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L7 sont toujours prêtes à distribuer des baffes

De retour de sa triomphale tournée de reformation en Europe, le groupe de Los Angeles nous parle de hair metal, de Donald Trump, de son docu à venir et du fameux incident du tampon au festival de Reading.

Photo - Rob Sheridan

Oubliez Nirvana, Soundgarden et autres sculpteurs de séquoias : le groupe le plus sauvage des années 90 était composé de quatre meufs de Los Angeles et s'appelait

L7

. D'une violence inouïe, leurs concerts atteignaient l'intensité des bacchanales des Cramps et l'impact-panzer de Motörhead époque

Ace Of Spades

. Trop trash et sauvages pour le grand public, les quatre walkyries punk ont mis leur carrière entre parenthèses pendant près de treize ans (!) avant de se reformer il y a quelques mois. En attendant la fin du monde, la chanteuse-guitariste Donita Sparks nous raconte pourquoi les Ramones étaient le groupe de rock ultime et comment elle a attaqué 50 000 Anglais à coups de tampon périodique.

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Noisey : Votre tournée européenne cet été a cartonné. Vous avez prévu de revenir en Europe bientôt ?

Donita Sparks :

Un documentaire sur nous doit sortir l'année prochaine. Je pense que nous reviendrons à cette occasion, on parle de dates en juin et après en août. Ça ne sera pas une énorme tournée genre deux mois non-stop, on est en train d'en parler en ce moment.

On dit que vous vous êtes reformées parce que les fans vous mettaient la pression ?

Oui, les fans nous harcelaient sur notre page Facebook ! Comme je m'en occupe, il m'arrivait de poster des vidéos que j'avais numérisées pour le docu. Je ne me doutais pas que ça intéresserait tant de monde, qu'autant de gens se souvenaient de nous et qu'il y avait une nouvelle génération de kids qui nous écoutaient. Il était donc écrit qu'on aurait à remonter sur scène… J'ai contacté tout le monde en disant que c'était maintenant ou jamais parce qu'on commençait à vieillir. En ce qui me concerne, ça m'était un peu égal qu'on le fasse ou pas mais comme les autres étaient branchées, on y est allées !

Vous continuiez à vous voir pendant les années de séparation ?

Non ! Je voyais toujours Dee [

Plakas, batteuse

] parce qu'on a fait un groupe ensemble, Donita Sparks And The Stellar Moments, mais je n'avais pas vu Suzi [

Gardner, guitare et voix

] depuis 2001. Il m'était arrivé de croiser Jennifer [

Finch, basse

] dans des clubs à quelques reprises, cela dit.

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Mais, à la base, pourquoi aviez-vous arrêté ?

On a arrêté parce qu'il n'y avait pas d'argent. On était fauchées, on n'avait ni label, ni management et notre popularité déclinait. Nous perdions du fric ! Partir en tournée et enregistrer coûte de l'argent même si on ne faisait pas des disques à gros budget. Il fallait louer un studio, etc. À cette époque, il n'y avait pas Pro Tools ! Donc on a liquidé l'affaire…

Quelque part, est-ce que vous n'êtes pas arrivées trop tôt ?

On est allées loin mais on n'a jamais vendu des millions de disques ni gagné beaucoup d'argent. Nous étions célèbres mais pas au niveau où on se fait vraiment du fric. Les gens seraient étonnés de voir que, même avec un certain niveau de notoriété, tu ne fais toujours pas d'argent… Il y a eu plusieurs facteurs qui ont fait qu'on n'est pas allées plus loin : nos disques ne passaient pas à la radio aux USA, je n'ai jamais su pourquoi alors que ceux de nos homologues masculins comme Nirvana et Soundgarden étaient diffusés ! Peut-être bien qu'on est arrivées trop tôt même si je ne vois pas qui a pris notre place dans le rock. Je pense qu'on était un peu uniques parce qu'on était des punks, mais notre musique, c'était du hard rock ! On touchait les deux scènes, les deux mondes…

Comment décrirais-tu tes trois comparses?

Du point de vue de leurs performances ou de leurs personnalités ?

Les deux !

Je dirais que Suzi est un peu excentrique et très drôle. Dee est adorable et bagarreuse et Jennifer est… [

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Silence

]… Très intelligente et généreuse.

L7 en session photo en 1992 au Reading Festival

Tu es originaire de L.A. ?

Non, je viens de Chicago mais je me suis installée à L.A. en 1983, à la fin du lycée. Le groupe est donc de Los Angeles. Dee et moi sommes de Chicago, Jennifer est de L.A. et Suzi vient de Californie du nord.

À la base, pourquoi t'es-tu installée à Los Angeles ?

Parce que j'adore vraiment la surf music. Je pensais que je deviendrais surfeuse mais j'ai atterri à Hollywood au lieu de la plage ! [

Rires

] Je suis donc devenue musicienne à la place.

Quels sont les premiers disques dont tu te souviens ?

J'ai des sœurs plus âgées. Les premiers souvenirs de rock and roll que j'ai sont les Beatles et les Monkees. Mes frangines dansaient à la maison en les écoutant. La première musique que je me souviens avoir aimée est donc le rock and roll même si ma mère prétend que j'étais aussi branchée par les comédies musicales type

Le Mélodie Du Bonheur

! Mais, un jour, mes sœurs ont rapporté un disque des Ramones et ma vie a changé !

Tu les a vus en concert quand tu étais ado ?

Je les ai vus à Chicago, quand j'avais environ seize ans. Je les ai vues plein de fois, que ce soit à Chicago ou à L.A.

Qu'est-ce qui t'avait plu dans leur musique pour provoquer un tel choc ?

J'ai trouvé qu'elle était magnifique, très énergique et que les paroles étaient hilarantes, géniales ! J'adorais le côté accrocheur de leurs chansons et leur ambiance. Pour moi, c'est la musique teenage ultime ! Je trouvais aussi que leur look était énorme. Je pouvais rester bloquée devant leurs photos. En fait, j'aimais tout : la présentation, l'artwork… Pour moi, le gestalt était parfait ! Ils ont probablement aussi été ma principale influence de guitariste.

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Comment expliques-tu que la scène punk de L.A. de la fin des années 70 et du début des années 80 ait si peu percé à l'étranger en comparaison de celle de New York ?

La scène punk de LA des débuts n'est pas très appréciée dans le reste des USA non plus. Les gens qui aiment ces groupes habitent pour la plupart Los Angeles ! Il y a quand même eu quelques groupes qui ont marché comme les Germs qui sont très connus, ou X qui l'était assez, mais je pense que la scène new-yorkaise a eu tellement eu d'influence qu'elle domine tout.

Quand vous avez commencé au milieu des années 80, il y avait une énorme scène metal à L.A. Des gens comme Mötley Crüe ou Faster Pussycat…

On ne faisait pas partie de cette scène qu'on trouvait plutôt drôle parce qu'on était des punks. Ces deux mondes ne se téléscopaient pas, on jouait dans des clubs différents. Nous étions séparés du point de vue géographique puisque les métalleux jouaient essentiellement sur le Sunset Strip alors que les punks jouaient à Hollywood, East LA et Downtown. Nous, on trouvait cette scène marrante, idiote et totalement misogyne.

Certains de ces groupes étaient des clichés ambulants…

Tu peux le dire mais pas moi parce que je suis amie avec certains de ces mecs ! En fait, c'est bizarre parce que, bien que nous n'ayons pas fait partir de cette scène, pas mal de ces groupes aimaient L7. Taime Down, le chanteur de Faster Pussycat adore L7, il nous a vues plein de fois. Quelques mecs de Guns N'Roses nous aiment bien aussi… C'est étrange et ironique qu'ils nous aient adoptées alors qu'on a toujours trouvé que c'était un truc misogyne !

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Et quid du hardcore ? Black Flag ? Circle Jerks ?

Suzi est sortie avec Chuck Dukowski, le bassiste de Black Flag pendant des années. Elle a même chanté sur leur chanson

«

Slip It In

»

donc elle les a vus de nombreuses fois. Jennifer, qui vient de la scène de L.A., les connait aussi personnellement. En ce qui me concerne, j'ai dû voir une fois Black Flag et Circle Jerks mais, en règle générale, je ne suis pas trop fan de hardcore. Il y a des chansons de Circle Jerks et Black Flag que j'adore mais je n'ai pas leurs albums chez moi.

Et le punk des 60's ? Il y avait des groupes excellents à Chicago comme les Shadows Of Knight…

Oui, je préfère ça au hardcore. J'aime bien les trucs entraînants et enlevés. Je peux écouter des trucs super-lourds mais je préfère ce qu'on trouve sur des compilations comme

Nuggets

.

Dans les années 90, vous avez été associées au grunge, qui venait de la région de Seattle, près de 2000 kilomètres plus au nord que LA. Comment avez-vous pris cette association ?

On aimait bien la scène de Seattle parce qu'on connaissait certains des groupes et que la plupart d'entre eux étaient cool du point de vue politique. Ils étaient très différents de ce qui se faisait à L.A., musicalement : c'étaient, comme nous, des punks qui jouaient du hard rock. On nous a donc incorporées dans cette scène, ce qui nous convenait parce qu'elle marchait très bien et que si on avait été seulement L7 de L.A., on aurait eu nettement plus de mal à nous faire entendre ! Donc, être associées à la scène grunge et à Sub Pop Records nous a permis de toucher plus d'oreilles et d'yeux ! Après, d'autres groupes basés un peu partout dans le pays ont rejoint cette scène.

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De quels groupes étiez-vous les plus proches ?

On était assez proches de Nirvana et Mudhoney. On a croisé Soundgarden quelques fois mais on n'était pas du genre à se téléphoner. Nous ne connaissions pas Alice In Chains même si j'ai rencontré Layne [

Staley, feu chanteur du groupe

] quelques années plus tard.

Pas mal de gens craignaient que Kurt Cobain finisse mal. Quand tu repenses à sa fin, quelles images te viennent à l'esprit ?

Hmm… C'était très étrange parce que… [

Long silence

]. Je préfère ne pas en parler, en fait.

OK, désolé.

Pas de problème !

Changeons de sujet. Vous étiez incroyablement sauvages sur scène, y at-il une anecdote en tournée qui t'a particulièrement marquée ?

Oh Seigneur ! Faut que je réfléchisse une minute… Puisqu'on parle de Nirvana, on était au Brésil avec eux. Des motards de la police nous escortaient de l'hôtel au stade où on devait, jouer et des hordes de fans nous entouraient. C'était impossible de sortir… Et d'aller aux toilettes ! On voulait toutes y aller et ça a été une sacré course contre la montre ! [

Rires

] C'était vraiment l'enfer !

Vous êtes à l'origine de Rock For Choice. Qu'est-ce que ça te fait de voir Donald Trump bien placé pour obtenir l'investiture des Républicains ?

[

Rires

] Je pense que la démocratie est un désastre aux États-Unis depuis plusieurs années déjà. Quant à Donald Trump, je le trouve incroyablement divertissant parce que c'est un tel putain d'enfoiré que je le trouve hilarant chaque fois que je le vois à la télé, alors qu'il énerve plein de gens. Trump incarne parfaitement ce que sont les conservateurs. Il reflète complètement leur ignorance. Quelque part, il est rafraîchissant parce qu'il montre quel genre de porc il est en ne cherchant jamais à rien cacher. Il nous expose la vérité sur ces gens.

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Des fans des Ramones ont eu du mal à digérer que Johnny, leur guitariste, était un républicain convaincu. Est-ce que cela t'a gêné ?

Et bien, je ne l'ai découvert que des années plus tard. Les Ramones ne brandissaient pas leurs opinions politiques en étendard et, quand il portait un T-shirt des US Marines, je croyais qu'il faisait ça pour déconner. Quand j'ai découvert qu'il était à ce point conservateur, ça m'a déçu. Par contre, Joey était tout le contraire. Mais au final, ça n'a aucune conséquence sur ce que je pense de leur musique. J'adore James Brown alors qu'il frappait sa femme. Je ne vais pas le boycotter parce qu'il éclatait sa femme même si je hais cet aspect de sa personnalité. Il y a beaucoup d'artistes qui ont une vie louche ou des opinions politiques douteuses. Prenons Ted Nugent, j'adore sa musique et, pourtant, ce mec est un cauchemar ! Cela ne m'empêche pas de me mettre à danser quand j'entends

« Cat Scratch Fever »

.

Bon, il va falloir qu'on parle de l'incident du tampon au festival de Reading en 1992… Quelque chose à ajouter à ce que l'on sait déjà ?

[

Rires

] Non, rien à ajouter : le public du festival de Reading nous balançait des tonnes de boue. Il avait plu à mort et le terrain n'était qu'une gigantesque mare de boue mélangée à de la merde de mouton parce que le terrain du festival sert de pâturages le reste de l'année… Donc on était bombardées et ça m'a rendue folle. La boue s'écrasait sur ma guitare, c'était l'enfer. J'ai donc décidé de m'amuser un peu, j'ai retiré mon tampon et je l'ai balancé dans la foule pour riposter ! Ce fut ma réaction « John Waters-esque » à ce que faisait le public…

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Un geste historique… Revenons au documentaire, de quoi s'agit-il exactement ?

Jennifer et moi avons beaucoup d'images que j'avais commencé à digitaliser pour éviter qu'elles se désintègrent. J'avais pour idée de sortir une compilation de nos films et de balancer tout ça sur le net sans me préoccuper de narration. Je savais que ça ferait plaisir aux fans… Et j'ai rencontré cette réalisatrice appelée Sarah Price. Elle a regardé les images et les a adorées. Elle m'a demandé si elle pouvait essayer d'en faire un documentaire, j'ai accepté. Comme aucune d'entre nous ne voulait s'asseoir face à la caméra pour répondre aux questions parce que ça nous semblait la pression, on a choisi de faire des interviews audio. Je n'ai aucune idée de ce à quoi ça ressemblera, je n'ai pas encore vu de prémontage. J'espère que ça sera artistique… On a plein d'images genre

« home movies »

qu'on avait commencé à tourner au début des années 90.

Il y a déjà une date de sortie ?

Je crois que les producteurs veulent le présenter au prochain SXSW, en mars 2016. La réalisatrice adore ce festival, elle veut y aller avec le film. Nous, on suivra le mouvement !

Et y a t-il d'autres choses que L7 dont tu aimerais parler ?

Oui ! Je joue de la batterie dans un tribute-band appelé Lou Man Group. Nous faisons des reprises de Lou Reed peints en bleu ! C'est évidemment un clin d'oeil à Blue Man Group… Et il s'est passé quelque chose d'incroyable : ils ont entendu parler de notre truc et

ont réalisé une tribute video pour nous

! Ils reprennent

« Sister Ray »

en nous imitant, c'est carrément énorme ! Sinon, j'écris beaucoup, mais en ce moment, je suis surtout concentrée sur L7.

Est-ce que cela veut dire qu'on peut espérer de nouveaux morceaux ?

Euh.. Rien n'est prévu pour l'instant mais on ne sait jamais !

À moins que ses fans ne le harcèlent, Olivier Richard n'ira pas sur Twitter.