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Music

The Saints ont sorti le premier single punk australien il y a pile 40 ans

Ça s'appelait « (I’m) Stranded », c'est devenu un énorme classique et on a demandé aux jeunes groupes australiens actuels, comme Ausmuteants et Total Control, à quel point ça les avait marqué.

Le clip de « (I'm) Stranded » des Saints s'ouvre sur leur batteur, Ivor Hay, filant un coup de latte dans une porte. Une image qui résume assez bien le groupe dont le single de 1976, et l'album du même nom sorti l'année suivante, ont changé la façon dont l'Australie et le reste du monde envisageaient la musique à guitares.

Une image encore plus forte : le chanteur Chris Bailey, clope à la main, s'approchant du pied de micro comme s'il allait lui rouler une pelle ou lui mettre un coup de tête. Directs, provocants, les Saints faisaient les choses à leur manière. Ils s'habillaient d'une manière qui n'avait rien à voir avec les punk anglais et ont été totalement ignorés par la presse australienne. Et pourtant, l'Aussie punk, c'était eux.

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Comme la chanson et le groupe, le clip est simple, sans artifices. Tourné dans un immeuble abandonné du centre de Brisbane, on y voit le quatuor jouer devant un foyer de cheminée (au dessus duquel sont inscrits le titre du morceau et le nom du groupe en peinture rouge). C'est ce qui servira de pochette à leur premier album.

Ecrit par le guitariste Ed Kuepper et Chris Bailey, le single est sorti à la base sur le propre label du groupe, Fatal Records, en 500 exemplaires. Ce fut le premier single de rock produit en indépendant en Australie, plusieurs mois avant que les Sex Pistols et les Buzzcocks ne fassent de même en Angleterre.

La chanson parle de distance et d'aliénation. Quand Bailey lance le sarcastique « far from home », on peut imaginer qu'il se réfère à l'isolation culturelle et géographique de l'Australie des années 70, même s'il parle en fait de son voyage retour des banlieues lointaines de Brisbane en train de nuit. Les grognements de Bailey et les riffs de Kuepper en ont fait le meilleur morceau punk australien de tous les temps.

Le groupe existait depuis 1973 mais c'est « (I'm) Stranded » qui les a sorti de leur trou. Le magazine anglais Sounds n'a pas tardé à faire du morceau son « single de la semaine et de toutes les autres » et le bureau londonien d'EMI a contacté sa succursale de Sidney afin qu'ils les signent illico pour 3 albums.

« L'Australie se définit souvent en s'opposant à ce qui est américain et anglais, et l'histoire du punk australien le montre : les groupes sont anti-glam, anti-fashion, une attitude personnifiée par "(I'm) Stranded" » explique Dan Stewart, qui joue dans les groupes australiens Straightjacket Nation et Total Control.

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« Il y a une retenue dans les Saints dont beaucoup de groupes américains, à l'exception de Television, étaient incapables. Cette forme de maturité est souvent perçue comme étant prétentieuse ou cynique comparée aux punks de cartoons sous amphétamines qu'on trouvait en Angleterre (ou les nerds de Détroit qui ont influencé Radio Birdman). The Saints était un groupe déjà bien développé quand ce disque est sorti, ils avaient effacé leurs défauts depuis longtemps, et ne ressentaient aucun besoin de livrer un punk excessif. Et le résultat est un diamant brut. »

Le groupe a déménagé à Londres peu de temps après la sortie de (I'm) Stranded et a publié deux albums en 1978, Eternally Yours et le jazz-bluesPrehistoric Sounds. La relation entre Kuepper et Bailey s'est ensuite détérioré et le groupe n'a jamais pu retrouvé les sommets de ses trois premiers classiques albums.

À l'occasion du 40ème anniversaire du single, nous avons demandé à quelques musiciens australiens de nous dire ce qu'ils pensaient du morceau, de l'album, et des Saints.

Michael Richards (Violent Soho)
The Saints ont fait prendre conscience aux jeunes du pays qu'à Brisbane, il y avait une culture qui était faite pour eux. Les années 60 étaient passés en un claquement de doigts et les kids de notre ville se demandaient, « Qu'est ce qu'il se putain de passe maintenant ? » Voilà ce que fut notre réponse. Un truc dont on était vraiment fiers et auquel on pouvait s'identifier.

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Ross Knight (Cosmic Psychos)
Il n'y a pas un titre raté sur cet album, pas comme toute la merde qui tournait ailleurs à l'époque, et ça a préparé le terrain pour mon album numéro 1 de tous les temps, Eternally Yours. Bordel, que je suis vieux !

Dan Stewart (UV Race, Straightjacket Nation, Total Control)
C'est un disque qui vaut un anniversaire. J'y repense encore quand j'écoute Eddy Current Suppression Ring par exemple. Le même type de sensibilité de mec de banlieue. Ça marche aussi avec Dick Diver. L'élégance, l'équilibre entre le sérieux et les robots. Et c'est clairement un exemple important pour tous les groupes que j'ai fait… C'était une bonne époque.

Gareth Liddidard (The Drones)
Quand tu te penches sur tous les musiciens de génie ; les Stooges ou Nina Simone ou Stravinsky ou Hendrix ou le Wu-Tang et tous les autres, on dirait qu'ils se sont montrés quand le monde a soudain eu besoin d'eux… ils ont tous ce truc en commun. Ils sont tous restés à l'état sauvage et ce qu'ils ont sorti a toujours été honnête, qu'ils en soient conscients ou pas. « (I'm) Stranded » ne déroge pas à la règle et il a été fait comme il se doit.

Richard Stanley (The Onyas, Ooga Boogas, Drug Sweat)
Radio Birdman étaient un groupe du peuple. Une expérience positive partagée avec la communauté. De la pop. The Saints étaient un groupe au-dessus du peuple. Replié, isolationniste et abrasif. De l'art.​

Jake Robertson (Ausmuteants, School Damage)
(I'm) Stranded est un superbe album. ll contenait une superbe reprise de Missing Links et c'était une belle transition du garage au punk. N'oublions pas les anniversaires de Eternally Yours et Prehistoric Sounds qui arrivent bientôt et qui sont aussi importants que celui-ci.

Jenny Branagan (NUN, Vacuum, Psychedelic Coven)
Un râle provenant d'une banlieue isolée du Queensland, « Im Stranded » a été le cri de guerre de mon désert culturel. Il a réussi a inculqué dans mon oreille d'adolescent immigré une forme de savoir. Dès que j'entends cette chanson - mon coeur me fait mal et une surchauffe interne me met sans dessus dessous et me donne envie de vomir, mais c'est un vomi salvateur !

Steph Hughes (Dick Diver, Blank Statements)
Les riffs qui grésillent font partie de moi maintenant, ceci étant dit, je pourrais jouer n'importe laquelle de ces chansons sans ampli et je suis sûr quelles marcheraient quand même. Le songwriting est tellement limpide. Il est intelligent mais il renvoie aussi à un son de gens excités de s'éclater et d'être partis de rien.

Ambrose Kenny-Smith (King Gizzard and the Lizard Wizard)
La première fois que j'ai entendu « (I'm) Stranded » c'était devant Black Out, une vidéo de skate de chez Black Label, quand j'avais 9 ou 10 ans. Ma mère était aussi une grosse fan de Ed Kuepper. Une année ou deux plus tard, quand j'ai été dans ma grosse phase punk, j'ai écouté le reste de l'album et ça m'a une nouvelle fois rendu dingue. Jusqu'à aujourd'hui, les Saints restent un de mes groupes favoris et ma plus grosse influence.