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Music

Unwound ont changé des centaines de vies, de Vancouver à Varsovie

Le légendaire groupe d'Olympia aurait du être aussi gros que Fugazi ou Nirvana.

Quand Unwound rapplique, les punks à lunettes de plus de 35 ans ont tendance à hyperventiler. Car même si ces trois gamins de Tumwater, Washington, n'ont jamais été mentionnés sur le site web de leur ville, ils ont changé des centaines de vies, de Vancouver à Varsovie. Trois gamins dégingandés et crasseux, vêtus de t-shirts à l'effigie des groupes punk locaux tâchés de sirop pour la toux, qui ont passé la majeure partie des années 90 à traîner dans tout ce que le pays comptait de squats, à assembler leurs propres pochettes d'album avec des tubes de colle. Unwound était un groupe immense pour des milliers de kids trop vénères pour se présenter comme des fans de qui que ce soit… Sauf d'Unwound. Parce qu'ils étaient incroyables, sur disque comme sur scène. Parce qu'ils représentaient vraiment quelque chose. Parce qu'ils ont réussi à ne jamais se faire récupérer par le mainstream ou la diarrhée « alternative » du début 90. Nirvana ou Fugazi, vous étiez obligés de les partager avec un tas de connards. Mais Unwound était un culte privé. Se comporter comme un putain de snob ne vous permettra clairement pas d'affronter la vie, mais de temps en temps, les gens méritent d'avoir un petit secret. En combinant la charge sonique des groupes de chez Gravity Records, l'énergie outrancière de ceux de chez Rawk et des textures de guitare rivalisant avec celles de Sonic Youth, Unwound est devenu un exemple pour, eh bien, pas assez de groupes, si vous voulez tout savoir. Pourtant, leur influence se ressent, que ce soit chez Modest Mouse, Merchandise, Raspberry Bulbs, chez un paquet de groupes britanniques actuels de punk et de post-punk underground, en même dans le black metal américain de ces dernières années. Aujourd'hui, le label Numero Group a finalement donné à Unwound le traitement de faveur que le groupe mérite. Après la sortie, l'an dernier, d'un best-of intitulé Kid Is Gone, le label lance aujourd'hui une anthologie en quatre volets. Le premier disque de la série, Rat Conspiracy, sortira le 18 mars. Il regroupe les albums Fake Train et New Plastic Ideas, ainsi que des sessions radio et une reprise tarée des Minutemen. Justin Troper, le chanteur/guitariste d'Unwound, et la batteuse Sara Lund, m'ont accordé un instant pour répondre à quelques questions sur le groupe et ces rééditions.

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Noisey : Qu'est-ce qui vous a poussé à sortir ces rééditions ?

Justin

: On en avait envie, tout simplement. On voulait qu'on se souvienne de nous, qu’on puisse continuer à exister quelque part sur Internet. Après que Fugazi aient mis en ligne une série de lives, je me suis dit qu'on devrait faire un truc dans le genre, à notre niveau. On a commencé à fouiller dans nos tiroirs et on a décidé de faire un site où l’on raconterait notre dernière tournée. Et c'est devenu

Live Leaves

.

Quand Numero nous a contacté en nous proposant de rééditer tous nos albums, on a tout de suite accepté. C'est le genre d'opportunité qui n'arrive qu'une seule fois dans ta vie. On ne pouvait pas passer à côté, même si on avait toujous de bonnes relations avec Kill Rock Stars, notre label originel. Mais ils n'avaient pas les moyens de faire ce que Numero voulait faire. Il y a deux genres de labels. Kill Rock Stars a besoin de faire découvrir et de promouvoir de nouveaux artistes et Numero est spécialisé dans le passé. Et Unwound est désormais un groupe qui appartient au passé. Dans le milieu de la musique, l'enthousiasme est la qualité la plus importante. Numero s'est montré enthousiaste et c'est un label qui sait ce qu'il fait, c'était parfait.

Vous étiez un groupe qui, à l’image de

Motörhead

, réussissait à mettre d’accord les gamins du metal, du punk et de l'indie-rock. C'était dû à quoi, à votre avis ?

Justin

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: Je me rappelle avoir eu cette conversation il y a longtemps avec un ami. Je ne suis pas sûr, mais c'est peut-être parce qu'on avait réussir à établir un équilibre entre des sonorités très différents, équilibre dans lequel un grand nombre de personnes pouvait se retrouver. Même en étant associés à la ville d’Olympia, à Kill Rock Stars et tout ce qui va avec, on a réussi à éviter d'être enfermés dans une scène, une esthétique ou une idéologie particulière. Notre musique était à la fois heavy, noisy, rapide, lente et calme. On a d’ailleurs joué avec toutes sortes de groupes – des mecs auxquels on ne s'attendait vraiment pas. Les Européens ont particulièrement eu du mal nous catégoriser, du coup, on jouait souvent devant des publics un peu étranges.

Sara

: Je pense que plus les groupes ou les musiciens sont honnêtes et sincères dans ce qu’ils font, plus ils trouveront des gens qui connecteront

vraiment

avec leur musique.

On pourrait définir vos paroles comme anti-poétiques, basées sur des fragments de conversations, un style très utilisé à l'époque, constitué de mots courts et de phrases cryptiques. Que ça soit vous,

Lync

ou même Nirvana, on retrouvait ça chez quasiment tout le monde. Et même si votre musique a évolué, vous avez toujours gardé cette approche.

Justin :

J'ai écrit quasiment toutes les paroles, excepté quelques chansons, que Vern a chantées. On n'avait pas vraiment de discussions là-dessus, donc je suis le seul responsable ! La plupart du temps, c'est vraiment la musique qui décidait des paroles. J'avais besoin de phrases d'une longueur bien précise, et j'ai presque toujours travaillé à l'envers, à partir des structures, des titres des morceaux… Généralement, je faisais court parce que j'avais pas mal de difficultés à me souvenir des passages trop longs et que je ne pense pas que ce soit une bonne idée de coller des tonnes de mots sur ce genre de musique. L'auditeur devrait être capable d'en retirer quelque chose, même si ça ne fait pas complètement sens. Par « anti-poétique », j'imagine que tu entends « anti-rimes » ? Mais pour moi, c'est justement ça la poésie. Les paroles que j'ai vraiment travaillées étaient les pires et celles que j'ai bâclées étaient souvent les plus intéressantes.

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Quelle influence pensez-vous avoir eu ? Vous avez le droit d’être arrogants, hein.

Justin

: C'est difficile à dire parce qu'il n'y a pas eu beaucoup de gens qui admettent ou se rendent compte de ce genre de trucs. Statistiquement, en prenant en compte le nombre de concerts qu'on a fait, les labels avec lesquels on a été associés, les groupes avec lesquels on a tourné et ce que les gens m'ont dit, je dirais qu'on a quand même eu une influence assez considérable. Mais comment est-ce que tu quantifies ça ? D'autant plus que tout n'est vu que par le prisme des listes de fin d'année des journalistes, ou par les livres, les anthologies, et pas par l'impact réel des artistes sur le public. De ce point de vue là, on n'est rien du tout. Donc, ok, d'une certaine façon, on a infiltré l'esprit des gens, mais est-ce que ça nous rend vraiment influents ? On en le saura jamais.

Sara

: C'est seulement depuis un an ou deux que j'entends parler -et uniquement par le bouche-à-oreille, je ne l'ai lu dans aucun livre- du nombre de personnes qu'on aurait influencé. Ça concerne quelques nouveaux groupes aussi. Mais oui, c'est difficile de quantifier ce genre de choses. J'imagine que ça fait du bien d'être « validé », même si ça n'a pas vraiment d'impact sur ma vie quotidienne. Ça reste assez abstrait pour moi.

En ce moment, il y a un retour du débat sur « ce que représente vraiment le Do It Yourself ». Qu'est-ce que signifie le DIY pour vous ? Est-ce que ça a encore une place dans votre vie ?

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Justin :

Si je devais être musicien aujourd'hui, je pense que je dirais non. Le punk DIY a représenté une partie importante de ma vie et a influencé mon éthique et mon comportement, mais j'ai toujours abordé les choses de manière plus globale. Ce que je veux dire, c'est que ce genre de communauté a parfois tendance à être si bornée et limitée, que ça en devient étouffant pour les artistes. Le collectivisme aboutit parfois sur la mise en place d'un environnement où le groupe a un sentiment de propriété sur l'art des individus ou même leurs valeurs. Les décisions que tu dois prendre peuvent être très différentes de ce que les gens attendent de toi. Et même si j'apprécie toujours aller à des concerts DIY ou y jouer, j'aime être entouré de gens différents, même si je ne partage pas leur vision du monde. Je connais des flics, des fanatiques religieux, des hippies et des ploucs qui en ont rien à foutre du punk rock ou de ses règles obscures, et ça me va. Je n'ai pas signé de pacte avec le punk mais je continue à le vivre parfois – j'imagine que je suis un punk à temps partiel. Aussi loin qu'ira le DIY, ma grand-mère sera toujours plus DIY que n'importe quel punk que j'ai pu connaître.

Sara

: Justin a tellement bien résumé ça que je n’ai rien à ajouter. Je vis à Portland, en Oregon, la capitale du néo-pseudo-DIY, et je suis tous les jours étonnée par ce délire « tout le monde est un entrepreneur », cette version mainstream et

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corporate

du DIY. C'est tellement pittoresque, tellement détaché de la réalité. Ceci dit, je continue à admirer et, dans un certaine mesure, à faire partie de ces personnes qui font leur propre truc, avec honnêteté.

Vous avez fait quoi durant ces 12 dernières années ? Je sais, c'est une question emmerdante, parce que vous avez enchaîné un tas de projets différents, mais tout le monde n'en a pas forcément entendu parler.

Justin

: J'ai enregistré quelques groupes après la fin d’Unwound mais je ne suis remonté sur scène qu'en 2012, avec

Survival Knife

, qui m'occupe pas mal aujourd'hui. On a un album qui sort au printemps. Je travaille aussi sur ce projet musical qui me taraude depuis genre, 15 ans. Avec un peu de chance, j'en viendrai à bout cette année. Ça m'a pris pas mal de temps pour revenir à la musique ou à quoi que ce soit de créatif. J'imagine que j'ai mis mon énergie dans d'autres choses, comme les études, l'escalade, les arts martiaux ou juste traîner avec ma copine et mes chiens. Du coup, revenir à la musique a été très agréable, avec pas mal de nouvelles perspectives. J'ai encore beaucoup à faire dans ce domaine, contrairement à ce que je pensais en 2002.

Sara

: Eh bien, en plus d'avoir joué des tas de styles de musique différents avec des tas de personnes différentes, je me suis mariée, je suis retournée à l'université, et j'ai eu un fils qui va avoir cinq ans. Être mère me prend beaucoup de temps et d'énergie, et mon mari joue dans un groupe qui est tout le temps en tournée, mais je continue de faire de la musique une priorité et je m'y consacre autant que possible. En plus d'avoir participé aux enregistrements du Corin Tucker Band et d'avoir un peu tourné avec eux, j'ai un groupe qui s'appelle

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Hungry Ghost

depuis sept ans maintenant. On a sorti un disque en 2012 et on est actuellement en train d'en écrire le deuxième. J'ai joué dans

77Boadrum

et

88Boadrum

, des performances incroyables avec plusieurs batteurs. J'ai enregistré un disque dingue et complètement improvisé avec le claviériste

Thollem McDonus

qui sortira en juin, et sera suivi d’une tournée sur la côte Ouest. J'ai joué avec un orchestre de percussions appelé

Secret Drum Band

, mené par la très talentueuse

Lisa Schonberg

. Et je continue à rechercher inlassablement des moyens de rester satisfaite, d'un point de vue créatif.



Quand Unwound rapplique, les punks à lunettes de plus de 35 ans ont tendance à hyperventiler. Car même si ces trois gamins de Tumwater, Washington, n'ont jamais été mentionnés sur le site web de leur ville, ils ont changé des centaines de vies, de Vancouver à Varsovie. Trois gamins dégingandés et crasseux, vêtus de t-shirts à l'effigie des groupes punk locaux tâchés de sirop pour la toux, qui ont passé la majeure partie des années 90 à traîner dans tout ce que le pays comptait de squats, à assembler leurs propres pochettes d'album avec des tubes de colle. Unwound était un groupe immense pour des milliers de kids trop vénères pour se présenter comme des fans de qui que ce soit… Sauf d'Unwound. Parce qu'ils étaient incroyables, sur disque comme sur scène. Parce qu'ils représentaient vraiment quelque chose. Parce qu'ils ont réussi à ne jamais se faire récupérer par le mainstream ou la diarrhée « alternative » du début 90. Nirvana ou Fugazi, vous étiez obligés de les partager avec un tas de connards. Mais Unwound était un culte privé. Se comporter comme un putain de snob ne vous permettra clairement pas d'affronter la vie, mais de temps en temps, les gens méritent d'avoir un petit secret.

En combinant la charge sonique des groupes de chez Gravity Records, l'énergie outrancière de ceux de chez Rawk et des textures de guitare rivalisant avec celles de Sonic Youth, Unwound est devenu un exemple pour, eh bien, pas assez de groupes, si vous voulez tout savoir. Pourtant, leur influence se ressent, que ce soit chez Modest Mouse, Merchandise, Raspberry Bulbs, chez un paquet de groupes britanniques actuels de punk et de post-punk underground, en même dans le black metal américain de ces dernières années. Aujourd'hui, le label Numero Group a finalement donné à Unwound le traitement de faveur que le groupe mérite. Après la sortie, l'an dernier, d'un best-of intitulé Kid Is Gone, le label lance aujourd'hui une anthologie en quatre volets. Le premier disque de la série, Rat Conspiracy, sortira le 18 mars. Il regroupe les albums Fake Train et New Plastic Ideas, ainsi que des sessions radio et une reprise tarée des Minutemen.

Justin Troper, le chanteur/guitariste d'Unwound, et la batteuse Sara Lund, m'ont accordé un instant pour répondre à quelques questions sur le groupe et ces rééditions.



Noisey : Qu'est-ce qui vous a poussé à sortir ces rééditions ?
Justin

: On en avait envie, tout simplement. On voulait qu'on se souvienne de nous, qu’on puisse continuer à exister quelque part sur Internet. Après que Fugazi aient mis en ligne une série de lives, je me suis dit qu'on devrait faire un truc dans le genre, à notre niveau. On a commencé à fouiller dans nos tiroirs et on a décidé de faire un site où l’on raconterait notre dernière tournée. Et c'est devenu

Live Leaves

.


Quand Numero nous a contacté en nous proposant de rééditer tous nos albums, on a tout de suite accepté. C'est le genre d'opportunité qui n'arrive qu'une seule fois dans ta vie. On ne pouvait pas passer à côté, même si on avait toujous de bonnes relations avec Kill Rock Stars, notre label originel. Mais ils n'avaient pas les moyens de faire ce que Numero voulait faire. Il y a deux genres de labels. Kill Rock Stars a besoin de faire découvrir et de promouvoir de nouveaux artistes et Numero est spécialisé dans le passé. Et Unwound est désormais un groupe qui appartient au passé. Dans le milieu de la musique, l'enthousiasme est la qualité la plus importante. Numero s'est montré enthousiaste et c'est un label qui sait ce qu'il fait, c'était parfait.



Vous étiez un groupe qui, à l’image de Motörhead, réussissait à mettre d’accord les gamins du metal, du punk et de l'indie-rock. C'était dû à quoi, à votre avis ?
Justin

: Je me rappelle avoir eu cette conversation il y a longtemps avec un ami. Je ne suis pas sûr, mais c'est peut-être parce qu'on avait réussir à établir un équilibre entre des sonorités très différents, équilibre dans lequel un grand nombre de personnes pouvait se retrouver. Même en étant associés à la ville d’Olympia, à Kill Rock Stars et tout ce qui va avec, on a réussi à éviter d'être enfermés dans une scène, une esthétique ou une idéologie particulière. Notre musique était à la fois heavy, noisy, rapide, lente et calme. On a d’ailleurs joué avec toutes sortes de groupes – des mecs auxquels on ne s'attendait vraiment pas. Les Européens ont particulièrement eu du mal nous catégoriser, du coup, on jouait souvent devant des publics un peu étranges.


Sara

: Je pense que plus les groupes ou les musiciens sont honnêtes et sincères dans ce qu’ils font, plus ils trouveront des gens qui connecteront

vraiment

avec leur musique.





On pourrait définir vos paroles comme anti-poétiques, basées sur des fragments de conversations, un style très utilisé à l'époque, constitué de mots courts et de phrases cryptiques. Que ça soit vous, Lync ou même Nirvana, on retrouvait ça chez quasiment tout le monde. Et même si votre musique a évolué, vous avez toujours gardé cette approche.
Justin :

J'ai écrit quasiment toutes les paroles, excepté quelques chansons, que Vern a chantées. On n'avait pas vraiment de discussions là-dessus, donc je suis le seul responsable ! La plupart du temps, c'est vraiment la musique qui décidait des paroles. J'avais besoin de phrases d'une longueur bien précise, et j'ai presque toujours travaillé à l'envers, à partir des structures, des titres des morceaux... Généralement, je faisais court parce que j'avais pas mal de difficultés à me souvenir des passages trop longs et que je ne pense pas que ce soit une bonne idée de coller des tonnes de mots sur ce genre de musique. L'auditeur devrait être capable d'en retirer quelque chose, même si ça ne fait pas complètement sens. Par « anti-poétique », j'imagine que tu entends « anti-rimes » ? Mais pour moi, c'est justement ça la poésie. Les paroles que j'ai vraiment travaillées étaient les pires et celles que j'ai bâclées étaient souvent les plus intéressantes.



Quelle influence pensez-vous avoir eu ? Vous avez le droit d’être arrogants, hein.
Justin

: C'est difficile à dire parce qu'il n'y a pas eu beaucoup de gens qui admettent ou se rendent compte de ce genre de trucs. Statistiquement, en prenant en compte le nombre de concerts qu'on a fait, les labels avec lesquels on a été associés, les groupes avec lesquels on a tourné et ce que les gens m'ont dit, je dirais qu'on a quand même eu une influence assez considérable. Mais comment est-ce que tu quantifies ça ? D'autant plus que tout n'est vu que par le prisme des listes de fin d'année des journalistes, ou par les livres, les anthologies, et pas par l'impact réel des artistes sur le public. De ce point de vue là, on n'est rien du tout. Donc, ok, d'une certaine façon, on a infiltré l'esprit des gens, mais est-ce que ça nous rend vraiment influents ? On en le saura jamais.


Sara

: C'est seulement depuis un an ou deux que j'entends parler -et uniquement par le bouche-à-oreille, je ne l'ai lu dans aucun livre- du nombre de personnes qu'on aurait influencé. Ça concerne quelques nouveaux groupes aussi. Mais oui, c'est difficile de quantifier ce genre de choses. J'imagine que ça fait du bien d'être « validé », même si ça n'a pas vraiment d'impact sur ma vie quotidienne. Ça reste assez abstrait pour moi.



En ce moment, il y a un retour du débat sur « ce que représente vraiment le Do It Yourself ». Qu'est-ce que signifie le DIY pour vous ? Est-ce que ça a encore une place dans votre vie ?
Justin :

Si je devais être musicien aujourd'hui, je pense que je dirais non. Le punk DIY a représenté une partie importante de ma vie et a influencé mon éthique et mon comportement, mais j'ai toujours abordé les choses de manière plus globale. Ce que je veux dire, c'est que ce genre de communauté a parfois tendance à être si bornée et limitée, que ça en devient étouffant pour les artistes. Le collectivisme aboutit parfois sur la mise en place d'un environnement où le groupe a un sentiment de propriété sur l'art des individus ou même leurs valeurs. Les décisions que tu dois prendre peuvent être très différentes de ce que les gens attendent de toi. Et même si j'apprécie toujours aller à des concerts DIY ou y jouer, j'aime être entouré de gens différents, même si je ne partage pas leur vision du monde. Je connais des flics, des fanatiques religieux, des hippies et des ploucs qui en ont rien à foutre du punk rock ou de ses règles obscures, et ça me va. Je n'ai pas signé de pacte avec le punk mais je continue à le vivre parfois – j'imagine que je suis un punk à temps partiel. Aussi loin qu'ira le DIY, ma grand-mère sera toujours plus DIY que n'importe quel punk que j'ai pu connaître.

Sara

: Justin a tellement bien résumé ça que je n’ai rien à ajouter. Je vis à Portland, en Oregon, la capitale du néo-pseudo-DIY, et je suis tous les jours étonnée par ce délire « tout le monde est un entrepreneur », cette version mainstream et

corporate

du DIY. C'est tellement pittoresque, tellement détaché de la réalité. Ceci dit, je continue à admirer et, dans un certaine mesure, à faire partie de ces personnes qui font leur propre truc, avec honnêteté.





Vous avez fait quoi durant ces 12 dernières années ? Je sais, c'est une question emmerdante, parce que vous avez enchaîné un tas de projets différents, mais tout le monde n'en a pas forcément entendu parler.
Justin

: J'ai enregistré quelques groupes après la fin d’Unwound mais je ne suis remonté sur scène qu'en 2012, avec

Survival Knife

, qui m'occupe pas mal aujourd'hui. On a un album qui sort au printemps. Je travaille aussi sur ce projet musical qui me taraude depuis genre, 15 ans. Avec un peu de chance, j'en viendrai à bout cette année. Ça m'a pris pas mal de temps pour revenir à la musique ou à quoi que ce soit de créatif. J'imagine que j'ai mis mon énergie dans d'autres choses, comme les études, l'escalade, les arts martiaux ou juste traîner avec ma copine et mes chiens. Du coup, revenir à la musique a été très agréable, avec pas mal de nouvelles perspectives. J'ai encore beaucoup à faire dans ce domaine, contrairement à ce que je pensais en 2002.



Sara

: Eh bien, en plus d'avoir joué des tas de styles de musique différents avec des tas de personnes différentes, je me suis mariée, je suis retournée à l'université, et j'ai eu un fils qui va avoir cinq ans. Être mère me prend beaucoup de temps et d'énergie, et mon mari joue dans un groupe qui est tout le temps en tournée, mais je continue de faire de la musique une priorité et je m'y consacre autant que possible. En plus d'avoir participé aux enregistrements du Corin Tucker Band et d'avoir un peu tourné avec eux, j'ai un groupe qui s'appelle

Hungry Ghost

depuis sept ans maintenant. On a sorti un disque en 2012 et on est actuellement en train d'en écrire le deuxième. J'ai joué dans

77Boadrum

et

88Boadrum

, des performances incroyables avec plusieurs batteurs. J'ai enregistré un disque dingue et complètement improvisé avec le claviériste

Thollem McDonus

qui sortira en juin, et sera suivi d’une tournée sur la côte Ouest. J'ai joué avec un orchestre de percussions appelé

Secret Drum Band

, mené par la très talentueuse

Lisa Schonberg

. Et je continue à rechercher inlassablement des moyens de rester satisfaite, d'un point de vue créatif.





La musique Unwound était tellement unique. Est-ce que vous pensez que ce groupe aurait pu exister aujourd'hui, à l'heure où tout est disponible sur internet ? Et est-ce qu'il y a de nouveaux groupes que vous appréciez particulièrement ?
Justin

: Je pense que si les gens veulent créer leur propre truc, ils doivent y consacrer beaucoup de temps avant que le déclic se produise. Le talent naturel et le génie sont des choses plutôt rares, pas vrai ? On avait pour habitude de répéter, répéter, tourner, tourner et jouer, jouer, jouer. Les groupes d'aujourd'hui sont des identités multimédias qui font des clips arty, tiennent des comptes Twitter et se vendent de la même manière que les marques. Les choses sont devenues plus accessibles, mais ça n'a pas rendu la scène musicale meilleure. Manifestement, aiguiser son son reste plus important que modeler son image.


Mais il y a un paquet de groupes/musiciens qui font des bonnes choses ces temps-ci. Pas tellement dans le rock traditionnel, exception faite de quelques gros noms établis, comme Mastodon ou Queens of the Stone Age. J'ai trouvé

Coloured Sands

de Gorguts, assez remarquable.

Night Exquisite

de Brent Arnold également. J’aime

Helms Alee

qui viennent d’ici, de Washington. Le dernier disque de Fuck Buttons aussi – à la fois expérimental et accessible. Je continue à suivre ce que fait PJ Harvey, et j’apprécie aussi le boulot de

Julia Holter

.

Sara : Se demander si la musique d’Unwound pourrait exister aujourd’hui, c’est comme se demander si le groupe que Justin, Vern et moi formions à 20 ans, pouvait toujours exister 20 ans plus tard. Et c’est impossible, parce que nous avons grandi et que nous vivons dans un monde différent. Mais il est toujours possible pour les musiciens de créer un espace de vérité et de passion, c’est certain. Même si aujourd'hui, tout le monde fait de la musique et qu'il est de plus en plus difficile de tirer son épingle du jeu. Et je n’ai plus autant d'énergie à dépenser dans cette quête. Alors j’attends simplement que quelque chose de bien me tombe dessus, sans passer des heures à chercher.
Ces temps-ci je suis plus dans un mood brut et thrashy, j’en ai relativement marre de tout ces trucs parfaitement exécutés et précieux. Cela dit, si c’est bon, c'est OK.
J’aime Ty Segall. J’aime aussi Helms Alee, qui sont fans d'Unwound, ce qui me rend assez fière. Je fais toujours attention à ce que Sam & Janet de Quasi sortent, ce sont deux personnes qui ont toujours su rester intègres. Le groupe de mon mari, Red Fang, est super. Leur musique est hyper sincère et j’aime bien voir les réactions qu’ils provoquent. J’aime aussi les concerts de Hornet Leg, ceux de Magic Mouth – qui viennent tous les deux de Portland.

Qu’est ce qu’il faudrait pour assister à une reformation de Unwound ?
Justin : Des tonnes de cash. Tout a un prix... En fait, non, ça ne va pas arriver les mecs.
Sara : Il faudrait aller chercher des gens différents, qui vivent dans des réalités différentes.


Zachary est le tonton punk de Noisey. Il est sur Twitter @zacharylipez

La musique Unwound était tellement unique. Est-ce que vous pensez que ce groupe aurait pu exister aujourd'hui, à l'heure où tout est disponible sur internet ? Et est-ce qu'il y a de nouveaux groupes que vous appréciez particulièrement ?

Justin

: Je pense que si les gens veulent créer leur propre truc, ils doivent y consacrer beaucoup de temps avant que le déclic se produise. Le talent naturel et le génie sont des choses plutôt rares, pas vrai ? On avait pour habitude de répéter, répéter, tourner, tourner et jouer, jouer, jouer. Les groupes d'aujourd'hui sont des identités multimédias qui font des clips arty, tiennent des comptes Twitter et se vendent de la même manière que les marques. Les choses sont devenues plus accessibles, mais ça n'a pas rendu la scène musicale meilleure. Manifestement, aiguiser son son reste plus important que modeler son image.

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Mais il y a un paquet de groupes/musiciens qui font des bonnes choses ces temps-ci. Pas tellement dans le rock traditionnel, exception faite de quelques gros noms établis, comme Mastodon ou Queens of the Stone Age. J'ai trouvé

Coloured Sands

de Gorguts, assez remarquable.

Night Exquisite

de Brent Arnold également. J’aime

Helms Alee

qui viennent d’ici, de Washington. Le dernier disque de Fuck Buttons aussi – à la fois expérimental et accessible. Je continue à suivre ce que fait PJ Harvey, et j’apprécie aussi le boulot de

Julia Holter

.

Sara : Se demander si la musique d’Unwound pourrait exister aujourd’hui, c’est comme se demander si le groupe que Justin, Vern et moi formions à 20 ans, pouvait toujours exister 20 ans plus tard. Et c’est impossible, parce que nous avons grandi et que nous vivons dans un monde différent. Mais il est toujours possible pour les musiciens de créer un espace de vérité et de passion, c’est certain. Même si aujourd'hui, tout le monde fait de la musique et qu'il est de plus en plus difficile de tirer son épingle du jeu. Et je n’ai plus autant d'énergie à dépenser dans cette quête. Alors j’attends simplement que quelque chose de bien me tombe dessus, sans passer des heures à chercher.
Ces temps-ci je suis plus dans un mood brut et thrashy, j’en ai relativement marre de tout ces trucs parfaitement exécutés et précieux. Cela dit, si c’est bon, c'est OK.
J’aime Ty Segall. J’aime aussi Helms Alee, qui sont fans d'Unwound, ce qui me rend assez fière. Je fais toujours attention à ce que Sam & Janet de Quasi sortent, ce sont deux personnes qui ont toujours su rester intègres. Le groupe de mon mari, Red Fang, est super. Leur musique est hyper sincère et j’aime bien voir les réactions qu’ils provoquent. J’aime aussi les concerts de Hornet Leg, ceux de Magic Mouth – qui viennent tous les deux de Portland. Qu’est ce qu’il faudrait pour assister à une reformation de Unwound ?
Justin : Des tonnes de cash. Tout a un prix… En fait, non, ça ne va pas arriver les mecs.
Sara : Il faudrait aller chercher des gens différents, qui vivent dans des réalités différentes. Zachary est le tonton punk de Noisey. Il est sur Twitter @zacharylipez