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Quelques règles de base pour éviter aux rappeurs d'aller en prison

Ne pas cambrioler dans chaque ville de sa tournée, ne pas poser avec l'arme du crime sur sa pochette, ne pas jouer à GTA dans la vraie vie, et deux-trois autres trucs.
Genono
par Genono

Il y a quelques temps, les Marseillais de Zbatata se sont retrouvés sous les feux des projecteurs pour des raisons extra-musicales complètement mongoles. Après leur signature chez Play On (label de Zaz, Gérard Lenorman ou Matt Houston), le groupe semblait destiné à devenir la prochaine sensation du rap français, et recevait de ce fait une grosse avance sur contrat -le groupe parle de 200 000 euros, mais n'oublions pas qu'il s'agit de rappeurs, et que la réalité compte certainement un zéro de moins. Clips, promo, tournée des chichas et des boites de nuit de la France profonde -ne riez pas, c'est devenu la source de revenus principale des rappeurs français- : le plan était bien huilé, et l'investissement plutôt sécurisé.

Le rap français étant ce qu'il est (un asile à ciel ouvert), l'improbable s'est alors produit : les trois rappeurs se sont motivés mutuellement à profiter de cette tournée pour cambrioler des particuliers. Le problème, c'est que les mecs n'avaient pas forcément l'expérience de Robert de Niro dans The Score, et ont multiplié les erreurs de débutants, notamment le fait d'utiliser le même véhicule à chaque fois qu'ils commettaient leurs méfaits, mais aussi de laisser le matériel volé à même le coffre. Évidemment, les mecs se sont rapidement fait péter, et ont enchainé les bévues. Premièrement, en se mettant d'accord, pendant l'arrestation, sur la version à donner à la justice. En excellents stratèges, les membres du groupe discutaient en arabe, se doutant que les policiers présents n'y comprendraient rien. Manque de bol, l'un d'eux était arabophone.

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Le deuxième coup de génie a eu lieu au tribunal, quand l'un des membres de Zbatata a expliqué à la Présidente du tribunal que la bêtise était due à l'effet de groupe, que les garçons se sont engrainés entre eux. Malheureusement, l'effet de groupe est une circonstance aggravante, et deux des trois rappeurs ont été condamnés à 8 mois ferme avec mandat de dépot, tandis que le troisième a écopé d'un sursis. Une histoire complètement débile qui nous rappelle que, bien plus que les citoyens ordinaires, les rappeurs ont une affreuse tendance à se fourrer dans des situations rocambolesques et à finir en prison pour des motifs improbables. Pour leur faciliter la vie et leur éviter de perdre des années derrière les barreaux, voici une liste non-exhaustive des choses à ne pas faire :

Ne pas trop se confier dans ses lyrics

Tiny Doo, vétéran du rap californien, a passé la moitié de son existence à raconter la vie dans les gangs, et particulièrement dans le Lincoln Park Blood Gang. Son dernier album en date, No Safety (2014), ne déroge pas à la règle, de la pochette représentant un revolver aux thèmes abordés tout au long du disque. Manque de bol pour Tiny Doo, une loi californienne permet de poursuivre tout membre de gang ayant profité d'une manière ou d'une autre d'un crime commis par d'autres membres du même gang. Votée en 2000, la loi n'a jamais amené personne devant les tribunaux, jusqu'à 2014 : le rappeur a alors été accusé d'avoir bénéficié des fusillades perpétrées par le Lincoln Park Blood Gang au cours de l'année précédente pour booster ses ventes de disques. Les charges contre Tiny Doo –qui n'a clairement pas le pseudo le plus gangsta- n'ont été abandonnées qu'après 8 longs mois de prison, alors qu'il risquait 25 années.

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Ne pas se prendre pour Dodo la Saumure

La figure du P.I.M.P est l'une des plus sacralisées par le rap, cristallisant tous les fantasmes du ghetto-youth de base : oseille, luxe, et putes à gogo. Certains prennent le rôle très à cœur dans leurs clips ; d'autres, plus impliqués, franchissent le pas et tentent l'expérience grandeur nature. C'est le cas de F.R.O.S.T, rappeur montréalais qui a récolté 2000 dollars par semaine, pendant plus de trois ans, avec une seule fille sous ses ordres. Il purge actuellement une peine de 4 ans pour proxénétisme et séquestration. Le pire dans tout ça, c'est que malgré son absence totale de neurones, F.R.O.S.T est vraiment un bon rappeur.

Ne pas pratiquer le cannibalisme

Les rappeurs ont tendance à faire de Tony Montana, Gennaro Savastano ou Vito Corleone leurs idoles absolues. Fort heureusement, certains sortent des sentiers battus, et jouent la carte de l'originalité, en allant chercher l'inspiration du côté d'Hannibal Lecter. C'est le cas de Big Lurch, rappeur texan condamné à perpétuité en 2003. Après avoir passé la soirée avec un ami, à consommer de la PCP (un psychotrope hallucinogène), il tue et dévore en partie (poumons, visage) une jeune femme de 21 ans, Tynisha Ysais. Il est arrêté quelques heures plus tard, nu et couvert de sang, en pleine rue, tandis que les analyses médicales se chargeront de prouver que son estomac contenait de la chair humaine ne lui appartenant pas.

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Ne pas poser avec l'arme du crime sur sa pochette

Membre d'une faction du gang des Crips, le rappeur X-Raided s'en est pris aux Bloods en 1992. Désirant se venger de deux frères membres du groupe rival, il a tout simplement assassiné leur mère à son domicile. Comme tout bon rappeur, le bonhomme a alors eu une idée complètement débile : raconter toute cette histoire en chansons, et surtout, poser avec l'arme du crime sur la pochette de son album Psycho-Active. Condamné alors qu'il n'avait que 18 ans, il pourrait sortir de prison avant ses 50 ans, en 2024. En attendant, il s'est constitué une discographie impressionnante : plus de 25 disques, tous enregistrés en prison avec les moyens du bord -notamment au téléphone, avec un enregistreur-cassette. Résultat : malgré un énorme travail en post-production, la moitié de ses albums se traine une qualité de son dégueulasse. Double-peine.

Ne pas décapiter Marine Le Pen

Quand on veut se forger un casier judiciaire pour gagner des points de street-crédibilité, le meurtre ou le braquage sont des possibilités sobres mais efficaces. Il y a pourtant bien plus simple : tourner un mauvais clip avec les moyens du bord, en appelant à décapiter Marine Le Pen. Deux rappeurs charentais, Rémy et Poposte (ça ne s'invente pas), ont été condamnés en mars dernier à un stage de citoyenneté et à 500 euros d'amende avec sursis, pour apologie de crime et injure publique, suite à une action en justice de l'avocat de la Présidente du Front National. Mais soyons sérieux deux minutes : s'il fallait vraiment condamner tous les rappeurs qui s'en prennent au FN, les tribunaux ne désengorgeraient absolument jamais –spoiler : Marion-Maréchal va manger un nombre incalculable de rimes salaces pendant les quinze prochaines années.

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Ne pas tirer les cheveux

Quand Seth Gueko a été condamné en 2013 à trois mois fermes pour avoir trainé une donzelle par les cheveux en pleins Champs Élysées, il n'a fait que rendre hommage, quelques années en avance, à l'un de ses mentors : Joeystarr. Condamné à deux mois en 1999 pour avoir insulté et frappé une hôtesse de l'air, l'ex-NTM prend six mois supplémentaires la même année pour avoir fracturé le nez de son ex-compagne. Joey réussit le tiercé dans l'ordre, en étant condamné en 2008 à trois mois fermes pour avoir mordu sa nouvelle compagne. Côté américain, comme dans tous les domaines, les mecs nous devancent largement en termes de violence, et là où la France a passé cinq ans à polémiquer sur trois mots d'Orelsan, toutes les plus grosses stars US jouent le jeu de la maltraitance sans jamais passer par la case tribunaux : 50 Cent, Chris Brown, Dr Dre, Eminem…

Ne pas jouer à GTA dans la vraie vie

DMX traîne un sacré lot de casseroles derrière lui : braquages, port d'armes, drogue, cruauté envers les animaux, manquements à la pension alimentaire, conduite sans permis … une collection colorée et diversifiée, dont la plus belle pièce date de 2004. En retard pour embarquer dans un avion à destination de la Suisse, où il était censé débuter sa tournée européenne, il a littéralement car-jacké un véhicule en pleine rue, intimant au conducteur et à sa fille de descendre immédiatement. Devant leur refus -logique-, il leur a alors affirmé qu'il était agent du FBI, et que leur véhicule était réquisitionné. Malgré le manque de crédibilité de son interlocuteur, le pauvre conducteur a fini par obtempérer -probablement à cause du fait que DMX était armé et complètement défoncé. Histoire de ne pas faire les choses à moitié, le rappeur a forcé la barrière de sécurité de l'aéroport -toujours en prétendant être un agent du FBI. Il écopera de seulement deux mois de prison pour cette blague un peu poussée, alors qu'il risquait 7 ans.

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Ne pas violer

Le petit monde du rap compte probablement plus de condamnations pour agression sexuelle que pour braquage. Hormis la célèbre affaire ayant amené Tupac à purger dix-huit mois de prison pour viol, on se rappelle ainsi de Mystikal, enfermé 6 ans, de 2004 à 2010, pour un viol en réunion filmé -avant de reprendre un bonus pour violences conjugales quelques mois seulement après sa libération. Le rappeur texan South Park Mexican (rien à voir avec le dessin animé), plus connu pour ses démêlés judiciaires que pour sa musique, purge actuellement une peine de 45 ans de prison pour différentes agressions sexuelles sur mineures –la plus jeune avait 9 ans. South Park Mexican a également mis enceinte une fille de 13 ans (et, quitte à faire les choses à fond, a refusé de payer la pension alimentaire). Le showbiz étant ce qu'il est –un monde aussi impitoyable et corrompu que celui de Dallas-, les accusations de viol n'ayant pas abouti à une condamnation sont légion, de Rick Ross à Birdman, en passant par Big Sean ou Cee Lo Green.

Ne pas cumuler toute la liste – en plus d'être belge

Séquestration, prostitution de mineures, arnaques, escroqueries diverses, vols avec violence, trafic de stupéfiants, recel… La liste des poursuites contre le Négatif Clan, crew bruxellois qui a pris les paroles du premier morceau de Lunatic très au sérieux – sorte d'hybride belge entre la Camorra et l'Entourage- ferait pâlir de jalousie les époux Balkany. Si les peines n'ont pas encore été prononcées pour reux, la justice belge devrait, selon toute vraisemblance, condamner au minimum sept membres de la bande au cours du procès à venir pour une affaire de séquestration et abus sur mineures, ainsi que pour arnaque à la prostitution. En début d'année, le Négatif Clan a pourtant lâché une nouvelle mixtape gratuite, prouvant ainsi qu'il avait toutes les qualités pour réussir dans le rap. Quel gâchis. Genono se tient à carreau sur Twitter.