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Music

Bastons de chiffres, rafales d'obliques et coups de guidons : on est allés voir Kraftwerk

Bah oui, nous aussi.

Nous avons patiemment attendu que la caravane passe pour se rendre à la dernière soirée que Kraftwerk donnait à la Fondation Louis Vuitton, le 14 novembre dernier, dans le 16ème arrondissement de Paris. Kraftwerk s'en tape de vendre son âme au Grand Kapital puisque Kraftwerk n'a jamais eu d'âme : ce sont des robots. Pourquoi Tour de France ? Tout simplement parce que c'est indéniablement le meilleur album de Kraftwerk. Meilleur concept. Meilleure pochette. Meilleures paroles. Stupeur ! Tsugi nous aurait menti ? L'EDM aurait elle seulement jamais existé sans Tour de France de Kraftwerk ? Hein les kids ? Vous y avez pensé à ça ? Sans les 4 de Düsseldorf, pas non plus de rap, ni de « Il est bô le lavabo » mais ça, on y reviendra une autre fois.

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Lorsque nous arrivons sur les lieux, première déception. Alors c’est ça la Fondation Louis Vuitton ? Aucune star n'est présente (même pas un petit Mirwais ?). Deuxièmement : aucun club cycliste n'a fait le déplacement alors que je suis sûr que certains CE auraient pu faire un effort pour choper une réduc même si, comme on l'a lu, c'était typiquement « le genre d’événement pour lequel les invitations s’échangent comme des drogues de synthèse dans un club berlinois ». 60€ le fix quoi. Aucun féru de vélo en tenue non plus une fois dans la salle. Personne n'a décidé de s'amuser, c'est ça ? Tant pis. On ronge notre frein, en mémoire de Fabio Casartelli.

Il ne fallait pas être un fin limier pour deviner que le public du spectacle serait aisé. Le cas échéant, il était simplement malin (ou dedans). Et pas si vieux finalement. Puis bon, c'était la dernière séance, la séance de rattrapage (toutes étaient complètes depuis un bail, même The Mix, oui). Le peuple était plus là pour l’événement que la performance, comme souvent aujourd’hui. Pas mal de couples (un homme, une femme ou un homme, un homme) qui avaient choisi de s'offrir un moment inoubliable en lunettes 3D. Pourquoi pas. En ce qui concerne l'endroit, cet amphithéâtre ressemble plus à une salle de séminaire que de spectacle. Les parois en verre donnent un aspect futuristique à l'ensemble mais ce serait encore mieux de déboiser encore un peu autour pour construire des tours de plusieurs étages, ça rajouterait une touche moderne, si la municipalité nous lit. C'est dit.

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Quand le départ est lancé, à l'heure qu'on m'avait indiqué dans l'oreillette (les types sont vieux mais toujours Allemands), on se marre. Alors c'est ça Kraftwerk ? On ne sait pas trop comment réagir, comme devant un solo de synthé de Jan Ulrich. Ralf Hütter chante comme Casio Judiciaire, genre rien-à-foutre. Je me dis qu'il va se mettre à slammer mais non. Le show se règle. On a droit à 25 minutes de Tour de France, de vallées, de sprints finaux à l'arrivée, de coups de pédales dans les montées, de plans d'hélico mais surtout d'un VJ signé Kling Klang Designs qui respecte toujours la ligne directrice sinusoïdale du quatuor : minimal-maximal. Entre Interstellar et Tetris. Avalanche de mots-clés, idées-fortes, c'est ça qu'on aime. C'est comme un feu d'article du 14 juillet, du bleu, du rouge, du vert, du jaune, oh les beaux chiffres ! Wouaw la pluie de pilules ! Hmm cette droiture du trait… Oh, une autoroute !

Bah oui. Le Tour de France terminé, Kraftwerk a évidemment enchaîné avec un medley (la puissance négative de ce terme) de TOUS leurs tubes. Ça ne servait donc à rien de choisir sa soirée. C'était juste du marketing en fait ! Capitalistes ! Le public ravi est resté correct jusqu'au bout (aucune présence de la communauté travelling), a parfois frémi et a beaucoup tapé des mains (gênant) sur « Autobahn », « Radioaktivität », « Trans-Europe-Express », « Das Model », « Man-Machine », « Die Roboter », « Homecomputer », « Numbers », « Techno-Pop », « Music-Non-Stop »… tiercé gagnant dans l'ordre, en espagnol, en russe, en anglais, en japonais, en français ou en allemand. Avec un son petit mais costaud. Et sans bout de ficelles évidemment, nous ne sommes plus en 1974 les vieux. L'époque est au lissage. Y'en a de toute façon eu pour tout le monde. Que tu sois disco, trance, bass, electro, ebm, house, techno ou vélo.

Bon, par contre, faut faire un truc pour ces combinaisons, même si je comprends que vous avez toujours de l'humour. Demandez à Stone Island ou à La Française des Jeux, parce que là on dirait un mélange de Tron et de La Soupe aux Choux. Après plus de 2 heures de show sans une goutte de sueur (grosse préparation sur route humide j'imagine), un morceau house filtrée vient conclure la fête sans alcool et les quatre chevaliers de l'epo s'éclipsent, puis reviennent pour mettre la honte à Détroit. Puisque chez Noisey nous sommes engagés contre les rappels, on a déjà filé. On se capte au village-étape de l'Alpe d'Huez le 25 juillet prochain les gars. D'ici là, attention sur les routes.

Rod Glacial aurait du mal à échanger un Bernard Hinault contre un Ralf Hutter. Il est sur Twitter - @FluoGlacial