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Music

Vox Low arrive après tout le monde à la fête disco-punk et s'en fout royalement

On écoute en intégralité le premier album des « faux blousons noirs de Saint-Ouen » qui sort le 2 février sur Born Bad Records.
Marc-Aurèle Baly
Paris, FR
Marion Barat

Alors que, circa 1992, Andrew Weatherall filait des ecstas à la louche à Bobby Gillespie et sa bande et que les dernières vapeurs du Summer of Love achevaient de déniaiser même les snobs les plus irrécupérables (en leur faisant notamment enfin accepter les vertus aphrodisiaques du break de batterie de « In The Air Tonight »), il se passait quoi au juste, « de l'autre côté de la Manche » ?

Par un lien de cause à effet assez logique, deux gosses de riches parisiens découvraient Screamadelica, puis, effarés par tant d'exotisme drogué, tentaient dans la foulée d'inventer la pop du (rétro) futur en perçant eux aussi un trou dans le mur de nos œillères musicales - mais à leur manière (oui, on parle bien de Daft Punk, pour les deux au fond qui ne suivent pas). Alors qu'en Angleterre les chakras libérés donnaient lieu aux mariages les plus fous (l'acid lubrique de Larry Sherman avec le psych déglingué de 13 th Floors Elevators, en gros), nos contrées jusqu'alors si musicalement sclérosées se piquaient désormais de kicks de 909 mais aussi de bande-son de porno cheap, de punk mais aussi de Supertramp, de radios libres mais aussi de RPR.

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Cette vision hédoniste-sucette des choses a contaminé la production dance française durant les dix grosses années qui ont suivi. On a alors eu affaire à une bande de mecs justement doués en affaire, pas assez crados pour mettre les mains dans le cambouis, mais assez futés pour s'arroger une part non négligeable du gâteau et le faire avec le sourire - il n'y a aucun sarcasme là-dedans, tout ceci était effectivement bien sympathique.

Puis, inévitablement, les choses se sont un peu corsées pour la pop parisianno-discoïde qui s'en met plein le nez. Parce qu'entre la fin de la Mort Aux Jeunes, la déliquescence de DFA Records, « quand la nuit se meurt en silence » (vous vous souvenez de cette lettre ouverte ?), puis la radicalisation et la multiplication des niches qui ont suivi, il n'y a a plus eu grand chose à se mettre sous la dent entre Grands Boulevards et Strasbourg St Denis, en tout cas pour ceux qui aiment nocer sans trop se cramer.

Et si les mecs de Vox Low, « faux blousons noirs de la port de St Ouen » (comme l'indique leur communiqué de presse), ont de toute évidence bien compris que la bataille disco rock cocaïnée était finie, ça ne les a pas empêchés de trainer leurs guêtres en studio et de tenter le coup quand même. D'abord sous le nom de Think Twice, tentative avorton-avortée au début des années 2000, puis avec ce patronyme qui sied sans doute plus à leurs ambitions financières - forcément, vue-la-conjoncture - revues à la baisse.

Détail frappant, lorsqu'on écoute le premier album de Vox Low, on a l'impression que le groupe n'a pas écouté d'album depuis 2012. On y trouve tout de même une sorte de malaise si caractéristique de 2018, qu'on situerait un peu entre une terreur de l'avenir et une quête des plaisirs rabougrie. Un truc un peu hors-carte, contemporain d'une époque où l'on sait que quelque chose cloche mais sur lequel on n'arrive pas à mettre le doigt. D'ailleurs, un des morceaux de l'album s'appelle « Something Is Wrong », et ne dit pas vraiment de quoi il retourne. Pareil pour « Now We're Ready To Spend », « You Are A Slave » ou « Some Words of Faith », qui trainent du pied en charentaises-wave, tapent la grosse caisse à un rythme de sénateur et ne font même plus semblant d'y croire un tout petit peu. C'est sans doute la première et la dernière fois que je citerai Orelsan de ma vie, mais il a bien raison quand il dit que la fête est finie : qu'on parle aux rappeurs trentenaires blancs dépressifs ou aux rockeurs transfuges reconvertis en boule à facette triste, c'est comme si tout le monde bandait mou aujourd'hui et l'assumait complètement. En tout cas, en attendant la sortie le 2 février de l'album de Vox Low chez Born Bad Records, on peut déjà vous laisser tâter la flaccidité avouée de l'objet ci-dessous.

Le premier album de Vox Low sera disponible le 2 février sur Born Bad. On en reparle plus en détail d'ici là.