Publicité
Noisey : Tu peux nous raconter d'où tu viens et comment tu as commencé dans la musique ?J'ai grandi dans le Sud de la France. J'écoute de la musique depuis que je suis gamin mais c'est quand je suis parti à Londres quand je faisais sciences po que le déclic s'est fait. J'ai rencontré là bas un pote qui faisait de la musique et tout est parti de là. Il gérait un label et ensuite on a eu une résidence au T-Bar. C'était mes premières expériences de clubs techno, mes premières drogues, j'avais 20 ans et ça a été la grosse claque. A l'époque je ne produisais pas du tout, je suis un peu fâché avec la technologie. Je mixais dans ma chambre depuis des années mais j'avais peur de le faire en club. Cette résidence a été l'occasion de faire les warm-ups des gens qu'on invitait, Jennifer Cardini, Chloé, Weatherall. La prod c'est venu ensuite, toujours par cet ami qui m'a demandé un remix en 2010.Tu ne veux pas le citer cet « ami » ?Danton Eeprom ? Ah si, mais j'ai l'impression que j'en parle tout le temps…T'inquiètes pas, Noisey a défendu son dernier album.[Rires] Ah cool. Bon voilà donc j'ai bidouillé Ableton et j'ai sorti ce remix chez Infine. Je le trouve assez pourrave maintenant mais ça m'a donné envie de m'y mettre. Je suis rentré à Paris et j'ai commencé à envoyer mes prods aux labels que j'aimais bien. J'ai rencontré Clément Meyer et j'ai commencé à participer au blog Get The Curse et j'ai rencontré toute une nouvelle bande (Antinote, DK, Low Jack…)
Publicité
Publicité
Publicité
Tu vas faire ton premier live bientôt je crois, tu peux nous en parler ?Je suis en pleine prépa là. Ca me fait peur car je n'en ai jamais fait. Je n'ai jamais été intéressé par le live en fait. J'ai toujours tellement aimé jouer en DJ que ça ne m'a pas attiré avant. Et puis ma façon de faire de la musique est tellement naïve et pas technologique. Je fais tout à l'arrache avec trois bouts de ficelle. Mais là je me suis dit que ce serait intéressant avec ce nouveau projet, plus hybride et aventureux.Pas mal de gens pensent qu'il y a un côté un requin chez les artistes « techno » qui défendent leurs albums en dj set et attendent de voir si ça fonctionne assez pour se lancer dans un live (ce qui permet aussi de faire monter les enchères). Tu te places comment là dedans ?C'est un truc de rocker de voir les choses comme ça. Je vois pas trop le dj set comme un sous live au contraire. Ce n'est pas du tout une stratégie mais plutôt une envie de me mettre un coup de pied au cul. Je pense que ça peut aussi me donner des idées pour produire. L'idée de December c'est de sortir de ma zone de confort et de ne plus reproduire le schéma du gars qui trimballe ses clés USB le week-end en club et qui glande le reste de la semaine[Rires].L'évolution vers December semble assez marquée par la musique 90's, on pense forcément à Pan Sonic, Alva Noto, Autechre des choses plus indus, noise aussi ….C'est marrant on me parle jamais de ce genre d'influences. Mais oui à fond. L'influence electronica, ambient est très peu revendiquée aujourd'hui, on a presque l'impression que ce sont des gros mots. Dans la scène à laquelle j'appartenais avec Tomas More dont je parlais toute à l'heure j'étais déjà le mec trop dark. J'essayais déjà de ralentir le tempo, aller vers quelque chose de plus IDM, ambient.
J'avais envie de faire un morceau techno ce que je ne fais jamais. Avec Tomas More, il y avait ce délire de lenteur, à 120 bpm avec un petit pied. Cette fois j'avais envie de faire un truc agressif. Je n'étais pas sûr de vouloir le sortir je le trouvais vulgaire. Les gars de Where to Now ? (le label qui édite « On A Leash») pensaient la même chose que moi d'ailleurs. Ils y ont trouvé un côté un peu hit et ont décidé de l'éditer en disque, et pas en K7 cette fois. Et puis je traîne tout le temps avec Phil/Low Jack et je me suis dit que ce serait assez parfait, il s'est bien éloigné du côté techno d'ailleurs. C'est mon morceau le plus bourrin et viril mais je trouve ça marrant. Tu sembles un peu faire le chemin inverse de gens comme Pete Swanson ou Vatican Shadow par exemple qui viennent de la noise et se dirige vers la techno. Tu envisages d'aller vers quelque chose d'encore plus arythmique/ambient, quitte à perdre ton réseau de base ?
Oui carrément, mais je n'ai pas envie de le faire pour le faire : sortir « mon disque chelou ». Mais je préfère avoir des moments comme ça dans mes disques et trouver une sorte d'équilibre entre des choses bizarres et des choses plus dansantes. Tu entretiens quel rapport avec ton image ? Tu as envie de disparaître derrière ta musique ou au contraire que les gens impriment un visage ?
J'aimerais qu'on écoute les disques avant de penser au projet même si c'est naïf. J'aimerais qu'on comprenne la constellation de références dans laquelle je puise et les univers dans lesquels je m'inscris.J'ai pas envie non plus de complètement m'effacer, de ne plus parler de ma vie en interview. Dans le futur, j'aimerais bien développer aussi une approche qui ne se limite pas à la musique, le cinéma par exemple est très important pour moi. J'aimerais bien montrer une facette esthétique que j'avais délaissé avec Tomas More. Dans l'univers club, il y a des enjeux commerciaux mais moins des enjeux d'esthètes. On fait moins de choix. Dans la scène dans laquelle évolue December, on te demande des choix radicaux, des prises de positions esthétiques. Les gens dont tu parlais, Smagghe ou Weatherall, ont un côté rocker dans cette relation à leur image, avec le côté uniforme de la moustache, les tatouages…
Ouais, ça je m'en fous un peu. Ça fait aussi un peu partie du problème. J'ai rien contre eux mais je ne fantasme pas le rock comme eux. Après cette nouvelle scène dont on parlait (LIES, Vatican Shadow, etc.) a aussi ses grandes panoplies, ses chapelles, ses dégaines. Ce que je veux surtout c'est qu'il y ait une cohérence esthétique entre toutes les sorties de December et que les gens pigent la démarche. Après, je ne vais pas jouer au mystérieux pour faire parler de moi…Adrien Durand attend l'hiver bien tranquillement. Il est sur Twitter.