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Music

Les Von Pariahs ne feront pas de prisonniers en 2016

Avec son deuxième album « Genuine Feelings », le groupe nantais enfonce le clou. Définitivement.

Que ce soit par principe, par préjugé ou simplement par tradition, le rock français est dénigré par les masses. Alors pourquoi le nouvel album de Von Pariahs pourrait-il être l'exception 2016 qui confirme la règle ? Parce que les nantais assument ouvertement sur Genuine Feelings l'influence de U2 ? Parce qu'ils ont réussi avec ce disque à ce situer au croisement des années 80 et 90, un peu comme si les Happy Mondays rencontraient Ride lors d’une jam session avec Fugazi ? On est allés tenter de trouver la réponse avec Sam Sprent et Théo Radière. Noisey : Deux ans après votre premier album, vous êtes restés fidèles à Nantes. C’est un bon spot pour ce type due musique ?
Sam : En tout cas, il y a pas mal de lieux labélisés rock, comme Les Ateliers de Bitche qui organise souvent des concerts. On a également un pote, Tristan, qui met régulièrement sur pied quelques évènements au Chien Stupide. On se retrouve tous là-bas, mais c’est vrai aussi qu’il n’y a pas tant de groupes de rock que ça à Nantes.

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Théo : À part Elmer Food Beat, ça n’est jamais allé très loin. Bon, il y a aussi les Little Rabbits qui ont peu la même histoire que nous, mais historiquement Bordeaux et Rennes ont une tradition plus forte que Nantes. D’un point de technique, vous avez repoussé la sortie du disque suite à un soudain changement de distributeur. Vous pouvez revenir sur cette histoire ?
Théo : Disons tout simplement que Differ-Ant, notre distributeur, a souhaité passer le relais à Pias parce qu’il pensait que ce label pouvait nous apporter davantage d’aide sur cet album. Ça peut paraître surprenant, mais je trouve ça vachement honnête de leur part. Ça prouve leur intégrité et la passion qu’ils peuvent avoir pour la musique. Si on lit entre les lignes, ça veut dire aussi que Genuine Feelings est considéré comme un album pouvant vous amener à une plus grande reconnaissance médiatique ?
Sam : À chaque album, on peut se dire ça [Rires] ! On a toujours été ambitieux et on s’est toujours encouragé à aller encore plus loin, à avoir confiance en nos capacités. Dans ce métier, si tu n’as pas un minimum d’ambition, tu ne fais pas grand-chose.

Théo

: Dans cette histoire, Differ-Ant a vraiment eu l’intelligence de valoriser notre travail et les deux années et demi passées sur ce disque. On verra bien ce qui se passera, mais c’est important pour nous de travailler avec des structures qui nous apprécient et qui peuvent nous permettent d’atteindre le plus de monde possible.

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À vos débuts vous citiez Joy Division comme influence. Vous pensez que c’est possible de faire du post-punk en ayant une autre influence que la bande de Ian Curtis ?

Sam

: Étant donné le peu de spectateurs à leurs concerts, les gens se sont peut-être trop branlés dessus, mais Viet Cong est bien la preuve que oui. Ils ont une vraie énergie et une vraie attitude. Pour moi, ça peut être largement suffisant pour être bon groupe de post-punk. Et puis je ne pense pas qu’il soit nécessaire de ressembler à Joy Division pour faire du bon post-punk.

Théo : Il y a Cure aussi. Three Imaginary Boys, c’est quand même bien post-punk. C’est peut-être une influence moins citée que Joy Division parce qu’ils ont eu une carrière plus longue et qu’ils ne bénéficient pas de l’image de martyr du rock propre à Ian Curtis. Il faut dire aussi que les Cure n’ont pas fait que ça, contrairement aux deux albums de Joy Division qui, pour le coup, sont très orientés post-punk.

Sam : Tout les groupes ont la même volonté, au final : marquer les gens, l’histoire de la musique et accepter d’être rattachés à d’autres groupes. Honnêtement, c’est notre cas, même si on considère notre son comme singulier. On sent pas mal l’influence des premiers U2 sur ce disque. On doit comprendre ça comment ?
Sam : Je sais que j’aime beaucoup Boy de U2 et certains de leurs titres que je trouve hyper efficaces, mais ça ne va pas plus loin. Ça me fait juste kiffer de voir tout un stade vibrer sur la même musique. Pour le reste, on essaye simplement d’être communicatif, de parler de choses simples, mais on ne peut pas échapper aux références.

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Théo : Peut-être que U2 avait les mêmes influences que nous, tout simplement. Dans le groupe, je suis à la source de tous les morceaux dans le sens où je compose l’harmonie générale et où je donne la direction des morceaux. Pourtant, je n’ai que très peu écouté U2. Je connais « I Will Follow » parce que j’adore ce morceau et que je le passe en DJ Set, mais c’est assez limité. Cela dit, ma copine est vraiment fan de U2, et particulièrement d’Achtung Baby, et elle a eu le même sentiment que toi. Mais tant mieux, au fond : si on peut avoir la même carrière qu’eux, je signe tout de suite ! Hormis les références à U2, votre disque semble s’orienter vers un son à la croisée des 80’s et des 90’s, là où le premier était plus orienté seventies. Vous comptez sauter de décennie à chaque album ?
Théo : Ça voudrait dire qu’on anticiperait la musique qui va se créer dans le monde à partir du cinquième album ? Si c’est le cas, ça nous va [Rires] ! Plus sérieusement, on ne pense pas comme ça. On a bien conscience d’être les héritiers de l’histoire de la musique, mais on est persuadé que notre musique est unique parce qu’elle nous est propre. Je m’explique : pour Genuine Feelings, on a fait une première session studio où on a enregistré six morceaux et, parmi ces six morceaux, deux d’entre eux collaient parfaitement à la rythmique un peu baggy sound que l’on retrouve dans le reste du disque. Et cette batterie mélangée à une guitare shoegaze, à une autre plus brute et au chant énergique de Sam, j’ai l’impression que c’est vraiment notre son, notre vision de la musique.

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Sam : On ne s’arrête jamais d’écouter des groupes actuels, des trucs qui tabassent en général, mais les artistes qui nous rassemblent viennent des années 70 et 80. Pour tout te dire, on a enfin l’impression d’avoir réellement découvert les Rolling Stones. Avant, c’était juste un logo pour nous. Depuis, j’ai lu l’autobiographie de Keith Richards et on a en beaucoup parlé entre nous.

Théo : L’album Sticky Fingers m’a pas mal chamboulé ces derniers mois, même si le nom des Rolling Stones ne revient pas souvent dans les chroniques que l’on lit sur nous. Pourtant, c’est vraiment un groupe auquel je peux me référer pour ce disque, ainsi qu’à My Bloody Valentine, Happy Mondays ou Ride.

Sam : On écoute aussi beaucoup de groupes ricains actuels, comme Thee Oh Sees et Ty Segall. Vous vous placez comment dans la scène française actuelle ?
Sam : Je pense qu’on a notre place, mais on n’a jamais réellement eu besoin de s’inscrire dans une scène. Ce n’est pas pour rien que l’on s’appelle Von Pariahs. Lorsqu’on vivait encore en Vendée, on galérait pour faire de la musique et on se battait pour pouvoir faire des concerts. Quand on est arrivé sur Nantes, les gens de Trempolino nous ont donné des clés, mais on sait ce qu’on veut depuis le début. On n’essaie pas de s’inscrire dans une scène. On fait partie de la famille du rock français par la force des choses, mais ça ne va pas plus loin.

Théo : C’est vrai qu’on a aussi un vrai esprit de contradiction : on essaye en permanence de ne pas faire ce qu’on attend de nous.

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Sam : Cela dit, il y a de super groupes de rock en France actuellement. Et voir J.C. Satan passer dans L’Album de la Semaine, ça fait super plaisir. D’autant que c’est mérité ! Sam, tu parlais des débuts difficiles. Est-ce qu’on n’est pas tenté de satisfaire les goûts du public lorsqu’on une renommée commence à se créer ?
Théo : C’est compliqué de donner au public ce qu’il a envie d’entendre. La musique n’a rien à voir avec les mathématiques. C’est plus compliqué que ça ! Pour moi, même quand un truc mainstream marche, il y a toujours une dimension inconnue. Bien sûr, les budgets démentiels, les passages en radio et les clips aident, mais ça ne suffit pas toujours. Du coup, il y a deux options : soit tu tentes de coller à une mode et tu n’es pas sûr que ça fonctionne, soit tu fais ton truc et tu as une vraie démarche artistique. On est plutôt dans cette seconde option. De toute façon, notre musique n’est pas vraiment faite pour les canons radiophoniques, même si je pense qu’elle a la capacité de toucher les gens. L’album se termine par « Tough Violence » qui sonne un peu prog rock. C’est une façon pour vous d’annoncer l’orientation sonore du prochain disque ?
Sam : Quand on fait la tracklist, on pense juste aux meilleures solutions possibles, sans jamais chercher à suggérer une quelconque signification. Le premier album, par exemple, se terminait par « 19.09 » et n’annonçait pas du tout celui-ci. Je ne peux donc pas dire que « Tough Violence » annonce la suite, mais je ne peux pas non plus dire l’inverse. On ne sait pas en fin de compte, on avance à l’instinct.

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Théo : L’enregistrement a d’ailleurs été complétement différent du premier album où tout avait été fait en une session et de manière beaucoup plus répétée, si bien que les gens qui venaient à nos concerts ne se retrouvaient pas systématiquement dans notre disque. Là, c’était beaucoup plus live et brut.

Sam : À dire vrai, on avait commencé à travailler sur Genuine Feelings durant la tournée d’Hidden Tensions. C’était une période assez intense parce qu’on enchainait les concerts, les répétitionss et les nouvelles compositions, mais tout s’est bien passé. On a enregistré Genuine Feelings en quatre sessions différentes, dont une partie au Blockhaus DY10, juste à côté de Trempolino, où on a un studio et où on avait déjà enregistré précédemment. Vous êtes un groupe de live. Avec ce deuxième disque, j’imagine que vous allez pouvoir définitivement dire adieu aux concerts dans les bleds paumés.
Théo : Par expérience, les bleds paumés sont parfois les meilleurs concerts. L’important, c’est d’être bien accueilli, d’avoir un bon public et de partager un bon moment. Il n’y a pas de règles, en fait.

Sam : On ne dit surtout pas adieu aux petits endroits. Ce n’est pas parce qu’on fait des dates au sein des SMAC’s que l’on s’inscrit dans un circuit. Je veux juste faire le plus de concerts possible. Ça l’a toujours été et ça signifie que je prends autant de plaisir à jouer dans le bar du coin que sur la grande scène des Eurockéennes. Pour tout dire, on a monté différents side-projects récemment, et les concerts qu’on effectue avec eux nous rattachent à ces lives donnés dans des petites salles. Sur Facebook, vous vous êtes réjouis d’être programmés au Fuzz’Yon. Pourquoi tant d’excitation à propos de cette salle ?
Sam : C’est la première salle qui nous a fait confiance, le programmateur est aussi notre manager et on a fait plusieurs résidences là-bas. Ça fait pas mal de raisons, déjà ! C’est aussi là-bas que nous avons effectué notre premier concert en 2008, en première partie de Black Joe Lewis. Retourner au Fuzz’Yon, c’est donc une façon pour nous de renforcer nos liens avec cette salle et l’équipe qui s’en occupe. Avant de se dire au revoir, est-ce que vous pouvez revenir sur l’histoire de cette pochette ?
Théo : À Lyon, on s’est pointé au Sonic lors d’un concert programmé par Génération Spontanée. Cette association fait couramment appel à plusieurs graphistes pour leurs affiches. Du coup, elles sont toujours super classes. De notre côté, on a tellement adoré la nôtre qu’on a fini par contacter l’illustratrice. Depuis, c’est devenue ma petite copine. Quand on a commencé à se pencher sur ce deuxième disque, ça paraissait donc plutôt évident de travailler de nouveau avec elle. On lui a proposé des mots-clés, mais elle n’était pas convaincue du résultat. Elle nous a donc proposé trois idées différentes. Trois enfants dans des situations particulières. Il y avait deux filles et un petit garçon. On a choisi ce dernier parce que ça nous semblait cohérent et parce que son expression est particulière.

Sam : On peut interpréter son expression de plusieurs manières différentes. Il n’y en aucune plus exacte qu’une autre : le seul truc à comprendre, c’est qu’il a besoin de s’exprimer. Il y a des pochettes de disques qui vous ont marqué dans l’histoire du rock ?
Sam : Celles des Thee Oh Sees sont super classes. Celles de Peter Saville pour Joy Division sont assez cultes également.

Théo : Ce n’est pas du rock, mais j’aime beaucoup la pochette du There Is Love In You de Four Tet.

Sam : Ah oui, j’aime bien aussi les pochettes de Born In The USA et Sticky Fingers. En fait, j’aime bien le cul de Springsteen et la bite de Jagger.