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Music

À la rencontre des ravers sobres du festival Shambhala

Le festival électro canadien propose depuis 3 ans une zone sans drogue ni alcool. Nous sommes allés interroger ceux qui ont choisi de la fréquenter.

Toutes les photos ont été prises par les auteurs de l'article. Le Shambhala Music Festival, qui a lieu tous les ans au Canada, en Colombie-Britannique, et a récemment soufflé ses 19 bougies, s'est imposé comme un modèle du genre, en fournissant aux utilisateurs de drogues la possibilité de les tester chimiquement, ainsi que de s'isoler dans un espace dédié. De nombreuses organisations et équipes médicales sont présentes sur place, comme l'association ANKORS (AIDS Network Kootenay Outreach and Support Society) [Réseau d'aide et de soutien de Kootenay pour le SIDA], qui élargissent en permanence la portée de leur service, alors qu'apparaissent de nouveaux problèmes, comme l'actuelle crise du fentanyl.

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C'est une bonne nouvelle pour ceux – et ils sont nombreux – qui ont décidé de s'adonner aux substances psychoactives à cette occasion, mais le festival s'occupe également de ceux qui n'ont pas besoin de se bourrer la gueule ou de se défoncer pour s'amuser, et parmi eux certains anciens utilisateurs ayant connu des problèmes d'addiction. En 2013, le Shambhala a lancé le programme d'accompagnement Camp Clean Beats, une zone sans drogue ni alcool, avec possibilité de prendre part à des meetings axés sur le combat contre ces addictions. Nous sommes allés à la rencontre des participants au Camp Clean Beats, ainsi qu'avec Mandy Lawson, la cofondatrice du projet, pour comprendre ce que ça fait de prendre part au festival électro des Kootenay Mountains complétement sobre, et pourquoi il est important que des lieux sécurisés comme celui-ci existent. MANDY LAWSON (CO-FONDATRICE ET COORDINATRICE DE CAMP CLEAN BEATS) Ville d'origine : Nelson, British Columbia

Combien de fois au Shambhala ? : 10

Ce qu'elle dit : « Camp Clean Beats est une zone qui bannit l'usage de la drogue et de l'alcool, pour ceux qui veulent faire la fête mais qui ne prennent pas de drogue ni ne boivent d'alcool pendant les concerts. Ça inclut la weed. Ça ne veut pas dire qu'on ne fait pas la fête, juste qu'on ne fait pas la fête de cette manière là. On organise trois meetings par jour, consacrés au rétablissement, pas besoin de suivre un programme en 12 étapes. On fournit un lieu d'accueil pour les gens qui sont curieux de savoir ce que c'est que de faire la fête sans produits. Si vous voulez faire la teuf tout en restant sobre, vous trouverez du soutien ici.

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Je prenais de la drogue pour atteindre un sentiment de connexion, pour sortir et danser, et je n'y arrivais pas, alors je prenais plus de drogue, et je n'y arrivais toujours pas. Et le jour d'après je me sentais complètement vide, rongée de remords et de honte. Aujourd'hui je sors danser et je me sens en communion avec mes amis, avec mes forces supérieures et - désolé si ça sonne un peu nase, mais bon - avec les basses. » BRETT

Ville d'origine : Whistler, British Columbia

Combien de fois au Shambhala ? : 1

Ce qu'il dit : « Le fait d'avoir accès à Clean Beats ici a été vraiment motivant. Il faut savoir s'écouter soi-même, et il faut aussi savoir écouter les gens qui t'entourent, et qui sont plus sages que toi, et cleans depuis plus longtemps que toi. Toute cette dynamique, ce truc d'avoir une communauté qui peut parfois penser pour toi, en dehors de ta tête, c'est bien. Pour moi, c'est une passion immense. J'adore danser, j'adore la musique électronique. Être capable de venir à ces gros shows de techno tout en sachant que je vais m'amuser et rester sobre, c'est énorme pour moi. Plus besoin de renoncer à ma vie juste parce que je suis sobre et clean, et le résultat c'est que ma vie s'est largement améliorée. » GABRIEL Ville d'origine : Victoria, British Columbia

Combien de fois au Shambhala ? : 4

Ce qu'il dit : « En fait, la première fois où je suis allé au Shambhala, l'emplacement de Clean Beats était juste à côté de là où je campais, et je devais le longer pour aller voir les concerts, donc je voyais tous ces gens qui faisaient le festival clean. C'est comme ça que j'ai découvert cet aspect du festival, mais je ne pouvais pas arrêter, tout simplement parce que j'étais dépendant, et je ne savais pas ce que 'modération' voulait dire. Et quand j'ai fini par faire une cure pour décrocher et ai commencé à vraiment aller mieux, je savais que Shambhala serait une possibilité, à moment donné, parce que je savais que Camp Clean Beats était là.

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Je vois toujours des gens qui consomment, et je ne les juge pas en tant que tels. Je ne les considère pas comme inférieurs parce qu'ils prennent de la drogue, ni avec jalousie ou envie. Je les vois comme un intolérant au gluten voit une pizza qui a l'air délicieuse, j'imagine. Tu sais que c'est mauvais pour toi, mais ça a quand même l'air délicieux ! » ANDREA NELSON (MEMBRE DU STAFF CAMP CLEAN BEATS) Ville d'origine : Nelson, British Columbia

Combien de fois au Shambhala ? : 9

Ce qu'elle dit : « J'ai tout arrêté il y a dix ans, quand j'en avais 20. Tous mes amis allaient en rave et faisaient la teuf, alors j'ai commencé à fréquenter le Shambhala en étant sobre, je buvais juste plein de Red Bull en mangeant des minis donuts. J'ai rencontré Mandy et elle n'arrivait pas à croire que je fasse ça toute seule. Elle m'a parlé de Clean Beats, donc j'y suis venue l'année dernière, et je crois que ça va faire sept ans que je viens sobre.

Ça a vraiment été très différent pour moi d'être entourée d'un groupe de gens sobres. On est nombreux à se séparer chacun de notre côté et faire notre vie quand il s'agit d'aller voir les concerts, mais de pouvoir revenir dans un lieu comme celui-ci, c'est vraiment motivant. On s'y sent comme chez soi, on a un salon, et on sait quand ont lieu les meetings. Ça donne le sentiment d'appartenir à un groupe au sein même du festival – ça m'a beaucoup apporté. » RACHAEL Ville d'origine : Salem, Oregon

Combien de fois au Shambhala ? : 1

Ce qu'elle dit : « Depuis que j'ai arrêté de me défoncer, il ya presque 4 ans, je ne suis pas allée dans un seul festival de musique ou une seule rave, parce que je n'étais pas sûre de l'environnement dans lequel j'allais me retrouver. J'ai été vraiment à fond dans la scène rave, j'ai commencé il y a environ 10 ans, et ça représentait une grande part de cette culture, le fait de voir jusqu'où on pouvait aller et de se défoncer le plus possible. Je ne me rappelais pas de la moitié des raves que je faisais à l'époque. Il y a cet esprit génial qui règne ici, cet aspect communautaire, et avoir un endroit où se mettre à l'écart et être entourée de gens sobres, ça a été vraiment super important pour moi. Je fais partie de ceux qui ne seraient pas là sans Clean Beats.

Je connais les noms de tout ceux qui viennent ici. On est amenés à partager des choses vraiment intimes pendant les meetings, sur nous-mêmes et sur nos expériences, pas seulement nos expériences ici, mais dans nos vies en général, et ça nous lie tous. Je pense qu'il y a quelque chose de très intime qui se passe entre les gens qui décrochent, qu'on est tous en demande de communication et de relation les uns avec les autres. Pas besoin d'avoir l'impression de rater une partie de notre jeunesse et de ne plus s'amuser juste parce qu'on a choisi d'arrêter de se droguer et de boire. »