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Music

Metz a une mission claire et précise : tout défoncer, partout, tout le temps

Le trio le plus féroce du Canada nous a parlé des Eagles, de Slayer, des hivers à Toronto et des chiens qui surfcrowdent à leurs concerts.

La musique de Metz n’est définitivement pas faite pour être décrite avec des mots, à moins que l’on prenne plaisir à décliner les adjectifs généralement réservés au monde animal : féroce, sauvage, primaire, et j’en passe. Le trio guitare-basse-batterie le plus connu de Toronto est de retour avec un deuxième album,

II

, qui est sorti hier chez Sub Pop. Plus intense et abouti que le précédent, il est une preuve bruyante que même si la recette est éprouvée, Metz fait partie des rares groupes actuels encore capables de faire un post-hardcore digeste et réjouissant. On les a rencontrés il y a quelques mois, la veille de leur concert ultra-sold-out au Point Ephémère. C’est Alex, le leader plus normcore que grunge, qui a mené les débats, pendant que ses deux compères soignaient leur gueule de bois à grands coups de Perrier.

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Noisey : Votre premier album a été enregistré de manière très spontanée - vous êtes entrés en studio et avez joué, sans rien de prévu au préalable. Ça été le même processus pour II ?

Ça été différent cette fois-ci. On s’est encore retrouvés en studio pour jouer, mais cette fois-ci, on avait déjà écrit quelques chansons au préalable, ou quelques bouts de chansons du moins. Je pense qu’on était super contents parce que ça faisait un bail qu’on était constamment en tournée et qu’on jouait les mêmes morceaux à longueur de temps, donc l’idée de rentrer chez nous et d’avoir le de prendre notre temps pour composer, c’était un vrai luxe.

Et effectivement ça a pris un certain temps… Vous ressentiez un peu de pression peut-être ?

On essaye toujours de vivre selon la règle que le seul avis qui compte pour notre musique, c’est celui que l’on peut avoir tous les trois. Si tu commences à réfléchir à ce que veulent les gens, ou encore pire ce que tu penses qu’ils veulent, tu finis vite par t'éloigner de tes intentions, et l’honnêteté de ce que tu produis en prend un coup. On essaye de ne pas penser à ce qui va vendre, ou à ce qui est cool. On s’en sort toujours mieux quand on s’en tient à ce qu’on sait faire, et je pense que c’est un principe qui tient pour toute production artistique.

Vous avez enregistré dans trois studios différents. C’est un principe feng shui ou quoi ?

[

Rires

] Non, c’est beaucoup moins sexy que ça en a l’air. C’était plus une histoire d’emploi du temps. Une fois qu’on était lancés, on avait pas du temps envie de s’arrêter parce que le studio était occupé ou je ne sais quoi, du coup on allait faire notre session autre part.

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Du coup c’était juste vous trois ?

Nous trois, un ingé son et Graham Walsh (Fucked Up) qui a mixé à la fin. Il s’est occupé de tout l’album, et pas juste de quelques morceaux comme sur celui d’avant.

La photo de la pochette, elle vient d’où ?

C’est une vieille photo prise par mon père…

… comme celle de l’album précédent, donc ?

Exactement. Elle résume vraiment bien le contenu des paroles. C’est basé sur nos relations, avec le monde qui nous entoure, les médias, le gouvernement, les médicaments, tout ça. C’est deux personnes assises ensemble qui regardent une étendue d’eau devant eux, et ils aimeraient la traverser mais ils n’y parviennent pas. Cette eau, c’est un peu comme un écran d’ordi ou une vitre à travers laquelle tu regardes le monde sans vraiment y trouver ta place. Ouais, les deux personnages sont complètement déprimés.

Tout ça m’a l’air bien plus deep et introspectif que ce à quoi vous nous aviez habitué avant.

Ouais, pour la première fois de ma vie j’ai été directement confronté à la mort. Beaucoup de morceaux font référence à ça. C’est quelque chose de nouveau pour moi, ça ne m’était jamais arrivé plus jeune. Toutes ses émotions je les ai mises dans l’album, il est beaucoup plus sombre aussi bien au niveau du son que des paroles. C’est un instantané de là où on en était dans nos vies à ce moment là. On a beau être ravis de qui se passe avec le groupe, il y a pas mal de choses autour qui nous font nous interroger et tout remettre en cause. C’est à l’origine de beaucoup de paroles sur cet album.

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Apparemment ça ne vous a pas donné envie d’écrire de balades pour autant… Ça vous fait flipper?

Non c’est pas tellement ça, il s’agit plus de bosser sur nos forces. Pour le moment aucun de nous trois n’a débarqué en disant « hey, j’ai une super idée pour une chanson à la cool ». Ca veut pas dire que ça n’arrivera jamais, mais ça ne s’est pas encore produit. Et puis on connaît nos limites en tant que groupe. Il y a pas mal de choses différentes que l’on pourrait faire séparément, mais avec Metz, on a une direction claire.

Celle de faire des concerts absolument dantesques ? Je ne vous ai encore jamais vu en concert, mais tout le monde est unanime pour dire que c’est une expérience de dingue…

Je peux te poser une question ? Ça fait 10 minutes qu’on discute ensemble, tu t’attends à quel genre de concert ? Un truc énergique, venant de la part de ces trois mecs endormis ?

Je crois toujours ce qu’on me raconte…

[

Rires

] C’est super flatteur ces commentaires, on est toujours contents d’entendre ça. J’adorerais qu’on dise de nous que notre songwriting et nos qualités de musiciens sont incroyables, mais c’est pas à nous d’en décider. Je pense que les gens se concentrent sur le côté énergique et chaotique de nos concerts parce que finalement c’est pas quelque chose que tu vois souvent. On joue comme ça parce qu’on considère que c’est comme ça que le punk rock doit être joué en live. Je me souviens parfaitement d’être allé voir des concerts plus jeunes et d’en ressortir secoué, physiquement secoué. C’est la meilleure sensation au monde. Et on l’a tous les soirs, c’est mortel. Disons que notre musique, elle se peint en live avec des très gros pinceaux.

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Il y a un type de fan de Metz que vous voyez toujours à vos concerts ?

C’est très divers, ça varie de ville en ville. Certains restent dans un coin plutôt calmes, d’autres transpirent et sautent dans tous les sens comme nous sur scène. Y’a pas mal de teens de 15 ou 16 ans. D’ailleurs à Londres hier y’avait même un chien ! Ouais y’avait un chien à notre concert hier, ils l’ont fait crowdsurfer, c’était dingue.

On vous demande souvent ce que vous écoutez en punk ou en hardcore, mais du coup vous écoutez quoi qui n’ai rien à voir avec ce genre ?

La majorité de ce qu’on écoute, c’est pas du punk. Surtout en tournée d’ailleurs… On joue sur scène comme des bourrins, t’imagines si on s’infligeait du Slayer de retour dans le van ? Non, on a besoin de se détendre. Chris est à fond dans les vieilles B.O. de films, les trucs de John Carpenter… En ce moment, il écoute cette de

Candyman

par Philip Glass, par exemple. On écoute des songwriters folk, des trucs psyché, du 60’s beat. On a bien kiffé le dernier Portishead, le Liars aussi. Rien de trop énervé, ça on s’en occupe nous-mêmes.

Donc la meilleure chanson après un concert, c’est quoi ?

Ma chanson préférée après un concert, c’est quand tout le monde ferme sa gueule. Ou sinon un bon vieil

Hotel California

des Eagles. [

Rires

] T’imagines la torture ? Y’aurait de quoi te dégoûter de faire des tournées. D’ailleurs on avait un pote à nous qui s’occupait de faire le son sur l’une de nous tournées. Et pour rigoler un peu, dès qu’on avait fini notre concert, il balançait cette vieille chanson rock’n’blues, un truc du genre du générique du

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Late Night Show

de David Letterman, avec un gros solo bien strident. À chaque fois on voyait l’ingé son de la salle courir à la cabine pour arrêter le morceau. On a arrêté de le faire quand on a commencé à voir des commentaires en ligne du genre « c’est quoi cette merde ? qu’est-ce qui leur prend ? ».

Faut dire que ça peut tuer une ambiance.

Tu peux la tuer avant de jouer aussi, hein. Maintenant on met souvent nos iPods avant nos concerts, parce que t’es là avant de monter sur scène à essayer de te motiver, et quelqu’un te met un putain de

MacArthur Park

ou je sais pas quelle connerie.

Vous êtes signés chez Sub Pop, vous enchaînez les tournées et les critiques sont unanimes sur vos albums. Vous avez l’impression d’avoir coché toutes les cases ?

On est tous les trois du genre à vouloir toujours plus. Ceci dit, on a très largement dépassé nos attentes en termes de musique. On s’était jamais dit qu’on ferait carrière comme musicien. Faut être un peu con pour espérer ça, non? Nos objectifs étaient simples : faire la musique que l’on aime, et la jouer à nos amis. Donc tout ce qui se passe, c’est un peu la cerise sur le gâteau. Le fait que l’on fasse ça à plein temps c’est déjà énorme, mais on se dira jamais qu’on a atteint un objectif définitif. Le seul objectif, c’est d’avoir au moins 3 Lamborghinis. À part ça, on évite de chercher une finalité quelconque à ce que l’on fait. Si tu te dis, « je veux jouer dans cette salle, dans cette ville » ou autres, t’auras beau avoir une tonne de trucs mortels qui t’arrivent, tu seras jamais satisfait. Tu peux passer ta vie à courir après des choses diverses et variées et à ne pas profiter de ce que tu as déjà. On pourra toujours écrire de meilleures chansons et faire de meilleurs concerts, on cochera jamais toutes les cases. Ouais, c’est la cerise sur le gâteau, et on adore le gâteau.

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Il y a bien un truc qui vous fait rêver, non ?

Progresser, faire encore et toujours de nouveaux morceaux. Si on y parvient, ça sera déjà un succès. On a pas vraiment d’inspiration à long terme, on pense pas comme ça. Quand on aura 65 ou 70 ans, on fera une tournée sur la lune. On affrètera un vaisseau spatial et on embarquera avec nous tout ceux qui en ont quelque chose à foutre de nous et de notre musique. Et on restera mourir là-bas, donc faudra vraiment être motivés, va falloir qu’on bosse notre fan base d’ici là.

En attendant vous vivez encore et toujours à Toronto. Vous avez pas pensé à déménager ?

Tous les jours. On vient de se taper l’hiver le plus froid du siècle. On a joué un concert à Los Angeles, et on se baladait en t-shirts peinards, et on s’est dit qu’on était vraiment stupides. Pourquoi on vit encore à Toronto ? C’est un cauchemar. C’est une super ville, mais c’est vrai qu’on a eu la chance de voyager et de voir plein de trucs, donc on se pose parfois la question de partir.

Vous faites souvent les louanges de Toronto et de ses groupes (Constantines, S.H.I.T., Soupcans)… C’est quoi la particularité de la scène là-bas ?

Je pense que c’est la diversité des groupes. Il a une tonne de groupes qui font des choses complètement différentes, et pourtant tout le monde joue ensemble. Si tu vas à un concert, ça ne sera jamais que du punk. C’est un bon mélange de musiciens talentueux qui jouent ensemble, qui s’entendent bien et qui se soutiennent les uns et les autres. C’est super ouvert comme scène, un vrai buffet musical. Il y a un connard ou deux, comme partout, mais globalement les gens sont soudés. On nous a vachement soutenus depuis le début, du coup on essaye de rendre la pareille.

Il paraît qu’on a vous a tapé sur les doigts pour que vous fassiez un compte Instagram.

On était déjà à la bourre avec Twitter, alors Instagram forcément… On a tendance à résister à la technologie disons, mais Instagram ça a l’air marrant. On va prendre des photos de ce que l’on bouffe, c’est pas mal comme idée non? Là on a balancé une photo qu’on a prise à Mexico, à un match de lucha libre. Des lutteurs avec des masques, qui n’aime pas ça ? Ça, c’est des choses intéressantes. On a eu plein de likes. On adore Instagram du coup. Suivez-nous !

Metz sera en concert le 27 juin à Evreux au festival Rock dans tous ses États et le 27 octobre à Paris, à la Maroquinerie.

Pas d'Instagram pour Diane Lebel. Par contre, elle est sur Twitter - @dianelebel