Michael Cera ne voudra jamais l'admettre, mais c'est un très bon musicien
Photo - Burak Cingi

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Michael Cera ne voudra jamais l'admettre, mais c'est un très bon musicien

L'acteur de « Superbad » et « Arrested Development » nous parle de ses divers projets musicaux et du titre synth-pop qu'il vient d'enregistrer avec Sharon Van Etten.

Ça vous étonne, vous, Michael Cera qui joue de la synth-pop ? Pas tant que ça en fait : on avait entendu l'acteur reprendre les Moldy Peaches dans Juno et jouer de la mandoline sur Hurtley, l'album de Weezer paru en 2010, et il a même sorti un album en 2014, True That, collection de morceaux lo-fi entre bedroom folk, pop psychédélique et instrumentaux au piano, discrètement publié sur Bandcamp. Et ça continue aujourd'hui, avec « Best I Can », un titre bourré de synthétiseurs vintage, sur lequel chante Sharon Van Etten, qui a été composé pour la B.O. de Dina , documentaire sur un couple de la banlieue de Philadelphie souffrant de troubles mentaux. Nous avons contacté Cara, terré dans un AirBnB en Californie pour un tournage top secret, pour parler de cette B.O. et de ses projets musicaux passé, présents et futurs.

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Noisey : Ce morceau s'éloigne pas mal de tes trucs précédents. Il y a des synthés partout.
Michael Cera: Il y en a beaucoup, oui. J'avais commencé à bosser sur la musique de Dina, et ils voulaient utiliser « Only You » de Yaz pour une scène dans le film. Mais ils n'étaient pas sûrs de pouvoir en obtenir les droits, donc je leur ai dit « Pourquoi est-ce que vous ne me laisseriez pas essayer de faire un morceau original pour ce passage, juste au cas où ? » Ils ont fini par obtenir les droits de « Only You », et ils l'ont gardé – ils adoraient comment il fonctionnait sur cette scène – mais comme j'avais enregistré mon morceau, ils se sont dit, pourquoi ne pas sortir « Best I Can » ?

Tu t'es inspiré du morceau de Yaz pour faire « Best I Can » ?
Ça a été ma première inspiration, dans la mesure où j'essayais d'imiter le son de cette époque. J'utilisais du matos analogique et j'essayais de retrouver ce feeling, même si je n'ai pas réussi ne serait-ce qu'à m'approcher du son de boite à rythmes de « Only You », qui est l'élément central du morceau. Mais c'était la première fois que je bossais avec des boites à rythmes, donc j'apprenais au fur et à mesure. J'ai aimé ce truc un peu ambitieux, de me frotter à ce son, d'essayer d'écrire un morceau vraiment pop. Je n'aurais jamais fait ça de ma propre initiative.

Est-ce que tu avais déjà tout ce matos analogique ?
J'ai acheté la boite à rythmes, une Roland TR-707. Mais j'avais déjà mon vieux Roland Jupiter 4 depuis des années. C'est un de mes instruments préférés. Et c'est pour ça qu'il y en a partout sur le morceau. J'ai passé des heures et des heures à bidouiller, à essayer d'en tirer pleins de sons différents, mais tout vient du même synthé. Ce morceau n'a rien à voir avec les autres. Les autres sont très simples. Ils ne sont pas écrasants, pas aussi ambitieux musicalement, ou pop, c'est surtout de la guitare et du piano.

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Comment Sharon s'est retrouvée impliquée dans le projet ?
Sharon et moi, on partage un local de répète – une toute petite pièce. Ça fait quelques années qu'on partage le loyer, et c'est là où on a enregistré le morceau. Je savais que je voulais une voix féminine, à cause du morceau de Yaz, et aussi parce que le personnage central du film est une femme, et ça me semblait cohérent d'avoir un narrateur féminin. Sharon est la première à laquelle j'ai pensé. C'est une chanteuse incroyable – elle a gentiment accepté, elle est venue et a bouclé ça en un rien de temps. Ça a du lui prendre une heure.

Qu'est-ce qui t'a attiré dans ce projet, en premier lieu ?
C'est un beau documentaire, un portrait très intime de ce couple, qui nous amène jusqu'à leur mariage. Et il est très sobre. Je connais [les réalisateurs] Dan [Sickles] et Antonio [Santini] depuis un moment. Je suis allé voir une projection-test chez un ami, au tout début, et ils n'avaient pas encore de musique, à ce moment-là. Je leur ai demandé s'ils accepteraient de me laisser en composer une partie – j'avais quelques idées en tête. Et si je me plantais totalement, ils n'auraient qu'à oublier et trouver quelqu'un d'autre. Je voulais juste tenter le coup, voir ce que ça pourrait donner.

J'ai le sentiment qu'on n'aurait pas pu trouver une meilleure personne que toi pour faire la B.O. de ce documentaire. Il est drôle, sincère, ouvert, un peu maladroit, mais aussi très doux. Ça correspond assez à ta sensibilité, non ?
Pour moi, ce film est plus que ça. Ça correspond à tout ce que tu dis, mais quand tu le regardes, tu t'y identifies différemment. Il est vraiment humain, et incroyablement intime. On a presque du mal à croire à quel point on vit cette relation de l'intérieur. Et puis je suis tombé amoureux des deux personnages centraux, Dina et Scott.

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Est-ce que tu bosses beaucoup sur la musique en ce moment – c'est pour ça que tu loues un local de répète ?
C'est pour avoir un endroit où je peux faire du bruit. Ce n'est pas vraiment possible dans un appartement à New York sans faire chier quelqu'un. Ça m'arrive d'y aller à trois heures du mat, juste pour jouer de la batterie pendant un moment, pour le côté thérapeutique. C'est vraiment marrant, juste écouter de la musique et jouer par-dessus, et essayer de s'améliorer. Je me fais une playlist Spotify avec des chansons dont j'aime la partie batterie. Il y a beaucoup de soul. Ou de Kinks. J'adore vraiment le jeu de Mick Avory. Je trouve que c'est un batteur sous-estimé. Ou des trucs comme Television, où la batterie n'est pas trop technique. Prendre confiance à la batterie est une fin en soi. J'adore jouer avec des amis, et me sentir assez en confiance pour passer à la batterie dans ces situations… Ça me suffit.

On a comparé True That à Elliott Smith, et même à Ram, de Paul et Linda MacCartney. C'est une collection de morceaux intimes. Ça t'a fait quel effet, ce genre de réception ?
C'est une vraie leçon d'humilité, parce que je ne comprends pas ces comparaisons. McCartney et cet album-là sont de grosses, grosses influences. Mais je sais ce qu'est ma musique – ce sont des trucs que j'ai enregistré avec un micro d'ordinateur portable, et il n'y a pas de…recherche dans le son. C'est la vérité. Je ne dis pas ça de manière péjorative, mais ça n'est pas comparable à ce qui, pour moi, incarne les sommets de ce que la musique peut être. Mais ça a été cool que les gens écoutent True That, et l'écoutent vraiment comme de la musique. C'est pour ça que je ne veux pas sortir un album de manière cérémoniale – ça passerait dans la catégorie « acteurs qui font de la musique » et c'est la honte. Je n'irais pas écouter un album parce qu'un acteur l'a sorti. J'espérais que les gens tombent dessus, qu'ils laissent la musique parler d'elle-même - et si c'est cool, et bien tant mieux.

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Donc tu ne te vois pas faire un truc un peu gros, studio et compagnie ?
Ma façon d'enregistrer est très intime, et vraiment en prise directe avec mes propres capacités, et mes propres faiblesses. Je m'assois devant mon ordi et je passe 3h à enregistrer une partie de guitare, à appuyer sur espace et recommencer encore et encore jusqu'à ce que ça sonne bien. Je ne pourrais pas travailler avec des contraintes de temps, un producteur professionnel ou un ingénieur. Et puis ce qui m'amuse, c'est d'enregistrer et de mixer, cette sensation de construire le son. J'adore faire des expérimentations avec ces trucs, même si ça n'aboutit sur rien. Donc j'essaie de diversifier mes activités, mais de la manière la plus modeste possible, tester du meilleur matos et voir ce que ça m'apporte.

Tu as défendu True That en tournée, dans un groupe mené par toi et Alden Penner, des Unicorns. Ce n'était pas ta première fois, mais ça a du être différent de jouer tes propres chansons. Ça t'a plu ?
Oui. J'aurais adoré que ça dure plus longtemps. C'était la première fois qu'on jouait ensemble dans un groupe, et après deux semaines, les choses se sont mises en place, et puis c'était fini. Il y a quelques chansons qui sont ressorties de tout ça, que j'aimerais vraiment enregistrer. Le seul truc un peu frustrant, c'est le peu temps que tu passes à jouer de la musique. Un concert d'une heure, ça te paraît durer une minute – d'un coup, c'est terminé. Je trouve ça un peu déstabilisant, et éprouvant pour les nerfs. Il y a un effet addictif bizarre, tu n'en as jamais assez.

Tu as dit que tu aimais jouer de la musique avec des amis. Il y a des gens avec qui tu jammes régulièrement ?
Mon ami Bene Coopersmith gère le seul magasin de musique de Red Hook, où j'habite – je crois qu'il n'a même pas de nom – et il organise une jam hebdomadaire avec les gens du quartier, rien que des gens qui n'ont rien à voir les uns avec les autres. J'adore faire ça. Et avec les gens qui habitaient en-dessous de chez moi, on a découvert qu'on était tous des gros fans des Kinks, alors on se retrouve et on chante leurs chansons – mon voisin, son frère, sa femme, moi, ma copine. On a deux ou trois guitares acoustiques, ou un piano, un tambourin. C'est un des trucs les plus thérapeutique du monde, surtout les harmonies vocales. C'est tellement cool de chanter avec d'autres gens.

Est-ce qu'on a des chances d'entendre plus de musique qui vienne de toi, dans un futur proche ?
Je ne sais pas. J'aimerais bien rassembler assez de chansons que j'aime pour pouvoir les sortir, mais ce n'est pas prévu dans l'immédiat. Il faudrait que j'aie assez de matériel. Mon rapport avec la musique tient vraiment de l'amitié, du hobby et de l'exutoire. Je ne me mets aucune pression.

Une dernière question d'assez mauvais goût : l'homonyme de ton personnage dans Arrested Development est mort. Est-ce que tu as déjà pensé – ne serait-ce qu'une fois – à faire un album de reprises « George Michael par George Michael » ?
Hmm… Non, non [ Rires]. Je pense que ça ne fonctionnerait pas. Mais c'était clairement un géant. Chris Martins est sur Twitter.