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Kero Kero Bonito est le seul groupe pop qui méritait d'être écouté en 2016

Oubliez Justin Bieber, Taylor Swift et Justin Timberlake : les meilleurs tubes de l'année ont été signés par un trio-anglo-japonais.

Rien ne semble pouvoir décourager Kero Kero Bonito. Depuis leurs débuts en 2013 sous la houlette de PC Music, Sarah Midori Perry, Gus Lobban et Jamie Bulled bricolent des comptines electro-pop hystériques totalement imparables, qui posent, en filigrane, une question simple et pas si naïve : « Pourquoi Radiohead seraient plus novateurs et géniaux que les B52's ? Aujourd'hui, il faut être triste ou agressif pour être considéré comme un vrai groupe. Si t'es trop joyeux, t'es forcément ironique, t'es juste là pour te marrer. Mais tout ça reste de la culture, et la culture ne devrait pas être toujours aussi sérieuse. » Paf.

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Devenus têtes de gondole de Soundcloud en 2014 avec leur mixtape Intro Bonito et leur single « Flamingo », approuvé par Ryan Hemsworth (« des confections effervescentes qui vacillent entre l'anglais et le japonais avec une astucieuse fluidité »), le mystère autour du groupe a grandi en même temps que sa notoriété — qui se cache derrière KKB ? Ont-ils les épaules pour gérer un tel taux de sucre et de fun ?

Avec la sortie récente de leur premier disque officiel, Bonito Generation, nous avons désormais la réponse. Mais aussi d'autres questions : d'où viennent tous ces maillots de foot ? En quelle année vivent-ils ? Ont-ils des problèmes dans la vie ? On s'est donc posés avec Sarah, Jamie et Gus (alias Kane West) pour discuter de leur univers coloré, de bilinguisme et du paysage pop actuel.

Noisey : Comment est né Kero Kero Bonito ?
Gus : Moi et Jamie sommes potes d'école. On a toujours voulu monter un projet ensemble, avec une chanteuse, alors on a déposé quelques annonces mais on a mis du temps à obtenir ce qu'on cherchait. Puis un pote moitié Japonais nous a recommandé un site qui s'appelle MixB, qui est en fait un forum pour les expats japonais à Londres. Il nous a dit, « bon, habituellement les gens cherchent des apparts ou des leçons d'anglais. Mais je suis sûr que vous allez trouver quelqu'un d'intéressant ! »

Sarah : Je n'avais aucun background musical avant de monter ce groupe. Je me souviens, j'allais sur MixB tous les jours pour voir s'il y avait des trucs intéressants et cette annonce a retenu mon attention. Je me suis dit « pourquoi pas ? » et j'ai répondu. Notre première répète s'est super bien passée, et la suite, vous la connaissez.

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De vos premiers titres sur Soundcloud à votre premier vrai album, Bonito Generation, vous avez suivi une trajectoire précise ?
Gus : Notre mixtape, Intro Bonito, symbolisait notre rencontre et la façon dont on s'entendait artistiquement. On se dit que les mixtapes peuvent être créatives et libres — pas forcément une compilation de déchets de studio, mais de l'exploration, sans avoir le besoin de s'engager ver une voie très nette… On l'a donc plus envisager comme un disque bootleg. Et on enregistrait en même temps des morceaux qui se sont retrouvés sur Bonito Generation.

Sarah : « Graduation » a été écrite juste après la mixtape, au moment où j'allais recevoir mon diplôme. Et je n'y suis pas allé, parce que je n'en avais vraiment pas envie. On a joué au Bunker à Londres ce soir-là, et je portais mon costume de diplômée, j'ai posté la vidéo sur YouTube et ça m'a fait du bien — c'était comme une remise alternative de diplôme. Cette chanson était très importante pour moi.

Gus : Aucun de nous ne s'est pointé à sa cérémonie, chacun pour des raisons différentes. Moi je n'y suis pas allé parce que la deadline pour dessiner la pochette d'Intro Bonito tombait le soir-même.

Sarah : Jamie, on était en tournée ?

Jamie : Ouais, moi j'étais dans l'avion.

L'aspect visuel du groupe a l'air super important. 
Sarah : On envisage KKB comme un univers à part entière —avec sa musique, ses visuels, et tout ce qui vient avec. C'est un package.

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Gus : Tous les meilleurs groupes ont un univers, non ? Kraftwerk avaient un univers. Beaucoup de nos chansons sont reliées entre elles. On a écrit « Fish Bowl » après l'apparition du poisson dans notre clip de « Lipslap ».

Alors, il est constitué de quoi l'univers de KKB ? 
Gus : On répète ce qu'on voit, mais on ne va pas l'afficher au mur et regarder tous les gens passer devant. On n'est pas effrayés d'être nous-mêmes, ce qui peut sonner un peu cliché, certes [Rires].

Sarah : Ce sont nos trois personnalités combinées forment l'univers KKB.

Vous avez l'habitude de tout voir de façon positive et optimiste. C'est pas un peu dur de garder cet état d'esprit parfois ?
Sarah : Je ne pense pas que nos chansons soient juste joyeuses ! Dans le titre « Trampoline », l'idée est que tu dois atteindre le fond pour pouvoir remonter à la surface. Tout n'est pas qu'arcs-en-ciel et sucreries. Les gens pensent qu'on est tous très heureux, mais la tristesse est nécessaire.

Au moment d'enregistrer cet album, il y a eu des étapes particulièrement formatrices ?
Gus : Lors de notre dernière tournée, on a écouté beaucoup de pop américaine sur la route. C'est la seule fois où l'on a été soumis aussi longtemps à la bande-son du top 40. Ca nous intéressait vachement. La radio actuelle est assez étrange, et très générationnelle, toujours ce besoin d'être à la pointe. Quand je suis rentré de tournée, je m'étais mis en tête de faire une chanson qui pourrait passer à la radio, et qui, en fait, serait la chanson que tu es en train de chanter. L'idée m'a fait marrer et j'ai écrit « Heard A Song ».

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Je me demande comment, plus tard, on définira la génération pop actuelle.
Gus : Le recul est un luxe merveilleux, mais c'est intéressant de voir aujourd'hui comment tout est codifié. Sur notre tournée, moi et Jamie, on a passé notre temps à écouter des trucs sortis en 2007 et 2008, et on voit à quel point des artistes comme Klaxons, Datarock et CSS étaient homogènes. C'est seulement maintenant que ça paraît évident. Je peux imaginer d'ici quelques années des gens disant de Future et Drake qu'ils sont so 2015 ou 2016. Mais tu ne peux jamais savoir tant que tu n'as pas le temps et le recul nécessaire. Je suis plutôt excité perso — j'espère qu'un jour on sera sur une compilation représentant l'année 2016.

Qu'est ce que vous voulez apporter concrètement au genre ?
Sarah : Le bilinguisme ! C'est peu courant d'entendre des gens chanter dans plusieurs langues sur une même pop song. J'ai l'impression que ça nous rend beaucoup plus universels, les frontières s'effacent peu à peu, surtout pour les gens comme moi qui viennent d'environnements distincts et qui ont des parents mélangés. Je ne crois pas que la musique doit être basée sur une seule culture. Ça n'a pas d'importance — on ne devrait pas se sentir obligés de chanter en anglais parce que nous venons d'Angleterre, et on n'a aucune raison de chanter en japonais quand nous sommes au Japon.

Gus : On vient d'apprendre qu'on avait été classés dans le Top 10 US catégorie « World Music ». Quelqu'un, à un moment donné, nous a collé ce tag et c'est resté. C'est super, les barrières explosent. Surtout avec des filles comme Grimes et Carly Rae Jepsen, qui sont plus pop que la pop music elle-même. Ce serait encore plus cool de voir ce genre d'artistes au sommet des charts.

(Photo - Sam Evans-Butler)