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Music

Range Tes Disques : Manic Street Preachers

On a demandé à James Dean Bradfield de classer les disques de son groupe, du moins bon au meilleur.

Photo — Alex Lake Ranges Tes Disques est une rubrique dans laquelle nous demandons à un groupe ou un artiste de classer ses disques par ordre de préférence. Après Korn, Slipknot, Lagwagon et Hot Chip, c'est au tour de James Dean Bradfield, le leader de Manic Street Preachers, de nous présenter les 12 albums du groupe, de celui qu'il trouve le moins bon à celui qu'il considère comme le meilleur.

12. LIFEBLOOD (2004)

Pourquoi est-ce le disque que tu aimes le moins ?
Pendant l'écriture de cet album, on a été frappé par une espèce de paralysie. On était peut-être simplement à cours d'inspiration, en attente de trouver une facette du groupe que nous ne connaissions pas encore. On était partis sur un mode opératoire un peu bizarre : mettre de côté notre première idée et écarter également la deuxième, pour en chercher une troisième. On écrivait un morceau et, immédiatement, on essayait d'aller contre notre instinct en le jouant différemment. Et puis on a très peu joué esnemble sur ce disque, il n'y a quasiment aucune prise live. J'enregistrais mes lignes de chant et les guitares, après quoi Nick et Sean sont passés pour enregistrer leur parties séparément. Il y a quelque chose de virtuel, de totalement déconnecté du réel, dans ce disque. Ça ne sonne pas naturel, on ne se reconnait absolument pas dedans. On s'est volontairement mis dans une position difficile et, le moins qu'on puisse dire, c'est que ça n'a pas payé.

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11. KNOW YOUR ENEMY (2001)

Je crois que c'est l'album des Manic Street Preachers qui a été le moins bien accueilli par le public.
Je pense que le malaise qu'on a connu avec Lifeblood est justement dû à Know Your Enemy, qui était lui-même une réaction au succès qu'on rencontrait alors en Europe et un peu partout dans le monde, excepté aux États-Unis. On avait vendu des millions d'exemplaires de Everything Must Go et This Is My Truth et on voulait réagir à ça. On pensait avoir perdu notre côté punk. Même si on le sentait toujours dans nos paroles et sur scène, on trouvait que notre son devenait trop policé. On pensait être tombés dans le piège du succès, ce qui était totalement con. Aujourd'hui, avec du recul, quand je repense à tous ça, je me dis « Putain, quel idiot j'ai été ! » Du coup, avec Know Your Enemy on a essayé d'être plus spontanés, plus naturels. On balançait un max de trucs sans se soucier de la production. Résultat, la plupart des titres sont bâclés, à moitié finis. Ce n'est pas de la faute du producteur, c'est la notre. On l'a mis au pied du mur en lui disant : « On veut que tout ça reste authentique et on veut que ça avance vite. » On n'a rien fait pour que cet album puisse respirer et sonner correctement. Ce n'est pas surprenant que Know Your Enemy et Lifeblood se retrouvent en bas de tableau car, comme je l'ai déjà dit, à cette époque on était en plein malaise, on essayait de réagir face à notre propre succès et on s'est trop pris la tête sur certains points.

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10. GOLD AGAINST THE SOUL (1993)

C'était un deuxième album difficile.
Je n'ai pas grand chose à reprocher à Gold Against The Soul , c'est un deuxième album on ne peut plus classique. Tu sais, quand tu sors un premier album et que tu as du succès, tu prends en grade, les gens commencent à savor qui tu es, et tu peux vite perdre le Nord. Je pense que Gold Against The Soul a souffert de ce succès et de la confusion qui en a résulté au sein du groupe. Au niveau des textes, cet album est, pour moi, l'un de nos moins bons. Je commence toujours par écrire les textes pour ensuite composer la musique. Quand je compose, je garde les paroles sous les yeux, et je pense que sur ce coup là, on était un peu à côté de la plaque. Sur cet album, les solos de guitare sont nettement plus engagés que les textes. [Rires] Après notre premier album, on a connu un succès d'estime en Grande-Bretagne, dans certains pays d'Europe et au Japon. Et on s'est un peu perdus.

Tu penses que ça a eu un impact sur The Holy Bible ?
Oui, sûrement. Je n'avais jamais vu ça comme ça, mais tu as peut-être raison. Les gens cherchent toujours à savoir ce qui t'a influencé sur un album. Et généralement, tu réponds en citant d'autres musiciens, d'autres morceaux. Mais je n'avais jamais réalisé que la véritable source d'inspiration d'un disque pouvait tout simplement être l'album précédent. Donc oui, je pense que si The Holy Bible est un disque aussi brut, rageur et intense, c'est grâce à Gold Against The Soul. Sur Gold Against The Soul, on avait pris une mauvaise direction; on devenait un peu trop rock et arrogants. Mais on a réussi à se dépatouiller de tout ça et on a réussi à enchaîner avec un album unique, sans compromis.

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9. JOURNAL FOR PLAGUE LOVERS (2009)

Sur cet album, on retrouve plusieurs textes de Richey [second guitariste du groupe, qui a disparu dans de mystérieuses circonstances en 1994].
C'est un album qu'on se devait de faire. On devait honorer ce contrat moral qu'on avait passé avec Richey. Quand il nous a quittés, le seul truc qu'il nous a laissé, ce sont ses trois carnets de paroles. Pendant des années, on les a laissés dans nos tiroirs. On savait qu'un jour ou l'autre on en ferait quelque chose, car quand un ami avec qui vous avez travaillé pendant plusieurs années vous laisse un tas de textes, eh bien, un jour, il faut les utiliser. L'idée de lui rendre hommage et d'honorer sa mémoire nous trottait forcément dans la tête depuis un moment, alors quand on a senti que le moment était venu, on s'est lancés. C'était une expérience vraiment incroyable. C'était même plus important que la sortie de l'album car pendant tout ce temps, on a eu l'impression que Richey était encore parmi nous. On a utilisé ses textes, mais on a aussi réfléchi à ce qu'il aurait aimé entendre en termes de composition et d'enregistrement. Si j'ai mis Journal For Plague Lovers à cette position c'est simplement pour le coté nostalgique et assez bizarre de cette expérience au cours de laquelle on a eu l'impression d'être à nouveau quatre. Le résultat final importait peu comparé à l'expérience en elle-même. Je ne le réalisais pas forcément à l'époque mais aujourd'hui, oui.

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Vous n'avez sorti aucun single de cet album ?
Non, de toute manière il n'y avait pas vraiment de titre exploitable sur cet album. C'est quelque chose qu'on savait dès le début. Le disque ne fonctionne que dans son ensemble, à cause de tout ce truc autour des paroles. Si on avait sorti des singles, tout le travail autour des lyrics de Richey serait tombé à plat.

Nicky a dit que cet album aurait pu porter préjudice au groupe, sur le plan commercial. Tu es d'accord ?
Oui. Il y a toujours une certaine disparité chez nos fans. Certains aiment les Manics de Everything Must Go, This Is My Truth et Send Away The Tigers, avec des morceaux épiques, dans une veine rock très classique, alors que d'autres préfèrent les Manics des débuts, plus sombres et volontairement prétentieux, qu'on retrouve sur The Holy Bible ou Know Your Enemy. Notre dernier album, Futurology est dans cet esprit là aussi. Ça n'arrête pas de changer et il y a parfois un peu d'incompréhension entre nos fans et nous.

8. GENERATION TERRORISTS (1992)

OK, votre premier album.
Je n'ai que des bons souvenirs de cet album, et j'aime le fait qu'il sonne un peu daté. Il y a quelques horreurs dessus, j'en conviens : la nouvelle version de « Spectators of Suicide » est un échec total et celle de « You Love Us » donne plus l'impression qu'on vient de L.A. que du sud du Pays de Galles. [Rires] Mais j'aime le côté à la fois fantaisiste et désanchanté de ce disque. J'aime ce mélange de rock XXL et de slogans situationistes. Écouter cet album, pour moi, c'est comme parcourir un vieil album photo. Tu revois des coupes de cheveux, des looks, des manteaux, des jeans, des vestes, des baskets, des sneakers, et sur certaines photos tu vas te dire « Mais à quoi je pensais à l'époque, au juste ? ». Mais c'est cool, ce sont les souvenirs d'une vie passée. Ça montre qu'on a vécu un truc fort et qu'on l'a fait à fond. Generation Terrorists a le côté invincible et irresponsable de la jeunesse. On peut pointer pas mal de trucs du doigt sur ce disque, mais à l'arrivée, il tient debout, parce que c'est l'oeuvre de quatre types passionnés. Il n'est pas forcément original, mais il est unique.

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Votre but initial était de vendre ce disque à 16 millions d'exemplaires et de vous séparer ensuite. Rien de tout ça n'est arrivé.
Tout à l'heure je parlais de la dichotomie qui existait au sein de notre public. Eh bien, elle existait aussi au sein du groupe. Sean et moi n'étions pas aussi franc-tireurs que Nick et Richey qui tapaient vraiment sur tout ce qui était à la mode et avaient des idées assez radicales et impossibles à réaliser. Ils aimaient l'échec autant que la réussite. Dans une sens, je peux comprendre ce qu'ils attendaient en se fixant ces objectifs inatteignables. Je connais Nick depuis très longtemps, ça a toujours été mon meilleur ami et il a toujours eu ce côté un peu fantasque. Ça ne m'a jamais dérangé, au contraire. Faire parti de toute cette folie me plaisait. Je trouvais ça distrayant.

7. THIS IS MY TRUTH, TELL ME YOURS (1998)

En plus d'être votre album qui a connu le plus de succès, c'est aussi le premier disque sur lequel Nicky s'est occupé des textes seul.
C'est probablement l'album qu'on a le plus vendu : quatre millions et demi d'exemplaires à travers le monde. Plutôt pas mal. En plus comme tu l'as dit, Nick se retrouvait seul pour écrire, sans Richey. Les gens ne peuvent pas réellement imaginer la difficulté que ça représentait pour Nick. Lui et Richey avaient des tas de textes ensemble : « Motorcycle Emptiness », « You Love Us », « La Tristesse Durera » et la majeure partie de The Holy Bible. C'était des partenaires incroyables qui étaient capables de se connecter dans l'écriture comme deux musiciens peuvent le faire lors d'une impro. Sur certains titres, on sent que Nick n'est plus traumatisé par la disparition de Richey. Le texte de « If You Tolerate This » — qu'il a écrit seul— est très bien construit, c'est une déclaration. Je trouve ce texte vraiment incroyable. Tout comme « My Little Empire ». Les paroles sont très brèves, elles vont à l'essentiel, mais elles sont terriblement clairvoyantes : elles n'expriment ni pitié, ni rage, ni désillusion. Mais même si certains textes de l'album font parties de mes favoris, j'ai quand même du mal à me reconnaitre dans cette version embourgeoisée du groupe. C'est un disque beaucoup plus soft, dans lequel on ne retrouve pas le coté punk qu'on avait au début du groupe, et qui reviendra par la suite.

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6. POSTCARDS FROM A YOUNG MAN (2010)

Après Journal For Plague Lovers, vous aviez envie de repasser en radio apparemment.

Oui, c'est ce que disait Nick ! [

Rires

] Pour lui, c'était « notre dernière tentative de communication de masse ». Je comprenais ce qu'il voulait dire par là car à l'époque en Angleterre, la pop était partout, jusque dans les émissions de télé-réalité. Et le rock et les guitares étaient donc sur le point de revenir en force. Même quand

Postcards From a Young Man

est sorti, on a commencé à sentir que les guitares n'étaient plus trop à la mode, qu'on n'en trouvait quasiment plus dans les charts, et que ça allait forcément revenir. Ça nous a guidés, inconsciemment. On croyait toujours au pouvoir des morceaux rock de trois minutes trente bourrés de messages. Sur cet album, Nick a écrit des textes magnifiques. « All We Make Is Entertainment », par exemple, est un morceau ultra-politisé, dissimulé sous une métaphore inoffensive. Si tu écris sur la politique, on va forcément dire que tu es un vieux grincheux, mais réussir à faire passer un vrai message politique de façon subtile est une vraie prouesse. J'ai adoré faire ce disque.

5. REWIND THE FILM (2013)

Cet album a vraiment révélé une nouvelle facette du groupe.
Comme je te le disais tout à l'heure, il arrive parfois qu'un groupe se perde en essayant de faire quelque chose de différent. Pour Rewind the Film, il s'est passé exactement l'inverse. L'idée de faire un album acoustique nous trottait dans la tête depuis un bout de temps déjà. On en avait déjà parlé en 1993 quand Richey était encore avec nous. Il nous disait qu'il adorerait faire un album dans le style de Nebraska de Bruce Springsteen. On s'est un jour retrouvés avec ces morceaux qui fonctionnaient parfaitement tous seuls, sans arangements, et on a tenté le coup. Ça s'est fait très naturellement. Et ça a marché. Ça a aussi montré qu'on pouvait écrire des textes plus intimes et introspectifs, en mettant de côté la politique. C'est cool que cet album ait connu autant de succès au Royaume-Uni. C'était un disque très inhabituel pour les Manics mais il a été très bien accueilli, donc c'est gratifiant.

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4. SEND AWAY THE TIGERS (2007)

Cet album marque un vrai tournant pour le groupe.
C'est vrai. On signait notre retour après trois ans d'absence. On ne s'était pas séparés, mais on avait fait une pause pour prendre un peu de temps pour nous. Nick et moi on a fait un album solo chacun et on a réussi à s'extraire du marasme dans lequel on se trouvait à l'époque de Know Your Enemy et Lifeblood. Je suis hyper fier de ce disque parce qu'on l'a sorti à un moment où on ne pensait plus pouvoir être capables de sortir un album de ce calibre, à la fois classique et direct, accessible et ultra-politisé. C'était cool, on était arrivés à un point où, au niveau de l'écriture, nos rôles pouvaient s'inverser et on apportait tous des modifications quand c'était nécessaires. On avait l'impression de revenir à l'époque où on jouait dans le salon de mes parents au Pays de Galles. On écrivait un truc et si dans les dix minutes ça ne le faisait pas, on recommençait. L'album a vraiment bien marché au Japon et en Angleterre. C'était vraiment cool de voir le groupe porté par cet album, de voir les gens chanter les morceaux en concert.

3. FUTUROLOGY (2014)

Vous avez sorti cet album moins d'un an après Rewind The Film. Ce sont deux disques qui vont de paire ?
Non, ils sont seulement liés par le temps car ils ont été écrits et enregistrés à la même époque. En studio, on n'arrivait pas à s'arrêter, et on a réalisé qu'on était en train de construire deux albums distincts. On a gardé sept titres pour Rewind The Film et les autres morceaux nous ont servi de base pour Futurology. On s'est rendus compte que les paroles de ces titres étaient basées sur la culture et la politique européenne. Ils avaient un coté Krautrock, avec ce beat motorik. C'est une bonne chose d'avoir fait ces deux albums si tard dans notre carrière. C'est un album dans lequel Richey aurait pu se retrouver, tant dans les sujets abordés que dans les styles musicaux. Ce n'est pas forcément le projet le plus expérimental qu'on ait fait, mais on voyait bien que l'objectif n'était pas d'en sortir des hits. « Europa Geht Durch Mich », qu'on chante en anglais et en allemand, ou « Black Square » ne sont pas des morceaux taillés pour les charts. On a rebossé avec l'ingé-son qui avait travaillé sur The Holy Bible, et ça lui a donné une couleur particulière, plus brute. C'est sans doute le disque qui se rapproche le plus de ce qu'on est vraiment.

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2. THE HOLY BIBLE (1994)

Vous rejouez cet album sur scène en ce moment. Comment ça se passe jusqu'à présent ?
Super ! J'aime jouer cet album car il est très technique. Il y a des structures très bizarres, très complexes, mais au final, tout s'imbrique. Et avec le nombre de lyrics que je dois débiter, je dois toujours être attentif. Mes solos sont vraiment compliqués et partent dans tous les sens, il y a des morceaux où la basse suit une structure totalement différente de tout le reste. tu dois donc être hyper-concentré. Les gens me demandent souvent : « C'est difficile de chanter ces textes, 20 ans après, sans Richey à vos cotés ? » Mais au risque d'en décevoir certains, j'ai tellement passé de temps à me concentrer sur l'apsect technique de ces morceau que je n'ai pas eu le temps de penser à tout ça.

Mais sur le moment, en 1993, c'était difficile de chanter ces textes, vu leur noirceur et les épreuves que traversait Richey ?
Comme je te l'ai dit, pour moi le challenge était surtout technique. Il fallait que tout se conjugue et s'imbrique. Donc après avoir écrit les lyrics, il a fallu composer la musique qui allait avec. Ça a été une vraie épreuve physique pour moi. Quand tu regardes les lyrics tu te dis « Putain! » Puis tu te mets à écrire un truc qui puisse coller à ces textes. Tu fais des essais, tu enregistres et tu te redis « Putain ! » Je me rappelle qu'à l'époque, je ne captais pas certains trucs écrits par Richey et je devais lui demander ce à quoi il faisait référence. Notamment le morceau « Of Walking Abortion, » qui comportait deux noms que je ne connaissais pas. Donc j'ai fait mes propres recherches. Le truc assez bizarre à propos de nous, et de Richey, c'est que nous étions tous des mordus de sport, ce qui ne collait pas vraiment avec notre image indie. On avait une attitude très : « C'est parti ! Vous allez vous prendre une branlée ! ». C'était cool, j'adorais ça. J'adore le coté sport de haut niveau qu'il y a dans la création d'un album.

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Vous comprenez tout l'attrait qu'il y a pour cet album ?
Totalement. C'est un aperçu d'une période très particulière dans la vie du groupe. Pour beaucoup de gens, un « classique » est un disque qui transcende son époque. Je ne suis pas d'accord. Pour moi, un « classique », c'est justement un album qui définit précisément une période donnée. Il a sa place à un moment et à un endroit précis. Comme The Holy Bible. A l'époque on était de jeunes hommes terrifiés par l'horreur économique et politique que représentaient les USA. On était obsédés par la politique américaine. On regardait ça de loin, mais ça nous fascinait totalement. On en parle dans « Ifonlywhiteamerica… ». Dans « Of Walking Abortion » on parle de l'Histoire américaine d'après-guerre — une période que Richey a beaucoup étudiée. Il y avait aussi des morceaux comme « Archives of Pain », dans lesquels on parle des limites de plus en plus troubles entre la droite et la gauche, dans l'Europe des années 1990. C'étaient des sujets d'époque. Aujourd'hui, si on abordait tous ces thèmes, ça n'aurait pas du tout le même effet. Je ne dirais jamais qu'on était aussi bons que The Clash, mais leur premier album non plus n'a pas transcendé son époque. Cet album est morne et glauque, il sonne comme l'année 1977. Et The Holy Bible a cette vibe post-idéologique complètement niquée, typique de la première moitié des années 90.

1. EVERYTHING MUST GO (1996)

Je me demandais si tu mettrais celui-ci ou The Holy Bible en numéro 1.

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Ça peut paraitre étrange, mais c'est assez dur de dissocier

Everything Must Go

de

The Holy Bible

. C'est pour ça que je les ai mis à la suite.

Everything Must Go

est le dernier album qu'on a fait avec Richey. Sur cet album on retrouve « Kevin Carter » qui est vraiment caractéristique de Richey. C'est d'ailleurs un titre qu'il avait écrit seul. Comme « Small Black Flowers » ou « Removables ». On trouve aussi des morceaux qu'il a composé à 50 %, comme « The Gril That Wanted To Be God » et « Elvis Impersonator ». On peut vraiment aborder cet album de différentes façons. Je ne suis pas sûr que ce soit un album que Richey apprécierait dans sa totalité, mais ce dont je me souviens c'est qu'on a écouté « No Surface All Feeling » et « Small Black Flowers » avec lui dans le sous-sol de l'Embassy Hotel sur Bayswater Road, avant qu'il nous quitte. Je lui ai alors demandé lequel de ces morceaux était son favori et, avec un grand sourire, il m'a répondu « Small Black Flowers ». Je savais qu'il appréciait vraiment ce titre. Même si certains ne seront pas d'accord, du au fait qu'il n'était pas avec nous lors de l'enregistrement de l'album, pour nous,

Everything Must Go

représente la dernière fois où on a travaillé avec Richey.

Le succès qu'on a rencontré avec ce disque avait un goût un peu amer. Parce que Richey n'était pas là. Parce qu'on s'est retrouvés affiliés au mouvement Britpop, alors que nous n'étions pas du tout là-dedans à la base et qu'on s'en foutait totalement. Certaines personnes considèrent même « A Design For Life » comme l'hymne absolu du genre. Cela dit, Richey avait senti le potentiel de « Kevin Carter ». Il était persuadé que ce serait un hit. Ce qui en soit, est une tour de force car ça parle quand même d'un photographe qui s'est suicidé après avoir réalisé l'importance qu'avaient les images de guerre. J'aurai aimé que Richey assite à ça. J'aurais aimé que Richey en profite et qu'il voie qu'on est pas obligé de baisser son froc pour avoir du succès.

Comme on l'a dit précédemment, The Holy Bible a finalement été la principale source d'inspiration pour Everything Must Go. On ne voulait pas prendre la même direction qu'avec The Holy Bible car on serait, tôt ou tard, tombés dans l'autoparodie. Ça aurait donné une truc gothique-comique. On savait qu'il fallait adopter une nouvelle direction pour laisser respirer notre musique. On devait essayer de dire ce qu'on avait à dire avec moins de mots, en proposant quelque chose de plus aéré, tant musicalement qu'au niveau des textes. Everything Must Go doit autant à The Holy Bible qu'à tous les disques qui nous ont donné envie de faire de la musique.

Cam Lindsay est une grosse, GROSSE fan de Manics. Elle est sur Twitter.