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Music

Le monde veut la peau de Britney Spears (mais elle tient bon)

Pourquoi la chute de Britney Spears n'a pas eu lieu.

Photo via le compte Instagram de Britney Spears.

Dans un entretien récent avec le journal britannique Metro, la chanteuse LeAnn Rimes évoquait les problèmes de santé mentale de Britney Spears. LeAnn confiait avoir « vécu la même chose », et expliquait que même si elle n'était pas allée jusqu'à se raser la tête devant une nuée de paparazzis avides, elle aussi en avait bavé.

« Je comprends à 100 % », dit-elle. « Je ne suis pas allée jusque là, mais je peux vous assurer que j'ai ressenti la même chose à un certain moment. »

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Évidemment, cette déclaration a généré un bon nombres d'articles aux titres aussi stupides que « LeAnn Rimes a failli s'effondrer comme Britney Spears », parce que parfois, les gens peuvent être - eh bien, complètement stupides.

En février prochain, cela fera dix ans que Britney a atteint son point de rupture, dans un salon de coiffure de Tarzana, en Californie, avant de s'en prendre à la voiture d'un photographe à coups de parapluie. Tout ça sous les yeux d'une foule hystérique.

À l'époque, les rumeurs disaient qu'elle se plaignait que ses extensions capillaires étaient trop serrées, et que lorsqu'une employée du salon lui avait demandé pourquoi elle l'avait fait elle-même, elle avait répondu : « Je ne veux plus que personne ne me touche. J'en ai marre que tout le monde me touche. »

Pas vraiment besoin d'avoir une imagination débordante pour comprendre pourquoi, après une vie de contrôle permanent, de plannings rigoureux et contraignants, et une totale absence de vie privée, une personne puisse péter les plombs. Cela n'a rien de « dingue » ou de « fou » que quelqu'un comme Britney finisse par dire : « Allez tous vous faire foutre, j'en ai marre. » Le seul truc réellement étrange, c'est que ce genre de chose n'arrive pas plus souvent. C'est peut-être parce que Britney a été une pionnière dans le genre.

Les problèmes psychologiques avec lesquelles Britney s'est débattue – et qui ont atteint un pic en 2007 et 2008 – ont été sur-médiatisés. Au sommet de sa popularité, Britney ne pouvait même plus aller aux toilettes sans être suivie. Chacun de ses faits et gestes était scruté, analysé et critiqué, que ce soit par les appareils des paparazzi, les billets de Perez Hilton ou les couvertures des tabloïds. L'intimité volée de Britney était partout. Brocardée, pourchassée, insultée, humiliée, harcelée et diffamée. Une photo infamante de son entrejambe fit les gros titres pendant des semaines.

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Elle avait 26 ans et était mère de deux enfants.

Le monde observait, et se régalait de son instabilité. On encourageait cette folie. Quoi de plus excitant que de voir la plus grande pop star de la planète craquer sous la pression ? Quoi de plus vendeur que Britney Spears en train de devenir complètement tarée ?

Rien. Parce que c'est ce qui est juteux et pervers qui rapporte de l'argent. L'article de Vanessa Grigoriadis pour Rolling Stone en 2008, « The Tragedy of Britney Spears », était une invitation à rencontrer la Vraie Britney. « La Tragédie de Britney Spears ». Comme si elle était une pièce de théâtre et pas un être humain, avec ses nuances et ses complexités.

« Ce n'est pas une gentille fille », écrivait Grigoriadis. « Ce n'est pas le petit ange de l'Amérique. C'est une créature des marais consanguine, qui fume cigarette sur cigarette, ne s'occupe pas de ses ongles, envoie les journalistes se faire foutre et hurle sur les gens qui lui demandent des photos pour leurs petites soeurs. »

Malgré les raccourcis mesquins de l'auteur et le récit de relations professionnelles hasardeuses qui fleurent bon la manipulation et la toxicité, le portrait de Grigoriadis montre une Britney forcée de travailler alors qu'elle est malade, et raconte la violence psychologique exercée par son père ainsi que son addiction à la drogue - deux problèmes auxquels elle a du faire face dans sa jeunesse. Pourtant, impossible de trouver dans l'article la moindre trace d'empathie pour elle.

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À la place, on nous montre Britney comme un insultante pute à succès, qui nous a tous abusés dans son propre intérêt. C'était nous, les victimes : elle nous avait trompés.

Britney en couverture de V Magazine.

L'article de Rolling Stone avait pourtant une vraie fonction : nous donner des signaux d'alerte. On peut y trouver les signes évidents de son incapacité à gérer sa célébrité démesurée. Des récits d'un comportement qui change petit à petit, de la « bonne petite », 100% américaine, infiniment polie, avec qui c'était un plaisir de travailler, à la femme tranchante, méfiante et de plus en plus paranoïaque, qui n'accorde même plus un regard à ses fans. Elle avait le sentiment, compréhensible, de ne plus pouvoir faire confiance à personne. Pourtant, dans la conclusion de Grigoriadis – moins d'une centaine de mots après le passage traitant de sa probable tentative de suicide par overdose de médicaments en 2007 –, on apprend qu' « après avoir tenu le monde entier pour responsable de ses problèmes, Britney commence enfin à réaliser son propre degré de dévastation, mais sa manie de croire que tout lui est dû l'empêche de se l'avouer, à elle-même ou à tous ceux qui essayent de l'aider.»

En novembre 2008, le public était invité à aller encore plus loin, avec le documentaire Britney : For the Record. Compilation d'interviews et d'images montrant l'envers du décor, For the Record dévoilait un aspect de la célébrité de Britney que nous n'étions pas vraiment prêts à voir.

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Voilà ce que c'était vraiment, d'être Britney. Pas la « girl next door », pas la Britney de « Baby One More Time ». La Britney qui traversait un divorce déchirant. La Britney qui essayait se remettre en selle après une grave crise psychologique. La Britney qui, fuyant vers sa voiture l'oppression constante des photographes, avait fait failli faire tomber son fils de ses bras, tout ça pour voir les photos d'elles en train de « lâcher son bébé » surgir en couverture de tous les journaux, et montrées comme un exemple flagrant de son incompétence.

Il y a une scène en particulier (celle dont tout le monde parle à chaque fois) où on peut voir Britney essayer d'expliquer et de comprendre les évènements des mois précédents – son mariage avec Federline, le combat pour la garde de son fils, le crâne rasé. Elle s'effondre, pleure, et lâche : « Je suis triste ». Ce film était censé être celui de son come-back.

Dans les scènes coupées au montage, on voit une Britney encore plus perturbée. « Si je n'étais pas soumise à toutes ces contraintes, en ce moment », dit-elle, « je me sentirais tellement libérée. Et quand je leur explique comment je me sens, on dirait qu'ils m'entendent… Mais ils n'écoutent vraiment pas. »

« Même quand on va en prison, on sait toujours qu'on va en sortir à un moment. Mais dans cette situation » – elle commence à pleurer – « ça ne s'arrête jamais. »

Depuis, des témoignages ont émaillé les pages de quelques journaux et sites internet, dénonçant les abus dont Britney et ses proches ont été victimes à l'époque, comme le fait qu'elle ait été droguée et contrôlée par son ancien manager Osamah « Sam » Lufti. La vie de Britney, déjà hors de contrôle, s'est transformée en spirale infernale à partir du moment où elle l'a rencontré.

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Ça s'est passé dans un club, via un ami mutuel. Il était « consultant » pour une companie de gaz. Lufti expliqua a Britney qu'il pouvait devenir son manager pour 15 % de ses 800 000$ mensuels. Soit 120 000$ par mois. Il aurait rédigé le contrat à partir d'un modèle trouvé sur internet.

Le père de Britney finit par obtenir une ordonnance restrictive à son encontre, craignant qu'il ne tente de prendre le contrôle de ses biens, de son emploi du temps, de sa musique, bref, de sa vie. Lufti s'était installé au domicile de la chanteuse et avait coupé les lignes téléphoniques. Beaucoup de gens dans l'entourage de Britney restent persuadés que Lufti la droguait en glissant des médicaments dans sa nourriture. Sam Lufti a été l'objet de trois autres ordonnances restrictives depuis.

À ce jour, il tente toujours de traîner Britney en justice, lui réclamant une indémnisation financière et la qualifiant de « junkie à la meth ».

Si on prend la peine de s'intéresser à toutes les épreuves que Britney a enduré – et ce qu'elle continue d'endurer –, on pourrait se dire qu'on a retenu la leçon. Mais à en juger au sort réservé à Amanda Bynes ou Lindsay Lohan, les prédateurs rôdent toujours. Et c'est plutôt déprimant.

Photo via le compte Instagram de Britney Spears

Dans son entretien avec Metro, LeAnn Rimes a déclare également admirer Britney : « Je la regarde, et je me dis que c'est vraiment génial qu'elle ait réussi à s'en sortir. Ça fait du bien de voir quelqu'un sortir du tunnel et renouer avec le succès. »

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Voilà LA citation qui devrait susciter les articles et les réactions. Parce que Britney Spears est toujours l'une des femmes qui a le plus de succès dans le monde de la pop.

On ne parle même pas du courage qu'il lui a fallu pour retourner sous le feu des projecteurs, pour remonter sur scène, en sachant très bien toute la dérision et les spéculations qui l'y attendraient – en sachant que des gens attendaient probablement qu'elle se plante. Cette force de caractère est tout à fait incroyable, mais ce n'est même pas le propos ici.

Depuis 2008, elle a sorti trois albums, et on en attend un quatrième, Glory. Elle a fait deux tournées mondiales – arrêtons nous là deux secondes. Tournées mondiales. Deux fois – et a donné cinquante représentations par an depuis trois ans de son spectacle Piece Of Me, à Las Vegas. C'est absolument dingue.

Elle a également été juge pour la deuxième saison de X Factor aux États-Unis, devenant par la même occasion la juge de concours de chant la mieux payée de l'histoire. Forbes Magazine l'a aussi nommée femme la mieux payée du marché de la musique en 2012.

Mais le plus important, c'est qu'elle a déclaré au magazine People être « plus heureuse que jamais ». Vous n'y croyez pas ? Jetez un oeil à son putain d'Instagram.

Le monde voulait sa peau, mais elle a tenu bon. Le chute de Britney Spears n'a pas eu lieu. Issy est sur Twitter.