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Le Prince Ali nous explique comment il prévoit de changer la FIFA de l'intérieur

Le Prince Ali de Jordanie était le seul candidat à affronter Sepp Blatter lors de la précédente élection. Il nous parle de réforme, d'inclusion et du futur de la FIFA.
EPA

L'élection du nouveau président de la FIFA approche à grands pas et le Prince Ali Al Hussein de Jordanie, le seul candidat à avoir affronté Sepp Blatter dans une élection, l'an dernier, a fait passer un nouveau palier à sa campagne.

Cinq candidats sont encore en course et personne ne se détache encore réellement. Le Prince Ali a promis de nettoyer la FIFA de l'intérieur s'il gagnait et de concentrer les efforts de l'organisation vers le sport en lui-même.

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Ses principaux rivaux sont le secrétaire général de l'UEFA Gianni Infantino et le Cheikh Salman ben Ibrahim Al-Khalifa, le président de la Confédération asiatique de football (AFC). Ce dernier a été critiqué par des ONG humanitaires pour son inaction durant le printemps arabe dans son pays (le Bahreïn), où des footballeurs ont été emprisonnés et torturés.

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Les autres candidats sont l'ancien secrétaire général de la FIFA Jérôme Champagne et Tokyo Sexwale, un riche entrepreneur sud-africain et ancien ministre.

Plus tôt dans la semaine, le Prince a critiqué l'intégrité de la FIFA, mettant notamment l'accent sur le fait que le chef du comité électoral, Domenico Scala, qui est aussi membre du comité d'audit et de conformité, partage la même nationalité que l'un des candidats, Infantino.

Lors d'une conférence de presse, il y a une semaine à Genève, le Prince Ali a étendu ses critiques au cheikh Salman, accusé de ne pas avoir protégé les joueurs de son pays lors des manifestations pro-démocratiques. Salman a répondu en indiquant qu'il n'avait joué aucun rôle dans le gouvernement du Bahreïn ou dans l'emprisonnement et la torture d'individus.

VICE Sports s'était entretenu avec le Prince Ali après la conférence. Il a abordé les événements de l'année passée, sa campagne, et ses promesses. Depuis, il a saisi le Tribunal arbitral du sport, mardi, pour demander un report de l'élection. En vain.

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VICE Sports: Quand on voit les changements que propose le comité de réforme de la FIFA, on se demande si le timing est vraiment le bon pour cette élection. Est-ce que ces réformes n'auraient pas dues êtres adoptées avant l'élection ?
Prince Ali: Je pense qu'on a déjà gâché beaucoup de temps et qu'il est important de redémarrer les choses. Il y a eu beaucoup de blocages et si vous regardez en profondeur l'état des fédérations, elles sont en train de souffrir, parce que plus rien ne bouge, les programmes de développement n'arrivent plus, et le monde a besoin de redémarrer. Donc, je pense qu'il faut qu'on ait cette élection au plus vite.

Sur le fait qu'elle ait pu être menée différemment, d'accord, il y a plein de problèmes de ce point de vue-là. Je suis pour la réforme et pour les propositions qui ont été faites (par le comité de réforme, ndlr). Ils ne sont pas allés assez loin, mais le fait qu'ils vont les mettre en œuvre avant l'élection d'un nouveau président est en effet un peu étrange. Mais c'est comme ça.

VICE Sports: Après les nombreuses élections où Sepp Blatter n'avait presque personne en face de lui, est-ce qu'on devrait s'inquiéter qu'il y ait autant de monde qui veuille le remplacer ?
Prince Ali: J'étais le seul candidat face à Sepp Blatter lors de la dernière élection. J'ai eu la même posture jusqu'ici. Je ne suis pas comme les autres candidats qui étaient des soutiens du président Blatter par le passé et qui se sont soudainement transformés en réformateurs. Je suis cohérent et je pense que c'est ce que veut le monde, et en particulier les fédérations.

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VICE Sports: Où sont passés les soutiens que vous aviez l'an dernier ?
Prince Ali: Mes soutiens venaient de partout dans le monde. Et c'est la meme chose aujourd'hui. Je suis le seul candidat qui soit président d'une fédération, et celle d'un pays en voie de développement en plus. J'ai été élu pendant 4 ans au comité exécutif de la FIFA et j'ai choisi de quitter le comité exécutif parce que je n'aimais pas comment se passaient les choses là-bas. J'ai réalisé, en tant qu'amoureux de ce sport, que la seule chose à faire pour changer les choses était de monter au créneau et d'aller chercher la présidence. C'est pour cela que je l'ai fait l'an passé, et c'est pour cela que je le fais maintenant.

Photo via EPA.

VICE Sports : Quelle était votre relation avec le Cheikh Salman lorsqu'il a décidé de se présenter ?
Prince Ali : C'est le président de la confédération asiatique. Il a annoncé son soutien au président de l'UEFA Michel Platini, et, après les événements malheureux qui sont arrivés à Platini, il a décidé de se présenter. Je ne peux pas parler pour lui mais on en est là aujourd'hui, et c'est la démocratie.

VICE Sports: Certains observateurs estiment que le Cheikh Salman va avoir besoin de votre soutien pour gagner. Si vous n'arrivez pas au second tour, est-ce que vous allez le soutenir ?
Prince Ali : Je suis un candidat qui ne fait pas dans les arrangements. Je pense que c'est d'une importance cruciale et je ne presse pas les gens à faire telle ou telle chose. Chaque fédération décidera pour elle-même.

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VICE Sports : Sepp Blatter a laissé le sujet des femmes dans le football sur la touche. Quelle est votre position sur le sujet, dans quelle direction voyez-vous ce dossier aller dans le futur, que vous gagniez ou non ?
Prince Ali : C'est le principal chantier de développement dans le football. Mais il y a beaucoup de choses à améliorer avant de pouvoir développer le football féminin. On doit dans un premier temps avoir un programme séparé pour le développement du football féminin. Parce que parfois, dans les fédérations, surtout quand elles sont en difficulté financière, les gens pensent que si vous soutenez le football féminin, cela enlève de l'argent au football masculin. Je pense qu'il devrait donc y avoir une séparation claire.

Pour ce qui est de la FIFA, je pense qu'il doit y avoir plus de de femmes représentées. Si vous regardez les grandes multinationales ou les organismes à travers le monde, les femmes représentent au moins 30% des effectifs. Si vous regardez la présence des femmes dans le football, on n'y est pas encore vraiment.

J'ai travaillé avec des collègues, notamment l'Australienne Moya Dodd (membre du comité exécutif de la FIFA et ancienne joueuse, ndlr) et l'Américaine Mary Harvey (ancienne gardienne internationale, ndlr), qui ne sont pas que d'anciennes joueuses, mais qui ont aussi des diplômes universitaires, des maîtrises en administration des affaires ou sont des avocates. Il y a donc beaucoup de potentiel de ce côté-là. Je vois aussi, par exemple, qu'au sein même de la FIFA, il y a des disparités entre les salaires des hommes et des femmes, pour des postes équivalents. Il y a beaucoup de problèmes à régler sur la question des femmes dans le football. Et je suis un grand promoteur du football féminin.

VICE Sports : Vous avez récemment critiqué la décision de la FIFA qui a choisi de couper ses subventions à la CONCACAF et la CONMEBOL, après les nombreuses accusations de corruption de leurs dirigeants. Quelle est votre solution pour un changement effectif dans ces confédérations ?
Prince Ali : Je veux être clair sur ce problème. Il y a bien évidemment eu plein de problèmes de corruption au sein de la CONCACAF et de la CONMEBOL. Mais récemment, il y a eu une nouvelle élection à la CONMEBOL et ils ont donc un nouveau président de confédération. Il a montré ses idées, la direction qu'il veut prendre, qui est très similaire à celle que je veux avoir pour la FIFA.

A la CONCACAF, ils travaillent aussi pour changer les choses. Mais l'idée de punition collective, surtout pour des fédérations qui n'ont rien à voir avec ce qui s'est passé - parce que le vrai problème, ce sont les confédérations et la manière dont elles étaient gérées - je trouve que c'est vraiment honteux. C'est aussi suspect de voir que ces choses-là sortent quelques semaines avant les élections. S'ils avaient voulu geler leurs aides aux confédérations, ils l'auraient fait dès que les problèmes ont été soulevés, pas au moment des élections. Je ne sais pas si c'était prévu comme ça ou pas, mais ce que je sais, c'est que c'est Domenico Scala, le président du comité électoral et le président de la commission d'audit et de conformité de la FIFA qui est à l'origine de cela. C'est un timing vraiment très étrange.

Mais si je suis élu, je n'autoriserais pas le fait qu'on stoppe le développement du football à cause des actions de quelques individus. C'est injuste.