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Music

Les 400 coups de Jimmy Jam et Terry Lewis

Impressionner Prince sur scène ? Faire mosher Michael Jackson en studio ? Propulser Usher dans l'espace ? Relancer la carrière de Mary J. Blige ? Assurer le retour de Janet Jackson ? Ils ont tout fait.

Membres du groupe The Time, formé en 1981 par Prince à Minneapolis, Jimmy Jam et Terry Lewis seront remerciés par sa majesté deux ans plus tard. Timing parfait, le duo allait alors pouvoir se lancer pleinement dans la production et la composition et terrasser l'industrie musicale, prenant une revanche sur leur mentor en engrangeant les Grammys et les cartons dans les charts et en bossant avec toutes les locomotives du pop-funk, du New Jack Swing ou du R&B contemporain. Des noms ? Michael Jackson, Luther Vandross, Boys II Men, Usher, Beyonce, Chaka Khan, Mariah Carey, Shaggy, George Michael, Gwen Stefani, TLC, Kanye West… C'est bon pour vous ? En gros, tout ce que vous balancez à une fête à 5h du mat' lorsque tout le monde est trop crevé ou bourré pour chercher des morceaux pointus sur YouTube.

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Récemment, Jam & Lewis ont remis le couvert pour enregistrer le dernier album de Janet Jackson, Unbreakable. Une occase inespérée de passer un moment avec Jimmy afin qu'il nous raconte quelques-unes de ses anecdotes de studio les plus mémorables, tâche qu'il pensait à première vue impossible - vu qu'a peu près tout ce qu'il a touché des doigts est mémorable - mais il a quand même joué le jeu et isolé 5 morceaux, couvrant 4 décennies de production.

THE TIME - « 777-9311 » (1982)

Jimmy Jam : « Pour moi, ce morceau sort du lot quand il est joué en live. Les autres titres dont on va parler ensuite, je n'ai jamais eu la chance de les jouer sur scène en tant qu'artiste. À l'époque, The Time ouvrait pour Prince sur certaines tournées, et on s'enorgueillait de nos performances live. On se donnait tous les soirs à fond pour botter le cul de Prince ! Il y avait une vraie rivalité entre nous et lui, mais il n'était jamais du genre, "Arrêtez, vous en faites trop, ne jouez pas aussi bien". En vérité, il était très fier de nous.

Donc, on ajoutait des trucs dans notre show qu'ils ne connaissaient pas, pour tester sa réaction. Il se marrait, épaté, "Mec, ça c'était drôle !"Il était fier de nous, mais il était très compétiteur. Il pensait que personne n'était meilleur que lui et, pour être honnête, il n'avait pas tout à fait tort. »

JANET JACKSON & MICHAEL JACKSON - « SCREAM » (1995)

« Michael nous avait dit qu'il voulait faire une chanson avec Janet, donc elle est venue au studio et on a proposé cinq ou six idées, l'une d'entre elles est devenue "Scream". Michael est entré très calmement dans le studio ce jour-là, il portait plusieurs bracelets, des bijoux et des grosses godasses – que des trucs pas vraiment recommandés en studio. Il était très timide, très apaisé, et il a dit [Jimmy imite parfaitement la voix de Michael], "Vas-y, mets le morceau à fond." Aussitôt, il s'est transformé en une espèce de diable de Tasmanie ; il s'est mis à danser comme un dingue dans tous les coins du studio, en tapant des mains, en donnant des grands coups de pieds au sol. En temps normal, quand un mec fait ça on lui rappelle qu'il doit rester en face du micro mais là, on s'est juste dit "Ok, on va se poser et te regarder faire ton truc". Janet - qui était supposée enregistrer sa voix le même jour - a vu ça et s'est tournée vers moi en glissant "Hum, je pense que j'enregistrerai ma voix à Minneapolis."

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J'avais rien vu de tel avant. Je n'ai rien vu de pareil depuis non plus. Au fil des années, j'ai vécu des trucs vraiment merveilleux et bouleversants en studio, mais ce jour-là, New York a vécu un tremblement de terre de magnitude 9 sur l'échelle du groove, causé par un seul homme : Michael Jackson. Il venait de se marier à Lisa-Marie Presley à cette période. On se demandait ce qui les avait réuni tous les deux, mis à part le fait qu'ils traînaient tous les deux dans le showbiz, étaients issus de familles de stars et tout. Elle a dit un jour que c'était la personne la plus gentille qu'elle avait jamais rencontré. Ça m'a frappé parce que je me disais exactement la même chose au sujet de Michael. »

USHER - « U REMIND ME » (2001)

« On avait déjà bossé avec Luther Vandross, Alexander O’Neal et Michael, et, vocalement, je mettrais Usher dans cette catégorie. Je pense qu'il n'a peut-être pas atteint totalement son potentiel en tant que chanteur, juste parce qu'il dépense plus son énergie dans l'entertainment, le songwriting et tous les concepts auxquels il pense plutôt que dans le simple fait de chanter.

Ce jour-là, L.A. Reid avait passé un coup de fil à Terry, et lui avait dit : "Terry, j'ai un morceau là. Mais je crois que Usher n'est pas suffisamment bon dessus. On lui a dit de retourner en cabine et de re-chanter le morceau en entier et il a dit que la seule personne pour qui il referait ça serait Terry."

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Je surnomme Terry le vocal master, il y a une alchimie magique entre lui et Usher ; il le pousse vraiment à créer quelque chose. Ils sont allés enregistrer ce titre à Los Angeles alors que moi, j'étais resté à Minneapolis. Je me souviens que Terry s'est enfoncé littéralement sous terre pendant 5 jours. Quand il est rentré, il a dit "je crois qu'on l'a". Le plus gros problème de départ, c'était que Usher essayait de chanter comme les mecs qui avaient enregistré la démo du morceau, plutôt que de rester lui-même. Donc j'ai dû le faire désapprendre la manière dont il écoutait la chanson, et la lui réapprendre, pour qu'il envisage ce titre comme un morceau 100 % Usher.

Deux jours plus tard, on a reçu un coup de fil de L.A. Reid : "Tu te souviens, je t'avais dit que le titre serait soit le premier single de l'album soit qu'il finirait à la poubelle ? Eh bien c'est le premier single de l'album." »

MARY J BLIGE - « NO MORE DRAMA » (2001)

« 95 % des chansons que nous avons produites ont été faites avec des artistes en tête, et on s'est déplacés en personne à New York pour faire écouter celle-là à Mary. On avait déjà écrit toutes les paroles - la chanson entière était quasi prête - mais on voulait qu'elle l'adapte à sa façon. On lui a joué et à la fin du morceau, elle s'est tournée vers nous et a déclaré "Wow, vous m'avez fait suivre par un détective privé ou quoi ? Vous avez déchiré. Je ne vais pas changer un seul mot."

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Avant de partir elle nous a glissé "Ne le prenez pas mal, j'aime vraiment cette chanson, mais pas pour l'album. Le texte dit qu'il n'y a plus de drame dans ma vie, mais ce n'est pas le cas, il y en a encore. Pour le prochain album en revanche, je ferai table rase de tous mes problèmes et ce sera le morceau-titre."

La chanson commence doucement, ensuite elle atteint très vite un point de rupture : il y a des cordes, de la tension, beaucoup de tragédie, une ambiance digne d'une scène de cinéma. Je crois qu'on avait même ajouteé un hélicoptère par-dessus. On arrive à un point où on se dit que tout est prêt à éclater, et ensuite, on revient simplement en arrière, et le titre se termine comme il a commencé. J'adore les chansons qui sont construites comme ça ; qui t'emmènent ailleurs et qui ensuite te redéposent au début.

Un des trucs qui me rend heureux c'est les chansons qui peuvent transformer les gens et les propulser en avant. Mary était déjà une artiste établie et avait vendu énormément de disques avant de bosser avec nous. Mais il y a certains morceaux qui sont des tournants dans des vies. Et celui-ci en a été un pour Mary. »

JANET JACKSON & MISSY ELLIOTT - « BURNITUP! » (2015)

« Janet voulait collaborer avec Missy dès la genèse de l'album Unbreakbale, mais on a réalisé que les chansons qu'on avait écrites n'étaient pas super adaptées pour elle. Donc ça partait assez mal. L'autre truc, c'est que Janet avait l'intention de faire un morceau rapide, dance, un tube qui servirait pour ouvrir ses concerts. Elle avait tous les éléments en tête au moment d'enregistrer : la chrorégaraphie, comment chaque élément allait s'emboîter au fil de sa performance.

On avait la mélodie et tout, et on a envoyé le track à Missy. Elle a donné un coup de baguette magique dessus et nous l'a renvoyé. La version qu'on a sortie est en fait la prise démo. Elle comptait la refaire. Elle le répétait sans arrêt, "je vais la refaire, je vais la refaire" mais on aimait tellement le rendu qu'on lui a dit que c'était parfait comme ça. Ça arrive souvent finalement, parce que l'énergie d'un chanteur qui pose sa voix pour la première fois sur un morceau est une sensation rarement égalable. » Vous pouvez suivre David sur Twitter.