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Music

Range Tes Disques : Primus

On a demandé à Les Claypool de classer les disques de son groupe, du moins bon au meilleur.

Range Tes Disques est une rubrique dans laquelle nous demandons à un groupe ou un artiste de classer ses disques par ordre de préférence. Après Korn, Slipknot, Lagwagon, Hot Chip et Manic Street Preachers, on passe aujourd'hui à Primus, avec le chanteur/bassiste Les Claypool, qui revient sur les 7 albums de son groupe (il a volontairement laissé de côté le dernier en date, Primus & The Chocolate Factory), de celui qu'il trouve le moins bon, à celui qu'il considère comme le meilleur.

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7. Antipop (1999)

Noisey : Pourquoi est-ce que c'est l'album que tu aimes le moins ?
Les Claypool : En grande partie parce que cet album correspond à une période difficile pour le groupe — pour moi, en tout cas. On ne s'entendait plus vraiment. Je suis bien content qu'on ait fait une pause à la fin des années 90… Cette pause, c'était une manière de dire que le courant ne passait plus entre nous mais qu'on n'avait pas assez de couilles pour se séparer. Et on a heureusement stoppé la machine juste avant de se mettre à faire des trucs vraiment merdiques — même si avec cet album, qui part dans tous les sens, on n'en était pas loin. Il y a de bons morceaux dessus, mais il n'est vraiment pas au niveau de nos autres disques. La musique est censée refléter ta vie ou une période de ta vie. Quand ils écoutent un disque, les gens se souviennent de ce qui se passait à l'époque dans leurs vies. Et nous, à l'époque d'Antipop, on ne s'entendait plus. Du coup, cet album ne m'évoque pas de très bons souvenirs.

Tu as dit que cet album partait dans tous les sens. Vous avez invité plein de producteurs différents dessus, tu penses que ça a joué ?
Oui, ça montrait qu'on allait complètement à la dérive. Cela dit, grâce à ces collaborations, on retrouve quand même quelques bons trucs sur l'album comme les morceaux avec Tom Waits, Stewart Copeland, Tom Morello ou encore Matt Stone, qui a produit un titre du disque. Ces mecs ont apporté beaucoup de choses incroyablement positives à l'album. Mais dans l'ensemble, Antipop, reste le disque que j'aime le moins.

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6. Tales From The Punchbowl (1995)

Pourquoi l'avoir mis en 6ème position ?
À mes yeux, Brown Album et Punchbowl se valent. Ce n'est pas que je ne les aime pas, c'est juste que je ne les aime pas autant que les autres albums. Le seul album qui m'a vraiment laissé un goût amer, c'est Antipop. Les autres représentent bien ce qu'on voulait retranscrire à l'époque où ont les a faits, et j'en suis très fier.

Il y a de bons titres sur Punchbowl. C'est le premier album qu'on enregistrait chez moi. Je venais d'emménager au Rancho Relaxo, au milieu de nulle part. Une tempête venait de passer sur la ville, la plus grosse tempête depuis plusieurs années. Elle a tout détruit sur son passage et pour finir l'enregistrement, on a du louer un générateur électrique Honda. Punchbowl est aussi le dernier album sur lequel joue Tim Alexander [ex-batteur du groupe]. On commençait déjà à s'éloigner. Au lieu de jouer ensemble ou de répéter, on passait le plus clair de notre temps en studio à écrire.

Aujourd'hui encore, on continue de jouer certains morceaux de l'album sur scène. « Southbound Pachyderm » est d'ailleurs l'un de mes morceaux préférés du groupe. Il est tellement agréable à jouer, c'est un morceau très structuré. « Electric Gravepine » aussi, on le joue souvent. Il y a beaucoup de titres très puissants sur cet album, mais dans l'ensemble, il est plus décousu que Pork Soda ou Sailing The Seas of Cheese, et pourtant ça ne faisait pas longtemps que Tim était parti…

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5. Brown Album (1997)

Quand je t'ai demandé de choisir, tu as préféré mettre Brown Album devant Punchbowl. Pourquoi ?
J'ai adoré travailler sur Brown Album. Le groupe prenait un nouveau départ avec l'arrivée de Brian « Brain » Mantia dans l'équipe. Il y avait une nouvelle étincelle. On a décidé de faire un album très brut. Pour l'enregistrement, j'avais acheté un vieux magnétophone 16 pistes à bandes. Larry « Ler » LaLonde [guitariste] et moi, on était de gros chineurs et on avait dégoté plein de trucs dans des brocantes et chez des prêteurs sur gage — des vieux compresseurs et tout plein d'autres trucs qu'on utilisait d'un tas de façons différentes. Brown Album a vraiment été une grosse expérience niveau sonore [Rires]. On a quand même bien galéré , mais ça reste un bon souvenir. Tim jouait toujours avec cette grosse batterie qui rappelait celle de Bill Bruford ou Neil Peart, donc quand Brain est arrivé, on l'a poussé à acheter une grosse batterie Vistalite pour vraiment ressembler à John Bonham. On est parti dans un truc totalement Bonham-esque— avec très peu de micros, beaucoup de compression et des prises de son directes en salle, jusqu'à ce qu'on se retrouve avec Brown Album.

4. Green Naugahyde (2011)

Pourquoi celui-ci arrive à mi-parcours ?
J'aime vraiment cet album. Ces derniers temps, on joue beaucoup de titres de ce disque sur scène. Notre ex-batteur, Jay Lane, était de retour parmi nous. On était de nouveau tous les trois, comme au début, et on était très excités à l'idée de faire ce disque ensemble. Dans les années 90, Primus faisait un album, une tournée, puis un autre album avant de repartir en tournée, et ainsi de suite. Durant ces années on a été, de loin, plus productifs que la plupart de nos contemporains. Tool par exemple, sort un album tout les trois ou cinq ans, nous, chaque année on débarquait avec du neuf. C'était cool, mais ça a bien failli nous tuer aussi. Ce break entre 2000 et 2010 nous a sauvés — ça m'a permis de me sonsacrer à différents projets de mon côté, et les autres aussi d'ailleurs. Et puis on est revenus, avec Jay Lane. De tous nos batteurs, c'était mon favori. On était donc remontés à bloc pour cet album.

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En tant que bassiste — et je m'en suis rendu compte quand j'ai fait l'album d'Oysterhead — j'ai réalisé que j'approchais les morceaux de manière très différente quand ils étaient écrits par quelqu'un d'autre. On voit bien le contraste avec les titres que j'écris moi et qui sont vraiment construits autour de la ligne de basse. C'est un album sur lequel j'ai pris plaisir à travailler et qui, en plus, a été bien accueilli par la critique. Beaucoup de groupes revenaient ou se reformaient à l'époque, et j'ai l'impression que de tous ces come-backs, le notre était un des rares à s'inscrire parfaitement dans la continuité de notre discographie — je ne veux pas citer de noms, mais à l'époque certains groupes revenaient avec des albums sur lesquels on ne retrouvait rien de ce qu'on aimait chez eux…

Ça a été dur de retrouver votre son ou bien c'est revenu naturellement ?
Je n'aime pas quand les choses ne se font pas naturellement. Quand on me force à faire quelque chose, ça me braque et je pars immédiatement dans la direction opposée, avec d'autres gens. Sur cet album les choses sont venues naturellement. Green Naugahyde me rappelle nos débuts, l'époque où Jayski était dans le groupe, avant que Tim nous rejoigne. Ce mélange entre le jeu de Jayski, qui a un swing très subtil, et celui de Tim, qui, lui, est un vrai bûcheron. C'était vraiment plaisant de revenir à tout ça. Cet album a aussi poussé Jay a faire des choses plus sombres. Aujourd'hui, je continue à penser que c'est vraiment un super album

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3. Pork Soda (1993)

Pourquoi selon toi, Pork Soda mérite cette troisième place ?
Simplement parce qu'il ne pouvait pas être numéro un ou numéro deux pour moi. [Rires] A mes yeux, nos trois premiers albums — je mets de côté l'album live— représentent l'essence même de Primus. On était au top de notre forme, notre moteur était rutilant. C'était la belle époque. Sur Pork Soda on a fait quelques essais. Avec chaque album, on tourne une nouvelle page et on essaye de déterminer ce qu'on va faire, tant au niveau de la composition que sur le plan sonore. Pork Soda, était une réflexion autour des nombreuses tournées qu'on avait faites les années précédentes. « My Name Is Mud » est né avant qu'on rentre sur scène au Greek Theatre de Berkeley. Je jouais de la basse en backstage et mon père, qui était présent, m'a dit « Hey, c'est pas mal, ça ! » C'est comme ça qu'est né le morceau. Il me semble qu'en terme de ventes, c'est notre plus gros succès.

C'est aussi le premier album que vous avez enregistré vous-mêmes. Quel a été l'impact sur le processus d'enregistrement ?
Pour The Seas of Cheese, on avait pris l'argent de notre maison de disques et on avait été dans de gros studios ultra-sophistiqués. Chez moi à Berkeley, je faisais pas mal d'enregistrements sur une petite Tascam 388. J'avais vraiment envie d'utiliser tous ces vieux boutons, alors on a engagé un ingé-son et on a tout fait dans notre salle de répète. On a ramené tout le matos qu'on utilisait en live. On a aussi utilisé la même console qu'en live. C'était les débuts de l'ADAT et on a ramené plusieurs, on les a empilés et on s'est mis à bosser. On a enregistré cet album dans des conditions live. C'était bien avant que Pro Tools existe. C'est drôle car j'ai remixé Seas of Cheese il y a quelques années pour faire un mix en 5.1 et j'ai été surpris — comme pour Pork Soda — par le peu de prises qu'on avait fait pour ces disques. Jamais plus de deux ou trois — parfois même une seule et, BAM, c'était dans la boîte !

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Beaucoup de gens ont trouvé Pork Soda nettement plus sombre que vos albums précédents.
Je ne suis pas tout à fait d'accord. C'était une belle époque, une époque joyeuse. [Rires] Ce n'est pas comme si on avait essayé de parler d'un drame personnel ou d'un truc du genre. Après, oui, c'était peut-être un disque plus intense que les autres. A cette époque j'utilisais de plus en plus la basse six cordes. Et puis, la pochette de l'album est noire. Pork Soda, pour nous, c'était juste une nouvelle étape dans ce parcours absurde, qui nous avait ouvert les portes de MTV et des stations de radios alors qu'on était ce groupe bizarre, auquel il peut être difficile de s'habituer, un peu comme, justement, un soda au goût de viande de porc.

2. Sailing The Seas Of Cheese (1991)

OK, alors Seas of Cheese en numéro 2.
Seas of Cheese est sûrement notre album le plus respecté, mais c'est aussi un disque qui disait « Ça y'est, nous y voilà, on est sur le point de sortir un album sur une major, et on va être marketés comme tous les autres grands groupes du moment », c'est à dire, à l'époque tous ces groupes de chevelus genre Poison et Guns N' Roses, bref, des gens avec qui on n'avait aucun point commun. On allait se retrouver projetés dans ce monde où des tas de gens allaient sûrement penser que nous n'avions pas notre place. C'était à double tranchant, ça passe ou ça casse. On allait « naviguer sur les mers du ridicule » [Sailing The Seas Of Cheese, « cheese » signifiant en argot « nase, ringard, ridicule »]

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Voter arrivée en major a eu un impact direct sur l'album ?
On a eu de la chance d'être chez Interscope, qui, à l'époque, était un petit nouveau dans la jungle impitoyable des majors, même s'il était déjà puissant et connaissait très bien le milieu. Le label avait ce côté grosse major mais conservait un côté indépendant. Ce projet était le deuxième album que sortait Interscope — le premier c'était l'album de Gerardo, Rico Suave. C'était vraiment une époque intéressante. Suite au succès de Frizzle Fry, toutes ces maisons de disques qui nous avaient ignorés pendant des années sont venues toquer à notre porte. Tom Whalley d'Interscope est le seul à être venu nous voir en concert, par accident certes, mais il nous a vu, a vu la ferveur du public, et nous a immédiatement signés, sans même savoir qu'on venait de vendre 80 000 exemplaires de notre premier album, Frizzle Fry. On allait sortir le deuxième album de l'histoire d'Interscope. On a rencontré beaucoup de monde. C'était une période incroyable, on a fait parti des premiers acteurs de l'histoire Interscope et aujourd'hui le label est devenu l'une des plus grosses entités du monde de la musique.

1. Frizzle Fry (1990)

Pourquoi est-ce que le premier disque du groupe reste ton favori ?
Frizzle Fry est mon album préféré car il représente une période incroyable de nos vies. On était jeunes, on commençait à faire notre trou, on proposait quelque chose de différent, on réalisait des choses dont personne ne nous croyait capables — même nous n'y croyions pas ! Tu sais quand tu es jeune, tu n'as pas de famille, pas de gosses, donc à cette époque, pour nous, le monde se résumait à notre groupe. C'était vraiment une époque incroyable.

Justement, à l'époque, vous étiez surtout réputé pour vos prestations live et votre tout premier disque, Suck On This, était d'ailleurs un disque live. Frizzle Fry a été votre toute première expérience en studio. Comment avez vous vécu cette transition ?
On a adoré faire ce disque live, qui a bien marché, qui a permis de nous faire un nom et avec Frizzle Fry, on a adoré pouvoir reprendre ces titres qu'on jouait depuis un bout de temps et les retravailler en y ajoutant plein de nouveaux éléments — en travaillant avec le producteur Matt Winegar, par exemple, ou en faisant participer nos potes pour le Fart Sandwich Posse [un back réalisé lors d'une session studion assez animée] C'était incroyable. On devait être défoncés les trois quart du temps. Mais on avait le sentiment d'accomplir de grandes choses, de faire quelque chose de nouveau, d'excitant. On ne se prenait pas la tête, les seules choses qui nous préoccupaient c'était de sortir et de faire de la musique. On jetait des nouilles sur le mur et on voyait ce que ça donnait. Et mec, c'était des putain de nouilles.

Primus sera en concert ce vendredi 12 juin à Paris, au Trianon. Bill Jones est sur Twitter.