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Music

VedeTT rince en profondeur

Le groupe dark-pop d'Angers a composé la parfaite bande-son de ce foutu mois de janvier 2016.

Mes amis, en ces temps troubles et incertains, je vous invite à ne surtout pas « positiver », ni « reprendre le cours d'une vie normale », et encore moins à « redoubler d'esprit festif ». La vie est une suite de contrariétés qui finit dans la mort et l'oubli, alors calmez un peu vos ardeurs. Enfermez-vous chez vous, fermez vos fenêtres, ne répondez à personne : enfoncez-vous en vous-mêmes, dans un effort inhumain pour prendre conscience de la vanité de toute chose. Si vous n'y parvenez pas tout seuls, souvenez-vous que la musique est le plus sûr moyen d'atteindre la tristesse quand on n'est pas encore triste, et de l'intensifier quand on l'est déjà. Aujourd'hui par exemple, vous pourrez par exemple écouter deux ou trois fois de suite l'album de VedeTT, qui est non seulement très bien dans le genre cold-pop, mais également votre meilleure chance de goûter au spleen absolu en un minimum de temps. À la tête de ce projet venu d'un désert aride où le cri des hommes n'a plus la force d'atteindre les cieux (oui, je parle bien de la ville d'Angers), un homme : Florent Vincelot, qui a profité de son passage à Paris il y a quelques jours pour me raconter comment il en était venu à composer la parfaite bande-son de ce foutu mois de janvier 2016.

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Noisey : VedeTT, comme la marque de bière ?
Florent Vincelot : Eh oui. Ça m’est venu en buvant une VedeTT dans un bar. Je n’en raffole pas spécialement mais je trouve le nom assez cool, catchy, et finalement assez drôle par rapport à mon univers musical, qui n’est pas très « pop star ». Je joue un truc assez dark, qui reste accessible mais pas très grand public, et le contraste avec ce terme péjoratif qu’est « vedette » me faisait marrer. La marque ne vous a jamais posé de problèmes ?
Non. Au contraire, je les ai contactés et ils m'ont proposé cinq caisses de bière, à venir chercher en Belgique. Le partenariat est donc en stand by, parce que je n’y suis toujours pas allé [Rires]. Le truc qui est cool, c’est que je n’ai pas à me prendre la tête à faire de la pub ou du merch’, il y a des affiches et des sous-bock au nom de mon groupe un peu partout. « Ton » groupe justement, c’est un projet solo. Tu fais absolument tout sur l’album ?
Quasiment tout. Il reste des bouts de morceaux de l’ancien VedeTT, quand on composait à plusieurs, et l'ex-guitariste a enregistré quelques parties, mais c’est tout. J’ai écrit et enregistré les nouveaux titres, ligne par ligne, avec l’aide de Romain Lejeune (Eagles Gift, Blind Suns) à la production, et Stéphane Lefevre au master. Puisqu’on parle de votre petite bande, rappelle-nous dans quels groupes tu joues ?
San Carol où je fais de la basse, et Sheraf, dans lequel je suis à la batterie. Quand à ceux qui jouent avec moi sur scène dans VedeTT, il y a eu Stew à la guitare (qui joue aussi dans Sheraf et San Carol) et Simon à la batterie (San Carol). C’est la famille du Joker’s Pub à Angers !
Exactement ! On y a travaille tous, ou on y a travaillé.

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Florent apparaît en personne à 1'29 dans ce clip relativement malaisant de San Carol

C’est l’album de San Carol qui a mis un coup de projecteur sur votre petite scène ?

Oui, et le succès plutôt honnête d’Eagles Gift, qui sont allés jouer à Austin. Blind Suns va bien cartonner aussi, à mon avis. Quant à Sheraf, bon, c’est un autre délire : mais on a notre petit public, c’est parfait.

On connaît surtout Angers pour les Thugs.

Et la Ruda Salska ! Et Zenzile ! Bon, les Thugs c’est une autre notoriété. Mais je t’avoue que je suis complètement passé à côté. On connaît les mecs, on les croise, mais je ne peux pas dire que j’ai été bercé par les Thugs.

Il y a beaucoup de projets solos qui ont fait parler d’eux l’année dernière, dans tous les styles : San Carol, Marietta, H-Burns, Jessica93, Anna, et même JC Satan (dont les albums sont faits en gros par une seule personne). C’est si dur que ça de faire un groupe ?

C’est pas simple. Je trouve que dans notre crew, on a trouvé une formule pas mal. C’est avec grand plaisir que je vais jouer pour Maxime (San Carol), servir ses morceaux, répondre à ses exigences, mais dans le cadre de VedeTT, avec les mêmes musiciens, c’est plutôt moi qui décide. Monter un groupe où chacun a son mot à dire dans la compo, ça marche parfois (avec Sheraf par exemple), à condition d’être vraiment sur la même longueur d’onde au niveau de ce qu’on veut faire, musicalement.

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Là, les idées s’emboîtent bien les unes dans les autres, ça fonctionne, parce qu’on traîne tout le temps ensemble et qu’on écoute les mêmes choses. Et peut-être même que le prochain VedeTT, on va le faire à plusieurs, parce que ça se passe vraiment très bien avec les gars, ils me sortent des trucs cool en répète. Mais là, je voulais sortir un truc pour moi, sans rendre de compte à personne. J’en avais besoin. Tout seul, tu ne fais pas de compromis, tu vas jusqu’au bout de tes idées. Parfois c’est un peu flippant, parce qu’il n’y a personne pour valider autour de toi. Tu fais un truc parce que ça te plaît, à toi, sans aucun retour. C’est excitant et insécurisant en même temps.

Ton truc, c’est la pop un peu dark, donc. On pense clairement à ce morceau de Q Lazzarus,

« Goodbye Horses »

.

À fond. Le premier titre de l’album, « Fade Away », est un hommage assumé à ce morceau. Un pote nous avait dit à la sortie d’un concert que ça lui rappelait Q Lazzarus, un nom que je n’avais jamais entendu de ma vie : il m’a rappelé que c’était la bande-son d’une scène mythique du

Silence des agneaux

. C’est vrai que le côté froid, la basse très droite, ça ressemblait à ce que je faisais déjà, mais « Goodbye Horses » m’a vraiment fait prendre conscience d’un truc, et a un peu joué le rôle d’élément déclencheur dans la composition de l’album. Par contre c’est le seul morceau de cette artiste, il n’y a absolument rien d’autre. C’est un mystère complet. Du coup je me suis dit que j’allais faire l’album qui développerait cette ambiance jusqu’au bout. Bon, finalement il n’y a que « Fade Away » qui colle vraiment, le reste s’en détache quand même largement.

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On entend un peu « Primary » de Cure, aussi.

Il paraît, mais je ne peux pas dire que je le revendique. Je connais Cure, mais la période

Faith

pas tellement.

Cocteau Twins ?

Non plus. Mais la composition, c’est un processus bizarre. Si tu savais le nombre de fois où je commence à écrire avec l’idée de faire un truc qui ressemble, mettons, à « Idiotheque » de Radiohead, et que je me retrouve avec un morceau qui n’a absolument rien à voir… Je ne pars jamais d’une ligne mélodique pour écrire, mais de l’envie de reproduire une ambiance. Sachant qu’au final, c’est la production qui fera tout : tu as beau arriver avec ta partition, le climat froid, le son métallique des instruments, tout ce qui va constituer l’identité du morceau, c’est la production qui va le faire. C’est un processus très technique. Donc bon, les « influences », ça n’explique pas grand chose.

Tu as voulu faire un morceau en français, un seul, mais tu l’as bien mis en avant : c’est à la fois le nom de l’album et le premier clip. Il faut y voir un signe du futur de VedeTT ?

Je sais pas, peut-être. Ca m’excite pas mal, même si c’est une démarche assez bizarre de chanter en français. T’es vraiment à poil, quoi. Quand j’ai écrit « Tuer les gens », j’ai d’abord cru que je n’arriverais jamais à le faire écouter à quelqu’un. C’est un morceau très personnel, et la pudeur t’arrête un minimum dans ces cas-là. Du coup le morceau ne devait même pas être sur l’album, j’ai commencé à l’enregistrer une fois que tout était fini. J’ai fait le gros du morceau, avec la grosse ligne de basse, en très peu de temps. Il y a deux notes, c’est très minimaliste. Et puis j’ai plaqué les paroles et j’ai aimé le résultat. Non seulement j’ai viré un morceau pour pouvoir inclure « Tuer les gens » sur l’album, mais j’ai décidé de baptiser l’album de son nom, ce qui donne à l’ensemble, rétrospectivement, une toute autre gueule. Une gueule plus fidèle à l’état d’esprit dans lequel j’étais à ce moment-là.

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Il est assez raide au niveau des textes. « Si ça va pas, on fait des enfants / Quelle drôle d’idée, on s’aimait avant ».

On a tous vu ça pas mal de fois, non ? Un couple un peu bancal qui fait un gosse pour relancer l’affaire… Quelle erreur ! [

Rires

] Je suis un enfant de ça aussi, d’un truc qui est devenu la norme – avoir des parents séparés. Donc c’est pas très gai, tout ça, mais je n’arrive pas à faire de la musique joyeuse quand je compose. Peut-être que ça viendra. Pourquoi pas écrire un truc plus festif un jour, parce que je ne suis vraiment pas un mec triste, je passe mon temps à rigoler avec mes potes. Mais va comprendre, quand j’écris, il y a toujours les vieilles angoisses qui remontent, et ça donne un truc à la tonalité assez triste.

VedeTT sera en concert :
Le 06/02 à Paris (Flèche d'Or)
Le 19/02 à Lyon (Le marché gare)
Le 03/03 à Angers (Jokers' Pub)
Le 04/03 à La Roche-s/Yon (Fuzz'Yon)
Le 10/03 à Nantes (Stereolux)
Le 18/03 à Nyon (Festival Voix de Fêtes)