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L'étendard de Teenage Bottlerocket flottera pour toujours sur la terre des Justes

C'était l'un des meilleurs groupes punk de ces dernières années : direct, efficace et mené par deux jumeaux surdoués. L'un d'entre eux, Brendan Carlisle est décédé ce week-end.

Ce week-end, le groupe Teenage Bottlerocket a annoncé le décès de son batteur, Brandon Carlisle, suite à la décision de Ray Carlisle (son frère jumeau et guitariste du groupe) et du reste de sa famille de débrancher les machines qui le maintenaient en vie. Son collocataire l’avait retrouvé sans connaissance il y a plusieurs jours. On ne sait toujours pas si le groupe va continuer, et si c’est le cas, il semble pour l’instant impossible de remplacer Brandon. Car le jeune homme brillait non seulement par son jeu hyper-énergique, mais aussi, comme ne cessaient de le faire remarquer ses amis et compagnons de tournée, par l’esprit qu’il insufflait au groupe. Aux concerts de TBR, le sourire était toujours de rigueur : à la Carlisle, c’est-à-dire au niveau maximal. Et en double ration, qui plus est !

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« C’est le pire jour de ma vie, a confié Ray sur Facebook suite à cette annonce, je n’arrête pas de pleurer. » Difficile en effet de mesurer la douleur que peut générer la perte d’un frère jumeau. Les survivants disent souvent qu’ils se sentent amputés d’une partie de leur âme. On entend aussi régulièrement parler de culpabilité, de claustrophobie, et la douleur est telle que certains envisagent le suicide. Ces deux frères ayant passé l’essentiel de leur vie à tourner à travers le monde, en jouant avec leurs amis une musique qui rendait les gens heureux, on se dit que le désespoir de Ray tient assurément de l’indicible.

via Facebook

Les frères Carlisle ont formé Teenage Bottlerocket en 2001. Musicalement, le groupe n’a rien inventé. Ils n’ont jamais essayé de le faire, ni prétendu expérimenter quoi que ce soit. En 14 ans d’existence, le quartette du Wyoming n’a cessé de rendre hommage au punk rock dans sa forme la plus classique — quatre accords, des structures couplet-refrain et de la rapidité. Une rapidité phénoménale.

« Quand on a commencé Teenage Bottlerocket, on se disait ‘On s’en fout, on veut porter des blousons en cuir, nos Converse et composer des chansons qui nous parlent et ça sonnera comme ça sonnera !’ » avait récemment déclaré Ray dans une interview.

Et c’est une bouffée d’air pur, vraiment. Dans une scène où de nombreux groupes prétendent réinventer le genre ou le tirer dans toutes les directions avec des degrés de réussite divers, il est appréciable qu’un groupe comme TBR ait humblement opté pour la simplicité. Et tandis que la définition du « pop-punk » n’a cessé de s’élargir avec les années, au point qu’on voit aujourd’hui des groupes qualifiés de la sorte juste parce qu’ils conjuguent mélodies et teintures capillaires, TBR n’a cessé de porter l’étendard de ce style dans ce qu’il a de plus noble et de plus pur, perpétuant une tradition héritée de 7 Seconds ou des Ramones. Et il suffit de regarder des photos de Brandon pour voir à quel point il avait (littéralement) cette musique dans la peau : un tatouage Screeching Weasel sur l’épaule et l’emblème des Ramones sur sa poitrine, juste au-dessus de « Carlisle ».

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via Instagram

De plus, les paroles de Teenage Bottlerocket sont intemporelles, ignorant les problèmes politiques circonstanciels pour se consacrer à la jeunesse de banlieues résidentielles, aux filles, au skate. Trentenaires, les musiciens faisaient presque figure de modèles dans la scène punk actuelle, transcendant et fédérant les générations. Ils brûlaient tout simplement de la même flamme que celle des Descendents quand ils ont sorti I Don’t Want to Grow Up.

Et même les pochettes des albums de TBR restent aussi pertinentes qu’incroyablement simples avec le même artwork d’une tête de mort sur fond de tibias entrecroisés mais avec une couleur différente à chaque fois. D’abord un rose vif, puis du jaune pétard, du vert fluo… On se souvient également de leur T-shirt qui reprenait le logo des Ramones à leur compte. Bien sûr, rien de nouveau sous le soleil, beaucoup l’ont fait avant eux mais chez Tennage Bottlerocket, le clin d’œil tenait vraiment plus de l’hommage sincère que de la parodie.

via Instagram

Ne vous méprenez pas : cet article ne veut surtout pas dénigrer le groupe, suggérer qu’il était banal ou quoi que ce soit, c’est même tout l’opposé. Ce que TBR a fait en revenant à une version épurée d’un genre assez simple (et qui se répète depuis une trentaine d’années), c’est de veiller à y injecter tout de même la dose de personnalité nécessaire pour en faire un truc éminemment jouissif, ce que beaucoup ont vainement tenté de faire avant eux.

Ce qui fait qu’à sa façon, Teenage Bottlerocket est véritablement un groupe unique, qui aurait pu sortir ses disques en 1979, 1994, 2015… et même plus tard. Certes, ils n’ont pas réinventé la roue, mais ils l’auront bien fait tourner, et à un rythme d’enfer.

Dan Ozzi est sur Twitter - @danozzi