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Music

Le label de Tove Lo nous a envoyé un disque et un donut. Dans le doute, on a chroniqué le donut.

Incontestablement le gâteau promotionnel de l'été 2016.

2016. Planète Terre. Paris. À l'heure où la défiance du public envers les médias – et celui des médias envers le monde de la communication dans son ensemble – a atteint son zénith, les attachés de presse n'ont d'autre choix que de rivaliser d'ingéniosité pour pousser les journalistes à écouter les disques des artistes qu'ils représentent. Pour la redoutable équipe de l'artiste suédoise Tove Lo – qui, au passage, fait tellement ramasser ses parents que c'est mentionné sur son article Wikipédia –, la promotion du single « Cool Girl », tiré d'un album prévu pour mi-octobre 2016, s'est faite en deux temps. Tout d'abord, il y a eu cet email envoyé le 4 août à une poignée de journalistes triés sur le volet, avec pour seul objet « And you, are you a Cool Girl ? » – une question simple, efficace, qui n'a pourtant abouti à aucune chronique satisfaisante. Face à cette situation de crise, le département marketing du label (Polydor, une division Universal) s'est réuni en urgence au 37ème étage de la tour de verre qui leur fait office de quartier général. Aux alentours de 18 heures, un chef de projet vêtu d'un smoking Smalto s'est adressé à l'ensemble des personnes de la pièce – aucune d'elles n'avait l'autorisation d'en sortir sans qu'un plan d'action viable ne soit établi. Après trois heures de brainstorming intense où il a notamment été question de « séduire les leaders d'opinion » et « crédibiliser ses propos », une image lui est venue en tête et il s'est empressée de la partager : « Si la musique ne se suffit plus à elle-même, ne devrait-on pas aussi leur donner à boire et à manger ? La Bible ne disait-elle pas que la musique a toujours été liée au goût ? » Le visage de ses collègues s'est éclairé. La voix d'une stagiaire affublée d'une blouse virginale s'est timidement élevée : « Un sceau d’émeraude sur une monture d’or, tel est un air de musique sur un vin délicieux. » (Siracide 32, 6). » L'assemblée a applaudi – la stagiaire a d'ailleurs été embauchée sur le champ – et 24h plus tard, nous trouvions sur le bureau de notre rédacteur en chef un sac en papier dans lequel se trouvaient, loi Évin oblige, un disque et un donut. Qu'attendait donc Polydor de Noisey ? Quelle était l'objectif de cette singulière offrande ? Était-ce là une énigme ? Et si oui, quelle en était la solution ? Dans le doute, nous avons donc mis le disque de côté et chroniqué le donut. *** Variation sur un thème déjà largement éprouvé : l'agression. Visuellement, on dirait une pâtisserie de mariage coréen. Techniquement, c'est un sablé avec une épaisse couche de glaçage et un trou au milieu (donc absolument pas un donut). La présentation (boîte en carton neutre, 2 points de fixation) ne laisse aucun choix : ce biscuit est là pour être mangé, rapidement et sans ambages. Le discours est tout aussi clair et direct : sucre, sucre, sucre, martelé jusqu'au cauchemar. Étonnamment, sur une petite portion, c'est presque supportable - je dis bien presque, ce qui signifie que ça reste tout de même féroce. Plus étonnant encore : le soupçon de citronnelle, plutôt inattendu et original. Subsiste toutefois un problème : cette pâtisserie est, a priori, totalement différente de celle que Tove Lo porte à sa bouche avec un air de reproche sur la pochette de son single Cool Girl. Déjà, elle est beaucoup plus grosse. Et si on reste très clairement sur une pâte sablée dans un cas comme dans l'autre, il apparait assez évident que le biscuit qu'on voit sur la pochette est nettement plus nuancé en texture et autrement plus fondant. Si à l'agression, il faut désormais ajouter le mensonge, où va-t-on ? Eh bien je vais vous le dire : au bar le plus proche, et pas pour rigoler. Parce que pour venir à bout de ce concentré de vesou et de sa forte persistance en bouche, il vous faudra au moins l'amertume d'un bitter - aux esthètes, on recommendera un Noilly Prat Original Dry, voire un Fernet Branca ; aux plus hardis une Suze, bue d'une traite, sans la moindre émotion.
Lelo Jimmy Batista, Rédacteur en chef NOISEY J’aime bien l’idée que ce gâteau fasse vraiment tout à l’envers. D’abord, il n’assume pas ses origines : il se fait appeler « donut », alors que désolé, mais pas du tout – au mieux, c’est un sablé breton, au pire, un calisson d’Aix. À la dégustation, c’est l’équation à plusieurs inconnues : comme si on avait empilé des arômes familier sans jamais vraiment réussir à avoir du goût. Au final, il reste l’emballage : une boîte hyper soignée et en même temps, une fois mise à nue, faussement déglingue. En fait ce donut, c'est juste votre cousin de province qui est monté à la capitale pour « percer dans la zikmu » et qui vous appelle à 7h du mat’ pour squatter votre canap’.
Léo Bourdin, Rédacteur en chef MUNCHIES Grâce à un savant mélange de fleur d'oranger et de citronnelle, un glaçage équilibré, une pâte délicatement sablée ainsi qu'une forme et une texture oscillant entre le donut classique et le cookie, Tove Love bouleverse ici les codes de la pâtisserie. Une prise de risque qui porte déjà ses fruits : pressenti pour le Billboard Hot 100 et adoubé par Lorde, on tient incontestablement le gâteau promotionnel de l'été 2016.
Julie Le Baron, Rédactrice en chef web VICE Je suis un bec sucré revendiqué, tous les gens qui me connaissent vous le diront. Toujours plus prompt à refuser une entrée pour un dessert, à esquiver un repas de midi pour un petit déjeuner, à taxer un Dinosaurus sur votre bureau quand vous avez le dos tourné. Et malgré ce pseudonyme qui me suit depuis plusieurs années maintenant, j’ai toujours voué un profond dégoût pour le sucre-glace. Vous savez, ce truc blanc qui remplace désormais les toits des millefeuilles - tout se perd putain. Et autant dire que si vous n’êtes pas friand de sucre-glace, le coo-nut (oui, parfaitement, un mélange entre le cookie et le do-nut) de Tove Lo, n’est pas fait pour vous. La couche blanche de 4 millimètres qui recouvre son biscuit citronné (celui-là même que la chanteuse lèche sur la pochette de son dernier single « Cool Girl », - qui d’après Lorde « sera le hit de l’été ») ne masque en rien le caractère bien trop sucré et random de la proposition culinaire, en termes de goût comme de texture. Mais c’est réglo, il est parfaitement à l’image de la proposition musicale de la chanteuse à qui on a oublié de dire qu’il ne fallait jamais s’affubler de l’adjectif « cool » pour en être. Vous foutez quoi, Polydor ?
Rod Glacial, Rédacteur NOISEY

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