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Total Control ne veulent surtout pas vous faire perdre votre temps

Daniel Stewart, le frontman du groupe australien, nous parle de leur nouvel album, Typical System.
TOTAL CONTROL

Fin 2011, Total Control sortaient Henge Beat sur Iron Lung Records, le label du groupe de powerviolence du même nom (lisez l'interview de Jensen Ward ici). Étrangement, dans la liste de leurs influences, aucune trace de Crossed Out ou de Infest, mais plutôt Suicide ou Ultravox. Ça va les mecs ? Plutôt très bien ouais. Henge Beat est devenu instantanément un classique, engendrant des armées de fans, et attirant l’attention du reste du monde sur la scène australienne après la dissolution des excellents et regrettés Eddy Current Supression Ring. Cette attention était parfaitement justifiée, Henge Beat est un mélange parfait de garage punk cramé, de synth-pop froide et de grosse reverb post-punk, le tout consolidé par une écriture de haut niveau. Après enquête auprès des groupes proches de Total Control ; on a compris que les bons morceaux ne se limitaient pas à un seul projet : allez donc écouter aussi The UV Race, Eastling et Lace Curtain. Trois ans plus tard et toujours chez Iron Lung, Total Control sortent Typical System, leur deuxième LP, un album à la fois sombre et tapageur qui plaira aux fans de Henge Beat. On vous avait déjà balancé deux des morceaux de l’album de Total Control (« Flesh War » et « Expensive Dog »), il était temps de passer à l’étape supérieure. Voici une interview exclusive avec le frontman de Total Control, Daniel Stewart (non, rien à voir).

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TOTAL CONTROL
TOTAL CONTROL

Noisey : Votre dernier album Henge Beat a été super bien accueilli à l’époque. PourTypical System, vous avez été approchés par plusieurs labels assez importants, mais vous avez préféré rester sur Iron Lung Records. Je pense savoir pourquoi, mais expliquez ce choix à nos lecteurs ?

Daniel Stewart

: On a sorti notre premier 7” avec Jensen (Ward) et Iron Lung, on a confiance en lui, c'est aussi simple que ça. On s'est vu tous les ans ces dernières années, et on a joué avec Society Nurse, un autre projet de Jensen. Ce sont des types bien, ils comprennent ce qu'on fait et n'avaient aucun souci avec les directions que le groupe souhaitait prendre. Donc on a sorti notre premier LP sur Iron Lung Records, et c'est pour les mêmes raisons qu'on est revenu pour notre deuxième LP. On voulait que tout se passe en confiance.

Iron Lung est un groupe très puissant dans son genre. Mais en tant que label vous pensiez aussi qu'ils seraient assez forts pour vous soutenir ?

J'aime l'idée de travailler avec des types qui viennent de la même scène que nous. Je ne pense pas qu'il y ait eu tant de challenges que ça pour tourner avec Total Control. On ne va pas si vite que ça en tournée, et en plus on ne tourne pas tant que ça. Je veux dire, ces dernières années, on a tourné tous les ans, on a sorti des albums, mais il y a aussi des moments où on a eu envie de se poser. On ne donne pas trop d'interviews, donc on sait que notre album ne sera pas vendu pendant quelques temps si on n'en fait pas une bonne promotion. Leur défi c'est de vendre tous les albums qu’ils pressent.

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Concernant le nom de l'album, Typical System, il a un rapport avec votre melting-pot musical (qui va de Suicide aux Screamers en passant par Joy Division et même Poison Idea) ? C’est une façon de tourner en dérision le fait d'être « un groupe type » ?

L'idée derrière le nom

Typical System

m'échappe, je ne veux pas vraiment savoir ce qu'il y a derrière. Je ne me rappelle pas avoir pris cette décision, mais je me souviens que quelqu'un avait sorti ce truc, que quelqu'un d'autre avait rigolé et dit que ça ferait un super nom pour l'album. Et c'est ce qui s’est passé. Quand je pense à la manière dont notre groupe fonctionne, je me dis qu'on a vraiment un sens de l'humour foireux, et qu'on met de cet humour partout. On fait de la musique si sombre et déprimante, avec beaucoup de références à des trucs complètement perturbés, mais ça ne serait pas un disque australien si on ne pouvait pas en tourner certains aspects en dérision. Les Australiens ne prennent jamais rien totalement au sérieux, ni la vie, ni la mort, rien. On est obligé d’en rire. C’est peut-être la raison de ce nom. Ça fait très post-punk anglais.

Donc c'est de l'humour noir ?

Sûrement. On aime l'humour noir, d’où le titre.

Vous avez déjà tourné deux fois aux États-Unis. Vous allez y retourner avec ce nouvel album ?

Non, on n'a aucun concert de prévu, on a juste deux concerts dans les semaines à venir et c'est tout. Je suis en tournée au Royaume-Uni avec UV Race et Al Monfort, et parce que la date de sortie de l'album était très proche de mon voyage en Europe, on a juste décidé de faire 2/3 concerts. On n’a rien prévu pour après, on n’est pas un groupe qui fait des prévisions. C'est un truc qui peut être possible. C'est tout ce que je peux te dire (

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rires

).

On dirait que vous sortez un album mais que vous vous en foutez un peu de la promo.

J'ai vraiment hâte qu’il sorte cet album, j'ai l'impression que ça me fera un poids en moins. C'est comme ça qu'on fonctionne, pendant une courte période, on va faire plein de choses, faire des concerts, partir en tournée, sortir un album, et après on va s'éteindre quelques temps. Et c'est assez difficile de parler de cet aspect du groupe.

Lors d’une tournée, on a rencontré un avocat qui voulait nous représenter. C'était un type que personne ne connaissait et qui voulait nous rencontrer. Je ne sais pas pourquoi, je n'avais rien fait de mal (

rires

). Ce n’est pas le genre de trucs qui m’arrive dans ma vie courante. Et c’est avec ce type de situations que je vois le décalage avec la manière dont les gens perçoivent notre groupe. Cette impression colle assez bien à notre façon de faire finalement, ne pas ne pas laisser notre groupe devenir quelque chose de particulièrement important.

Si l’on écrit/enregistre/joue les meilleures chansons que l'on peut faire, c'est avant tout pour la musique. Je pense que c'est la meilleure façon de l'expliquer. On n’est pas convaincu par le concept de promo, parce que l’album est vraiment bon et que les gens l'écouteront, donc on n’a pas besoin de faire des tournées ou des concerts pour pousser les gens à le choper. Notre album sera chez tous les disquaires, et les gens pourront l'écouter sur Internet. Quand je dis qu'on n'a rien de prévu pour le futur, c'est vraiment qu'on n'a rien prévu.

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Avec tous les projets que vous avez en cours, vous gardez quand même des priorités ?

Je pense que c’est ce qui marche sur le moment qui doit définir la priorité. Si tu as un peu de temps libre, tu peux jouer avec d'autres groupes, ok. La plupart des gens qui font de la musique fonctionnent comme ça, ils ont une obsession à un moment donné. Tu choisis un projet et tu t'y dédies entièrement. Ce qui est cool avec tous ces groupes, c'est que tu as toujours une ou deux personnes qui s'y donnent à fond, se chargent de tous les aspects du truc, sans que ça en devienne tyrannique pour autant, où alors une personne dirige tout et les autres se contentent de suivre. La plupart des bons trucs qui arrivent en ce moment sont juste le résultat d’une quantité de travail. Pour moi, le meilleur groupe du moment est Soma Coma. C’est un groupe de hardcore qui existe depuis quelques années, je les ai vu en concert et c'était complétement dingue, la force qu’ils développent sur scène.

On dirait que la scène australienne est hyperactive en ce moment. A part Soma Coma, quels autres groupes vont sortir du lot à ton avis ? Deuxièmement, tu penses que les groupes viennent moins vu que l'Australie est une île et que les villes sont loin les unes des autres, et que cela créer une frénésie dans le pays ?

Ouais, ça fait une dizaine d'années que c'est plus simple pour les groupes de tourner en Australie et de se faire de l'argent, parce que le dollar australien a beaucoup pris en valeur, et ça devient rentable pour les groupes. Les billets de concert ont eux aussi augmenté pour que ce soit également rentable pour les groupes qui tournent à domicile. J’ai constaté que la plupart des groupes qui passaient étaient vraiment moins bon que les groupes locaux qui faisaient leur première partie.

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Les groupes australiens ont plus confiance en eux maintenant, ils ont tellement côtoyé de groupes feignasses qui ne se foulaient pas qu’ils ont appris de ça. C'est une généralité je sais, mais il y a quelques années on a vraiment atteint une certaine force dans la musique australienne, on s’est mis à tourner partout dans le monde et on a vu plein d'autres groupes. On sentait quelque chose de puissant. C'est assez simple de faire de la musique à Melbourne, il y a plein de studios pour répéter et de salles de concert.

Donc, y'a toujours plein de groupes cool, je vais juste te parler de ceux que j’écoute en ce moment. Il y a ce groupe, Dribble, que j'aime vraiment, un autre groupe de hardcore, Gutter Gods, qui ont fait leur dernier concert il y a six mois et qui étaient vraiment très bon. Dribble c'est du punk assez crade, mais avec un côté sympa. Ça sonne comme du vieux punk américain, j'aime bien. Ça fait très punk de New York. Il y a ce type Justin Floor qui jouait dans ZOND, un putain de groupe. Très lourd. Il faisait des solos hyper dark, indus techno impressionnante. Y'a aussi Flat Fix, qui fait de la house bizarre, très bonne. Et puis Russell Street Bombings, fondé par Al et Zeff.

(Vous reconnaissez?)

Al joue dans un millier de groupes, enfin vous êtes tous dans un millier de groupes.

Ouais, Al est un type incroyable. Il a tellement de groupes, et c'est clair que tous ses groupes sont des bons groupes en Australie. J'aime tout ce qu'il fait. Je pourrais te citer plein de groupes, mais ça suffira. C'est vraiment cool d'avoir un groupe à Melbourne. Pour les labels, check ce que fait Cool Death, ils ont du bon, niveau punk et hardcore. Et il y a ce label, Archaic, qui sort de la bonne techno/noise.

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Vous avez joué aux États-Unis avec plein de groupes totalement différents, comme Raspberry Bulbs, The Men, Destruction Unit, Crazy Spirit, etc etc. C’était voulu ?

Ouais. On fait tout par nous-même, on n’a pas de manager. On veut faire de bons concerts avec de bons groupes, et on n'a besoin de personne. C'est la seule façon d'être dans un groupe que l'on connaît, on ne pourrait pas travailler dans un label ou autre.

Si un groupe comme Interpol vous appelait pour que vous tourniez aux États-Unis avec eux. Ça vous brancherait ?

Absolument pas. Parce que si l’on joue avec Interpol, ça signifie qu'on ne joue pas avec Crazy Spirit. Et c'est le genre de groupe avec lequel on a envie de jouer. On ne veut ouvrir pour personne, on ne veut pas jouer avec des groupes comme ça. Ça ne leur plairait pas de tourner avec nous (

rires

). On n'est pas un groupe qui rend bien en dehors d'une petite salle. C'est de la musique faite pour un public réduit. Être dans un stade… Non, je crois pas.

Beaucoup de gens pensent que c'est une antithèse, genre « je vais jouer avec U2, comme ça un maximum de monde nous connaîtra ». Dans votre cas, j’ai l’impression que vous vous souciez plus d’écrire de bons morceaux et de ne jouer que dans des petites salles, que de populariser votre groupe, non ?

Ouais, c’est un truc qui ne nous intéresse pas. On n’en parle même pas. La renommée, etc, ça ne me touche pas. J'ai des choses bien plus importantes auxquelles penser. Les gens pensent à ce genre de choses quand ils assistent à des conférences ou à des meetings bizarres. Ce genre de mecs qui apprend à faire buzzer son groupe sur un iPad. C'est assez dur à comprendre.

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Si tu me files une copie de Typical System là, maintenant, que je me prends une heure au calme pour l'écouter, t’espères que je te dise quoi après?

C'est difficile parce qu’à chaque fois que je sais que quelqu'un a écouté un album auquel j'ai participé, je suis gêné. Que ce soit une critique tranchée ou un commentaire sympa, je serai embarrassé.

T'espères juste que le temps qu'ils ont mis à écouter l'album n'aura pas été du temps gâché. Si quelqu'un me dit que ce n'était pas une totale perte de temps, alors pour moi c’est réussi. Comme j'espère que la personne qui aura lu cette interview jusqu'au bout ne se dira pas que c'était une totale perte de son temps. Les gens n’ont jamais le temps. Aujourd’hui, la seule manière de reconnaître un adulte, c'est qu'il ne te raconte pas à quel point il est crevé ou débordé, parce qu'il est suffisamment adulte pour savoir que

tout le monde

est crevé ou débordé. La seule chose que je peux espérer avec cet album, c'est qu’il ne sera une perte de temps pour personne.

Des plans avec UV Race ?

On va faire une tournée de quelques semaines en Europe. On est déjà aux 2/3 de notre deuxième film, un film de science-fiction. C'est assez barré, et notre second album servira de bande originale. On a décidé de tourner des films en tant que groupe et de sortir les B.O. C’est plutôt logique, notre dynamique dans le groupe est assez cinématographique.