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Music

Un dimanche à Orange County avec la crème de l'emo 90's et du hardcore straight edge

No For An Answer, Texas Is The Reason, Scream, Samiam, The Bronx et 20 autres était réunis le 20 mars dernier en l'honneur de Jon Bunch, chanteur de Sense Field décédé en janvier.

Jon Bunch dans Sense Field

Californie et punk hardcore ont toujours été intimement liés pour moi. Ca a commencé comme beaucoup de gens en 1994 avec la sortie de Smash de Offspring puis progressivement, je me suis intéressé au punk rock américain de Bad Religion, Rancid, NOFX, avant de découvrir de nombreux groupes plus obscurs, plus rapides et, pour beaucoup, honteusement bootleggés par le label allemand Lost & Found dans les années 90. De Stalag 13 d’Oxnard à Ignite d’Orange County, je suis tombé dans le hardcore californien quand j’étais au lycée. Dans la foulée, je m’intéressai à Insted et Chain of Strength, qui étaient les fers de lance du revival straight edge de la fin des années 80 en Californie, les homonymes de Youth of Today et Judge, si vous préférez. Mais si un groupe m’a marqué plus que les autres, c’est No For An Answer.

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Comme pour le punk rock, j'ai fontionné à rebours. J'ai abord été fan de Speak 714 dès la première écoute, avant un retour aux sources vers le premier groupe du chanteur, Dan O’Mahony. Son timbre de voix, son style de chant et ses paroles ont toujours été à part dans le paysage microcosmique de la vague Youth Crew des premières années de Revelation Records.

Très vite après le décès de Jonathan Bunch survenu fin janvier (il était âgé de 45 ans), un concert hommage au chanteur de Sense Field était annoncé à l’initiative de Casey Jones, batteur mythique de groupes non moins légendaires, et chanteur de Justice League initialement prévus à l’affiche. L'affiche justement, réunissait de nombreux groupes du coin dont certains renaissaient de leurs cendres. Autant dire que la seule présence de No For An Answer a suffi à violenter mon compte bancaire. Finalement, c'est 25 groupes en tout qui se partageaient les trois scènes le temps d’un après-midi dominical à Santa Ana. Quel rapport entre Offspring et Sense Field me direz-vous ? Le premier album de la bande à Dexter Holland que l’on trouvait déjà en une de Maximum Rock’n’Roll à l’époque (octobre 90), est sorti sur Nemesis Records, le label californien qui hébergeait notamment Reason To Believe, premier groupe de Jon Bunch, et entre autres Chorus Of Disapproval et Visual Discrimination, formations qui jouaient toutes les deux le 20 mars.

Le programme de la journée :

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À peine débarqué à LA, je me dirige vers le Yost Theater de Santa Ana où le concert se joue à guichet fermé. Pour un peu, je loupai complètement Visual Discrimination qui ouvrait le bal : après avoir entendu la première moitié depuis la file à l’extérieur du théâtre, je verrai finalement la fin du set typique d’un style annonciateur du crossover des années 90. Tout juste le temps de monter à l’étage pour découvrir Freewill (dont l'excellent album vient de ressortir), qui jouait apparemment son premier concert depuis 1990 avec un set d’une poignée de chansons très influencées par l’école Dischord : sentiment confirmé par la reprise de « Values Here » de Dag Nasty (qui joueront d'ailleurs en Allemagne fin avril). Il était convenu que ce festival d’un jour soit un marathon imposant certains dilemmes en termes de programmation. Cependant, il m’était acquis que l’enchainement des groupes jouant dans la troisième salle (et la meilleure, une espèce de discothèque improbable en sous-sol, baignée d’une lumière rougeâtre) était inévitable.

Ma première surprise fut le concert de Blood Days, sorte de all-star band du hardcore californien des trente dernières années, déjà très consanguin à l’époque : le groupe comprenant en Casey Jones à la batterie, Joe D. Foster (aucun jeu de mots) et Gavin Oglesby aux guitares, John Lorey (ex-Unity) à la basse et Jae Hansel (ex-Outspoken) au chant. Le set est court, puissant et caractéristique d’un hardcore rapide, mélodique et surtout chanté, estampillé SoCal (Sud Californie), voire du seul comté d’Orange. Le temps d’écouter quelques chansons de Drumkan, stars de l’emo japonais des 90's reformés eux aussi pour l’occasion, et me voici redescendu pour voir une poignée de chansons à l’occasion d’un court set de Done Dying dans lequel depuis 2013 officient notamment Dan O’Mahony au chant et Mike Harsfield à la guitare. Le live est fidèle à ce que j’ai pu écouter sur les deux premiers EP's et me donne carrément envie d’écouter l’album sorti l’an dernier et que je ne connais pas encore, ce qui est la marque d'un concert réussi.

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Nouveau détour pour apercevoir trois morceaux de Knapsack, groupe emo 90’s encore, avant de me retrouver devant Strife, dont le dernier concert que j’avais vu, au Black’n’Blue de NYC à l’occasion de la reformation de Judge en 2013, était leur meilleure prestation à ce jour. L’impression se confirme, et les voir sur une si petite scène est une consécration : le set est court mais intense et comporte principalement des classiques issus pour moitié de In This Defiance, deux chanson de One Truth, et deux chansons récentes. Un aller-retour vers la « salle de bal » pour entendre quelques notes de Gameface (déjà vus à l’occasion des 25 ans de Revelation Records en 2012) et je m’empresse de retourner dans l’antre de l’« Underground » pour la raison qui m'a amené du 13ème arrondissement à la Californie : voir No For An Answer (et jou-ir).

Le line-up annoncé, celui du EP You Laugh de 1988 est confirmé, et quatre des six morceaux du disque seront joués. Le premier brûlot est « Man Against Man », un titre ancien aux paroles contre le racisme, ré-enregistré en studio à l’occasion de la reformation du groupe en 2012 sur un nouveau 45 tours. C’est justement le titre de ce dernier, « It Makes Me Sick », qui suit « You Laugh » dans la setlist qui ne comporte que deux morceaux du LP, à savoir mon favori, « Domino Principle », et « I Spy ». Quelques calembours de Tonton Dan plus tard, dont une à l’adresse de ces nombreux vieux aux tattoos straight edge qui boivent des bières. « Just Say No », « Liar » et « Without A Reason » fermeront la marche du set, à la fin duquel une surprise avait été annoncée de longue date. Faute de Justice League, c’est en fait une reformation du premier line-up d’Ignite (qui ne compte aujourd’hui plus aucun membre d’origine) qui avait été annoncée quelques semaines avant le concert. Le temps de quatre chansons, les deux premiers chanteurs se sont succédés pour quatre titres d’un groupe dont la piètre prestation dans sa forme actuelle au dernier Persistence Tour m’avait laissé amer. Joe Nelson assurera « Ash Return » et « Slow », et Randy Johnson chantera « Automatic » et « Turn ». Epique !

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L’enchainement qui motivait mon voyage était déjà terminé, mais pourtant, la soirée ne faisait que commencer et j'ai asissté ensuite à ce qu'il restait du set de Samiam, qui est aussi le meilleur que j’ai vu d’eux, sûrement du fait de la petite scène et d’une ambiance calorifique dont je vous laisse juges.

Une autre curiosité de ce festival était la présence d’une légende du hardcore de la côte Est : Scream, groupe dont l’influence est largement sous-estimée et dont le nom est le plus souvent connu pour avoir vu Dave Grohl y faire un passage à la batterie à la fin des années 80. Ce sera la conclusion en beauté du chapitre old school de l’hommage à l’issu duquel, n’ayant jamais été un grand fan d’Into Another, je m’autorise une petite balade dans le chef lieu du comté d’Orange pour grignoter un hot dog sans chien, ni même toute autre forme de vie (ou de mort) animale.

Retour au sous-sol pour le concert d’Outspoken après deux morceaux desquels s’impose un choix cornélien : revoir Texas Is the Reason, ou m’envoyer l’enchainement new school de la journée, à savoir Outspoken dont le peu que j’ai vu était mortel, Mean Season et Chorus Of Disapproval. L’émotion aura raison de ma rage. Après avoir manqué The Bronx, Aquabats et aperçu quelques morceaux de Death By Stereo que j’ai mis un certain temps à reconnaître, je suis prêt, prêt pour un torrent de sentiments. Texas Is the Reason est LE groupe grâce à qui je me suis familiarisé avec l'emo, à force d’épuiser ma cassette de Do You Know Who You Are? Il y avait bien sur eu The Get Up Kids et Jimmy Eat World, Samiam et Hot Water Music, mais c'est TITR qui m’a ouvert la voie et amené plus tard vers Sense Field et autre Mineral. C’est donc avec le souvenir d’un concert incroyable à l’occasion du 25ème anniversaire de Revelation Records au Iriving Plaza de New-York que je me poste dans la fosse, juste à côté de Chris Bratton et Frosty de Chain Of Strength.

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Si la setlist n’offrait aucune surprise, en revanche, l’ordre choisi était particulier et le concert laissait transparaitre une émotion non feinte de Garrett Klahn. Le festival était quand même l'occasion d'un dernier adieu, hein.

Mais le temps n’était plus à l’attendrissement, et sitôt les larmes séchées, j'ai pu voir les derniers morceaux de XChorusX et enchainer sur Mean Season, pour retrouver ce groove si caractéristique des groupes new school de l'école, groove qui tranchait encore avec le côté metal de la force qui allait malheureusement prendre le pas sur le style quelques années plus tard.

Après six heures de concerts non stop, le clou du spectale, soit le concert hommage à Jon Bunch qui réunissait différents chanteurs autour des autres membres de Sense Field, allait commencer. Beaucoup de titres étaient issus de leur premier album sur Revelation, alors que je connaissais surtout Building qui est le seul présent dans ma discothèque. C’est donc avec une joie non dissimulée que j’ai pu apprécier la performance de Zoli Teglas, chanteur d’Ignite depuis 1995, dont l’interprétation du titre « Overstand » était une vraie appropriation, malgré son incapacité à mémoriser les paroles.

La boucle était ainsi bouclée, un passage en revue express et intense de plus de trente ans de Orange County hardcore dont l’influence de l’école Dischord ne peut être reniée, des origines au tournant emo.

RIP Jon Bunch. Nicolas chante dans Angry Vets et est trop vieux pour Twitter.