Il y a dix ans, le 25 novembre 2007, deux jeunes à moto ont un accident mortel avec une voiture de police. Pendant les trois nuits qui suivent, des affrontements avec les forces de l’ordre éclatent dans cette petite commune du Val-d’Oise, suscitant l’attention des médias du monde entier. Depuis, les Beauvillésois vivent avec cette cicatrice qui peine à s’effacer.Linda Mestaoui est née et a grandi à Villiers-le-Bel. Journaliste de formation, elle s’est lancée depuis janvier dans un projet photographique dédié à la jeunesse de Villiers-le-Bel, intitulé « Back in the hood ». Avec son appareil photo, Linda a dressé le portrait des jeunes de Villiers-le-Bel, qu’ils soient artisans, artistes, sportifs, ou un peu tout ça à la fois.
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VICE : De quoi est née l’envie de retourner à Villiers-le-Bel ?
Linda Mestaoui : C’est un projet que je n’avais pas du tout prévu. C’est comme une commande divine, c’est ma voix intérieure qui m’a guidée. Il fallait que je retourne sur les lieux où j’ai grandi. L’idée était aussi de rendre ce qu’on m’a donné en réalisant ce portrait de la jeunesse de ma ville.Cela naît des dix ans des émeutes ?
Même pas. Je ne m’étais pas rendu compte que ça allait faire dix ans en commençant mon projet. En fait, c’est le maire de Villiers-Le-Bel, qui me l’a rappelé. En janvier, j’étais allée le voir pour lui présenter mon projet et pour le prévenir que j’allais travailler dans sa ville. Et le premier truc qu’il me dit, c’est « Ah, mais en plus c’est les 10 ans des émeutes, ces vautours de journalistes vont tous débarquer ». Je me rends compte à ce moment-là que mon projet s’inscrit dans une certaine actualité.
Linda Mestaoui : C’est un projet que je n’avais pas du tout prévu. C’est comme une commande divine, c’est ma voix intérieure qui m’a guidée. Il fallait que je retourne sur les lieux où j’ai grandi. L’idée était aussi de rendre ce qu’on m’a donné en réalisant ce portrait de la jeunesse de ma ville.Cela naît des dix ans des émeutes ?
Même pas. Je ne m’étais pas rendu compte que ça allait faire dix ans en commençant mon projet. En fait, c’est le maire de Villiers-Le-Bel, qui me l’a rappelé. En janvier, j’étais allée le voir pour lui présenter mon projet et pour le prévenir que j’allais travailler dans sa ville. Et le premier truc qu’il me dit, c’est « Ah, mais en plus c’est les 10 ans des émeutes, ces vautours de journalistes vont tous débarquer ». Je me rends compte à ce moment-là que mon projet s’inscrit dans une certaine actualité.
Qu’est-ce que tu voulais montrer avec ton projet ?
L’objectif était de défaire un cliché attaché à ma ville, un cliché né à cause des émeutes. J’ai vu ma ville se transformer après les émeutes, qui ont causé beaucoup de tort à la ville, aux jeunes, aux habitants. J’avais envie de montrer de façon peut-être un peu évidente que la jeunesse de Villiers-le-Bel est belle. Par exemple, les premières photos que j’ai prises, c’était pendant une cérémonie de remise de cartes électorales avant les élections. L’idée c’était de dire que ces jeunes dont vous parlez en mal, ils ont un pouvoir électoral. Ils peuvent voter, donc regardez-les avec un peu plus de valeur. Pendant que vous parlez d’eux, ils avancent.
L’objectif était de défaire un cliché attaché à ma ville, un cliché né à cause des émeutes. J’ai vu ma ville se transformer après les émeutes, qui ont causé beaucoup de tort à la ville, aux jeunes, aux habitants. J’avais envie de montrer de façon peut-être un peu évidente que la jeunesse de Villiers-le-Bel est belle. Par exemple, les premières photos que j’ai prises, c’était pendant une cérémonie de remise de cartes électorales avant les élections. L’idée c’était de dire que ces jeunes dont vous parlez en mal, ils ont un pouvoir électoral. Ils peuvent voter, donc regardez-les avec un peu plus de valeur. Pendant que vous parlez d’eux, ils avancent.
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Ce projet a été compliqué à réaliser ?
Comme j’y suis allée avec beaucoup d’enthousiasme et de sincérité, les gens que j’ai photographiés l’ont ressenti et cela m’a facilité la tâche. Ils ont tous un point en commun – qu’ils cabrent des motos, qu’ils fument du shit dans des voitures, qu’ils se forment au métier de pâtissier, qu’ils dansent ou rappent – ils te demandent de te présenter, d’expliquer ton projet. Si ton projet tient la route, ils vont t’autoriser à les prendre en photo, mais pas longtemps. Ils sont aussi peut-être touchés qu’on fasse la démarche de venir à eux.
Comme j’y suis allée avec beaucoup d’enthousiasme et de sincérité, les gens que j’ai photographiés l’ont ressenti et cela m’a facilité la tâche. Ils ont tous un point en commun – qu’ils cabrent des motos, qu’ils fument du shit dans des voitures, qu’ils se forment au métier de pâtissier, qu’ils dansent ou rappent – ils te demandent de te présenter, d’expliquer ton projet. Si ton projet tient la route, ils vont t’autoriser à les prendre en photo, mais pas longtemps. Ils sont aussi peut-être touchés qu’on fasse la démarche de venir à eux.
Tu dirais que ta démarche est politique ?
C’est avant tout un travail artistique. Mais par contre, j’aimerais que ces photos de Villiers-le-Bel, ou celles d’autres personnes qui photographient les banlieues, se retrouvent dans les tourniquets de cartes postales à Paris. Je voudrais que les touristes voient cela à côté du Baiser de l’Hôtel de Ville de Doisneau. Ces photos, ce sont un témoignage de notre société.Qu’est-ce qui t’a le plus surprise pendant cette petite année passée à Villiers-le-Bel ?
L’amour que j’ai pour cette ville. Je n’aurais jamais pensé que j’étais aussi liée à cet endroit. Je me suis jamais sentie aussi libre et épanouie que là-bas. Je n’aurais jamais pensé que mon centre se trouvait là-bas. Je ne pensais pas non plus que je pourrais dépasser mes limites. Au début, j’avais du mal à aller voir les gens. Un des premiers clichés que j’ai pris, celui des deux jeunes filles dans le hall, c’est un ami qui m’a forcée à aller la prendre, en me disant « On ne bouge pas tant que tu n’as pas fait ta photo ». Et maintenant, je passe mes samedis à photographier des types qui font de la bécane.
C’est avant tout un travail artistique. Mais par contre, j’aimerais que ces photos de Villiers-le-Bel, ou celles d’autres personnes qui photographient les banlieues, se retrouvent dans les tourniquets de cartes postales à Paris. Je voudrais que les touristes voient cela à côté du Baiser de l’Hôtel de Ville de Doisneau. Ces photos, ce sont un témoignage de notre société.Qu’est-ce qui t’a le plus surprise pendant cette petite année passée à Villiers-le-Bel ?
L’amour que j’ai pour cette ville. Je n’aurais jamais pensé que j’étais aussi liée à cet endroit. Je me suis jamais sentie aussi libre et épanouie que là-bas. Je n’aurais jamais pensé que mon centre se trouvait là-bas. Je ne pensais pas non plus que je pourrais dépasser mes limites. Au début, j’avais du mal à aller voir les gens. Un des premiers clichés que j’ai pris, celui des deux jeunes filles dans le hall, c’est un ami qui m’a forcée à aller la prendre, en me disant « On ne bouge pas tant que tu n’as pas fait ta photo ». Et maintenant, je passe mes samedis à photographier des types qui font de la bécane.
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