On a soumis notre questionnaire connard à Siboy

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On a soumis notre questionnaire connard à Siboy

La cagoule par temps de canicule, supporter le PSG quand on habite Mulhouse, les rôts au micro, les prods signées Damso : on est allés cuisiner le hooligan du 92i sur les sujets qui fâchent.

« Ah ouais, les questions de connard - c'est ce que tu préfères non ? »

C'est avec un certain naturel et pas mal de décontraction que Siboy s'est prêté à notre questionnaire-pas-trop-sympa. Sans mixtape ou autre projet venu préparer le terrain, le rappeur de Mulhouse a signé directement avec Spécial, premier album où il livre exactement ce qu'on attendait de lui - soit, en gros : des sons de bourrin histoire de bien se déchaîner en live. Mais pas que. À la surprise générale, l'album s'avère en effet bien plus varié que prévu. Si on y trouve effectivement de gros bangers calibrés, qu'ils soient trap ou afro, on a également droit à des morceaux plus tranquilles, dans des ambiances presque intimistes. Y'aurait-t-il un coeur qui bat sous la cagoule de Siboy ? Aucune idée, parce que pour le coup, on a surtout parlé de fesses, d'Hannibal Lecter et de crottes qui ne partent pas, même après avoir tiré la chasse.

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Noisey : Quand tu as vu le score du dernier Damso, tu as réalisé que tu ne seras jamais l'employé modèle du 92i ?
Siboy : Tu parles du disque de platine, tout ça ? Non, je me suis dit bravo pour lui, il le mérite en fait. [Rires] Je ne me suis pas comparé, personnellement.

Pour « Bon qu'à ça », tu n'as mis que les initiales « BQC » parce que tu savais qu'à la base c'est un titre de Kaaris ?
[Rires] Hmm… Non, non franchement.

Tu as fait « Mula » avec Booba et sur l'album, tu as invité Damso et Benash. Rien avec Shay. Tu penses que ça envoie quel message dans une société patriarcale comme la nôtre ?
Écoute, on avait un morceau ensemble, avec également Benash dessus. Mais comme elle avait changé de style entre temps, et que le morceau était assez sombre, ça ne reflétait plus ce qu'elle faisait dernièrement. Même elle était d'accord pour ne pas le mettre.

Tu as donc fait ça pour lui rendre service, ta gentillesse t'honore.
Oui et non, c'est plus un choix concerté. Pour les feats, je reste en cercle fermé, pour l'instant. Je connais pas grand-monde de l'extérieur non plus. Gradur, Sheguey Squad, je les connais bien. Deux-trois autres rappeurs, un peu. Mais c'est tout, les autres on se connaît juste par le blase.

Tu dis dans « Un jour » : « les salopes me suçaient après Nero Nemesis ». Mais comment elles font pour te reconnaître ?
Hein ? Les salopes ? Ben, avec ma cagoule. [Rires]

Sur « Président » : « tu veux mon flow, tiens mon crachat, enlève la cagoule ça te va pas ». Ça y est tu clashes enfin Kalash Criminel ?
Naaaaaan, parce qu'il n'y a pas que lui qui porte la cagoule. C'est plus un délire pour… Hum, comment te dire ça ? il faut que je fasse gaffe avec ce que je réponds en plus, parce que ça sera utilisé contre moi si je dis des bêtises [Rires]. C'est parce qu'il y a des gens, qui prennent la cagoule comme une mode bizarre, y'en a à qui ça va et d'autres ça leur va pas du tout. Kalash s'est fait connaître donc tout le monde le voit en ce moment, il a la lumière sur lui, mais cette rime le concerne pas.

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C'est con, parce que moi j'avais cité cette phase en mentionnant Kalash Crimi sur Twitter, tant pis.
[Il éclate de rire] Ah le fouteur de merde !

En janvier, tu m'avais dit que tu trouverais un truc plus artistique pour cacher ton visage. On est fin juin et tu as toujours une cagoule de terroriste sur la gueule…
[Rires] C'est très dur. Franchement on a essayé hein. Mais c'était pas ça. Et ça servait à rien de s'afficher avec un truc qui ne correspond pas. C'était nul ! On a essayé de trouver un truc dont je ne peux pas parler, quelque chose de beaucoup plus artistique, mais ça ne marchait pas. Du coup, retour à l'original.

Ta collection de cagoules est plus importante que la collection de bobs de Gradur ?
Ouais, c'est possible ! « J'ai plus de cagoules que d'habits », comme je dis dans un morceau. En plus, on en a encore acheté là, pour faire des réserves.

On est en été, c'est la canicule, comment tu fais pour tenir ?
Je vais te dire la vérité : je fais pas trop de différence quand j'ai ma cagoule. Je suis quelqu'un qui chauffe vite de la tête, ma tête est toujours brûlante, suffit d'une casquette. Du coup, ça va. Mais bon, là celle que j'ai est plus légère que la dernière fois qu'on s'est vus hein ! C'est plus une polaire, sinon ce serait trop.

Je voulais te féliciter, tu es le premier rappeur français à roter au micro depuis longtemps, sur « Hitch ».
Oh ? [Agréablement surpris] Ah ouais ? Justement ça vient quand je dis « Hannibal, les dévorer » etc, et fallait que j'illustre bien le côté « après manger », c'était juste ça et en plus ça me faisait marrer. Et j'ai pas triché, c'est un one shot le rôt. Pas de drop. J'ai roté, pam.

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« Spécial », c'est le quota doux de l'album ? Tu as dû t'entraîner pour éviter de gueuler ?
Tout est parti de la prod. Déjà on me l'a envoyée en 2015, mais je me suis rendu compte que je l'avais seulement en 2016, jamais écouté avant. J'ai écouté et j'ai pété un plomb, « waaah, c'est trop lourd » et je me suis mis à la recherche du beatmaker, parce que ça datait. Je cherchais, je cherchais, j'étais avec Heezy Lee, qui me dit « tu cherches quelle prod », je lui fais écouter, il rigole et se fout de ma gueule « mais t'es con, c'est moi qui te l'avais envoyée celle-là ». Il était juste à côté de moi depuis le début.

C'est ce qu'on appelle un incroyable coup de théâtre. Mais si ça se trouve c'était pas lui et il a dit ça juste pour gratter.
[Rires] Non c'était vraiment lui. C'est lui fort ! Et franchement, sur cette prod, j'ai pas calculé, elle était plus tendre, elle appelait plus de douceur.

C'est vrai qu'elle est bien. J'imagine que c'était une de tes préférées puisque le morceau donne son titre à l'album.
Non, ça c'est juste parce que je savais pas trop comment appeler mon album à la base. J'hésitais entre Déterminé et Spécial, et je suis parti sur Spécial. Je le trouve plus touchant. Je l'écoute souvent.

Avec « Mobali », tu t'essaies au côté afro-lover, j'imagine qu'on t'a forcé, que ça a été très dur pour toi…
Non pas du tout. J'ai écouté la prod, j'ai grave kiffé, j'ai dit aux autres « non les gars faut en faire quelque chose, j'ai un refrain », je tremblais, ça me brûlait et tout. J'ai posé ma partie, puis Benash et Damso ont posé, super rapide en vrai.

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Après, vous tirez à la courte paille pour savoir sur l'album de qui ça va atterrir ?
Non, je crois que c'était plus évident : j'ai fait le refrain et un couplet, donc naturellement le morceau appartenait plus à Siboy qu'aux autres. C'était le même principe pour « Ivre » avec Benash. Si le morceau te ressemble plus, faut qu'il te revienne, c'est comme ça que je vois les choses.

Sur scène tu penses développer le côté boys band 92i grâce à ce morceau ? Si vous vous mettez torse-nu et que vous faites une choré, vous pouvez très bien devenir les Afro-2Be3.
[Il rit à gorge déployée, ce qui n'est pas chose facile quand on est cagoulé] Sérieux ? Non, pas du tout, pas du tout. On va rester nous-mêmes ! T'es un bâtard !

« Coriace comme une crotte qui part pas après avoir tiré la chasse ». Tu as une façon très personnelle de faire de l'egotrip.
Bah ouais ! C'était déjà arrivé à tout le monde ça. Franchement y'a des crottes, c'est super relou. Tu chies, tu tires la chasse, ça part pas, tu retires la chasse, ça part pas. C'est insupportable, de ouf.

Tu as des toilettes classiques ou un sanibroyeur ?
Non, normal normal. Mais comme je te dis, t'es là, imagine ça arrive quand t'as des invités, c'est quand même chiant. T'es obligé de t'en occuper… Des fois pour mes phases je me prends pas la tête, je me rappelle des trucs de ma vie, des trucs qui me font marrer, et c'est parti.

Prodigy est décédé il y a quelques jours, c'est quelqu'un que tu écoutais ?
Je savais même pas ! [À son pote] T'étais au courant qu'il était décédé toi ? Il est mort quand ?

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Mardi 20 juin, au soir.
Il est mort comment ?

Des suites de sa maladie, du coup il était fragile et en plus là il s'est étouffé avec un œuf apparemment.
Il s'est étouffé avec un œuf ? [Rires] Et bah dis donc. Un œuf… Putain, c'est incroyable. RIP, qu'il repose en paix. Je vais pas te mentir, Mobb Deep je connais, j'ai écouté quelques morceaux, mais c'était pas mon délire de base. Bien sûr y'a les grands classiques, B.I.G et Pac mais c'est le South qui m'a vraiment touché. Pas le rap à l'ancienne, West Coast/East Coast, ils ont ramené autre chose, que je me voyais bien faire à ma sauce. Ça m'a inspiré, ça me représentait. C'est peut-être grâce à eux que je me suis mis à la codéine, inconsciemment ! J'ai découvert le truc via un pote qui m'a dit « goûte ça », je savais pas ce que c'était, j'ai testé, « wow, c'est bon », et voilà.

Sur « Au revoir merci » tu as dit tout haut ce que beaucoup disaient devant leur télé avec ta phrase sur Da Fonseca qui « suce Messi »
Faut savoir que je kiffe Da Fonseca, et je kiffe ses commentaires, il est marrant de ouf, mais quand il parle de Messi, tu vois que c'est de l'amour, le côté Argentin ressort. Après, les autres références, c'est parce que je suis un petit passionné de foot, ça vient direct. Perso, je suis PSG.

Mais tu habites Mulhouse.
Oh, ça veut rien dire, mon père vient du Congo là-bas et il a toujours supporté de ouf. Je crois que c'est de lui que ça me vient en plus ! Que Paris, depuis toujours.

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Et niveau rap, tu te vois mettre en avant des gens de chez toi ?
Avec Internet tout est possible, mais c'est toujours plus compliqué quand tu viens pas de Paris. J'ai l'impression qu'il y a toujours ce truc qui t'oblige d'abord à être validé par Paris avant de pouvoir devenir national. Mais le web a brisé des barrières, si tu fais bien le taf. C'est du travail. Y'a des rappeurs talentueux. Il faut marteler les gens sur le net, répéter encore et encore, que les gens s'habituent à toi. C'est compliqué la musique mon frère. En vérité y'a plein de rappeurs. Ça va venir, chacun son heure. J'ai fait 2-3 sons avec des gens de ma ville, on clippera peut-être pour leur donner de la force. Si c'est pour leur donner une force de tuba ça sert à rien, faut attendre que les projecteurs soient là pour partager.

En parlant de partage, tu étais au courant que « Zer », c'est de l'argot de Grigny au départ ? Tu comptes vivre 10 ans avec la SACEM de ce morceau ?
[Rires] Non, quand même pas. Sinon je savais pas du tout, je suis même pas d'Île de France moi ! Big up à Grigny, c'est un putain de mot, un putain de style. Moi j'aime bien.

Tu as bossé avec l'ingé son de PNL. En te voyant hurler sur des sons comme « Al Pacino », il n'a pas été profondément dégoûté ?
[Rires] Non, les gens ont l'habitude. Et je fais pas n'importe quoi ! « Al Pacino », je l'ai travaillé, c'est super contrôlé malgré les apparences, j'ai carrément fait des yaourts avec mes hurlements et j'ai écrit dessus seulement après. Des fois c'est plus spontané, mais pas celui-là, c'était calculé.

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Les références à Hannibal reviennent souvent, c'est ton héros d'enfance ?
Hannibal c'est vraiment des coïncidences : sur « Kiubb 5 », j'avais même pas fait gaffe que c'était encore lui dans l'intro. Mais en vrai c'est un perso que je kiffe de ouf. Les films et la série, le personnage est excellent. Apparemment c'est inspiré d'un mec qui a existé et qui franchement devait faire des repas super bons [Rires]. J'aime ce genre de personnage sombre, même si lui était très maîtrisé. Mais quand il va dans le sale, il y va à fond. Ça me fait penser à moi quand je mets ma cagoule en fait : dès que je l'enlève on me dit « hé mais t'es calme en fait ». Y'a cette contradiction.

On connaissait ton goût pour la violence mais cet album est aussi l'occasion d'en apprendre plus sur ta personnalité. Par exemple tu as une passion attendrissante pour les gros culs.
[Rires] C'est réel ! Je suis un BLACK ! Un putain de black. Les gros culs, des belles formes, ça fait plaisir. Franchement, quoi, tu vois les gros culs c'est toujours un plaisir. Les maigres, voilà… Les skinny, je peux être ami avec elles, c'est mes amies voilà. Je crois en l'amitié homme-femme tant qu'on parle de skinny.

Je vois.
T'es d'accord, ça veut dire que toi aussi t'es dedans !

Disons que « je veux voir la vie en rose, le boul à J-Lo », c'est le genre de phrase de mec qui a grandi devant les clips de l'époque avec des étoiles dans les yeux.
Mais ouais, elle était incroyable. Elle était vraiment incroyable… Tu te disais que plus tard, tu ferais ta vie avec ce genre de femme, une meuf avec un pétard comme ça, fantastique. Elle a traumatisé beaucoup de monde. C'est pas qu'un truc de black en vrai, j'ai toujours aimé les formes.

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Et pas trop la taille mannequin.
J'ai un message à faire passer aux skinny : je vous aime bien en fait, on est meilleurs potes, on restera amis comme jamais ! C'est vrai que j'ai plein de phases comme ça [il réfléchit]… C'est pas sur le même morceau mais c'est vrai que ça finit par se rejoindre : « t'as un bon fond mais je préfère ton anus » . C'était plus pour le jeu de mot, mais c'est vrai que ça se rejoint, mon amour des belles rondes me perdra.

Ne pas mettre « Mula » avec Booba alors que ça aurait dopé les chiffres de l'album, c'est la pire décision du monde, non ?
Je me suis dit que ça faisait quand même 1 an et demi qu'on m'avait pas entendu tout seul, je voulais pas servir du réchauffé, livrer que du neuf. Ce son tournait depuis déjà 5 mois, même s'il a très bien marché.

Tu m'avais dit « moi je suis une galère, même niveau papier, mes déplacements c'est compliqué pour les clips ». Vous n' avez jamais clippé « Mula », j'imagine que tout le monde en a marre de toi…
Non… Attends on est retourné au questionnaire connard ?

On n'en est jamais partis.
[Rires] Non, si ça saoulait Booba on n'aurait pas fait le morceau. La vraie raison c'est le timing. Faut dire ce qui est, lui aussi a des trucs derrière, il a aussi la préparation de son nouvel album, ses biz, tout ça.

Et puis t'es pas Lacrim.
Ahahah, bah ouais aussi, je suis pas Lacrim, c'est vrai ça.

C'est vrai que Damso t'a proposé des instrus mais que c'était pas du tout au niveau ?
[Silence] Mais… comment tu sais ça ?

En fait je viens de l'inventer, tant mieux si c'est vrai !
[Rires] Oh putain, bah ouais, le pire c'est que c'est vrai, il m'a proposé des beats mais c'était pas trop dans mon délire. Même moi j'ai proposé des instrus à Kopp, c'était pas trop dans son délire non plus.

Depuis vous vous faites tous la gueule j'imagine, c'est moche.
Non, du tout, on est tous copains ! [Rires] Déjà à l'époque, j'avais du mal à envoyer mes prods comme ça. Je travaillais avec un collègue à moi et c'était lui qui avait les contacts des artistes et leur envoyait, moi j'étais pas à l'aise avec ça. Si des gens se sont demandés pourquoi en tant que beatmaker j'avais pas de prods sur les autres projets 92i c'est simple : je les envoyais même pas. Je faisais des prods et je les envoyais même pas [Rires]. Je les trouvais pas assez efficaces. Le truc c'est que j'avais perdu mon rythme de beatmaker. Je suis un peu tuba niveau prods [Rires]. Faut que je rattrape un peu le temps.

Ça va être dur si t'es « feignant comme un timal » comme tu le rappes.
Oui, c'est vrai. Hé, je suis feignant moi à la base, mais comme je le dis à la mesure d'après : « pour l'oseille je suis matinal ». Comme tout le monde en vrai. Je vais accélérer le rythme, je commence déjà le prochain album, mais si c'est pas prêt ça peut remettre un an, si c'est pas assez soigné. C'est aussi pour ça que je suis pas sorti avant, j'étais pas prêt, franchement.

Yérim est sur Twitter.