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Music

Ni francs-maçons, ni chrétiens convaincus : voici Lodges

Le groupe de hardcore parisien nous a filé son nouveau clip extrait du futur album « See God » et on leur a posé plein de questions sur Dieu.

Lodges est à nouveau une preuve que la scène hardcore française sait se prendre en main. Formé à Paris en 2013, sur les cendres de Donkey Punch, le groupe a troqué la légèreté et le fun de leurs premiers morceaux contre un aller simple pour les abysses. Le résultat : un premier EP très propre, Walking on Hands and Knees, sorti sur le label Straight & Alert il y a 2 ans. Aujourd'hui, après avoir galéré plusieurs mois pour trouver un label, les gars ont décidé d'envoyer tout le monde se faire foutre et de créer leur propre structure, évidemment baptisé Closed Door Records. Ce sont donc eux et eux-seuls qui sortiront leur premier album en novembre prochain, See God, dont on vous file en avant-première le clip holy terror tiré du morceau « Triumph Over You » juste en-dessous. Comme ils avaient l'air concernés par d'autres choses que les éternelles vicissitudes de la scène et notamment les questions relatives au Tout-Puissant, on leur a fait une interview sur Dieu.

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Noisey : J'ai l'impression que vous avez moins écouté Converge et plus Ringworm ces derniers mois.
Max (Guitare) : C’est quand même bien hargneux Ringworm. Dans l’ensemble, on a gardé nos influences précédentes, et on a essayé de les mélanger à des choses un peu plus « lumineuses ».

Clément (Batterie) : On voulait revenir à quelque chose de plus simple en terme de composition, avec une dynamique un peu « rock » qu'on retrouve sur des morceaux comme « Triumph Over You » ou « Trainwreck ». Le problème se pose quand il est question d'y intégrer des riffs edge metal.

Antoine (Guitare) : Par rapport au premier ep, le côté « chaotique » (aussi affreux que ce qualificatif puisse l’être) a clairement été mis sur la touche pour se focaliser sur un format de chanson plus catchy et plus direct. Du coup et même si en apparence l’album est plus simple dans sa composition, je trouve qu’il est paradoxalement beaucoup plus riche que les précédentes sorties. C’est un bon compromis entre confort et sportivité, à la manière d’un coupé Volskwagen.

On dirait que que le style « Holy Terror » est un peu en berne depuis que la fusion est revenue en force dans le hardcore, nan ?
Olivier (Chant) : Je ne suis pas sûr, il y a toujours des groupes comme Rot In Hell et sûrement un tas d’autres qui essayent avec plus ou moins de succès de faire revivre l’héritage d’Integrity. Après, il y a des groupes comme Rise and Fall et Oathbreaker qui sont partis de cette base pour faire un truc plus personnel par la suite. Donc je pense qu’on se situerait d’avantage dans cette veine.

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Max : Turnstile a ouvert la boite de pandore avec cette histoire de fusion. J’ai bien peur que d’ici quelques années les sacs Poivre Blanc aient remplacé tous les Eastpak noirs de la scène hardcore.

Clément : En tous cas, j'ai hâte de voir la suite et jusqu'où leur passion pour Living Colour va les mener.

Antoine : Le Holy Terror est très bien là où il est. Perso et sans forcément être transcendé par ce revival hardcore Parker Lewis, je préfère toujours entendre des groupes jouer de mauvais riffs de Leeway plutôt que de mauvais riffs d’Integrity. La marge de gêne est plus acceptable dans le premier cas.

Il s’est passé quoi avec ta voix d'ailleurs Olivier ? Les passages chantés, c’est une idée de qui ?
Olivier : On va pas se mentir, un groupe comme Twitching Tongues a ramené le chant clair dans le hardcore/metal sur le devant de la scène. C’est devenu de nouveau acceptable. C’était un truc normal entre les années 90 et 2000 avec Vision of Disorder, Life of Agony, Only Living witness. Puis c’est devenu complètement has B-been. Personnellement j’ai toujours trouvé ça cool si c’est dans l’intérêt du morceau, s’il y a une vraie valeur ajoutée. Et donc voilà, quand Max est arrivé avec ses riffs, je me suis dit pourquoi ne pas essayer, les autres m’ont encouragé à aller dans cette direction et on est satisfaits du résultat. Après, on s’attend à ce que les gens nous sortent que ça sonne Twitching Tongues, mais bon à priori, comme je l’ai dit plus haut, c’est pas le seul groupe à utiliser du chant clair.

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Clément : Olivier est un petit man de la pop music, c'était en lui dès le début, bien emmitouflé sous ses T-shirts violents.

Vous en êtes où dans votre quête de label pour sortir votre album ?
Olivier : Ça a été très long et laborieux. Il y a une petite poignée de personnes qui font ça bien en France, mais malheureusement tous avaient déjà beaucoup de trucs sur le feu et pas de temps/argent/motivation à nous caler dans leur planning de sorties. On a eu un deal intéressant avec un label allemand mais qui nous obligeait à sortir l’album au premier trimestre 2016. Vu qu’il est enregistré depuis avril 2015, on ne voulait pas attendre plus longtemps. On veut profiter de cet élan dynamique pour le sortir maintenant. Aujourd’hui, que ce soit chercher un label ou des dates, si il n’y a pas un semblant de buzz autour de toi, c’est très compliqué de capter l’attention des gens. Trop de groupes. Un patron d’un label français m’a dit clairement : « Si je ne connais pas le nom du groupe y’a 95 % de chances pour que leur mail de démarchage finisse dans ma corbeille ».

Donc quand t’es un petit groupe français, même si tu as joué avec Kickback, Deafheaven, Slapshot et j’en passe, que t’as un petit paquet de dates sous le coude, un album bien produit, un bel artwork, les labels étrangers s’en foutent parce qu’ils n’ont jamais entendu parler de toi. Faut que tu te fasses recommander par quelqu’un. C’est dur à digérer mais ça marche comme ça aujourd’hui. L’un dans l’autre, pour des questions de planning et d’un contrôle total sur ce qu’on voulait sortir, on a décidé de monter notre label : Closed Doors Records. L’idéal, quand tu as assez de temps et d’argent, c’est de tout faire toi-ême, payer une agence pour les relations presses et gérer ton bigcartel. On est un peu fauchés donc on essaye de faire ça du mieux qu’on peut avec nos moyens, mais voilà l’idée.

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Vous vous considérez comme un groupe chrétien, catholique, athée, autre(s) ?
Max : Je dirais plutôt agnostique. Chacun dans le groupe à des croyances différentes, concrètes ou non, mais je pense qu’on est tous ouverts à la possibilité d’une force supérieure, qu’elle prenne la forme d’un Dieu ou d’autre chose. Personnellement, je place l’athéisme au même niveau que la religion, puisqu’il reste dans l’affirmation catégorique de la non existence de « Dieu ». Tout ce qui me déplait dans la religion se retrouve bien souvent dans l’athéisme, à savoir le communautarisme et la négation des croyances de l’autre. Tout le monde veut parler, mais personne ne veut écouter.

Mais de toute façon le groupe n’a pas vocation à porter une idéologie. C’est plutôt un vaisseau qui nous permet de concrétiser nos goûts musicaux et esthétiques ensemble. Pour ce qui est des thèmes, on aborde les sujets qui nous intéressent de manière franche et directe. Si ça parle aux gens tant mieux, sinon ça ne m’empêchera pas de dormir.

Clément : Me concernant, je me considère un jour sur deux, suivant l'humeur, athée ou agnostique, de culture chrétienne et intéressé par l'Islam et les religions pré-islamiques. On vous a déjà traité de francs-maçons à cause de votre nom ou bien tout le monde s’en branle ?
Max : Tout le monde s’en branle. Peut être que si on s’était appelé « Talmud » on aurait eu plus de problèmes. Par contre, si tu plies notre pochette en deux et que tu la places en face d’une lampe UV, tu peux voir Serge Dassaut tenir le monde en flamme dans ses mains.

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Clément : Le monde s'en fout ouais, il préfère les jeux de mots.

Antoine : On nous a également reproché le fait que par une coïncidence étrange, si tu changes l’ordre et le nombre de certaines lettres de « Lodges », cela donne « Jacques Attali ». Ca vous arrive de prier pour obtenir quelque chose ou de dire « merci mon Dieu » quand il vous arrive un truc inespéré ?
Olivier : ça m’est arrivé plusieurs fois d’être à deux doigts de me faire dégommer par des chauffards à Paris. « Razibus » comme dirait le père Tarain. Et dans ces moments là, j’ai quand même tendance à me dire qu’il y a un truc au-dessus de moi et à le remercier.

Clément : Non. Par contre, plus jeune, j'avais fait un mausolée pour Hide le guitariste d'X Japan décédé en 98, afin de pouvoir me recueillir à sa mémoire. Sans m'en rendre compte, j'ai sûrement gagné des points d'accès au paradis.

Max : Un paquet de fois oui.

Antoine : 1 à 2 fois par semaine.

Jurez-vous au « Nom de Dieu » ? Dans quelles circonstances ?
Olivier : Quand des organisateurs me répondent positivement pour des dates. Donc pour ainsi dire, très rarement.

Antoine : J’essaie de laisser Dieu tranquille autant que faire se peut. Qu’avez vous pensé du film de Jaco Van Dormael avec Poeelvoorde dans le rôle de Dieu ? C’est qui pour vous le meilleur Dieu du cinéma ?
Max : Agréablement surpris. C’était assez malin en terme de campagne de vendre le film comme une comédie un peu franchouillarde et burlesque, et d’en faire totalement autre chose quitte à décevoir le spectateur. Le métrage tombe un peu dans les travers du film d’auteur francophone avec une imagerie poétique ringarde à la Jeunet, mais il en subsiste quand même de bonnes idées. Au final, tout est bien qui finit bien, le consommateur lambda s’est fait baiser par la campagne de communication, et un film sans Kad Merad ni Charlotte Gainsbourg arrive a rentrer dans ses frais.

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Sinon pour le meilleur Dieu du cinéma, ca serait l’homme à la boite dans The Box de Richard Kelly. J’aime bien l’idée d’une entité ambivalente qui serait à la fois Dieu et le Serpent.

Clément : Je savais que Max parlerait de The Box, et je suis plutôt OK avec ça et cette histoire d'ambivalence. Ca me rappelle un peu ce que disait Nabe dans son Régal des Vermines, « Tout individu qui n’est pas à la fois son propre Dieu, son fidèle et son impie, n’est pas religieux. ». Bon par contre pour Nabe comme dh’ab, c'est très individualiste comme vision des choses et l'idée de Dieu est ramené à sa propre personne.

On se ferait chier sur Terre si le concept de religion n’avait pas été inventé, hein ?
Olivier : On se ferait déjà bien chier dans la musique. On n’aurait pas eu de douces mélopées de la part de Marduk avec des noms comme « Jesus Christ Sodomized ». La tristesse. Comment les scientifiques peuvent-ils être certains du Big Bang et de l’évolution si personne n’était là pour les voir ?
Max : Un peu comme les concerts de Refused avant qu’ils splittent en fait, pourtant tout le monde a l’air de penser que c’était bien.

Clément : Ca sent la question piège, je passe mon tour. S’il existe un après, vous aimeriez qu’il se matérialise sous quelle forme ?
Olivier : Un coffee shop hyper cosy avec un choix de café infini, de bons vinyles à écouter et mes proches.

Max : J’aimerais que mon esprit soit numérisé, qu’il devienne une sorte d’absolu, un condensé d’information pure, puis qu’il soit placé dans une dictée magique.

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Clément : Sous la forme d'Hitler qui tue Mélanie Laurent dans les rêves de Mélanie Laurent.

Antoine : Probablement un savant mélange entre les rêves de Clément et d’Olivier : un coffee shop où Hitler t’apporterait un Mocha brûlant que tu pourrais jeter au visage de Mélanie Laurent. En 2015, en qui ou en quoi vous croyez, à part vous ?
Olivier : En Taylor Swift et PNL.

Max : En Dexter Holland et Noodles, Greg K. a toujours fait de la figuration à mon avis.

Clément : Personnellement, je crois pas mal en Sacha Béhar.

Antoine : À une reformation de Kickback mais j’imagine que je peux toujours aller me faire enculer.

Lodges sont sur Facebook. Rod Glacial se pose plein d'autres questions sur Twitter.