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Music

Cher Mark Bell, rassure-toi je vais être bref

Parce qu'il y a des choses pour lesquelles les anecdotes et les souvenirs ne suffisent pas.

Cher Mark, Au départ je pensais t'adresser une très longue lettre, dans laquelle je serais revenu sur tout un tas de souvenirs de soirées déliquescentes dans les sous-bois de l'Est de la France et de cassettes de mixes enregistrés au vol sur Kiss FM ramenées de Londres par les grands frères du quartier qui avaient eu la chance de toper une bourse pour aller ruiner leurs Air Command Force sur les parquets du Milk Bar ou du Heaven. J'ai passé une partie de la soirée d'hier à essayer de l'écrire, quelques heures après que ton décès ait été confirmé par Black Dog, puis par Warp, ce qui ne laissait malheureusement plus aucune chance pour que ce soit juste une rumeur déformée ou un funeste malentendu (perso, je l'ai appris par Jean Nipon. Je ne sais pas si tu as eu la chance de le rencontrer. Tu aurais dû). Et au fur et à mesure que j'avançais et que je vérifiais certains détails sur les pochettes de tes disques ou dans les pages des vieux numéros du NME et du Melody Maker que j'ai conservés, je me suis rendu compte que quelque chose clochait. Si j'avais pu écrire assez facilement une lettre à Lou Reed l'an dernier, c'est parce qu'il n'avait pas vraiment compté pour moi. C'est juste qu'il se trouvait là, dans un coin, à chaque fois, à des moments importants. Là, c'était complètement l'inverse. Ta musique, elle n'a jamais marqué d'évènements vraiment importants dans ma vie. Mais elle a toujours compté, sans faiblir, au long des années. Frequencies, je n'ai jamais cessé de l'écouter. Pareil pour le premier maxi, pareil pour à peu près tout le reste (enfin, peut être pas ce remix des Bridewell Taxis, faut pas déconner non plus). J'ai eu la chance d'acheter quasiment tous ces disques au moment de leur sortie, mais ce qui fait vraiment leur force c'est que pas une seule fois il ne m'ont ramené à ces moments précis où je les ai découverts. J'ai très peu de souvenirs qui y sont rattachés (alors que j'en ai des tonnes liés à des disques de Nirvana ou de The Orb que je suis totalement incapable de réécouter aujourd'hui). Ces disques, si je les ai écoutés aussi régulièrement, c'est tout simplement parce qu'ils ont réussi à rester là, dans l'air, comme une idée, comme quelque chose qui échappe à toute forme de contrôle. « Comment expliquer ce qui se passe dans le coffre pendant ces brusques poussées de déflagration qui règlent les battements de vos artères sur les pulsations secrètes du monde ? », disait Louis Calaferte. Moi, la question, ça fait un moment que je ne veux plus me la poser. Ça me va très bien comme ça. Alors, je me contenterai juste de te remercier, Mark. Pour tout. À commencer par ces cinq là.

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Cher Mark,

Au départ je pensais t'adresser une très longue lettre, dans laquelle je serais revenu sur tout un tas de souvenirs de soirées déliquescentes dans les sous-bois de l'Est de la France et de cassettes de mixes enregistrés au vol sur Kiss FM ramenées de Londres par les grands frères du quartier qui avaient eu la chance de toper une bourse pour aller ruiner leurs Air Command Force sur les parquets du Milk Bar ou du Heaven.

J'ai passé une partie de la soirée d'hier à essayer de l'écrire, quelques heures après que ton décès ait été confirmé par Black Dog, puis par Warp, ce qui ne laissait malheureusement plus aucune chance pour que ce soit juste une rumeur déformée ou un funeste malentendu (perso, je l'ai appris par Jean Nipon. Je ne sais pas si tu as eu la chance de le rencontrer. Tu aurais dû). Et au fur et à mesure que j'avançais et que je vérifiais certains détails sur les pochettes de tes disques ou dans les pages des vieux numéros du NME et du Melody Maker que j'ai conservés, je me suis rendu compte que quelque chose clochait.

Si j'avais pu écrire assez facilement une lettre à Lou Reed l'an dernier, c'est parce qu'il n'avait pas vraiment compté pour moi. C'est juste qu'il se trouvait là, dans un coin, à chaque fois, à des moments importants. Là, c'était complètement l'inverse. Ta musique, elle n'a jamais marqué d'évènements vraiment importants dans ma vie. Mais elle a toujours compté, sans faiblir, au long des années. Frequencies, je n'ai jamais cessé de l'écouter. Pareil pour le premier maxi, pareil pour à peu près tout le reste (enfin, peut être pas ce remix des Bridewell Taxis, faut pas déconner non plus).

J'ai eu la chance d'acheter quasiment tous ces disques au moment de leur sortie, mais ce qui fait vraiment leur force c'est que pas une seule fois il ne m'ont ramené à ces moments précis où je les ai découverts. J'ai très peu de souvenirs qui y sont rattachés (alors que j'en ai des tonnes liés à des disques de Nirvana ou de The Orb que je suis totalement incapable de réécouter aujourd'hui). Ces disques, si je les ai écoutés aussi régulièrement, c'est tout simplement parce qu'ils ont réussi à rester là, dans l'air, comme une idée, comme quelque chose qui échappe à toute forme de contrôle.

« Comment expliquer ce qui se passe dans le coffre pendant ces brusques poussées de déflagration qui règlent les battements de vos artères sur les pulsations secrètes du monde ? », disait Louis Calaferte. Moi, la question, ça fait un moment que je ne veux plus me la poser. Ça me va très bien comme ça. Alors, je me contenterai juste de te remercier, Mark. Pour tout. À commencer par ces cinq là.








Mark Bell est décédé en fin de semaine dernière, suites à des complications post-opératoires. Il avait 43 ans.

Lelo Jimmy Batista est le rédacteur en chef de Noisey France. Il a interdit les hommages à chaud et les articles nécrologiques sur le site. Sauf cas exceptionnel. Celui-ci en était un. Il est sur Twitter - @lelojbatista

Mark Bell est décédé en fin de semaine dernière, suites à des complications post-opératoires. Il avait 43 ans.

Lelo Jimmy Batista est le rédacteur en chef de Noisey France. Il a interdit les hommages à chaud et les articles nécrologiques sur le site. Sauf cas exceptionnel. Celui-ci en était un. Il est sur Twitter - @lelojbatista