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Music

Les mecs de la MZ ne veulent pas être des figurants du rap français

On s'est posés avec Jok'Air, Dehmo et Hache-P pour qu'ils nous parlent de leur présent et de leur futur.

La MZ c'est Jok'Air, Dehmo et Hache-P, trois jeunes méga-motivés qui rappent sous le nom Mafia Zeutrei depuis 2007. Leur dernière mixtape, MZ Music vol. 3.5 est sortie le 3 novembre dernier (sur Arista France) et le groupe reste pourtant toujours aussi dur à cerner, certains les voient comme un crew qui fait bouger les collégiennes (depuis « Lune de Fiel »), d'autres comme un groupe ghetto, et d'autres encore n'en ont rien à foutre et ne comprennent pas bien qui est qui. Pour éclaircir tout ça, on s'est posé rapidement avec les trois loustics et deux de leurs potes (Chich et Marlo) qu'on peut considérer comme des membres non officiels du groupe. Car la MZ c'est avant tout une histoire de bons potes et de bonnes vannes (et de bonnes sapes aussi).

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Noisey : Vous êtes un groupe relativement jeune mais ça fait déjà un moment qu'on entend parler de vous.
Dehmo : On a monté le groupe en 2007, on était beaucoup plus à l'époque, c'est monté jusqu'à 8… Là on n'est plus que 3, les plus sérieux, les plus déterminés. Mais le collectif Davidson Present s'est agrandi avec d'autres gars, comme Chichon et Marlo ici présents.

Votre style ?
Dehmo : Unique. [Sourire] C'est le mot !
Jok'Air : Différent. Par rapport au milieu du rap français. Enfin, perso j'estime qu'on a apporté un truc différent de ce qu'il y avait avant.
Dehmo : Nous, c'était un vrai coup de pression déjà

Au niveau des influences, c'est plutôt ce qui se fait en ce moment niveau rap US non ?
Dehmo : Je pense plutôt que c'est « influence nous ». Tu vois quand t'es petit, ta mère t'habille un peu n'importe comment, et puis tu évolues. Y'en a qui préfèrent suivre vraiment un exemple précis, une idole. Bon, ben je pense que nous [Il regarde les vêtements des autres membres du groupe], dans La MZ, on préfère s'habiller, je vais pas dire comme personne, mais pas comme tout le monde en tout cas. On peut avoir la même paire ou le même jean que d'autres mais on ne va pas les porter avec les mêmes affaires qu'eux.

Jok'Air : Au niveau musical, nos influences varient, ça va des morceaux africains qu'on écoutait étant petits, d'autres ont été plutôt à fond dans le rap français, certains un peu plus américains et c'est ce mélange qui fait La MZ. En général on bosse avec Ekinox, le beatmaker officiel de l'équipe…
Chich : Ca va très vite en général.
Hache-P : Et c'est lourd en plus.
Marlo : Par exemple « Lune de Fiel », il a été fait en un soir, dans une cage d'escalier : l'instru était lourde, le refrain est venu direct et les couplets ont suivi. Quand je te dis en un soir, c'est vraiment ça.
Jok'Air : Un soir de Noël…

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Hache-P : Le refrain c'est la base du son. Dès qu'on a une instru, on commence direct par le refrain. Dès qu'on a la direction du refrain, on a celle du son et après on commence à gratter nos couplets.
Jok'Air : Les refrains de la MZ c'est des trucs plutôt mélodiques qui rentrent facilement dans la tête. Du coup, c'est à ce moment là qu'on voit les influences que chacun a assimilées.

Au niveau des lyrics vous assumez pleinement le côté entertainment.
Hache-P : Moi personnellement, j'ai l'instru, je balance mon flow, bonjour, au revoir, je sors de la cabine. Pas de prise de tête pour aller d'un point précis à un autre, pour plaire à je sais pas qui.
Chich : Après si t'écoutes bien y'a un minimum de recherche quand même. Mais si tu regardes le groupe, tu vois des mecs qui aiment bien blaguer, se vanner entre eux. On fait pareil dans la musique, mais avec les autres rappeurs.
Marlo : Parce que quand t'écoutes d'autres rappeurs, hmmm… ils se prennent trop au sérieux ! Ce qu'on dit, c'est réel, ok, mais on est décontractés aussi.
Jok'Air : C'est la musique du peuple ! Si des gens adhèrent c'est parce qu'on parle comme tu voudrais qu'on te parle dans la vraie vie. On est déjà soutenus par notre quartier, et on espère bien que ça va continuer. Hache-P : Il y a aussi des sons comme « Enfermés Dehors », ça dépend, on peut te parler de trucs moins légers, mais c'est comme un mec normal : les humeurs changent.
Jok'Air : Un jour on décide de manger des pâtes, un jour de manger du riz, ça va ça vient.
Marlo : Si c'est bien fait, on le mange !
Dehmo : Voilà, tu peux dire tout ce que tu veux mais chez nous ce sera toujours bien fait.

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Comment vous vous situez dans le rap, par rapport aux autres ?
Dehmo : La concurrence, c'est nous. Chaque fois qu'un rappeur parle de « la concurrence », il parle de nous en fait. [Sourire] On est en concurrence avec tout le monde, pas que les groupes parisiens ou les rappeurs de notre âge. Ceux qui visent haut, faudra nous passer sur le corps, et nous on est là pour leur passer sur le corps aussi. C'est que de la musique tout ça. Et puis on n'est pas des rappeurs de studio, on aime bien bouger et partager le truc avec le public.
Jok'Air : C'est une mentalité de boxeur : être le plus efficace possible, que ton adversaire tombe au 1er round. Voilà notre démarche : on veut tous les coucher, un par un. C'est le jeu !
Hache-P : J'aime trop la compétition dans le rap. Je vais écouter quelqu'un et après : faut que je fasse mieux que lui ! Ça me motive. « Ah il a fait ça ? Vas-y ok j'arrive, bim ». Sans ça, t'évolues jamais. Et les concerts… C'est rock'n'roll.
Jok'Air : L'excitation, l'adrénaline, le rideau s'ouvre, on entre dans l'arène : c'est ça qu'on aime ! Et plus il y a de la compétition plus le niveau est élevé. De toute façon, ça dépasse la musique : dans la vie de tous les jours c'est la guerre. Pour trouver un taf, t'es en compet' avec d'autres candidats, le bar où on est c'est le concurrent de celui d'en face… Si la guerre peut être artistique, c'est tant mieux.

Vous êtes toujours en indé ?
Chich : Ouais, faut bien le rappeler ça ! Parce qu'il y a des gens qui disent « ouais MZ a signé, MZ a signé » mais que dalle ! [Rires]
Jok'Air : Pour bien expliquer les choses, MZ est sur le label Davidson Present/KDBzic, et la distribution est assurée par une maison de disques. Mais tout le travail au-delà du fait de placer des CD dans les bacs et en numérique, c'est en indé. C'est important, depuis qu'on est gamins, on fait tout nous-mêmes, et quand le produit fini sort enfin, on peut en être fiers. Jusqu'ici, tous les projets MZ c'était à la sueur de notre front. Je ne dis pas que ce sera forcément toujours comme ça, mais pour l'instant oui : tous les précédents projets MZ Music 1, 2, 3 et 3.5, les clips, c'est nous.

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C'est vrai que vous faites beaucoup de clips.
Jok'Air : C'est indispensable. Quand le son sort en même temps que le visuel c'est toujours mieux. C'est une idée que Davidson a eue depuis le début : faire plein de clips, des clips bien soignés…
Hache-P : Les négros sont soignés aussi d'ailleurs !
Dehmo : Regarde la gueule de mes potos. Comment tu veux qu'on soit pas classe dans les clips ?
Marlo : T'as les plus beaux du rap game devant toi.

C'est quoi l'avenir du groupe ?
Jok'Air : L'objectif c'est de tout niquer, d'arriver au top. C'est simple, on vient de quartiers défavorisés, si je peux repasser devant dans 10 ans et dire à mon fils « c'est là que papa a grandi », et qu'il n'en croit pas ses yeux, ce serait déjà beau.
Dehmo : J'ai envie de faire semblant de manger du caviar [Rires], de me défriser pour avoir une coupe comme ça [Il mime une mèche], de m'habiller en costard, de payer des œuvres d'art que je ne comprends même pas [Il montre un tableau au mur] mais qui sont super chères, jusqu'à ce que mon fils me dise « mais arrête tes conneries un peu ». Non, sérieux, on aime ce qu'on fait, et c'est pas juste pour faire un petit tour et se barrer. Si on peut aller le plus loin possible, on le fera. On veut pas être des figurants.

Quand vous écoutez la radio ça vous arrive de…
Jok'Air : De rigoler ?
Marlo : On se marre, beaucoup !
Hache-P : La dernière fois on est parti à Fréjus tourner un clip, tu connais ? C'est à 7h de Paris en caisse. On a mis une radio française. Ohlala, c'était génial, on se marrait tellement qu'on n'a pas vu le temps passer. En fait, j'ai même un conseil : quand vous êtes tristes, allumez la radio, vous allez rigoler. C'est incroyable.
Dehmo : Vous allez arrêter de vous suicider avec ça, c'est sûr.

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La MZ, plus détendue que jamais.

Maintenant vous allez m'expliquer quelle est la spécificité de chacun dans le groupe. Vous pouvez demander à votre voisin de vous aider.
Chich : Pour moi, Dehmo c'est l'arrogance, Jok'Air c'est le sexe…
Jok'Air : Attends, laisse-moi me présenter ! Moi à la base, j'aime quand c'est décomplexé, que ça parle de trucs un peu crus, ouais. Bon, je m'appelle Jok'Air, et quand tu as le joker dans tes cartes, tu sais que c'est chaud pour le gars d'en face. Dans le groupe c'est pareil. [Rires] Bon je continue : Marlo, depuis qu'on est bambins, c'est la touche gangsta…
Marlo : Ah, djo… [Rires]
Jok'Air : La touche rue dans le collectif, une certaine crédibilité… C'est comme ça qu'on l'aime. Tout en restant décomplexé.
Marlo : Si tu me vois en cabine au micro, je fais des trucs ouf, mais quand ça sort, le travail est sérieux. Voilà. C'est Marlo, pétasse !
Chich : Moi je dirais que j'essaie aussi de me prendre un peu plus au sérieux, j'amène du soutien : même si tu ne me vois pas souvent devant les caméras, je suis toujours là pour eux. Même en dehors du rap, je suis là. Une sorte de bras droit.

Hache-P : Bon ben moi, j'ai pas de style précis, j'en ai vraiment rien à foutre, sur instru je peux crier, chanter, je fais ce que je veux.
Marlo : Je vais te dire qui est Hache-P : celui qui n'aime pas ceux qui font pas d'argent. Tu vois pas qu'il ne parle que de ça dans ses sons ? Djo il te dit « fais de l'argent » parce que dans ce monde personne ira le chercher pour toi. C'est pour ça qu'il t'en parle tout le temps.
Dehmo : pour moi c'est lui qui a le meilleur flow. Il peut prendre n'importe quelle instru avec inspiration… il va chercher loin. SI tu lui dis « fais-moi un refrain » ou un 8 mesures, il va pas poser juste pour faire des rimes, tu vois le délire ? Il va vraiment jouer avec.
Hache-P : C'est pour ça que je dis que j'en ai rien à foutre ! [Rire général]

Vous répondez quoi à vos détracteurs ?
Hache-P : Les gens aiment bien être choqués, pas vrai Jok'Air ?
Jok'Air : Si on peut te vendre du sale on va te vendre du sale. Les gens aiment le sexe, le sang, c'est comme ça.
Marlo : Les gens veulent que tu les ambiances. La musique à la base c'est ça. Tu vas faire quoi, raconter tes soucis à l'auditeur ? Il va dire « moi aussi j'ai mes problèmes, j'ai pas envie d'entendre les tiens ». Il veut s'évader le mec.

Hache-P : Y'en a qui se plaignent mais qui écoutent des rappeurs américains bien plus vulgaires que nous, sauf qu'ils captent rien aux lyrics.
Chich : Plus on parle de nous, mieux c'est, en bien comme en mal.
Dehmo : En bien ça serait mieux, mais en mal on s'en fout !

Selon la MZ, Yérim Sar est le sosie de Nicolas Batum. Il est sur Twitter - @spleenter