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Yeti Lane s'offre une virée dans l'exosphère avec « L’Aurore »

Le duo nous parle de son étonnant troisième album, de ses rencontres avec Anton Newcombe et Damo Suzuki, et nous présente son nouveau clip « Acide Amer ».

Toutes les photos sont de Sylvain Gouverneur.

Yeti Lane. Pas simple de se faire une place au soleil avec un nom pareil. Surtout quand on est originaire de Charleville-Mézières, épicentre de la hype mondiale. Partis de là-bas sans passer par la case Easyjet, Charlie et Ben ont déjà sorti deux albums, dont le magnifiquement incompris

Echo Show

. L'occasion de s'exiler un peu plus pour travailler les fondamentaux. Marqués au fer rouge par des expériences de l'extrême partagées à Berlin ou Londres avec les joyeux drilles Anton Newcombe et Damo Suzuki, ces ex-Cyann&Ben reviennent avec

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L'Aurore

, troisième album qui sort aujourd'hui 4 mars sur Clapping Music. Un disque enregistré dans les anciens studios Vogue mais qui vire pourtant méchamment space-rock. Un virage à 180° que personne n'avait vu arriver. Je les ai retrouvés dans un troquet de la planète Terre pour en parler. Ils m'ont accueilli les bras ouverts et avec leur nouveau clip, « Acide Amer », qu'on vous présente d'ailleurs juste en-dessous.

Noisey : Comment ça va, Yeti Lane ?

Ben :

Très bien, merci.

Charlie :

Nickel.

Qu'avez-vous conservé de la période Cyann&Ben ?

Ben :

Beaucoup de souvenirs, déjà. Ça n'a pas duré très longtemps mais ça représente énormément de souvenirs. Le temps passait plus lentement à cette période là.

Charlie :

C'était la période des grandes découvertes. Celles des premiers disques qu'on sortait, les premiers concerts, les tournées… On découvrait cet univers en étant jeunes et naïfs. Tout était magique.

Ben :

On vient de Charleville-Mézières et on se connaît de là-bas. Cyann était aussi de là-bas.

Vous écoutez encore ce que fait Cyann ou plus du tout ?

Ben :

Oui, on se tient au courant. Elle habite entre Berlin et Paris désormais.

Après deux albums plutôt pop, L'Aurore marque un virage carrément space-rock. C'est dû à quoi ?

Ben :

On n'aime pas se répéter. Sinon on s'ennuie. Le space-rock a toujours été présent en nous, même à l'époque de Cyann&Ben. C'est donc une évolution assez naturelle. Et puis on agit souvent en réaction à l'album précédent.

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Parlons-en. The Echo Show paraissait beaucoup plus accessible que L'Aurore.

Charlie :

Ce nouvel album est surtout beaucoup plus spontané. À chaque album, on veut marquer une rupture complète avec le précédent. C'était déjà le cas avec notre premier LP quand Cyann&Ben s'est terminé. À ce moment là, on rêvait de pop, de sixties, d'acoustique. Et quand Loïc a quitté le groupe, on s'est retrouvés à deux et on a voulu recentrer la musique sur un truc plus direct, qui correspondait plus aux influences de Ben et aux miennes. Des trucs plus kraut, plus psyché. On s'est mis à utiliser plus de synthés pour compenser la perte d'un musicien. Après la tournée

Echo Show

, on se sentait un peu figés dans le format pop. On voulait plus de liberté, et ça s'est senti en studio pendant l'enregistrement de l'album. On s'est laissé beaucoup de liberté en studio entre les différentes prises.

Vous avez travaillé il y a quelques temps avec Damo Suzuki. Cette liberté vient de là ?

Ben :

On a eu deux expériences avec lui. Expérience, c'est vraiment le mot adapté. Une première fois à Londres. Damo tourne tout seul et à chaque fois qu'il arrive dans une ville il a besoin d'un backing-band. Lui, il appelle ça son

network

. À Londres, tout ce qu'il voulait c'était jouer une heure non-stop. Sans silence et en totale improvisation. On avait reçu un petit mail avant nous disant « Svp, ne répétez pas ». C'est sûr que ça a eu une influence sur notre manière d'appréhender la musique.

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Donc vous montez sur scène avec lui sans savoir ce que vous allez faire ?

Charlie :

C'est toute la philosophie de Can et de Suzuki depuis toujours. C'est génial à faire. On l'a refait une deuxième fois à Paris, à l'Espace B. C'était encore mieux. La rencontre avait eu lieu grâce à notre label anglais, Sonic Cathedral, qui organise pas mal de concerts à Londres. Ce côté impro nous a tellement branché qu'on a voulu le reproduire en partie sur

L'Aurore

. On vient de jouer au Silencio, là, et les morceaux de l'album continuent d'être différents sur scène, en évolution.

J'ai été un peu désarçonné en écoutant L'Aurore. J'ai eu du mal à entrer dedans dès la première écoute, contrairement à Echo Show.

Ben :

Ça a toujours été comme ça avec nous.

Charlie :

C'est vrai qu'il est moins direct, moins pop. Plus sombre. On a travaillé les ambiances. Il est certainement moins direct mais c'est exactement ce qu'on voulait faire. On n'a pas fait cet album en se disant qu'il allait être universel.

Pas trop déçus qu'Echo Show soit passé aussi inaperçu ?

Ben :

C'est vrai qu'on n'en a pas vendu des tonnes, mais on est habitués à ça.

Charlie :

On couvre les frais, on sauve les meubles. En gros, on en vend assez pour en faire un autre derrière. C'est le minimum.

Qu'écoutiez-vous pendant l'enregistrement de L'Aurore ?

Ben :

Franchement, pas grand chose. Quand on enregistre, je n'écoute que nous et les démos qu'on a faites pendant toute l'année.

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Charlie :

Pas mal de blues-rock seventies et de musique improvisée. Plutôt allemande et électronique.

Le titre de l'album a un rapport avec le film de Murnau ? Je pense à ça à cause de son sous-titre, « A song for two humans ».

Ben :

On n'a pas du tout pensé à ce film, tiens. Je ne tilte que maintenant.

Charlie :

Cela dit, si quelqu'un veut nous confier une bande originale, qu'il n'hésite pas.

On sent la patte d'Anton Newcombe sur certains titres, non ? « Crystal Sky » pourrait presque être une collaboration entre Brian Jonestown Massacre et Primal Scream.

Ben :

C'est marrant que tu dises ça. On a fait des premières parties de la tournée de Brian Jonestown Massacre avec

The Echo Show

. On l'a rencontré, il a aimé ce qu'on faisait et il nous a invité à enregistrer à Berlin, chez lui, dans son studio. On est restés deux semaines en huis-clos avec lui, et il a invité Barrie Cadogan, le mec de Little Barrie. Une grande expérience, qui nous a à l'époque plus marqué que la musique. Si tu l'as entendu, c'est peut-être mystique car ils ne sont pas sur le disque.

Charlie : En plus, Little Barrie était le guitariste de Primal Scream ! Après ces expériences avec Damo Suzuki et Anton Newcombe, vous devez être champions du monde des drogues toutes catégories confondues.
Ben : Bien sûr, on a tout essayé. Sans parler de la drogue, on sort de ces rencontres plus grands. On a eu affaire à des gens géniaux. Avec une vision de la musique, de l'art. T'apprends beaucoup. Seulement 8 titres sur ce disque. Vous en gardez pour l'édition Deluxe ou quoi ?
Ben : On en a enregistré plus. Mais il fallait que ça dure deux fois 20 minutes, les standards actuels du vinyle. Tu peux pas en mettre plus. On a perdu 30 minutes par rapport au format cd.
Ben : Exactement. D'ailleurs, le premier album de Cyann&Ben faisait bien 70 minutes. Avec un morceau caché ! Charlie : 40 minutes c'est un bon format pour un disque chargé, qui est sombre et tendu tout le long. Plus, ce serait oppressant. Vous êtes des passionnés de synthés vintage. Ça vous arrive d'en échanger avec Zombie Zombie?
Ben : J'ai une boite à rythmes de Cosmic Neman qui traîne chez moi. Si tu les croises, tu peux lui dire de passer la récupérer. La release party de L'Aurore aura lieu le 31 mars à Paris, au Pop Up du Label. Yeti Lane jouera également le 8 juin à Petit Bain aux côtés de Mars Red Sky.