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Music

Range Tes Disques : Anthrax

On a demandé à Charlie Benante de classer les disques de son groupe, du moins bon au meilleur.

Range Tes Disques est une rubrique dans laquelle nous demandons à un groupe ou un artiste de classer ses disques par ordre de préférence. Après Korn, Slipknot, Lagwagon, Hot Chip, Manic Street Preachers, Primus, Burning Heads, le label Fat Wreck Chords, New Order, Ride, Jean Michel Jarre, Blur, Mogwai et Ugly Kid Joe, nous avons demandé à Charlie Benante, le batteur d'Anthrax, de classer les disques de son groupe, de celui qu'il trouve le moins bon, à celui qu'il considère comme le meilleur. Nous avons volontairement écarté les EPs et les compilations pour nous concentrer sur les 10 albums du groupe.

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10. Fistful Of Metal (1984)

Noisey : Pourquoi celui-ci en dernier ?

Charlie Benante : Parce que je trouve qu'il ne sonne pas comme du Anthrax. La moitié des titres ont d'ailleurs été écrits avant que j'arrive dans le groupe. Des morceaux comme « Deathrider » ou « Metal Thrashing Mad » ont été composés bien plus tard. Ce qui signifie qu'avant même qu'il ne sorte, ce disque était déjà en partie daté. On joue toujours « Deathrider » sur scène, ceci dit. Et on a fait un concert à L.A. il y a quelques mois, pour la fermeture de la House of Blues, durant lequel on a joué « Across The River », qui est extrait de cet album.

Mais il s'est passé tellement de choses avec ce disque… Neil [Turbin, premier chanteur du groupe] était au chant, Neil a viré Danny [Dan Lilker, bassiste originel du groupe, futur Brutal Truth et Nuclear Assault], après quoi Neil s'est fait virer. Les pièces du puzzle n'étaient pas tout à fait en place, si tu vois ce que je veux dire. Il a fallu pas mal d'ajustements pour qu'on commence à se sentir réellement à l'aise. Pour moi, ce n'est qu'au moment de l'arrivée de Joey [Belladonna] au chant qu'Anthrax a vraiment pris forme.

9. Stomp 442 (1995)

Là encore, une période bizarre, qui durera quelques années et s'étendra jusqu'à l'album suivant, que j'évoquerai juste après. À l'époque, on était signés sur Elektra. C'était le deuxième album qu'on faisait chez eux, après Sound of White Noise, qui avait très bien marché. Sur la fin de la promo de Sound of White Noise, il y a eu de gros remaniements chez Elektra. En gros, le staff qui nous avait signé s'est fait dégager et ils ont embauché un tas de nouvelles recrues qui n'avaient qu'un objectif : se débarrasser des groupes dont ils avaient hérité en rejoignant le label. Et on faisait partie de ces groupes. Sauf qu'ils ne pouvaient rien contre nous : notre contrat stipulait qu'Elektra devait encore sortir un album d'Anthrax. Du coup, on a fait ce disque en sachant pertinemment que derrière, personne ne le soutiendrait. C'était une sale période et je n'en garde pas de très bons souvenirs. Mis à part le fait que [Dimebag] Darrell ait participé à ce disque. Ça, c'était vraiment cool.

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C'est aussi le seul de vos disques où votre logo n'apparaît pas.
C'était une idée du label et on a été assez stupides pour les écouter. Mais il faut se souvenir que le milieu des années 90 était une période compliquée. Le metal n'était plus vu du même oeil qu'en 1989 ou 1990. On était en pleine période post-grunge, le terme « alternatif » était utilisé à toutes les sauces. Du coup le label nous a dit : « Ce n'est peut être pas une bonne idée d'utiliser ce logo ». Et on s'est dit : ok, tentons le coup. C'était vraiment une période difficile.

8. Volume 8: The Threat Is Real (1998)

D'excellents souvenirs, mais, là encore, énormément de problèmes avec notre label. On était toujours en pleine période alternative et personne ne savait quoi faire des groupes metal. On s'est retrouvés sur Ignition et la semaine où le disque est sorti - je me demande si ce n'était pas carrément le jour où il est sorti - le label a mis la clé sous la porte. Le cauchemar. Mais on adorait ce disque. On s'est donc accrochés. On est allés de l'avant. Aujourd'hui encore, je pense que si cet album avait bénéficié de plus d'exposition, les choses se seraient passées autrement. C'était vraiment dur pour John Bush [troisième chanteur du groupe, qui a succédé à Joey Belladonna, avant de lui laisser la place à nouveau], parce qu'il venait de rejoindre le groupe, que le premier album sur lequel il avait chanté avait bien marché et que celui-ci a été un bide énorme. On a complètement perdu la dynamique qu'il avait réussi à insuffler.

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Vous avez pris pas mal de risques sur ce disque. Des morceaux comme « Bare » ou « Celebrated Summer » sont très différents de ce que vous faites habituellement.
Complètement. On a vraiment fait ce qu'on voulait sur cet album, en l'assumant complètement. Même si on avait toujours l'image d'un groupe metal, on voulait essayer de s'aventurer ailleurs, d'essayer d'autres choses, sans trop se soucier de ce que les gens pouvaient penser. On était dans cet état d'esprit là.

La deuxième moitié des années 90 n'a pas été facile pour les groupes metal.
C'était une période vraiment bizarre.

7. State of Euphoria (1988)

State Of Euphoria a été un disque important pour le groupe, mais j'ai toujours trouvé qu'il avait un côté inachevé. On avait une tournée énorme qui démarrait et on a eu très peu de temps pour l'enregistrer. On l'a vraiment bouclé à l'arrache. J'aurais aimé qu'on prenne un peu plus notre temps, mais on n'a pas vraiment eu le choix. Il y a de très bons morceaux dessus, mais certains sont bâclés.

En un peu moins de 12 mois, vous avez sorti deux albums et un EP. J'imagine que ça a du être stressant.
Oui, les choses allaient trop vite, on était pris dans un tourbillon. Il y avait énormément de pression parce que l'album précédent était génial et qu'on voulait faire encore mieux. Mais il aurait fallu plus de temps pour ça. Ça nous a servi de leçon, en tout cas.

Cela dit, ça reste le disque sur la pochette duquel Mort Drucker [caricaturiste américain célèbre pour son travail dans le magazine MAD] a dessiné vos caricatures, c'est quand même génial ! Comment s'est arrivé ?
J'avais l'idée depuis un moment. J'étais fan de MAD Magazine quand j'étais gamin et j'ai toujours rêvé de faire quelque chose avec lui. Et le fait est qu'il a accepté ! Je pense que ce genre de choses n'arrive pas par hasard et que, lorsqu'elles se produisent, tu ne dois pas hésiter une seconde et saisir l'opportunité. J'ai toujours aimé les pochettes dessinées, comme celle du Draw The Lines d'Aerosmith qui a été réalisée par Al Hirschfeld.

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6. We've Come for You All (2003)

Un gros tournant pour le groupe. On revenait à nos racines purement heavy metal tout en composant des morceaux plus mélodiques. Je considère ce disque comme le point de départ de la seconde vie d'Anthrax. C'est aussi notre dernier disque avec John au chant.

C'était aussi la première fois que vous mettiez autant de temps entre deux sorties.
L'industrie du disque était devenue un bordel pas possible. Et on voulait vraiment prendre le temps de réfléchir à ce qu'on allait faire et avec qui on allait le faire. Une fois qu'on a su ce qu'on voulait, on a enregistré ce que je considère comme un excellent disque de metal moderne.

John est parti de son propre chef ou c'est le groupe qui l'a viré ?
Un peu des deux. Tous les rebondissements et déceptions qu'il a connus avec les disques précédents l'avaient épuisé. Et il a commencé à y avoir des discussions sur un retour possible de Joey. Le contexte était en train de changer.

Ça signifiait quoi pour toi d'avoir Roger Daltrey en invité sur ce disque ?
C'était génial. Je veux dire, putain, le chanteur des Who ! C'est Scott [Ian, guitariste] qui a géré ça avec lui, c'était hyper cool.

5. Sound of White Noise (1993)

Un autre tournant crucial. Quand tu as connu le succès avec un chanteur, comment est-ce que tu le remplaces, comment est-ce que tu fais pour que ça reste aussi bien et que ton public ne soit pas déçu ? Déjà, je trouve que les morceaux sur ce disque sont tous vraiment, vraiment bons. « Only » est un titre fabuleux et c'est le premier qu'on a composé pour ce disque. Avec Sound Of White Noise, on a vraiment retrouvé les sensations de nos débuts, ce sentiment d'invulnérabilité, cette impression que quoiqu'on fasse, ça marchera. Changer de chanteur, c'est extrêmement délicat. Peu de groupes y ont survécu. Mais cette arrogance juvénile qu'on a retrouvé avec l'arrivée de John nous a permis de faire un putain de bon disque. Et c'est ça qui compte. Si tu as de bons morceaux, le reste suivra. Et le fait est que ça a marché du feu de Dieu.

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John était déjà quelqu'un d'« identifié », vu qu'il chantait dans Armored Saint. Tu penses que ça vous a aidés ?
Oui, complètement. Et sa voix collait parfaitement avec nos nouvelles compos. Tout s'est parfaitement imbriqué.

Votre son a pas mal changé sur ce disque. Certains y entendent une influence grunge, par exemple.
On nous l'a souvent fait remarquer et je pense que c'est surtout parce que l'album a été produit par Dave Jerden, qui avait travaillé avec Alice In Chains et Jane's Addiction. C'est lui qui nous a donné ce son.

4. Persistence Of Time (1990)

Après tout le délire qui avait entouré la sortie de State of Euphoria, ce disque était un peu notre retour à la réalité. Le son était plus dur, plus sombre. On commençait à se prendre pas mal de réflexions, les journalistes nous demandaient pourquoi on souriait sur les photos, ce genre de choses. On était en train de devenir une caricature de nous mêmes, avec nos grimaces, nos shorts, etc. On a eu envie d'arrêter tout ce délire et de revenir à quelque chose d'un peu plus sérieux. On réfléchissait pas mal à tout ce truc autour du temps, aussi. Notre premier disque est sorti en 1984 et en l'espace de 6 ans, on a fait plusieurs fois le tour du monde. Et aujourd'hui, avec Internet et les nouvelles technologies, les choses vont encore plus vite. C'est devenu une préoccupation universelle. C'est un disque dans lequel on s'est énormément investis, plus que dans aucun autre album d'Anthrax. On voulait faire un truc solide, massif, cohérent. Et on allait tous dans la même direction, avec le même état d'esprit.

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En même temps, ce retour au sérieux ne vous a pas empêché d'apparaître dans la série Mariés, Deux Enfants !
C'est une des meilleures expériences que j'ai eu avec le groupe. On a passé une semaine à L.A., dans les studios Paramount. Le premier jour, on a fait une lecture de nos textes et on a rencontré toute l'équipe. Cela dit, on connaissait déjà certains d'entre eux vu qu'on avait joué contre Christina [Applegate] dans un match de softball caritatif. C'était tellement génial. Je me souviens que le deuxième ou troisième jour, on a emmené David Faustino, qui jouait Bud Bundy, voir Metallica et il s'est pris une cuite et est arrivé hyper en retard le lendemain. Les producteurs sont venus nous voir dans notre loge et nous ont dit : « Nous aimerions que vous ne sortiez plus Mr Faustino. »

Joey était encore avec vous pour Mariés, Deux Enfants.
Il est parti peu de temps après le tournage. Pour le coup, là, la décision venait du groupe. On s'est laissé du temps pour trouver un nouveau chanteur. On a pas mal réfléchi et on est allés à L.A. pour passer des auditions. C'est comme ça qu'on est tombés sur John.

« Bring The Noise » ne figure pas sur l'album, mais le titre est sorti peu de temps après. C'est un titre très important et emblématique. Ça a complètement cassé les barrières entre rap et metal.
On était plusieurs dans le groupe a être très fans de rap. On l'a fait parce qu'on avait envie de le faire, pas pour des raisons financières ou je ne sais quoi. Les seules expériences du genre avant ça, c'était le truc avec Aerosmith et RUN-DMC et éventuellement notre morceau « I'm The Man ». On n'imaginait pas une seconde l'impact que ça allait avoir. Ça s'est fait très simplement. On connaissait Chuck [D. de Public Enemy], on lui a demandé : « T'en penses quoi ? » et il a répondu « Allons-y ! ». Aujourd'hui ça demanderait des tas d'allers-retours et de discussions entre labels et agents. Mais c'était une époque différente. D'ailleurs, notre tournée avec Public Enemy et les Sisters Of Mercy a eu lieu avant que ce genre de mélange devienne la norme, avec des trucs comme Lollapalooza, etc.

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3. Spreading the Disease (1985)

C'est à partir de cet album que j'ai commencé à m'investir dans l'écriture des morceaux et que Scott s'est mis à écrire les paroles. Pour moi, c'est le premier véritable album d'Anthrax. Tout y est.

Vous avez volontairement fait un disque très différent de Fistful Of Metal ?
Pas vraiment, c'est juste arrivé comme ça. Tu peux déjà sentir cette évolution sur des titres comme « Lone Justice » ou « Aftershock ». Et « Gung-Ho » avait été écrit pendant les sessions de Fistful Of Metal. Le truc marrant, c'est qu'on a enregistré et mixé l'album, après quoi chacun est rentré chez soi. Et en l'écoutant, quelques jours plus tard, je n'étais pas très content du résultat. J'avais l'impression qu'il manquait quelque chose. J'avais ce morceau en chantier, « A.I.R. », que j'ai terminé et dont j'ai envoyé la démo au reste du groupe. Ils l'ont tellement adoré qu'on est immédiatement retourné en studio pour l'enregistrer. C'est devenu le premier titre de l'album et la base de ce qu'on allait faire sur le disque suivant, Among The Living.

C'est l'album avec lequel vous vous êtes fait connaître.
Le groupe commençait à ressembler à quelque chose, c'était notre premier disque sur une major, ça marchait bien pour nous. Mais ça restait compliqué au quotidien. Ce n'était non plus la fête, loin de là.

C'est à cette époque là que toi et Scott avez formé S.O.D. en parallèle.
À la base, c'était juste un side-project débile qu'on avait lancé en studio avec Scott et Frank [Bello, basse] pendant l'enregistrement de l'album. On appelait ça The Disease, c'était juste pour déconner. Et puis Scott a commencé à dessiner ce personnage, qu'il a baptisé Sargent D. Et on voulait continuer à jouer avec Dan Lilker, on était déçus qu'il quitte le groupe. Du coup, on lui a demandé de nous rejoindre. Et ça s'est mis en place tout seul. On a enregistré l'album en un week-end. S.O.D. c'était une façon de faire des choses que vous ne pouviez pas vous permettre avec Anthrax ?
C'était juste pour déconner. Il y avait un côté très satirique, qui n'était pas présent chez Anthrax. Speak English or Die est un disque complètement débile et parfaitement inoffensif mais on ne pourrait plus faire un disque comme ça aujourd'hui. C'était une autre époque, mec. Tu pouvais dire ce que tu voulais, parce que les gens avaient le sens de l'humour, ils ne prenaient pas autant les choses au sérieux. Aujourd'hui, on serait taxés de racistes, sexistes ou misogynes.

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2. Worship Music (2011)

La raison pour laquelle je place celui-ci aussi haut, c'est parce que c'est le disque qui nous a permis de revenir sur le devant de la scène. Tout à coup, les gens se sont dit : « OK, ces mecs ont encore quelque chose à dire. » L'album a très bien marché et il a surtout permis de ressouder le groupe.

Y'a-t-il eu un moment pendant lequel Anthrax a failli s'arrêter ?
Disons qu'il y a eu un moment de flottement. Scott faisait d'autres trucs et on ne se voyait plus beaucoup avec les autres membres du groupe. J'écrivais des nouveaux morceaux, je prenais contact avec tout le monde régulièrement. On n'était pas au mieux de notre forme, mais on s'est accrochés. Et puis Metallica ont été intronisés au Hall of Fame, et Scott et moi avons été invités à la cérémonie. On est allés boire un verre ensemble après et Lars [Ulrich, batteur de Metallica] nous a demandé : « Hey, vous penseriez quoi d'une tournée avec le Big Four [les quatre groupes phares de la scène thrash : Metallica, Slayer, Megadeth et Anthrax] ? » On ne s'attendait pas à ce qu'il nous propose un truc pareil et on lui a répondu que ce serait une idée géniale. C'est ce qui a fait que Scott et moi nous sommes remis au boulot. Et on a plus lâché l'affaire depuis.

Comment était la tournée du Big Four ?
C'était dingue. On s'est tellement amusés. On est juste un peu tristes de ne pas avoir fait plus de concerts ensemble. Mais certaines personnes commençaient à péter les plombs… Si ça n'avait tenu qu'à nous, on aurait continué. D'ailleurs, on continue régulièrement à faire des tournées avec Slayer.

Vous avez eu trois chanteurs durant cette période : Dan Nelson, John Bush et Joey Belladonna.
Oui, mais on savait déjà qu'il n'y en avait qu'un qui était vraiment notre chanteur. Et quand on s'est remis au boulot, c'est lui qu'on a appelé.

1. Among the Living (1987)

Pourquoi celui-ci en premier ?
C'est le disque qui a fait d'Anthrax le groupe qu'il est aujourd'hui. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé en 1986 et 1987 mais on a tous sorti nos meilleurs disques durant cette période-là : Master Of Puppets pour Metallica, Reign In Blood pour Slayer, Peace Sells pour Megadeth et Among The Living pour nous. Je ne sais pas, il y avait peut-être quelque chose dans l'air… Toujours est-il que Among The Living signifie énormément pour nous. Ce disque était juste putain d'invincible.

Pas mal de gens se sont demandé si c'était le prêtre chelou de Poltergeist II sur la pochette.
Ce n'est pas lui à proprement parler, mais il nous a servi de modèle, c'est certain. Ce perso m'avait vraiment marqué. C'est cool que les gens fassent le rapprochement en tout cas, ça veut dire que le côté flippant est toujours là.

Cam Lindsay est sur Twitter.