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Siouxsie & The Blanquette

Mais qui est vraiment Olivier Streiff, le candidat gothique de Top Chef ? Un poseur bidon ou le vrai mec cool de 2015 ? Nous sommes allés passer un moment avec lui pour le savoir.

Photo - Marion Bungert

S'il est bien une raison pour laquelle on se souviendra de la sixième saison de

Top Chef

, c'est la présence d'Olivier Streiff. Salutaire touche de Khol dans les rouages de l'émission culinaire de M6, le candidat lorrain (mais basé dans les Alpes-Maritimes) a gagné notre sympathie dès la première émission. Un gothique de presque 40 ans qui gère parfaitement le smoky eye (même de près, on a vérifié) et qui se paye le luxe d'être à la fois drôle, droit dans ses bottes et monstueusement doué dans ce qu'il fait (il joue d'ailleurs sa place en finale ce soir, eh ouais) : on est loin, très loin, des pipes de compétition qu'on croise habituellement dans ce genre de show. Afin de savoir qui était vraiment Olivier Streiff et en connaître un peu plus sur ses goûts musicaux, nous sommes allées passer un moment avec lui. L'occasion d'apprendre que le cuisinier de

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Top Chef

adore

Bloodflowers

de Cure et les reprises de Nirvana par des voix féminines, continue à écouter les Doors et Indochine et n'en veut même pas à Placebo pour son dernier album tout pété. Et si Olivier Streiff était le

vrai

mec cool de 2015, celui qui fait juste ce qu'il aime vraiment ne voit pas l’intérêt d'être un gros connard ironique ?

Noisey : Salut Olivier. Quelle relation entretiens-tu avec la musique ?

Olivier Streiff :

La musique est essentielle pour moi. A tel point que je ne sais pas ce que je préfère entre la musique et la cuisine. Vraiment. Mon cœur balance entre les deux, et souvent je suis beaucoup plus proche de la musique. J'en écoutais avant de faire de la cuisine.

Quelle relation avais-tu avec la musique étant adolescent ?

Cela remonte à avant l’adolescence en fait. Enfant, mes parents me faisaient écouter des trucs horribles, très populaires. A 10 ans j’ai découvert l’Adagio de Samuel Barber grâce à

Platoon

d’Oliver Stone et pour la première fois de ma vie, je me suis demandé comment il était possible de faire quelque chose d’aussi beau. J’ai également connu et adoré Mozart grâce à un de mes profs de français.

Joues-tu d'un instrument ?

Non, et c’est le regret de ma vie. J’en avais envie, mais mes parents n’en avaient pas forcément les moyens. J’aurais aimé faire du piano, un jour peut-être…

Bon, tu joues d’un autre piano maintenant, celui de la cuisine [Rires] C'est marrant, tu nous parles beaucoup de musique classique mais ton look est ouvertement gothique…

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Quand j’ai commencé à vouloir faire de la cuisine, mes parents m’ont envoyé en observation dans un restaurant pour voir à quoi le métier ressemblait. Un jour, un des employés me tend une cassette : l’

Absolutely Live

des Doors. Ça a été une nouvelle révélation : la découverte de Jim Morrison, pour qui je tombe en adoration totale. Ça a été le point de départ de tout un tas de choses que j'allais découvrir par la suite et qui allaient faire de moi la personne que je suis aujourd'hui. En essayant d’aller plus loin, de comprendre ses textes et sa musique, je me suis rendu compte que c’était quelqu’un de très cultivé. Ce n’était pas juste un rocker, c'était un vrai poète. C'est par ce biais que je découvre Rimbaud, Baudelaire, Verlaine, Nietzsche, Jack Kerouac…

Tu as plutôt été attiré par les poètes et les écrivains qui ont inspiré Jim Morrison. Tu n’aimais pas ses contemporains ?

Si bien sûr, je suis aussi un gros fan de Janis Joplin, Jimi Hendrix, les Who… J’ai beaucoup écouté et aimé la musique de cette période là. J’aurais aimé vivre à cette époque, je crois. Peut-être que dans une autre vie, j’y étais… Je l’espère en tout cas !

Pour notre génération, les Doors restent souvent liés aux années lycée et on connaît finalement assez peu de gens capables de garder une telle fascination pour Jim Morrison passé 17 ans…

Les Doors n'ont que quatre ans de carrière. Et ce n'est pas leurs albums qui sont les plus interessants, ce sont leurs lives. On est dans la créativité pure, quand Jim Morrison déclamait des poèmes sur « Light My Fire », c'est juste génial. Dans l'absolu, ce n'est pas forcément le plus grand groupe du monde, et puis on finit vite par saturer de l'orgue, mais leurs morceaux sont intemporels, et c'est ça que j'aime.

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Photo - Marion Bungert

S'il est bien une raison pour laquelle on se souviendra de la sixième saison de

Top Chef

, c'est la présence d'Olivier Streiff. Salutaire touche de Khol dans les rouages de l'émission culinaire de M6, le candidat lorrain (mais basé dans les Alpes-Maritimes) a gagné notre sympathie dès la première émission. Un gothique de presque 40 ans qui gère parfaitement le smoky eye (même de près, on a vérifié) et qui se paye le luxe d'être à la fois drôle, droit dans ses bottes et monstueusement doué dans ce qu'il fait (il joue d'ailleurs sa place en finale ce soir, eh ouais) : on est loin, très loin, des pipes de compétition qu'on croise habituellement dans ce genre de show. Afin de savoir qui était vraiment Olivier Streiff et en connaître un peu plus sur ses goûts musicaux, nous sommes allées passer un moment avec lui. L'occasion d'apprendre que le cuisinier de

Top Chef

adore

Bloodflowers

de Cure et les reprises de Nirvana par des voix féminines, continue à écouter les Doors et Indochine et n'en veut même pas à Placebo pour son dernier album tout pété. Et si Olivier Streiff était le

vrai

mec cool de 2015, celui qui fait juste ce qu'il aime vraiment ne voit pas l’intérêt d'être un gros connard ironique ?




Noisey : Salut Olivier. Quelle relation entretiens-tu avec la musique ?
Olivier Streiff :

La musique est essentielle pour moi. A tel point que je ne sais pas ce que je préfère entre la musique et la cuisine. Vraiment. Mon cœur balance entre les deux, et souvent je suis beaucoup plus proche de la musique. J'en écoutais avant de faire de la cuisine.



Quelle relation avais-tu avec la musique étant adolescent ?

Cela remonte à avant l’adolescence en fait. Enfant, mes parents me faisaient écouter des trucs horribles, très populaires. A 10 ans j’ai découvert l’Adagio de Samuel Barber grâce à

Platoon

d’Oliver Stone et pour la première fois de ma vie, je me suis demandé comment il était possible de faire quelque chose d’aussi beau. J’ai également connu et adoré Mozart grâce à un de mes profs de français.





Joues-tu d'un instrument ?

Non, et c’est le regret de ma vie. J’en avais envie, mais mes parents n’en avaient pas forcément les moyens. J’aurais aimé faire du piano, un jour peut-être...



Bon, tu joues d’un autre piano maintenant, celui de la cuisine [Rires] C'est marrant, tu nous parles beaucoup de musique classique mais ton look est ouvertement gothique…

Quand j’ai commencé à vouloir faire de la cuisine, mes parents m’ont envoyé en observation dans un restaurant pour voir à quoi le métier ressemblait. Un jour, un des employés me tend une cassette : l’

Absolutely Live

des Doors. Ça a été une nouvelle révélation : la découverte de Jim Morrison, pour qui je tombe en adoration totale. Ça a été le point de départ de tout un tas de choses que j'allais découvrir par la suite et qui allaient faire de moi la personne que je suis aujourd'hui. En essayant d’aller plus loin, de comprendre ses textes et sa musique, je me suis rendu compte que c’était quelqu’un de très cultivé. Ce n’était pas juste un rocker, c'était un vrai poète. C'est par ce biais que je découvre Rimbaud, Baudelaire, Verlaine, Nietzsche, Jack Kerouac…



Tu as plutôt été attiré par les poètes et les écrivains qui ont inspiré Jim Morrison. Tu n’aimais pas ses contemporains ?

Si bien sûr, je suis aussi un gros fan de Janis Joplin, Jimi Hendrix, les Who… J’ai beaucoup écouté et aimé la musique de cette période là. J’aurais aimé vivre à cette époque, je crois. Peut-être que dans une autre vie, j’y étais... Je l’espère en tout cas !



Pour notre génération, les Doors restent souvent liés aux années lycée et on connaît finalement assez peu de gens capables de garder une telle fascination pour Jim Morrison passé 17 ans...

Les Doors n'ont que quatre ans de carrière. Et ce n'est pas leurs albums qui sont les plus interessants, ce sont leurs lives. On est dans la créativité pure, quand Jim Morrison déclamait des poèmes sur « Light My Fire », c'est juste génial. Dans l'absolu, ce n'est pas forcément le plus grand groupe du monde, et puis on finit vite par saturer de l'orgue, mais leurs morceaux sont intemporels, et c'est ça que j'aime.





Comment t’es-tu approprié cette esthétique gothique au final ?

Par la poésie, évidemment… Mais bon, j’ai grandi à l’époque à laquelle où ont déferlé successivement The Cure, Depeche Mode, Indochine et Nirvana, donc je suis tombé dedans naturellement - avec l’aide de mes grandes sœurs qui avaient déjà les cheveux en pétard.



Tu as l'air très à l'aise avec le fait d'être « différent ».

J’aime pas trop le terme « différent ». Je suis cuisinier donc parfois, on accepte peut-être moins mon extravagance que si j’étais chanteur ou créateur, mais je ne me sens pas foncièrement différent. Je reçois beaucoup de messages d’autres cuisiniers qui se disent que maintenant que j’ai repoussé les limites du conventionnel, ils peuvent s’assumer comme ils sont eux aussi. Et ça c’est génial, parce que pour s’exprimer au mieux, un artiste doit se sentir libre à tous les niveaux, y compris dans son look.



Tu vas régulièrement en concert ? En soirées goth ?

Je faisais pas mal de soirées gothiques quand j’étais jeune, en Allemagne notamment puisque je suis lorrain, et puis sur la Côte d’Azur ensuite. Les concerts, j’essaye d’en faire le maximum mais avec mon métier, j’ai pas forcément le temps. Mon dernier gros concert, c’était celui des Doors un peu avant la mort de Manzarek, pour les 40 ans de la mort de Jim Morrison. Sinon je regarde énormément de lives en DVD, j'aime beaucoup ça.



Il y avait vraiment une scène gothique développée sur la Côte d’Azur ?

Pas vraiment, c’était juste des caves dans le vieux Nice, des endroits confidentiels. Niveau musical, c’est une région assez aseptisée, plate… On préférait se retrouver entre amis. Mais j’ai l’impression que ça bouge de plus en plus et qu’il y a des scènes un peu plus solides qui commencent à apparaître depuis quelques temps.




Corpus Delicti, un des très rares groupes goth de Nice, dans les années 90.

Tu évoques beaucoup Pierre Soulages, qui est aussi une référence pour des mecs comme... ahem, Gesaffelstein.

Je suis quelqu’un de cérébral. Le travail de Pierre Soulages m’a permis de concentrer ma réflexion vers des choses plus minimalistes, d’aller à l’essentiel. Il m’a aussi permis de ne pas avoir peur de proposer des choses différentes, de dépasser mes bases classiques. Soulages, on pourrait se dire « c’est juste du noir » et en fait non, quand on rentre dans la matière, dans l’œuvre, on se rend compte que c’est beaucoup plus complexe. En cuisine aussi le plus compliqué, c’est de faire simple.



T’écoutes quoi quand tu cuisines ?

Ça dépend vraiment de mon humeur. Je dis toujours « c’est pas moi qui décide ». Je suis simplement l’alchimiste qui transforme les matières… Chopin, Nirvana, Oasis, The Cure, Katie Melua quand j’ai besoin de calme pour penser un plat ou des choses plus violentes, de temps en temps. J’écoute principalement des trucs sur YouTube. Je travaille aussi en écoutant mon iPod.



Si tu ouvres un jour un nouveau restaurant, tu te vois donner une place importante à la musique ?

Bien sûr. Comprendre le cuisinier en tant qu’artiste, c’est comprendre son univers. La musique est indissociable du mien.



On aimerait bien ton opinion sur quelques artistes : les Cocteau Twins ?

Je ne connais pas bien. Ce qui est étrange, c'est qu'on m'envoie aujourd'hui beaucoup de musique depuis l'emission. Je prends le temps de tout écouter. N'hésitez donc pas à m'en envoyer.



David Bowie ?

Bien sûr, j'adore !



Une période préférée ?

Quand j'aime quelqu'un je le suis du début jusqu'à la fin. Avec les plus, avec les moins. Je suis très fidèle. Quand je rentre dans l'univers de quelqu'un, ce n'est pas seulement prendre les moments que l'on préfère, c'est embrasser la totalité de sa carrière. Je veux comprendre pourquoi.





Tu citais Indochine tout à l'heure : ils ont quand même sacrément changé depuis leurs débuts, ça te dérange pas ?

Non. Je vais comparer ça avec mon expérience de cuisinier : j'ai eu un restaurant très intime, et je remarque aujourd'hui que beaucoup de gens veulent profiter de ce que je fais. Il y a la haute couture et le prêt-à-porter. Je considère qu'Indochine est capable de faire les deux. On peut dire aussi pour Indochine que c'est marketé, qu'ils sont là pour l'argent, mais je vois personnellement une vraie démarche artistique. Il faut que tout le monde puisse en profiter, cela me paraît normal. Ce n'est pas parce qu'on a plus d'argent qu'on est moins sensible et créatif.



Placebo, tu aimes aussi on présume ?

Bien sûr !



C'est un peu pareil qu'Indochine, là, le dernier album craint vraiment. T'en as pensé quoi ?

Il me parle moins. J'ai une manière de procéder peut-être un peu différente des autres. Il y a des albums qui vont me parler tout de suite, et il y a des albums qui ne me parlent pas, que je mets de côté et que j'écoute quelques temps plus tard. Et là je commence à comprendre. Peut-être qu'à un moment, ils étaient plus en avance par rapport à ce que j'attendais d'eux, et c'est quelque part à moi de faire l'effort de comprendre. Un peu pareil qu'en cuisine. Il y a quinze ans, je travaillais les fleurs et personne ne voulait en manger, maintenant on en voit partout. Après on aime ou on n’aime pas, c'est une affaire de goût, mais ce n'est pas pour autant que je vais laisser tomber.



Tu n'as jamais laissé tomber un artiste ? Même The Cure ?

Jamais. Quand j'écoute

Bloodflowers

, beaucoup de gens me disent que c'est nul, alors que c'est l'album que j'écoute le plus.





Tu as entendu que le mec de Franz Ferdinand se lançait dans la cuisine ? T'en penses quoi ?

Pourquoi pas ? Comme je le disais au début de l'interview, je trouve que les deux univers se ressemblent. On part d'une émotion pour en faire quelque chose. Ce n'est qu'une transformation de la matière.



Y-a-t'il des trucs que tu as honte de manger ou d'écouter ?

Non, pas vraiment. Je ne suis pas contre McDo, ni le surgelé. Même en musique, je suis assez droit dans mes bottes. Si j'aimais quelque chose, je n'aurais aucun mal à le dire. Je ne suis pas pour tout, mais je ne suis contre rien.



Tes dernières découvertes musicales ?

J’ai beaucoup saoulé mon assistante avec Pretty Reckless (la sous-Courtney Love de Gossip Girl). Je l'ai écouté en boucle pendant un bon moment, j'ai trouvé qu'elle avait une voix géniale. J'aime beaucoup les voix féminines. J'ai bien aimé par exemple les reprises de Nirvana avec des filles au chant : Joan Jett, Kim Gordon... J'ai trouvé ça génial.





Sur notre verticale Munchies, on a un show où on suit un chef et ses amis en soirée, qui finissent évidemment bourrés : c'est quoi tes tips contre la gueule de bois ?

Mon état de santé ne me permet pas vraiment d'être bourré, juste « pompette », on va dire. Je pense que quand on est artiste, on aime bien cultiver cet état second, mais j'ai compris que je n'avais pas besoin de cela pour cuisiner. Je ne me suis jamais drogué, j'ai toujours préféré me débrouiller seul pour ce qui s'agit de mieux me connaître. Je n'ai pas besoin d'alcool pour créer.



Donc tu n'as jamais pensé à cuisiner des matières hallucinogènes...

Non. Mais je pense que ce ne sont pas vraiment les ingrédients qui donnent cet effet, plutôt la mise en condition. La plus grande des drogues pour moi c'est la persuasion, et je pense qu’il est possible d’avoir les effets sans rien utiliser.



Pour qui aimerais-tu cuisiner ?

Nicolas Sirkis, évidemment ! L’idée d’une collaboration entre sa musique et ma cuisine me tente beaucoup.



Dernière question : nos mamans nous ont demandé si tu allais gagner. Alllez, avoue, tu vas gagner ?

Il reste deux émissions, il faudra être patient.




Marine et Marion ont déjà gagné depuis longtemps. Elles le prouvent chaque jour sur RETARD et plus ponctuellement sur Twitter - @RETARDMAGAZINE


Comment t’es-tu approprié cette esthétique gothique au final ?

Par la poésie, évidemment… Mais bon, j’ai grandi à l’époque à laquelle où ont déferlé successivement The Cure, Depeche Mode, Indochine et Nirvana, donc je suis tombé dedans naturellement - avec l’aide de mes grandes sœurs qui avaient déjà les cheveux en pétard.

Tu as l'air très à l'aise avec le fait d'être « différent ».

J’aime pas trop le terme « différent ». Je suis cuisinier donc parfois, on accepte peut-être moins mon extravagance que si j’étais chanteur ou créateur, mais je ne me sens pas foncièrement différent. Je reçois beaucoup de messages d’autres cuisiniers qui se disent que maintenant que j’ai repoussé les limites du conventionnel, ils peuvent s’assumer comme ils sont eux aussi. Et ça c’est génial, parce que pour s’exprimer au mieux, un artiste doit se sentir libre à tous les niveaux, y compris dans son look.

Tu vas régulièrement en concert ? En soirées goth ?

Je faisais pas mal de soirées gothiques quand j’étais jeune, en Allemagne notamment puisque je suis lorrain, et puis sur la Côte d’Azur ensuite. Les concerts, j’essaye d’en faire le maximum mais avec mon métier, j’ai pas forcément le temps. Mon dernier gros concert, c’était celui des Doors un peu avant la mort de Manzarek, pour les 40 ans de la mort de Jim Morrison. Sinon je regarde énormément de lives en DVD, j'aime beaucoup ça.

Il y avait vraiment une scène gothique développée sur la Côte d’Azur ?

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Pas vraiment, c’était juste des caves dans le vieux Nice, des endroits confidentiels. Niveau musical, c’est une région assez aseptisée, plate… On préférait se retrouver entre amis. Mais j’ai l’impression que ça bouge de plus en plus et qu’il y a des scènes un peu plus solides qui commencent à apparaître depuis quelques temps.

Corpus Delicti, un des très rares groupes goth de Nice, dans les années 90.

Tu évoques beaucoup Pierre Soulages, qui est aussi une référence pour des mecs comme… ahem, Gesaffelstein.

Je suis quelqu’un de cérébral. Le travail de Pierre Soulages m’a permis de concentrer ma réflexion vers des choses plus minimalistes, d’aller à l’essentiel. Il m’a aussi permis de ne pas avoir peur de proposer des choses différentes, de dépasser mes bases classiques. Soulages, on pourrait se dire « c’est juste du noir » et en fait non, quand on rentre dans la matière, dans l’œuvre, on se rend compte que c’est beaucoup plus complexe. En cuisine aussi le plus compliqué, c’est de faire simple.

T’écoutes quoi quand tu cuisines ?

Ça dépend vraiment de mon humeur. Je dis toujours « c’est pas moi qui décide ». Je suis simplement l’alchimiste qui transforme les matières… Chopin, Nirvana, Oasis, The Cure, Katie Melua quand j’ai besoin de calme pour penser un plat ou des choses plus violentes, de temps en temps. J’écoute principalement des trucs sur YouTube. Je travaille aussi en écoutant mon iPod.

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Si tu ouvres un jour un nouveau restaurant, tu te vois donner une place importante à la musique ?

Bien sûr. Comprendre le cuisinier en tant qu’artiste, c’est comprendre son univers. La musique est indissociable du mien.

On aimerait bien ton opinion sur quelques artistes : les Cocteau Twins ?

Je ne connais pas bien. Ce qui est étrange, c'est qu'on m'envoie aujourd'hui beaucoup de musique depuis l'emission. Je prends le temps de tout écouter. N'hésitez donc pas à m'en envoyer.

David Bowie ?

Bien sûr, j'adore !

Une période préférée ?

Quand j'aime quelqu'un je le suis du début jusqu'à la fin. Avec les plus, avec les moins. Je suis très fidèle. Quand je rentre dans l'univers de quelqu'un, ce n'est pas seulement prendre les moments que l'on préfère, c'est embrasser la totalité de sa carrière. Je veux comprendre pourquoi.

Tu citais Indochine tout à l'heure : ils ont quand même sacrément changé depuis leurs débuts, ça te dérange pas ?

Non. Je vais comparer ça avec mon expérience de cuisinier : j'ai eu un restaurant très intime, et je remarque aujourd'hui que beaucoup de gens veulent profiter de ce que je fais. Il y a la haute couture et le prêt-à-porter. Je considère qu'Indochine est capable de faire les deux. On peut dire aussi pour Indochine que c'est marketé, qu'ils sont là pour l'argent, mais je vois personnellement une vraie démarche artistique. Il faut que tout le monde puisse en profiter, cela me paraît normal. Ce n'est pas parce qu'on a plus d'argent qu'on est moins sensible et créatif.

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Placebo, tu aimes aussi on présume ?

Bien sûr !

C'est un peu pareil qu'Indochine, là, le dernier album craint vraiment. T'en as pensé quoi ?

Il me parle moins. J'ai une manière de procéder peut-être un peu différente des autres. Il y a des albums qui vont me parler tout de suite, et il y a des albums qui ne me parlent pas, que je mets de côté et que j'écoute quelques temps plus tard. Et là je commence à comprendre. Peut-être qu'à un moment, ils étaient plus en avance par rapport à ce que j'attendais d'eux, et c'est quelque part à moi de faire l'effort de comprendre. Un peu pareil qu'en cuisine. Il y a quinze ans, je travaillais les fleurs et personne ne voulait en manger, maintenant on en voit partout. Après on aime ou on n’aime pas, c'est une affaire de goût, mais ce n'est pas pour autant que je vais laisser tomber.

Tu n'as jamais laissé tomber un artiste ? Même The Cure ?

Jamais. Quand j'écoute

Bloodflowers

, beaucoup de gens me disent que c'est nul, alors que c'est l'album que j'écoute le plus.


Photo - Marion Bungert

S'il est bien une raison pour laquelle on se souviendra de la sixième saison de

Top Chef

, c'est la présence d'Olivier Streiff. Salutaire touche de Khol dans les rouages de l'émission culinaire de M6, le candidat lorrain (mais basé dans les Alpes-Maritimes) a gagné notre sympathie dès la première émission. Un gothique de presque 40 ans qui gère parfaitement le smoky eye (même de près, on a vérifié) et qui se paye le luxe d'être à la fois drôle, droit dans ses bottes et monstueusement doué dans ce qu'il fait (il joue d'ailleurs sa place en finale ce soir, eh ouais) : on est loin, très loin, des pipes de compétition qu'on croise habituellement dans ce genre de show. Afin de savoir qui était vraiment Olivier Streiff et en connaître un peu plus sur ses goûts musicaux, nous sommes allées passer un moment avec lui. L'occasion d'apprendre que le cuisinier de

Top Chef

adore

Bloodflowers

de Cure et les reprises de Nirvana par des voix féminines, continue à écouter les Doors et Indochine et n'en veut même pas à Placebo pour son dernier album tout pété. Et si Olivier Streiff était le

vrai

mec cool de 2015, celui qui fait juste ce qu'il aime vraiment ne voit pas l’intérêt d'être un gros connard ironique ?




Noisey : Salut Olivier. Quelle relation entretiens-tu avec la musique ?
Olivier Streiff :

La musique est essentielle pour moi. A tel point que je ne sais pas ce que je préfère entre la musique et la cuisine. Vraiment. Mon cœur balance entre les deux, et souvent je suis beaucoup plus proche de la musique. J'en écoutais avant de faire de la cuisine.



Quelle relation avais-tu avec la musique étant adolescent ?

Cela remonte à avant l’adolescence en fait. Enfant, mes parents me faisaient écouter des trucs horribles, très populaires. A 10 ans j’ai découvert l’Adagio de Samuel Barber grâce à

Platoon

d’Oliver Stone et pour la première fois de ma vie, je me suis demandé comment il était possible de faire quelque chose d’aussi beau. J’ai également connu et adoré Mozart grâce à un de mes profs de français.





Joues-tu d'un instrument ?

Non, et c’est le regret de ma vie. J’en avais envie, mais mes parents n’en avaient pas forcément les moyens. J’aurais aimé faire du piano, un jour peut-être...



Bon, tu joues d’un autre piano maintenant, celui de la cuisine [Rires] C'est marrant, tu nous parles beaucoup de musique classique mais ton look est ouvertement gothique…

Quand j’ai commencé à vouloir faire de la cuisine, mes parents m’ont envoyé en observation dans un restaurant pour voir à quoi le métier ressemblait. Un jour, un des employés me tend une cassette : l’

Absolutely Live

des Doors. Ça a été une nouvelle révélation : la découverte de Jim Morrison, pour qui je tombe en adoration totale. Ça a été le point de départ de tout un tas de choses que j'allais découvrir par la suite et qui allaient faire de moi la personne que je suis aujourd'hui. En essayant d’aller plus loin, de comprendre ses textes et sa musique, je me suis rendu compte que c’était quelqu’un de très cultivé. Ce n’était pas juste un rocker, c'était un vrai poète. C'est par ce biais que je découvre Rimbaud, Baudelaire, Verlaine, Nietzsche, Jack Kerouac…



Tu as plutôt été attiré par les poètes et les écrivains qui ont inspiré Jim Morrison. Tu n’aimais pas ses contemporains ?

Si bien sûr, je suis aussi un gros fan de Janis Joplin, Jimi Hendrix, les Who… J’ai beaucoup écouté et aimé la musique de cette période là. J’aurais aimé vivre à cette époque, je crois. Peut-être que dans une autre vie, j’y étais... Je l’espère en tout cas !



Pour notre génération, les Doors restent souvent liés aux années lycée et on connaît finalement assez peu de gens capables de garder une telle fascination pour Jim Morrison passé 17 ans...

Les Doors n'ont que quatre ans de carrière. Et ce n'est pas leurs albums qui sont les plus interessants, ce sont leurs lives. On est dans la créativité pure, quand Jim Morrison déclamait des poèmes sur « Light My Fire », c'est juste génial. Dans l'absolu, ce n'est pas forcément le plus grand groupe du monde, et puis on finit vite par saturer de l'orgue, mais leurs morceaux sont intemporels, et c'est ça que j'aime.





Comment t’es-tu approprié cette esthétique gothique au final ?

Par la poésie, évidemment… Mais bon, j’ai grandi à l’époque à laquelle où ont déferlé successivement The Cure, Depeche Mode, Indochine et Nirvana, donc je suis tombé dedans naturellement - avec l’aide de mes grandes sœurs qui avaient déjà les cheveux en pétard.



Tu as l'air très à l'aise avec le fait d'être « différent ».

J’aime pas trop le terme « différent ». Je suis cuisinier donc parfois, on accepte peut-être moins mon extravagance que si j’étais chanteur ou créateur, mais je ne me sens pas foncièrement différent. Je reçois beaucoup de messages d’autres cuisiniers qui se disent que maintenant que j’ai repoussé les limites du conventionnel, ils peuvent s’assumer comme ils sont eux aussi. Et ça c’est génial, parce que pour s’exprimer au mieux, un artiste doit se sentir libre à tous les niveaux, y compris dans son look.



Tu vas régulièrement en concert ? En soirées goth ?

Je faisais pas mal de soirées gothiques quand j’étais jeune, en Allemagne notamment puisque je suis lorrain, et puis sur la Côte d’Azur ensuite. Les concerts, j’essaye d’en faire le maximum mais avec mon métier, j’ai pas forcément le temps. Mon dernier gros concert, c’était celui des Doors un peu avant la mort de Manzarek, pour les 40 ans de la mort de Jim Morrison. Sinon je regarde énormément de lives en DVD, j'aime beaucoup ça.



Il y avait vraiment une scène gothique développée sur la Côte d’Azur ?

Pas vraiment, c’était juste des caves dans le vieux Nice, des endroits confidentiels. Niveau musical, c’est une région assez aseptisée, plate… On préférait se retrouver entre amis. Mais j’ai l’impression que ça bouge de plus en plus et qu’il y a des scènes un peu plus solides qui commencent à apparaître depuis quelques temps.




Corpus Delicti, un des très rares groupes goth de Nice, dans les années 90.

Tu évoques beaucoup Pierre Soulages, qui est aussi une référence pour des mecs comme... ahem, Gesaffelstein.

Je suis quelqu’un de cérébral. Le travail de Pierre Soulages m’a permis de concentrer ma réflexion vers des choses plus minimalistes, d’aller à l’essentiel. Il m’a aussi permis de ne pas avoir peur de proposer des choses différentes, de dépasser mes bases classiques. Soulages, on pourrait se dire « c’est juste du noir » et en fait non, quand on rentre dans la matière, dans l’œuvre, on se rend compte que c’est beaucoup plus complexe. En cuisine aussi le plus compliqué, c’est de faire simple.



T’écoutes quoi quand tu cuisines ?

Ça dépend vraiment de mon humeur. Je dis toujours « c’est pas moi qui décide ». Je suis simplement l’alchimiste qui transforme les matières… Chopin, Nirvana, Oasis, The Cure, Katie Melua quand j’ai besoin de calme pour penser un plat ou des choses plus violentes, de temps en temps. J’écoute principalement des trucs sur YouTube. Je travaille aussi en écoutant mon iPod.



Si tu ouvres un jour un nouveau restaurant, tu te vois donner une place importante à la musique ?

Bien sûr. Comprendre le cuisinier en tant qu’artiste, c’est comprendre son univers. La musique est indissociable du mien.



On aimerait bien ton opinion sur quelques artistes : les Cocteau Twins ?

Je ne connais pas bien. Ce qui est étrange, c'est qu'on m'envoie aujourd'hui beaucoup de musique depuis l'emission. Je prends le temps de tout écouter. N'hésitez donc pas à m'en envoyer.



David Bowie ?

Bien sûr, j'adore !



Une période préférée ?

Quand j'aime quelqu'un je le suis du début jusqu'à la fin. Avec les plus, avec les moins. Je suis très fidèle. Quand je rentre dans l'univers de quelqu'un, ce n'est pas seulement prendre les moments que l'on préfère, c'est embrasser la totalité de sa carrière. Je veux comprendre pourquoi.





Tu citais Indochine tout à l'heure : ils ont quand même sacrément changé depuis leurs débuts, ça te dérange pas ?

Non. Je vais comparer ça avec mon expérience de cuisinier : j'ai eu un restaurant très intime, et je remarque aujourd'hui que beaucoup de gens veulent profiter de ce que je fais. Il y a la haute couture et le prêt-à-porter. Je considère qu'Indochine est capable de faire les deux. On peut dire aussi pour Indochine que c'est marketé, qu'ils sont là pour l'argent, mais je vois personnellement une vraie démarche artistique. Il faut que tout le monde puisse en profiter, cela me paraît normal. Ce n'est pas parce qu'on a plus d'argent qu'on est moins sensible et créatif.



Placebo, tu aimes aussi on présume ?

Bien sûr !



C'est un peu pareil qu'Indochine, là, le dernier album craint vraiment. T'en as pensé quoi ?

Il me parle moins. J'ai une manière de procéder peut-être un peu différente des autres. Il y a des albums qui vont me parler tout de suite, et il y a des albums qui ne me parlent pas, que je mets de côté et que j'écoute quelques temps plus tard. Et là je commence à comprendre. Peut-être qu'à un moment, ils étaient plus en avance par rapport à ce que j'attendais d'eux, et c'est quelque part à moi de faire l'effort de comprendre. Un peu pareil qu'en cuisine. Il y a quinze ans, je travaillais les fleurs et personne ne voulait en manger, maintenant on en voit partout. Après on aime ou on n’aime pas, c'est une affaire de goût, mais ce n'est pas pour autant que je vais laisser tomber.



Tu n'as jamais laissé tomber un artiste ? Même The Cure ?

Jamais. Quand j'écoute

Bloodflowers

, beaucoup de gens me disent que c'est nul, alors que c'est l'album que j'écoute le plus.





Tu as entendu que le mec de Franz Ferdinand se lançait dans la cuisine ? T'en penses quoi ?

Pourquoi pas ? Comme je le disais au début de l'interview, je trouve que les deux univers se ressemblent. On part d'une émotion pour en faire quelque chose. Ce n'est qu'une transformation de la matière.



Y-a-t'il des trucs que tu as honte de manger ou d'écouter ?

Non, pas vraiment. Je ne suis pas contre McDo, ni le surgelé. Même en musique, je suis assez droit dans mes bottes. Si j'aimais quelque chose, je n'aurais aucun mal à le dire. Je ne suis pas pour tout, mais je ne suis contre rien.



Tes dernières découvertes musicales ?

J’ai beaucoup saoulé mon assistante avec Pretty Reckless (la sous-Courtney Love de Gossip Girl). Je l'ai écouté en boucle pendant un bon moment, j'ai trouvé qu'elle avait une voix géniale. J'aime beaucoup les voix féminines. J'ai bien aimé par exemple les reprises de Nirvana avec des filles au chant : Joan Jett, Kim Gordon... J'ai trouvé ça génial.





Sur notre verticale Munchies, on a un show où on suit un chef et ses amis en soirée, qui finissent évidemment bourrés : c'est quoi tes tips contre la gueule de bois ?

Mon état de santé ne me permet pas vraiment d'être bourré, juste « pompette », on va dire. Je pense que quand on est artiste, on aime bien cultiver cet état second, mais j'ai compris que je n'avais pas besoin de cela pour cuisiner. Je ne me suis jamais drogué, j'ai toujours préféré me débrouiller seul pour ce qui s'agit de mieux me connaître. Je n'ai pas besoin d'alcool pour créer.



Donc tu n'as jamais pensé à cuisiner des matières hallucinogènes...

Non. Mais je pense que ce ne sont pas vraiment les ingrédients qui donnent cet effet, plutôt la mise en condition. La plus grande des drogues pour moi c'est la persuasion, et je pense qu’il est possible d’avoir les effets sans rien utiliser.



Pour qui aimerais-tu cuisiner ?

Nicolas Sirkis, évidemment ! L’idée d’une collaboration entre sa musique et ma cuisine me tente beaucoup.



Dernière question : nos mamans nous ont demandé si tu allais gagner. Alllez, avoue, tu vas gagner ?

Il reste deux émissions, il faudra être patient.




Marine et Marion ont déjà gagné depuis longtemps. Elles le prouvent chaque jour sur RETARD et plus ponctuellement sur Twitter - @RETARDMAGAZINE


Tu as entendu que le mec de Franz Ferdinand se lançait dans la cuisine ? T'en penses quoi ?

Pourquoi pas ? Comme je le disais au début de l'interview, je trouve que les deux univers se ressemblent. On part d'une émotion pour en faire quelque chose. Ce n'est qu'une transformation de la matière.

Y-a-t'il des trucs que tu as honte de manger ou d'écouter ?

Non, pas vraiment. Je ne suis pas contre McDo, ni le surgelé. Même en musique, je suis assez droit dans mes bottes. Si j'aimais quelque chose, je n'aurais aucun mal à le dire. Je ne suis pas pour tout, mais je ne suis contre rien.

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Tes dernières découvertes musicales ?

J’ai beaucoup saoulé mon assistante avec Pretty Reckless (la sous-Courtney Love de Gossip Girl). Je l'ai écouté en boucle pendant un bon moment, j'ai trouvé qu'elle avait une voix géniale. J'aime beaucoup les voix féminines. J'ai bien aimé par exemple les reprises de Nirvana avec des filles au chant : Joan Jett, Kim Gordon… J'ai trouvé ça génial.


Photo - Marion Bungert

S'il est bien une raison pour laquelle on se souviendra de la sixième saison de

Top Chef

, c'est la présence d'Olivier Streiff. Salutaire touche de Khol dans les rouages de l'émission culinaire de M6, le candidat lorrain (mais basé dans les Alpes-Maritimes) a gagné notre sympathie dès la première émission. Un gothique de presque 40 ans qui gère parfaitement le smoky eye (même de près, on a vérifié) et qui se paye le luxe d'être à la fois drôle, droit dans ses bottes et monstueusement doué dans ce qu'il fait (il joue d'ailleurs sa place en finale ce soir, eh ouais) : on est loin, très loin, des pipes de compétition qu'on croise habituellement dans ce genre de show. Afin de savoir qui était vraiment Olivier Streiff et en connaître un peu plus sur ses goûts musicaux, nous sommes allées passer un moment avec lui. L'occasion d'apprendre que le cuisinier de

Top Chef

adore

Bloodflowers

de Cure et les reprises de Nirvana par des voix féminines, continue à écouter les Doors et Indochine et n'en veut même pas à Placebo pour son dernier album tout pété. Et si Olivier Streiff était le

vrai

mec cool de 2015, celui qui fait juste ce qu'il aime vraiment ne voit pas l’intérêt d'être un gros connard ironique ?




Noisey : Salut Olivier. Quelle relation entretiens-tu avec la musique ?
Olivier Streiff :

La musique est essentielle pour moi. A tel point que je ne sais pas ce que je préfère entre la musique et la cuisine. Vraiment. Mon cœur balance entre les deux, et souvent je suis beaucoup plus proche de la musique. J'en écoutais avant de faire de la cuisine.



Quelle relation avais-tu avec la musique étant adolescent ?

Cela remonte à avant l’adolescence en fait. Enfant, mes parents me faisaient écouter des trucs horribles, très populaires. A 10 ans j’ai découvert l’Adagio de Samuel Barber grâce à

Platoon

d’Oliver Stone et pour la première fois de ma vie, je me suis demandé comment il était possible de faire quelque chose d’aussi beau. J’ai également connu et adoré Mozart grâce à un de mes profs de français.





Joues-tu d'un instrument ?

Non, et c’est le regret de ma vie. J’en avais envie, mais mes parents n’en avaient pas forcément les moyens. J’aurais aimé faire du piano, un jour peut-être...



Bon, tu joues d’un autre piano maintenant, celui de la cuisine [Rires] C'est marrant, tu nous parles beaucoup de musique classique mais ton look est ouvertement gothique…

Quand j’ai commencé à vouloir faire de la cuisine, mes parents m’ont envoyé en observation dans un restaurant pour voir à quoi le métier ressemblait. Un jour, un des employés me tend une cassette : l’

Absolutely Live

des Doors. Ça a été une nouvelle révélation : la découverte de Jim Morrison, pour qui je tombe en adoration totale. Ça a été le point de départ de tout un tas de choses que j'allais découvrir par la suite et qui allaient faire de moi la personne que je suis aujourd'hui. En essayant d’aller plus loin, de comprendre ses textes et sa musique, je me suis rendu compte que c’était quelqu’un de très cultivé. Ce n’était pas juste un rocker, c'était un vrai poète. C'est par ce biais que je découvre Rimbaud, Baudelaire, Verlaine, Nietzsche, Jack Kerouac…



Tu as plutôt été attiré par les poètes et les écrivains qui ont inspiré Jim Morrison. Tu n’aimais pas ses contemporains ?

Si bien sûr, je suis aussi un gros fan de Janis Joplin, Jimi Hendrix, les Who… J’ai beaucoup écouté et aimé la musique de cette période là. J’aurais aimé vivre à cette époque, je crois. Peut-être que dans une autre vie, j’y étais... Je l’espère en tout cas !



Pour notre génération, les Doors restent souvent liés aux années lycée et on connaît finalement assez peu de gens capables de garder une telle fascination pour Jim Morrison passé 17 ans...

Les Doors n'ont que quatre ans de carrière. Et ce n'est pas leurs albums qui sont les plus interessants, ce sont leurs lives. On est dans la créativité pure, quand Jim Morrison déclamait des poèmes sur « Light My Fire », c'est juste génial. Dans l'absolu, ce n'est pas forcément le plus grand groupe du monde, et puis on finit vite par saturer de l'orgue, mais leurs morceaux sont intemporels, et c'est ça que j'aime.





Comment t’es-tu approprié cette esthétique gothique au final ?

Par la poésie, évidemment… Mais bon, j’ai grandi à l’époque à laquelle où ont déferlé successivement The Cure, Depeche Mode, Indochine et Nirvana, donc je suis tombé dedans naturellement - avec l’aide de mes grandes sœurs qui avaient déjà les cheveux en pétard.



Tu as l'air très à l'aise avec le fait d'être « différent ».

J’aime pas trop le terme « différent ». Je suis cuisinier donc parfois, on accepte peut-être moins mon extravagance que si j’étais chanteur ou créateur, mais je ne me sens pas foncièrement différent. Je reçois beaucoup de messages d’autres cuisiniers qui se disent que maintenant que j’ai repoussé les limites du conventionnel, ils peuvent s’assumer comme ils sont eux aussi. Et ça c’est génial, parce que pour s’exprimer au mieux, un artiste doit se sentir libre à tous les niveaux, y compris dans son look.



Tu vas régulièrement en concert ? En soirées goth ?

Je faisais pas mal de soirées gothiques quand j’étais jeune, en Allemagne notamment puisque je suis lorrain, et puis sur la Côte d’Azur ensuite. Les concerts, j’essaye d’en faire le maximum mais avec mon métier, j’ai pas forcément le temps. Mon dernier gros concert, c’était celui des Doors un peu avant la mort de Manzarek, pour les 40 ans de la mort de Jim Morrison. Sinon je regarde énormément de lives en DVD, j'aime beaucoup ça.



Il y avait vraiment une scène gothique développée sur la Côte d’Azur ?

Pas vraiment, c’était juste des caves dans le vieux Nice, des endroits confidentiels. Niveau musical, c’est une région assez aseptisée, plate… On préférait se retrouver entre amis. Mais j’ai l’impression que ça bouge de plus en plus et qu’il y a des scènes un peu plus solides qui commencent à apparaître depuis quelques temps.




Corpus Delicti, un des très rares groupes goth de Nice, dans les années 90.

Tu évoques beaucoup Pierre Soulages, qui est aussi une référence pour des mecs comme... ahem, Gesaffelstein.

Je suis quelqu’un de cérébral. Le travail de Pierre Soulages m’a permis de concentrer ma réflexion vers des choses plus minimalistes, d’aller à l’essentiel. Il m’a aussi permis de ne pas avoir peur de proposer des choses différentes, de dépasser mes bases classiques. Soulages, on pourrait se dire « c’est juste du noir » et en fait non, quand on rentre dans la matière, dans l’œuvre, on se rend compte que c’est beaucoup plus complexe. En cuisine aussi le plus compliqué, c’est de faire simple.



T’écoutes quoi quand tu cuisines ?

Ça dépend vraiment de mon humeur. Je dis toujours « c’est pas moi qui décide ». Je suis simplement l’alchimiste qui transforme les matières… Chopin, Nirvana, Oasis, The Cure, Katie Melua quand j’ai besoin de calme pour penser un plat ou des choses plus violentes, de temps en temps. J’écoute principalement des trucs sur YouTube. Je travaille aussi en écoutant mon iPod.



Si tu ouvres un jour un nouveau restaurant, tu te vois donner une place importante à la musique ?

Bien sûr. Comprendre le cuisinier en tant qu’artiste, c’est comprendre son univers. La musique est indissociable du mien.



On aimerait bien ton opinion sur quelques artistes : les Cocteau Twins ?

Je ne connais pas bien. Ce qui est étrange, c'est qu'on m'envoie aujourd'hui beaucoup de musique depuis l'emission. Je prends le temps de tout écouter. N'hésitez donc pas à m'en envoyer.



David Bowie ?

Bien sûr, j'adore !



Une période préférée ?

Quand j'aime quelqu'un je le suis du début jusqu'à la fin. Avec les plus, avec les moins. Je suis très fidèle. Quand je rentre dans l'univers de quelqu'un, ce n'est pas seulement prendre les moments que l'on préfère, c'est embrasser la totalité de sa carrière. Je veux comprendre pourquoi.





Tu citais Indochine tout à l'heure : ils ont quand même sacrément changé depuis leurs débuts, ça te dérange pas ?

Non. Je vais comparer ça avec mon expérience de cuisinier : j'ai eu un restaurant très intime, et je remarque aujourd'hui que beaucoup de gens veulent profiter de ce que je fais. Il y a la haute couture et le prêt-à-porter. Je considère qu'Indochine est capable de faire les deux. On peut dire aussi pour Indochine que c'est marketé, qu'ils sont là pour l'argent, mais je vois personnellement une vraie démarche artistique. Il faut que tout le monde puisse en profiter, cela me paraît normal. Ce n'est pas parce qu'on a plus d'argent qu'on est moins sensible et créatif.



Placebo, tu aimes aussi on présume ?

Bien sûr !



C'est un peu pareil qu'Indochine, là, le dernier album craint vraiment. T'en as pensé quoi ?

Il me parle moins. J'ai une manière de procéder peut-être un peu différente des autres. Il y a des albums qui vont me parler tout de suite, et il y a des albums qui ne me parlent pas, que je mets de côté et que j'écoute quelques temps plus tard. Et là je commence à comprendre. Peut-être qu'à un moment, ils étaient plus en avance par rapport à ce que j'attendais d'eux, et c'est quelque part à moi de faire l'effort de comprendre. Un peu pareil qu'en cuisine. Il y a quinze ans, je travaillais les fleurs et personne ne voulait en manger, maintenant on en voit partout. Après on aime ou on n’aime pas, c'est une affaire de goût, mais ce n'est pas pour autant que je vais laisser tomber.



Tu n'as jamais laissé tomber un artiste ? Même The Cure ?

Jamais. Quand j'écoute

Bloodflowers

, beaucoup de gens me disent que c'est nul, alors que c'est l'album que j'écoute le plus.





Tu as entendu que le mec de Franz Ferdinand se lançait dans la cuisine ? T'en penses quoi ?

Pourquoi pas ? Comme je le disais au début de l'interview, je trouve que les deux univers se ressemblent. On part d'une émotion pour en faire quelque chose. Ce n'est qu'une transformation de la matière.



Y-a-t'il des trucs que tu as honte de manger ou d'écouter ?

Non, pas vraiment. Je ne suis pas contre McDo, ni le surgelé. Même en musique, je suis assez droit dans mes bottes. Si j'aimais quelque chose, je n'aurais aucun mal à le dire. Je ne suis pas pour tout, mais je ne suis contre rien.



Tes dernières découvertes musicales ?

J’ai beaucoup saoulé mon assistante avec Pretty Reckless (la sous-Courtney Love de Gossip Girl). Je l'ai écouté en boucle pendant un bon moment, j'ai trouvé qu'elle avait une voix géniale. J'aime beaucoup les voix féminines. J'ai bien aimé par exemple les reprises de Nirvana avec des filles au chant : Joan Jett, Kim Gordon... J'ai trouvé ça génial.





Sur notre verticale Munchies, on a un show où on suit un chef et ses amis en soirée, qui finissent évidemment bourrés : c'est quoi tes tips contre la gueule de bois ?

Mon état de santé ne me permet pas vraiment d'être bourré, juste « pompette », on va dire. Je pense que quand on est artiste, on aime bien cultiver cet état second, mais j'ai compris que je n'avais pas besoin de cela pour cuisiner. Je ne me suis jamais drogué, j'ai toujours préféré me débrouiller seul pour ce qui s'agit de mieux me connaître. Je n'ai pas besoin d'alcool pour créer.



Donc tu n'as jamais pensé à cuisiner des matières hallucinogènes...

Non. Mais je pense que ce ne sont pas vraiment les ingrédients qui donnent cet effet, plutôt la mise en condition. La plus grande des drogues pour moi c'est la persuasion, et je pense qu’il est possible d’avoir les effets sans rien utiliser.



Pour qui aimerais-tu cuisiner ?

Nicolas Sirkis, évidemment ! L’idée d’une collaboration entre sa musique et ma cuisine me tente beaucoup.



Dernière question : nos mamans nous ont demandé si tu allais gagner. Alllez, avoue, tu vas gagner ?

Il reste deux émissions, il faudra être patient.




Marine et Marion ont déjà gagné depuis longtemps. Elles le prouvent chaque jour sur RETARD et plus ponctuellement sur Twitter - @RETARDMAGAZINE


Sur notre verticale Munchies, on a un show où on suit un chef et ses amis en soirée, qui finissent évidemment bourrés : c'est quoi tes tips contre la gueule de bois ?

Mon état de santé ne me permet pas vraiment d'être bourré, juste « pompette », on va dire. Je pense que quand on est artiste, on aime bien cultiver cet état second, mais j'ai compris que je n'avais pas besoin de cela pour cuisiner. Je ne me suis jamais drogué, j'ai toujours préféré me débrouiller seul pour ce qui s'agit de mieux me connaître. Je n'ai pas besoin d'alcool pour créer.

Donc tu n'as jamais pensé à cuisiner des matières hallucinogènes…

Non. Mais je pense que ce ne sont pas vraiment les ingrédients qui donnent cet effet, plutôt la mise en condition. La plus grande des drogues pour moi c'est la persuasion, et je pense qu’il est possible d’avoir les effets sans rien utiliser.

Pour qui aimerais-tu cuisiner ?

Nicolas Sirkis, évidemment ! L’idée d’une collaboration entre sa musique et ma cuisine me tente beaucoup.

Dernière question : nos mamans nous ont demandé si tu allais gagner. Alllez, avoue, tu vas gagner ?

Il reste deux émissions, il faudra être patient.

Marine et Marion ont déjà gagné depuis longtemps. Elles le prouvent chaque jour sur RETARD et plus ponctuellement sur Twitter - @RETARDMAGAZINE