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Toutes les photos sont d'Antoine Merlet.
Culture

Grandir en France sur une île coupée du monde

Léa a 12 ans et habite l’île de Sein, un bout de caillou entouré d'une mer agitée et à deux heures de bateau du Finistère.

Venir en plein hiver sur l’île de Sein en Bretagne n’est pas chose aisée. Il faut faire entre une et deux heures de bateau dans une mer qui peut être capricieuse. La mer d’Iroise est un des endroits sur Terre où il y a eu le plus de naufrages. Alors qu’ils ne sont plus que 100 sur ce bout de terre perdu au milieu de l’océan, leur vie est rythmée par les marées qui amènent le bateau quotidiennement. Celui-ci ne passe que si le temps le permet. En dépit de leur liberté, ils sont d’une grande dépendance avec le continent. Sans bateau, pas de nourriture, de professeur pour la petite école, pas de quoi réparer les habitations ou autres, pas de médicaments. Le photographe Antoine Merlet est allé à la rencontre de ces habitants qui ont choisis de vivre loin de tout.

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Aujourd’hui le portrait de Léa, 12 ans.

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« Je m'appelle Léa, j'ai 12 ans et j’habite sur l'île. Nous ne sommes que deux élèves avec quatre professeurs au collège. Même si parfois on s'ennuie beaucoup on trouve toujours un moyen de s'amuser. A l’école je suis avec Lily Rose, nous sommes amies. L’année dernière il y avait deux autres élèves mais elles sont parties au lycée sur le continent alors on continue à se parler sur les réseaux. L’école est différente par rapport au continent, nous avons moins de professeurs. Ils viennent en bateau car ils n’habitent pas sur l'île, alors quand le temps est trop mauvais, ils ne peuvent pas venir ce qui arrive surtout en hiver avec les tempêtes. J’aime bien l’école, mais on doit se lever tôt et honnêtement je n’en ai pas envie parce que moi, j'ai la plus grande flemme de l'univers. J’aime bien les maths ce qui est drôle car mes parents ont toujours détesté ça, mais aussi l'espagnol et l’histoire. Les récréations sont parfois un peu longues alors le professeur d’EPS (Julien) à récemment amené des nouveaux matériels comme les ballons, les cordes à sauter… »

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Léa.

Pour Léa, vivre sur l’île à son âge est une bonne chose, elle apprécie le fait qu’il n’y ait pas trop de monde, pas de voiture, pas d’embouteillages, et contrairement à ce qui se passe sur le continent, qu’elle ne risque pas d’arriver en retard au collège. Léa est formelle, vivre à Sein où il y a si peu d’habitants n’est pas une contrainte ni ennuyeux. 

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« Je ne sais pas si je pourrai rester sur l’ile, je ne vois pas trop mon avenir ici. Il n’y a pas beaucoup de monde »

Pendant son temps libre, elle dort beaucoup et même si elle se couche tôt, elle aime bien faire la grasse matinée. Léa passe beaucoup de temps à jouer à des jeux sur internet ou sur son téléphone portable. Elle est devenue très à l’aise avec les nouvelles technologies ce qui lui permet d’aider les professeurs au collège, et d’être comme elle le dit « la prof des profs pour le numérique ». Plus tard, elle aimerait bien travailler dans l’informatique, tout en étant très attirée par l’Education Physique et Sportive. Ces deux filières lui plaisent, et si ça ne marche pour une, elle pourra se rabattre sur l’autre.

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Léa ne sait pas si elle pourra rester sur l’île.Travailler dans le numérique pourrait être envisagé mais il faudrait qu’il y ait moins de coupures d’électricité, sinon, ça ne serait pas possible. Après le collège, Léa devra aller au lycée sur le continent, ce qui l’angoisse un peu. Ici, elle se sent protégée, là-bas, les élèves seront beaucoup plus nombreux, il y aura plus de monde, et le fait de ne plus être sur l’île avec ses parents et amis lui fait un peu peur, mais heureusement comme elle dit dans un grand rire « le continent, ce sera McDonald’s tous les midis… non en vrai pas tous les midis… »

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« Ne pas être nombreux ici veut dire ne pas avoir beaucoup d’ami, mais ça ne me dérange pas, je passe mon temps à escalader les rochers sans savoir d’où ça vient »

Ne pas avoir beaucoup d’amis, vivre au milieu de si peu d’habitants ne semble pas déranger Léa. Elle passe beaucoup de temps à escalader les rochers, une passion dont elle ne connait pas l’origine. A chaque fois que ses cousins de Lyon viennent en vacances sur l’île, elle voit bien que son mode de vie à elle est complètement différent du leur et se trouve beaucoup plus débrouillarde qu’eux. C’est toujours elle qui va escalader les rocher pour récupérer ce qu’ils ont perdu, et si la petite bande décide de construire quelque chose, les cousins ont des idées, mais se savent pas comment les mettre en pratique, alors comme dit Léa « c’est moi qui m’y colle… ». Elle s’amuse aussi de les sentir un peu perdus, jusque dans leur façon de parler où ils emploient des expressions différentes.

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Léa semble vivre en harmonie au milieu de toute cette eau salée, à tel point que lorsqu’elle était chez ses grands-parents qui ont une piscine, sur le continent, elle a été très étonnée de constater qu’elle flottait mal et nageait plus difficilement que les autres. Pour elle, c’était « un peu chiant, je nage mieux et plus longtemps dans la mer ». 

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« Ce que j’aime sur l’île c’est que si je veux rester seule, je n’ai pas besoin de bouger, si je veux voir du monde, c’est juste à côté. Les couchers de soleil sont incroyables.  Sur Instagram lorsque je poste des photos de paysage tout le monde me dit que c'est beau et ça me plait. Les profs sont super sympas ici. C'est bien. Je regrette juste l'absence de MacDo. »

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