Elles deviennent quoi, The Donnas ?

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Elles deviennent quoi, The Donnas ?

10 ans après la sortie de leur dernier album, on a retrouvé Brett Anderson pour discuter punk rock et années college.

C'est grâce à mon attrait pour les comédies romantiques lycéennes des années 90 et 2000 que j'ai découvert The Donnas (merci aussi au passage à Dix bonnes raisons de te larguer pour Letters To Cleo). Plus précisément, la fausse romance entre Adrian Grenier et Melissa Joan Hart dansDrive Me Crazy, et en particulier cette scène où le couple était planté devant un concert des Electrocutes—la projet parallèle des membres des Donnas. Coincées dans leurs tops 90's à paillettes, les quatre filles donnaient une performance à des années-lumière de ce que l'on avait l'habitude de voir dans ce type de film.

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Nous étions en 1999, et les Donnas avaient déjà sorti 3 albums en 3 ans. The Donnas, c'était une alliance de 4 jeunes meufs badass dont l'esthétique était un mix parfait des Ramones et de Runaways, avec des paroles passionnément et imperturbablement insolentes, me faisant découvrir des termes argotiques pour désigner la fumette (« Everybody's Smoking Cheeba ») ou le plan pour tuer un crush dans l'oeuf (« Get Rid Of That Girl »). Surtout connues pour leur cinquième album Spend the Night (et son tube « Take It Off »), période charnière où elles quittèrent Lookout! Records pour la major Atlantic (ouuuh !), le premier disque des Donnas, bourré de mélodies lo-fi et d'hymnes à trois accords, mêlait rébellion adolescente et grognements punk sans jamais excéder les 3 minutes. Ce disque fête ses 20 ans et comme nous fêtons tout et tout le monde, on a voulu prendre des nouvelles de la meneuse du groupe, Brett Anderson (oui, comme le chanteur de Suede), qui avait disparu de la circulation depuis le dernier album du groupe (Bitchin' en 2007) et leur ultime concert en 2012. Aujourd'hui, Brett va à la fac (!), bosse sur sa musique et a monté un nouveau projet (The Stripminers). Elle nous a raconté tout ça.

Noisey : D'où vient le nom de votre groupe, The Donnas ?
Brett Anderson : À la base, ça vient d'une parodie du logo McDonald's. Classique. En fait, on a commencé en 1993, quand on était au collège. On était dans deux groupes en même temps : Electrocutes et The Donnas.

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Attends, Electrocutes existait vraiment ? Ce n'était pas un coup monté du réalisateur de Drive Me Crazy ?
Non ! John Schultz a juste utilisé notre autre nom. Il était fan de notre groupe et nous avait demandé : « ce ne serait pas cool si on prenait les Electrocutes plutôt que les Donnas ? » On a sorti un disque sous le nom Electrocutes, Steal Your Lunch Money. Quand on a sorti l'album noir et blanc des Donnas, on avait encore les Electrocutes à côté. The Donnas jouaient un punk rock style Ramones alors que Electrocutes étaient plus thrashy. On était à fond dans Sonic Youth. En fait, Electrocutes était notre vrai groupe et The Donnas était notre side-project. Les gens ont commencé à vraiment aimé les Donnas, donc on a fini par fusionner les deux groupes. American Teenage Rock 'n' Roll Machine représente vraiment ce mélange des deux. Je crois que notre musique a vraiment changé à partir de ce disque.

Tu signais toutes les compos, ou chacune y mettait du sien ?
C'était clairement collaboratif. On écrivait toujours dans une optique de groupe. On se surnommait la « génération fun ». Dès que j'écrivais un texte, j'essayais de me focaliser sur un truc qui nous représentait toutes les quatre. Quand une autre écrivait, j'essayais toujours d'être vraiment ouverte pour représenter au mieux l'identité du groupe.

Vous écoutiez quoi à l'époque de votre premier album ?
L'influence de ce LP, c'était les Ramones. Pour Electrocutes, c'était Free Kitten, tous les trucs Riot grrrl, Bikini Kill, Bratmobile, L7, Sonic Youth, mais aussi Faith No More, Metallica, KISS, Poison, Mötley Crüe et David Lee Roth. On était branchées sur tout.

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Quels étaient vos morceaux préférés sur ce premier album, ceux que vous adoriez jouer ?
À cette période, on écrivait avec le producteur Darin Raffaelli. Ce disque me paraît tellement vieux aujourd'hui. J'adore les vieilleries. « Let's Rab » et « Let's Go Mano » étaient des chansons qu'on avait écrites avec Darin. « Rab » est un mot qu'un pote de l'école disait tout le temps, donc on l'a utilisé pour ce titre. « Mano » était également un mot d'argot inventé. « Last Chance Dance » était intéressant parce que dans l'intro de la chanson, on peut entendre notre prof de géométrie de 4ème faisant une annonce. Je ne me rappelle pas si on a écrit ce morceau en lien avec la danse ou si c'était juste une coïncidence. Je me souviens juste d'Allison lui demandant si on pouvait utiliser sa voix pour notre morceau. « Huff All Night » était une de mes chansons favorites. Elle était vraiment marrante à jouer, et elle a été marrante à écrire. C'était la première fois où j'ai réfléchi à la manière dont la mélodie et le refrain pouvaient coller ensemble.

Vous avez décollé dès ce premier disque, ou c'est venu ensuite, avec Spend the Night ?
Ce premier disque reste encore obscur pour moi. J'avais l'impression que personne ne nous connaissait encore.

Cette signature chez Atlantic en 2002, elle a changé vos vies ?
C'était fou. On m'a raconté l'histoire vue de l'extérieur, et il y a un truc que je n'avais pas réalisé, mais on avait une tournée de prévue quand les attentats du 11 septembre ont eu lieu. C'est arrivé un lundi et notre premier concert était le vendredi suivant, à LA. Toute la tournée était bookée, mais nos parents ne voulaient pas qu'on parte. Il fallait pourtant qu'on le fasse - c'était très important pour nous. Quand on est arrivés à New York, notre concert à Irving Plaza était complet, un mois après les attentats. Tous les gens des labels étaient là. C'était le premier soir où les gens sortaient vraiment à nouveau, ils étaient restés cloîtrés chez eux pendant des jours. Le timing était bizarre, le pays était en deuil, on était à la fois effrayées et énervées, et en même temps notre groupe se portait mieux que jamais. La situation était compliquée. Je me rappelle aussi à quel point ce concert était bon, malgré tout ce qu'il se passait autour de nous. On se disait, « s'il y a bien un truc que l'on sait faire, c'est se la donner sur scène. »

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Tu es toujours en contact avec les filles du groupe ?
Ouais ! Je suis en ce moment même en train d'envoyer un texto à Maya.

Vous avez joué ensemble récemment ? C'est prévu ?
Non, ça fait un moment, les gens nous le demandent souvent. On a quasiment joué le quota de concerts de toute une vie à nos débuts, donc bon.

Tu fais quoi aujourd'hui ?
Je suis à Stanford, je termine une licence, c'est un peu fou. Sur notre premier disque, on avait une chanson qui s'appelait « I Don't Wanna Go To School ». C'est amusant d'observer ce retournement de situation. Je me souviens très bien de ce que je racontais en tournée, « la fac c'est de la merde. Tu t'endettes pour rien et à ta sortie, tu ne peux même pas avoir de boulot », etc. Alors qu'aujourd'hui, je vais à la fac et j'étudie la psychologie. En fait, j'avais débuté ce cursus à l'université de Berkeley en 1997. On pensait que la tournée allait être un bide, et on s'était toutes inscrites pour un semestre, au cas où. Evidemment, je ne l'ai jamais terminé.

Quels changements importants as-tu observé dans l'industrie musicale de ces 20 dernières années ?
Le premier truc majeur a été Napster, et ça a été un désastre parce que les maisons de disque l'ont vu arriver et n'ont rien fait pour s'adapter. Ils auraient pu et auraient dû faire les choses différemment. C'est facile à dire parce que je ne suis pas un patron de label, soit, mais on était impliqués dans ce business et nous, on l'a vu venir. Genre, tu ne peux pas arrêter l'Amérique toute entière. Il va falloir être intelligent là-dessus. Ce qu'on a fini par faire, à contrecoeur, ça a été de transformer notre réel « produit » (le disque) en un simple outil marketing. On donnait nos disques pour faire la promo de notre groupe, et se concentrer sur notre nouveau « produit » : nos concerts et notre merch.

De ton point de vue, tu crois que le milieu est aujourd'hui pire que lorsque tu as commencé ?
On était complètement incapables de vivre de ce qu'on faisait. On a dû générer des revenus indirects avec toutes les choses autour. Donc c'était difficile et décourageant, et puis la crise a eu lieu. C'est comme si l'industrie musicale avait connu sa propre crise, et qu'ensuite le pays avait eu la sienne; la double peine. Je n'ai jamais imaginé que l'argent allait revenir dans l'industrie musicale. C'était à sens unique. Maintenant, quand j'y réfléchis, je me demande comment font les nouveaux groupe pour s'en sortir aujourd'hui.

Quel conseil tu donnerais à la Brett Anderson d'il y a 20 ans ?
Je lui dirais de ne pas se préoccuper autant du futur, et qu'elle récoltera plus tard les fruits de ce qu'elle fait au présent, tout ça n'est pas si important. A l'époque, je pensais que toutes les décisions que je prenais étaient pour la vie, mais ce n'est pas aussi grave et définitif que ça. Je me forcerais à aller au bal de fin d'année, j'avais séché parce que je trouvais ça stupide, une formalité débile. Je me serai au moins souvenu de ce que j'avais fait de ce soir-là, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

_Ilana Kaplan est sur [Twitter. ](https://twitter.com/lanikaps)_