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Music

Sacrificial Youth est la première comédie musicale hardcore

Henry Rollins : « Des acteurs incroyables ». Ian McKaye : « Bouleversant ». Jello Biafra : « Un régal ».

Quand Broadway rencontre le Bowery, ou plutôt quand Minor Threat rencontre Spinal Tap, eh bien ça donne Sacrificial Youth, première comédie musicale jamais réalisée autour de la scène hardcore américaine, 15 ans après The Edge of Quarrel, qui est au mouvement hardcore/punk ce que L'Arbalète est au cinéma d'action français. Tout ça pour vous dire que Joe Losurdo (déjà réalisateur d'un documentaire sur la scène de Chicago, You Weren't There, et en plein tournage d'un nouveau film sur le label Wax Trax!) partait de zéro et était quasiment sûr de faire moins pire que ses prédecesseurs. Avec un scénario digne d'un film Troma, Losurdo réinjecte du sarcasme et de la substance dans un milieu qui en manque cruellement depuis des années. Vous ne me croyez pas ? Lisez vous-même le pitch :

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« C'est l'histoire de TJ, un adolescent à la croisée des chemins. Alors qu'une entreprise multinationale prépare un plan diabolique aux proportions bibliques pour détruire La Scène, TJ est forcé d'accepter son destin d'élu et doit tenir tête et lutter.»

Noisey : Qui a trouvé ce script ? Et qui a eu l’idée d’en faire une comédie musicale ?
Joe Losurdo : J’ai toujours pensé que le bon vieux hardcore (celui du début des années 80) avait des structures de morceaux très similaires aux comédies musicales. Que ce soit Minor Threat ou Bad Brains. En plus de ça, j’étais obsédé par la version ciné de Jesus Christ Superstar. Je me disais que je pouvais réunir les deux éléments dans une forme semi-cohérente et tout s’est mis en place. L’idée de départ est sortie d’une vaste blague, mais au fur et à mesure, je me suis dit que je tenais un truc. Il n’est pas uniquement question du pouvoir et de l’influence des multinationales dans le film. Il capture surtout le caractère sur-émotif, tête à claques et dramatique lié à l’adolescence. Je veux dire par là que le personnage principal, TJ, est un putain de boulet ! Même ses potes ont du mal à le supporter ! Mais son cœur est à la bonne place et leur petite scène n’existerait pas sans lui. Il y au aussi des passages dignes de Spinal Tap au sein desquels chaque personne qui a déjà fait partie d’un groupe se reconnaîtra.

Des actionnaires ont investi dans ton film ?
Ha ! Quelle personne saine d’esprit investirait dans une comédie musicale hardcore ? Ce n’est pas American Idiot !

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Le processus décrit dans le film a déjà lieu dans la scène hardcore, non ?
Oh, je crois qu’il s’est produit il y a longtemps déjà. Et pas seulement au sein du hardcore, mais avec la musique underground en général. C’est pourquoi j’ai voulu l’inclure au présent, en faisant de TJ un paria parmi les parias pour ses curieuses notions d’intégrité et de trahison. Il rejoue presque la Guerre Civile finalement. TJ veut que tout soit comme au début des 80’s, même si c’est une façon révisionniste de voir les choses. Les temps changent, l’humanité change, les attitudes et les valeurs changent. Tu ne peux pas stopper ça, et tu ne devrais pas tenter de le faire non plus. Passe à autre chose et évolue.

Selon toi, qui pourrait être le vrai messie et sauver le hardcore des griffes des multinationales ?
Ni Dieu, ni idole ! On a eu nos messies-idoles à l’époque, cque ce soit Ian MacKaye, Jello Biafra, Henry Rollins, etc. Je ne pense pas qu’eux-mêmes se voyaient comme ça, mais les autres oui. Et au final, ce qui les rendait si géniaux était leur dévouement total à leur art sans jamais se soucier d’être « commercialement viable ». C’est leur musique qui les a rendu révolutionnaires, pas leurs speeches. Je pense que ce qui manque à la scène hardcore aujourd’hui est son côté weird et sa liberté des premiers jours. Des groupes pétés, bizarres et expérimentaux comme Flipper, les Minutemen, Butthole Surfers ou End Result faisaient tous partie de la scène. Aujourd’hui, il y a trop de conneries « tough guy » qui font sonner la plupart des groupes pareil.

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C’était dur de choisir l’acteur pour le rôle principal ? Comment s’est passé le casting ? Les acteurs sont semi-pro ou ce sont des types que tu as piochés dans la scène ?
La plupart des acteurs étaient dans des groupes punk, dans le skate ou autre. Ca a beaucoup aidé d’avoir des gens qui « captaient le truc ». J’avais des potes acteurs qui ont aussi passé l’audition mais ça ne collait pas du tout. Ils auraient sûrement été meilleurs mais ils ne comprenaient pas les rôles ou le scénario et avaient ce truc cheesy en eux que tu vois dans des mauvaises série à la télé. Rob Bakker, le mec qui joue TJ, a été le dernier à passer le casting mais ça a été le premier à réciter le texte comme je le voyais dans ma tête. Il y avait beaucoup de TJ dans Rob et beaucoup de Rob dans TJ, pour le meilleur et pour le pire !

J’imagine que Sacrificial Youth est une première dans le genre. T’avais des modèles en tête quand tu bossais dessus ?
Comme je te l’ai dit, l’influence la plus évidente est Jesus Christ Superstar, mais aussi La Montagne Sacrée, Suburbia, Another State Of Mind, The Decline Of Western Civilization, Over The Edge, Cotton Candy et même Spinal Tap. Mais j’ai aussi profité de mon expérience au sein de mes anciens groupes de hardcore, Life Sentence et Regress. Il y a pas mal de scènes du film qui me sont réellement arrivées.

Tu as eu beaucoup de retours ?
Tous positifs pour l’instant ! Ca s’est super bien passé lors des premières en Argentine, à Montréal et ici, à Chicago. C’est vrai que le format n'est pas évident au départ, moi-même je ne suis pas un gros fan de comédies musicales, je suis plutôt branché par les films musicaux comme ceux que je t’ai cités plus haut.

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Le film sera disponible avec des sous-titres français ?
Si tu connais quelqu’un qui peut les faire gratuitement, ouais ! On a déjà le sous-titrage espagnol, allemand et italien sur le DVD. J’ai voulu l’avoir en français aussi mais la personne qui devait le faire s’est désistée au dernier moment…

De toi à moi : les téléphones et les appareils photo devraient être bannis des concerts, non ? Et que faire des selfie-sticks ?
Tout à fait. J’ai failli plusieurs fois en venir aux mains avec des trous du cul qui foutent leur téléphone en face de toi. On dirait qu’ils ont besoin de prouver à chaque fois qu’ils y étaient et que ça leur donne une sorte de crédit cool. C’est mal élevé, c’est infernal et c’est chiant. En tant que personne qui bosse dans la production vidéo pour bouffer, je peux te dire que c'est à milles lieux de profiter du concert et du moment présent.

Quel est le futur du hardcore ?
Je suis bien trop vieux et déconnecté pour répondre à cette question ! Je pense que ce serait bien mieux si ça redevenait à nouveau une scène d’adolescents. Et si elle se détendait un peu, bordel ! Où sont passés l’humour, le sarcasme et ce truc qu’on appelle… fun ? Bon, il arrive encore qu’un groupe récent me botte le cul, sur disque ou sur scène (l’exemple le plus récent : UnGnomes), donc il y a toujours de l’espoir.

Au fait, j’ai lu que tu étais en train de tourner un documentaire sur le label Wax Trax! !
Oui, je le réalise avec ma femme, Christina Tillman. Leur histoire est géniale et complètement DINGUE. On est en train de l’éditer et je pense qu’une première sera jouable d’ici la fin de l’année. Rendez-vous sur www.regressivefilms.com pour vous tenir au courant. Sacrificial Youth sera diffusé à New York le 27 février pour les Winter Film Awards et à Berlin en mai prochain. (Il est dispo en DVD et VOD ici) Rod Glacial se sacrifie chaque jour sur Twitter.