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Music

Pow ! : Murder Dog revient vous donner l'heure

Une anthologie du meilleur magazine rap des années 90 va être éditée au printemps.

Tous les fans de gangsta rap des sous-sols, du Midwest au Val-de-Marne, vont pouvoir lever les bras en l'air : le magazine Murder Dog fait son retour sous forme de livre, une rétrospective intitulée Murder Dog: The Covers, Volume 1 qui sera dispo ce printemps.

Cette revue principalement connue pour ses photos en gros plan et ses articles ultra-fouillés, a été créée par un personnage nébuleux, connu sous le nom de Black Dog Bone. Né au Sri Lanka, il a grandi au nord du pays, dans la jungle, quasiment seul, avant de partir travailler à Dubaï, sans passeport, à l’époque où la ville n'était encore qu'un désert, avant d'émigrer aux Pays-Bas — grâce à des potes étudiants hollandais rencontrés à Dubai — pour rejoindre une jeune américaine rencontrée plus tôt. Un vrai self-man made du DIY qui n’a jamais lâché le morceau, comme il le racontait récemment dans une interview pour la RedBull Music Academy.

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L’idée du magazine lui est venue alors qu’il était étudiant à l’école d’art de San Francisco au début des années 90. Après avoir fini ses études, Black Dog Bone a gardée le projet de mag dans un coin de sa tête et a bougé à Vallejo, le terrain de jeu des légendes du rap de la Bay Area, E-40 et Mac Dre. En plus d’avoir soutenu ces deux artistes, Murder Dog a supporté dès leurs débuts des rappeurs comme Lil Wayne, 50 Cent, Outkast, Young Jeezy ou Rick Ross en leur consacrant la une du magazine bien avant qu’ils ne deviennent les superstars qu’on connait aujourd’hui.

« A l’époque où j’ai créé Strange avec Travis O’Guin, c’était difficile d’être exposé dans la presse pour des gars underground comme moi » raconte Tech N9ne à propos de son label, qui cartonne aujourd’hui. « Il n’y avait aucun magazine qui mettait en avant la scène rap du Midwest ou la scène underground dans son ensemble. Black Dog Bone et les types de Murder Dog sont devenus cette exception. Grâce à eux, j’ai pu faire une douzaine de couverture. J’avais le soutien des rues, des prisons et même de l’étranger. Partout où il y avait des cités, les gens pouvaient lire des trucs sur Tech N9ne dans Murder Dog »

Contrairement à The Source, le magazine rap le plus important de l’époque, Murder Dog n’a jamais fait dans les strass et les paillettes, et n’a jamais fait abstraction de rien. Les rappeurs posaient sur la couverture avec des guns ou en montrant les signes de leur gang. Quand on ouvrait le magazine, en plus des articles sur le rap, on trouvait aussi des trucs sur la musique tribale ou encore les révolutions sociales. Les histoires étaient bien souvent crues et jamais censurées. Des articles si longs qu’ils faisaient passer les papiers du New-Yorker pour des news Konbini.

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Le magazine a toujours été authentique. Comme les valeurs qu’a défendues le mystérieux Black Dog Bone lors de son long et tortueux parcours. Enfin un magazine qui parlait de rap et qui venait du rap. Comme BDB le dit dans l'interview, « Je n’avais pas d’argent, je ne connaissais rien à la presse, je ne savais même pas comment faire un magazine (…) Rien que pour l'impression c’était 2 000 dollars, alors j’ai fait un chèque. Je n’avais que 25 dollars sur mon compte… Voilà comment Murder Dog est né. Grâce à un chèque en bois. »

Comme le dit Matt Sonzala, l’un des principaux contributeurs du mag pendant plusieurs années, « le but du premier numéro était de parler de ceux dont on ne parlait pas. Point. »

Blag Dog confirme : « J’ai traité le rap africain, sri lankais, anglais et même celui du moyen-orient. J’ai interviewé des shamans pour Murder Dog. J’ai interviewé le nutritionniste David Wolfe. Je suis pour la nourriture bio et le bien-être. Je cours tous les jours et je suis végétarien. Ça fait des années que je n’ai pas mangé de viande ou de poisson. J’aime tout ce qui est sain. Je mange tout cru. Je suis extrême sur certains trucs. Murder Dog était un mag extrême. »

Son passage chez Redbull a mis la puce à l’oreille de Paul Stewart, éditeur chez Over The Edge Of Books et vétéran de l’industrie musicale. Il a joué un rôle déterminant dans le lancement des carrières de différents artistes comme The Pharcyde, House of Pain et Warren G. Sa maison d’édition a comme slogan « Not Your momma’s book company » et a sorti pas mal d'ouvrages assez radicaux ces dernières années. Il vient de conclure un contrat avec Black Dog Bone pour publier deux livres Murder Dog et l’a aussi aidé à choisir les couvertures. Le second volume se penchera plus sur le contenu du magazine, une vraie mine d’or du rap underground.

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« Mon souvenir préféré c’est quand j’ai dû aller à Honolulu pour interviewer des rappeurs hawaïens » raconte Sonzala, collaborateur de Murder Dog. « C’était dingue d’entendre toutes leurs histoires et d'avoir leurs avis. Ils étaient comme tous les mecs investis dans le rap, mais ils avaient un tel respect de la nature que ça m'a marqué. »

« Aller à Minneapolis pour faire une série d’interviews, ça aussi c’était dingue. Je me baladais d’un quartier de Blood à un quartier de Crips. J’allais de l’un à l’autre avec des membres du clan opposé. Tout le monde se checkait, était uni et excité à l’idée de faire parler de leur musique et de leur ville. C’était monumental. Pendant les trois ou quatre jours que j’ai passés là bas, j’ai entendu une vingtaine de fois les gens dire que la sortie de Murder Dog donnait envie aux gens de rester unis. Une chose qu’ils n’auraient jamais fait avant. On a rien arrêté et on a provoqué aucun changement au niveau des majors mais on a aidé certaines personnes à prendre du temps pour réfléchir à ce qu’ils faisaient ou à ce qu’ils étaient vraiment. Et ça, c’est vraiment gratifiant. »

« J’ai voyagé partout dans le monde et j’ai rencontré des personnes incroyables, c’est ce que j’appréciais le plus dans Murder Dog. De Greenwood à la Caroline du Nord en passant par Pittsburgh, Dallas, Gary, l’Indiana ou encore Honolulu, j’ai rencontré tellement de gens d’une indépendance d’esprit incroyable. A travers le rap et surtout à travers Murder Dog, j'ai pu pénétrer tellement d’univers inconnus. Et certains de ces types sont devenus des amis. »

Murder Dog continue de paraître en ligne alors que Black Dog Bone aspire à de nouvelles choses. Il vit actuellement dans l’est africain où il enquête sur la scène rap pour un futur livre.

« Ici c'est un rap très street et hardcore, très ghetto, mais aussi très conscient et politique. Ce n’est pas du gangsta rap ou du rap bling-bling. C’est à la fois un rap tribal et africain. Les rappeurs chantent leurs textes dans la langue tribale qui leur est propre. C’est un mouvement qui grossit sans cesse. Je suis très excité d’assister à tout ce qui se passe en temps réel. » Tamara Palmer est sur Twitter.