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Melt-Banana sortent un nouveau disque et aimeraient éviter de tuer des animaux sur la route

Le légendaire commando noise japonais sort son premier disque depuis six ans, a perdu la moitié de ses membres, mais reste déterminé à pulvériser tout ce qu'il reste de vivant sur la planète.

Photo aimablement fournie par Resource Graphics. Fetch, le nouvel album de Melt-Banana, est leur premier depuis 6 ans. 6 ans, c’est long, et c’est encore plus long dans leur cas, vu que leurs morceaux sont extrêmement courts. En effet, Fetch dure exactement 32 minutes, ce qui signifie que vous auriez pu l’écouter 16 436 fois durant les 6 ans qui le séparent de son prédécesseur Bambi’s Dilemma. 16 436, c’est à peu près le nombre de fois que j’envisage en tout cas d’écouter Fetch, vu qu’il s’agit d’un authentique chef d’œuvre de hardcore-punk hystérique mené par les hurlements totalement autres de Yasuko « Yako » Onuki et l’incompréhensible jeu de guitare d’Ichiro Agata, qui sonne plus que jamais comme l’attaque d’une station spatiale par des cyborgs kamikazes.

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Si je ne cite pas les autres membres du groupe, c’est tout simplement parce qu’ils ont tous quitté le navire. Désormais seuls maîtres à bord, Yako et Agata ont comblé le vide laissé par leur bassiste Rika et leur ribambelle de batteurs intérimaires avec des bandes et des boîtes à rythmes, ajoutant encore à l’aspect chaotique de l’ensemble. Le duo sera en tournée à travers les Etats-Unis tout au long des prochains mois et devrait logiquement envahir l’Europe d’ici le printemps 2014.

Noisey : Content de vous revoir et de pouvoir enfin écouter un nouvel album de Melt-Banana !
Yako : Merci pour ton accueil. Mais nous n’étions pas vraiment partis, si ?
Agata : C’est passé tellement vite… Je n’avais même pas réalisé que Bambi était sorti il y a six ans.

Qu’avez-vous fait pendant tout ce temps ?
Agata : On a beaucoup tourné, principalement en Europe et en Amérique du Nord. On a aussi fait quelques festivals en Australie, notamment un à la Sydney Opera House auquel nous avons été invités par Lou Reed. C’était une super expérience. On a également joué en Finlande, en Corée, en Thaïlande et à Taiwan.
Yako : Et on a sorti un 45t, Initial T sur INIT records.

Vous avez également monté ce side-project, Melt-Banana Lite. C’est arrivé comment ?
Agata : Yako m’a fait écouter des démos de chansons qu’elle avait composé, basées uniquement sur de la batterie, du theremin et sa voix. Elle voulait faire un truc sans guitares. On devait partir en tournée avec Dave Witte, qui était dans Discordance Axis, et je pense qu’elle voulait tester son jeu de batterie ultra-rapide sur des morceaux sans guitare. Et on a donc créé Melt-Banana Lite.
Yako : Après cette tournée avec Dave, on a continué développer ce projet, parfois avec un vrai batteur, d’autres fois avec un ordinateur, et on a fini par sortir un album, qui a été enregistré en studio mais dans des conditions live.

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Quand avez-vous commencé à travailler sur Fetch?
Agata : J’ai enregistré les premières démos en janvier 2011.
J’ai lu quelque part que le tremblement de terre du 11 mars 2011 était une des raisons pour lesquelles Fetch avait été terminé si tard.
Agata : Oui. Je ne saurais pas te dire exactement pourquoi, mais après ce tremblement de terre, les choses ont changé. J’étais totalement incapable de me concentrer sur les morceaux, l’enregistrement…

Peut-être la musique te semblait-elle subitement moins importante ?
Agata : La musique est importante pour moi, parce que c’est tout ce que je peux et tout ce que je veux faire. Mais à force de voir les news à la télé, avec tous ces morts et ces musiques tristes et tragiques en fond… Je ne sais pas, ça m’a dégoûté. Je ne peux pas donner d’explication précise, mais ça m’a réellement mis mal à l’aise.

Qu’est-ce qui vous a fait revenir à votre « état normal » ?
Agata : Probablement notre tournée américaine, fin 2011. C’était une tournée de deux mois et ça nous a permis de penser à autre chose qu’à ce qu’il se passait au Japon. Je crois que ça m’a fait beaucoup de bien.

Ok, parlons des titres de Fetch. Quels sont vos préférés ?
Agata : J’aime beaucoup « Infection Defective. » C’est quasiment un morceau mid-tempo, ce qui n’est pas vraiment habituel pour nous.
Yako : C’est difficile pour moi d’en choisir juste une ou deux, mais si je devais en choisir une que je n’aime pas, je te dirais immédiatement : aucune.

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Yako, où continues-tu à trouver l’inspiration pour tes paroles, après toutes ces années ? C’est la vie à Tokyo qui te met la haine comme ça ?
Yako : Non, j’adore la vie à Tokyo, et il n’y a pas tant de choses que ça qui me mettent en colère. Je puise mon inspiration aussi bien dans des expériences négatives que dans des choses plus positives.

Agata, ton jeu de guitare a toujours été très particulier, notamment au niveau des effets que tu utilises, mais sur ce nouvel album, j’ai l’impression que tu es encore allé plus loin.
Agata : En fait, j’ai utilisé de nombreuses pistes de guitare, mais très peu d’effets. Enfin si, j’ai utilisé pas mal d’effets mais ce sont les mêmes que sur les disques précédents, je n’ai pas ajouté beaucoup de nouvelles pédales. J’ai surtout travaillé à partir de boucles que j’ai superposé.

Je trouve queFetch est votre album le plus équilibré, on est pile à mi-chemin entre vos premiers disques, très extrêmes et agressifs, et ceux, plus accessibles, sortis ces dernières années. La production est également très propre, plus accessible, même si on est loin d’un disque pop.
Agata : Nous avons enregistré nos deux premiers disques avec Steve Albini. On a beaucoup appris en le regardant travailler et on a donc décidé par la suite de tout enregistrer nous-mêmes. Cela dit, ça reste très difficile, parce que nous ne sommes pas des professionnels dans ce domaine. Alors parfois, on fait les choses un peu dans l’urgence, sans trop s’appliquer. Je suis donc heureux d’entendre que la production de Fletch te plait !

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Comment vous êtes vous retrouvés en duo ? C’était un choix délibéré ?
Agata : Pas du tout. Pour tout te dire, nous avions envisagé de mettre un terme à Melt-Banana l’été dernier, mais nous avons changé d’avis après avoir été invités par Shellac au festival ATP. Nous n’avions plus de batteur ni de bassiste, mais ils nous ont dit de venir quand même et de jouer seulement à deux.
Yako : Je pense qu’au fond, on ne voulait pas que ça s’arrête.

Finalement, ça a du vous arranger de continuer avec une boîte à rythmes, vu que vous passiez votre temps à changer de batteur.
Agata : Pas vraiment. Nous avons fait plus de 1300 concerts avec notre formation précédente et nous étions donc habitués à jouer avec un vrai batteur. Ça n’a pas été une décision facile. Beaucoup de gens pensent qu’il est plus facile de jouer avec une boîte à rythmes mais jouer avec un bon batteur est beaucoup plus simple.

Est-ce que le fait de n’être plus que deux sur scène a eu un impact sur vos concerts ?
Yako : Pas du tout. Ce qui importe au final, ce n’est pas le nombre de gens sur scène, mais ce qu’ils font, ce qu’ils jouent et l’énergie qu’ils y mettent.

Vous êtes actuellement en tournée aux USA. Vous avez prévu de touer un autre daim cette fois ? (le titre de l’album précédent, Bambi's Dilemma a été inspiré par un incident qui s’est produit en tournée et dans lequel un daim était impliqué. Les choses se sont malheureusement très mal terminées pour le daim).
Agata : Ce serait un peu comme demander à un groupe dont un membre est décédé dans un accident de bus s’ils ont prévu de tuer quelqu’un d’autre sur leur prochaine tournée. Rentrer dans ce daim n’a pas été une expérience très amusante. Mais la vie continue.
Yako : En tout cas je ne veux pas imaginer qu’on puisse avoir un autre accident de ce genre. Ça m’a vraiment beaucoup attristé.

A part le meurtre brutal d’un pauvre daim sans défense, il vous est arrivé d’autres choses bizarres en tournée ?
Agata : Figure-toi qu’après l’accident avec le daim, un type complètement défoncé est rentré dans notre van à Austin, ce qui nous a valu de nous retrouver au beau milieu d’une véritable chasse à l’homme. Toutes les rues étaient bloquées par les voitures de police et la police montée. On était sur le point de monter sur scène, mais on a du retarder le concert pour répondre aux questions des policiers.

S’il vous plait, dites-moi que vous jouerez à la cérémonie d’ouverture des jeux olympiques de Tokyo en 2020. C’est votre devoir. Le monde entier va regarder cette cérémonie et je ne veux pas que les gens pensent que SMAP est tout ce que le Japon a à offrir en termes de musique.
Agata: Notre devoir est de te pulvériser, alors nous le ferons.

Daniel est un anglais exilé au Japon et il s'occupe d'un excellent podcast de musique japonaise nommé It Came From Japan. Il est aussi sur Twitter. Evidemment - @ItCameFromJapan.