Comment le rappeur CeasRock a su se relever pour créer un classique
Rashad Bedeir

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Musique

Comment le rappeur CeasRock a su se relever pour créer un classique

Le rappeur montréalais a appris que, de l’échec à la victoire, il n’y a qu’un pas.

Au cours de la création de son dernier album Wins & Losses , le rappeur CeasRock a subitement dû faire face à de gros problèmes financiers, à un tel point que ce projet a failli ne jamais voir le jour. Finalement, grâce au soutien de son entourage et de son producteur, Prince Club, il a pu aller au bout de cette aventure. En utilisant cette série de coups durs financiers et humains, il a donné naissance à un album où célébration et remise en question cohabitent durant 11 chansons.

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Alors qu'il vient de sortir RAIR, son nouveau vidéoclip, VICE l'a rencontré pour discuter des défis de créer un album en 2017, mais aussi ceux d'être un rappeur anglophone au Québec.

VICE : Pourquoi ton album s'appelle « Wins & Losses »?
CeasRock : Au cours de la création de l'album, j'ai perdu beaucoup d'argent pour des raisons dont je ne souhaite pas trop parler. En tout cas, je n'avais plus le budget nécessaire pour continuer à créer de manière professionnelle et j'ai failli tout arrêter. Finalement, Prince Club, qui a produit tout l'album, m'a dit que je devais continuer et que tout allait s'arranger, et c'est comme ça qu'est né le concept de l'album Wins & Losses. À vrai dire, avant ces problèmes financiers, les chansons étaient bien plus légères. Par la suite, j'ai pris un virage plus sérieux qui a conduit à la dualité qu'on peut entendre sur ce projet.

Selon toi quels sont les défis de faire un album en 2017?
Hormis l'aspect financier, le plus dur, c'est de capter l'attention des gens et de la garder avec un album de 11 chansons. Les gens n'ont pas forcément envie d'écouter un album en entier en 2017. On le voit sur les statistiques des plateformes de streaming, la plupart du temps les gens vont décrocher à partir de la quatrième ou cinquième track. Ce n'est pas parce que l'album est mauvais ou que les premières chansons sont meilleures, mais parce les auditeurs font face à énormément de sollicitations : il y a des nouveaux singles, EP et albums qui sortent tous les jours ou presque. C'est donc difficile pour un artiste indépendant de sortir du lot.

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Alex 'TRON' Jeremy

C'est quoi alors, le secret pour se démarquer?
Je pense qu'il n'y pas de place au hasard, il faut avant tout comprendre et connecter avec son audience. J'ai aussi appris avec le temps qu'il ne faut pas en donner plus que tu as besoin d'en donner. Imaginons que tu as très faim, je vais t'offrir quatre assiettes de bouffe, mais tu vas en manger qu'une seule et ça va te suffire. C'est pareil avec la musique, il ne faut pas en donner plus qu'il le faut sinon elle ne sera pas consommée.

Pourquoi c'est si difficile d'être un rappeur anglophone au Québec?
Que ça soit au Québec ou au Canada, j'ai l'impression que les gens attendent que tu deviennes d'abord populaire à l'étranger pour te donner l'attention que tu mérites. C'est ce qui s'est un peu passé avec Kaytranada, mais aussi avec Drake qui a fait d'abord son buzz aux États-Unis avant de devenir populaire au Canada. Dans tous les cas, il ne faut pas se mentir, le français domine ici et il est nécessaire de sortir du Québec pour véritablement vivre de sa musique en tant que rappeur anglophone.

Est-ce que tu trouves ça étrange qu'aucun rappeur montréalais n'ait encore percé aux États-Unis?
Non, pas vraiment, il y a plein de raisons derrière cette réalité comme le manque de financement, mais je ne veux pas me cacher derrière cette excuse. Ça fait longtemps que j'observe la scène rap montréalaise, et je pense qu'il ne s'agit que d'une question de temps pour que notre musique s'exporte à l'international. D'ici les deux prochaines années, plusieurs artistes devraient blow up. J'ai l'impression que le premier qui va percer va créer un effet boule de neige et entraînera plusieurs autres rappeurs dans sa réussite.

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Alex 'TRON' Jeremy

Parlons un peu de ton dernier vidéoclip, quelle est l'idée derrière?
Je voulais raconter une histoire qui m'était déjà arrivée. Il y a quelques années, j'étais seul dans ma voiture, j'avais un peu bu, un peu fumé et je me suis endormi au volant… Quand je me suis réveillé, j'avais la tête dans le airbag, mais heureusement je m'en suis sorti indemne, sans même une égratignure. J'ai tout de même éclaté ma voiture dans cette histoire.

Qu'est ce que tu racontes dans cette chanson?
Je parle des hauts et des bas que j'ai vécu ces derniers temps. Parfois, tout va bien, puis il t'arrive une galère que tu n'avais pas du tout vue venir. Cette chanson est aussi une métaphore pour expliquer que parfois, s'il vous arrive d'avoir des coups durs, il est possible de s'en sortir. J'essaye toujours de trouver un aspect positif dans le négatif. C'est pour ça qu'à la fin du vidéo, tu me vois fièrement debout sur le toit de ma voiture accidentée.

Setiz Taheri

C'est quoi le message qu'on devrait retenir de ce vidéoclip?
S'il vous arrive quelque chose de mauvais, essayez de rebondir le plus vite possible. Il faut continuer d'avancer. Tout est une question de perception, c'est à toi de donner l'importance que tu souhaites à l'expérience que tu viens de vivre. Tu vois, cet accident ne m'a pas traumatisé; par contre, ça a vraiment affecté mon père. C'est pour ça qu'au début de la chanson tu peux entendre sa voix. Ça rappelle les conseils des parents qui disent à leurs enfants de ne pas fumer, boire et conduire. C'est un petit clin d'œil à toutes ces phrases qu'on a tous déjà entendues.

Maintenant que ton album est sorti, qu'est-ce que tu fais pour continuer à le faire vivre ?

Je sors des vidéos et je fais des interviews, j'essaye de faire tout ce que je peux pour qu'il soit écouté par le plus grand nombre. À part ça, je continue bien évidemment à faire de la musique. Je fais des featurings qui pourront peut-être lui redonner indirectement de l'attention. C'est ça, la beauté d'internet : il y a tellement de musique disponible que ton projet peut devenir populaire bien après sa sortie. Ce qui me plaît avec mon album, c'est que, selon moi, il est intemporel. Il pourrait s'écouter dans cinq ans comme il y a cinq ans. J'ai grandi sur des classiques et j'ai essayé d'en faire un. En général, les tendances sont faites pour disparaître et c'est la vraie bonne musique qui reste.