Range Tes Disques : Mastodon
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Music

Range Tes Disques : Mastodon

On a demandé aux barons metal d'Atlanta de classer leurs 8 albums, de celui qu'il trouvent le moins bon, à celui qu'il considèrent comme le meilleur.

Range Tes Disques est une rubrique dans laquelle nous demandons à un groupe ou un artiste de classer ses disques par ordre de préférence. Après Korn, Slipknot, Lagwagon, Hot Chip, Manic Street Preachers, Primus, Burning Heads, le label Fat Wreck Chords, New Order, Ride, Jean-Michel Jarre, Blur, Mogwai, Ugly Kid Joe, Anthrax, Onyx, Christophe, Terror, Katerine, Redman, Les Thugs, Moby, Les $heriff, L7, Descendents, Teenage Fanclub, Dinosaur Jr, Kery James, Brujeria et Ludwig Von 88, Étienne Daho, Loudblast, Pavement, Phoenix, Afghan Whigs, !!!, Black Lips, Converge et Swervedriver, c'est au tour de Mastodon, les barons metal d'Atlanta, de classer leurs disques. On a donc demandé à leur batteur, Brann Dailor, de les remettre dans l'ordre, de celui qu'il trouve le moins bon, à celui qu'il considère comme le meilleur.

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8. Call Of The Mastodon (2006)

Noisey : Pourquoi est-ce que tu as mis Call Of The Mastodon en dernier ?
Brann Dailor: Parce que j'ai le sentiment que Mastodon n'avait pas encore atteint sa forme définitive, et je ne pense même pas que ça ait été le cas à l'époque de Remission. J'adore cette période du groupe, parce que c'est le moment où on se rencontre, et où il y a la première étincelle de ce son nouveau, qu'on a découvert ensemble. C'est cet album qui nous a fait sortir de chez nous, monter dans le van et partir sur la route. On était hyper impatients de pouvoir partir en tournée et de commencer à jouer en tant que groupe. En gros, c'est notre démo – The Nine Song Demo, c'était le titre initial – un titre très imaginatif. Il assez sauvage et barré. Je vois ce que tu veux dire : c'est à la fois Mastodon, mais pas encore le vrai Mastodon, même si on capte la direction que vous êtes entrain de prendre.
Ça a aussi un peu sauvé le groupe, cet enregistrement. J'étais en train d'hésiter à rester ou à quitter Atlanta. Les choses n'allaient pas forcément très bien à l'époque, pour pas mal de raisons. Je commençais à perdre patience. Je venais tout juste de rencontrer ces mecs. Et je leur ai dit : « Bon, on va enregistrer cet album, et on verra ensuite. » Le deuxième jour, au moment où on était tous assis ensemble, en train d'écouter ce qu'on avait fait, j'ai eu le sentiment qu'il se passait un truc vraiment spécial, et qu'il était inenvisageable que je laisse tomber ça. J'ai dit « Je ne vais nulle part, je ne pars pas à New York. Je reste ici pour faire du Mastodon. »

7. The Hunter (2011) L'ambiance devait être difficile pour le groupe [le frère du guitariste Brent Hinds est mort dans un accident de chasse pendant la conception de The Hunter].
Ça a été dur. Ça a vraiment été difficile de se concentrer sur cet album, pour être honnête. C'était pile au moment où on s'était vraiment mis à écrire pour ce disque que Bill nous a dit qu'il allait quitter le groupe et partir en cure de désintox. Et puis le frère de Brent est mort. La situation n'était vraiment pas reluisante, d'un point de vue personnel. Brent n'était vraiment pas bien, mentalement. L'ambiance était donc assez lourde. Pour réussir à traverser cette période, on a dû, je pense, s'efforcer à ce que les choses restent les plus légères possibles dans le local de répète. On a décidé de tirer un trait sur l'idée de concept-album. C'était presque comme si on se prenait notre propre retour de bâton. On venait d'enchaîner environ deux ans de tournée, Crack The Skye, avec des structures de morceaux très complexes, très prog', et une écriture vraiment dense. Là, on n'a pas voulu aller trop loin. Prends un morceau comme « Blasteroid », c'était marrant à écrire, marrant à jouer, et on s'est dit « C'est bon. On ne va pas plus loin avec ce morceau. Celui-là est fini. Morceau suivant… O.K., celui-là est fini aussi. » On a essayé de ne pas se lancer dans des trous noirs sans fin et de ne pas se retrouver frustrés dans le local de répète, parce que mentalement, ce n'était vraiment pas gérable, surtout pour Brent. Il fallait que ça reste fun. J'adore toujours ce disque, et, certains jours, je pourrais tout à fait le classer numéro un.

6. Remission (2002) À la base, je croyais que c'était le premier album du groupe, mais tu m'as expliqué que c'était Call Of The Mastodon.
On a écrit tous ces morceaux ensemble. L'album d'avant, Call Of The Mastodon, c'était le moment où on venait de se rencontrer, ça ne faisait vraiment que quelques mois. Pendant qu'on tournait et qu'on jouait dans les caves, on a écrit ce qui allait devenir Remission. On a passé beaucoup de temps avec ces morceaux, à leur donner forme et à se creuser la tête dessus. C'est un album assez complexe et assez fou, mais pour moi, il y a aussi des moments plus doux, un peu plus délicats. Le dernier morceau, « Elephant Man », et « Trilobite », « Train Wreck », tu trouves des indices de ce qu'on allait faire ensuite. Il était super heavy, super féroce. Je l'adore toujours autant, et je crois que pour certaines personnes, ça a vraiment été une grosse explosion. C'était un truc nouveau dans la musique heavy. On était excités qu'il sorte, curieux de voir jusqu'où on pourrait amener ce son nouveau, et de savoir ce qu'on allait faire ensuite. Est-ce que cet album t'a aussi aidé à surmonter la mort de ta sœur ?
Oui, j'écris toujours là-dessus. Ça a été le premier album pour lequel je me suis posé à une table et j'ai écrit de vrais textes, donc ça avait quelque chose d'intéressant. Je n'avais jamais vraiment fait ça auparavant.

5. Once More Round The Sun (2014)

On retrouve encore beaucoup de trucs personnels sur celui-ci…
Ouais, comme toujours… Après avoir défendu The Hunter en tournée, on a pas mal écrit, et on avait déjà la majeure partie de la musique, mais on n'avait pas beaucoup de textes. Je crois que c'était le 4 janvier – c'était juste quelques jours après le jour de l'An – ma mère est tombée d'une chaise et a eu une hémorragie cérébrale, elle s'est fracturé le crâne… Elle est restée dans le coma pendant un mois environ. J'étais donc plus ou moins absent des sessions d'enregistrement, je restais à Rochester, dans l'unité de soins intensifs, et j'écrivais des paroles.

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Est-ce que ça en fait un disque sur lequel il est difficile de revenir, maintenant qu'on en parle ?
Non, pas trop. Ça va. Comme la plupart des gens, tu arrives à te construire ce rempart de détachement, qui te permet de parler des choses de manière très clinique… Comme c'est le cas pour la mort de ma sœur. Je peux être là et t'en parler, parce que j'ai travaillé là-dessus pendant des années. Pas dans le sens être capable de parler de quelque chose d'horrible, mais plutôt presque comme si ça ne m'était pas arrivé. Comme si j'en parlais mais que c'était arrivé à quelqu'un d'autre. C'est un bon mécanisme, je pense.

Pour moi, cet album est une chronique de toute cette période. C'était assez horrible. Mais au moment où je suis retourné en studio pour enregistrer, ça a été vraiment génial que Bill [Kelliher], Brent et Troy [Sanders] soient là. On est une famille. Il y a un truc vraiment spécial avec notre groupe, c'est notre proximité, et notre volonté de nous laisser explorer les uns les autres toutes ces grandes et tragiques situations familiales qu'on traverse tous, à travers notre musique commune. C'est un truc que j'aime vraiment chez les mecs de mon groupe. C'est vraiment quelque chose qui nous a tous aidés à traverser les différentes situations auxquelles on a malheureusement été confrontés pendant ces presque vingt ans passés à jouer ensemble. Il y a une façon de pouvoir quasiment changer l'issue finale des choses, quand tu manies le fantastique, quand tu contrôles la musique et l'histoire que tu racontes ; tu es en mesure de changer le résultat final.

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4. Emperor Of Sand (2017)

Celui-là aussi est un concept-album ?
Oui, il nous a ramené dans le domaine du concept, ce qui est toujours amusant. C'est un disque qui parle du cancer, il y avait beaucoup de cancers autour de nous – on était encore plus pessimistes. Ça a été deux ou trois ans vraiment difficiles. La femme de Troy a eu un cancer du sein, et la mère de Bill avait un cancer du cerveau. Et ma mère n'est toujours pas remise de sa lésion cérébrale, elle n'arrête pas d'avoir des problèmes depuis.

C'est affreux.
Bill et moi, on se retrouvait le matin, et on discutait des conclusions des médecins, des options possibles, et de toutes sortes de trucs comme ça, c'était nos petites discussions quotidiennes, autour du café, et puis on descendait à la cave, et on commençait à faire tourner des riffs, enregistrer des trucs.

Du coup, enregistrer cet album, ça a été comme un refuge pour vous ? Dans la mesure où tu n'as pas à réfléchir à tous ces problèmes, tu peux juste te concentrer sur la musique ?
Complètement. Et en plus de ça, même si c'est notre boulot d'écrire et d'enregistrer de la musique, il s'avère que c'est un truc qu'on adore faire. C'est un cliché que la plupart des musiciens te répéteront, que leur musique a été là au moment où ils en avaient besoin, ce genre de trucs. On peut au moins toujours faire ça. C'est clairement un truc qui te remonte le moral quand ça ne va pas fort, et que tu te prends des trucs horribles en pleine gueule, ou que tu te tapes une interminable et frustrante conversation qui ne mène nulle part avec une équipe de médecins. Tu descends dans ta cave, tu fais tourner quelques riffs, et tu as le sentiment d'avoir accompli quelque chose, d'avoir transformé cette frustration en un truc bien.

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3. Blood Mountain (2006)

Metal Hammer a élu Blood Mountain meilleur album de 2006.
C'était une belle réussite. Ça a été notre premier album sur une major, et on était surexcités. On savait aussi qu'il y avait plein de mauvaises langues qui disaient qu'on allait vendre notre âme au diable et faire un album très pop, et je crois qu'on est vraiment loin du compte. Je pense qu'on a tapé bien plus haut et qu'on est allés bien plus loin, pour être sûrs que ça ne soit pas le cas. On ne s'est pas dit « Oh, il faut qu'on fasse un pur album psyché complètement barré », mais on en avait envie, et c'est un peu ce qui en est ressorti.

Prends des morceaux comme « Bladecatcher » et « Capillarian Crust », c'était sauvage, dingue, ou « Siberian Divide » et « Crystal Skull », j'ai le sentiment que certains de nos meilleurs morceaux sont sur cet album. Et « Colony of Birchmen » nous a en quelque sorte ouvert des portes, aussi. Donc oui, je considère que c'était un super premier album sur une major, carrément. Je ne crois pas qu'on ait sacrifié quoi que soit de notre imagination. Pour moi, on a donné tout ce qu'on avait. C'est comme ça que je le vois.

2. Leviathan (2004)

Je pense que c'est avec Leviathan que tout a vraiment changé pour le groupe. C'est notre première incursion vers les concept-albums, et le thème de Moby Dick. C'est un de ces albums où tout s'imbriquait à merveille pour nous. Et j'aime l'imagerie. Je pense que c'est à ce moment où on a commencé à sortir la tête du trou. C'était un album « retroussage de manches et au boulot ». On s'y est mis, et on a bossé dur de dur.

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Mais ça a beaucoup amené au groupe. Ça nous a clairement fait gravir un palier supplémentaire, après Remission. Quand on a sorti Remission, ça avait déclenché un espèce de buzz, comme on dit. Quand Leviathan est sorti, ça a carrément été la sirène d'alarme qui annonçait qu'on était là pour un moment, que c'était pas du flan. « Hearts Alive », ça a été le grand morceau épique qui a vraiment fait comprendre aux gens qu'on avait aussi plus à offrir artistiquement. Mais on était aussi capable d'écrire un truc aussi heavy et direct que « Blood and Thunder », et les faire cohabiter sur le même album.

1. Crack The Skye (2009)

J'ai le sentiment qu'on était arrivé à un truc complètement différent, à un autre niveau dans le songwriting et dans l'élaboration des chansons en général – Brent Hinds nous a offert beaucoup de très grands moments. Je crois qu'on s'est tous vraiment retrouvé là-dessus et, avec l'aide [du producteur] Brendan O'Brien , on a vraiment fait un truc très spécial, et je suis très heureux qu'il figure dans notre catalogue. Pour moi, c'est vraiment juste une magnifique œuvre d'art.

Je me souviens l'écouter pour la première fois après l'avoir enregistré, dans sa version définitive, et être complètement soufflé. Genre, putain, c'était tellement excitant, je n'arrive pas à croire qu'on ait fait ça. C'est le genre d'album dont je me disais que je n'aurais pas honte de le jouer à David Bowie, tu vois ce que je veux dire ? Ça serait celui-là que je choisirais, pour lui faire écouter. Je lui aurais dit : « Écoute, il y a deux-trois trucs pas mal… » Mastodon sera en concert le 29 novembre à Paris, à l'Elysée Montmartre.