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Avec ou sans Three 6 Mafia, Gangsta Boo est toujours là

À l'occasion de la sortie de son dernier EP, la rappeuse de Memphis revient sur sa passion pour les tueurs en série et sur sa tournée avec Run The Jewels.

« Tu n’as qu’à taper mon nom dans Google ! »

C’est ce que m’a répondu Gangsta Boo, un brin exaspérée mais sans méchanceté, quand je lui ai demandé de me parler de ses premiers pas dans le rap avec Three 6 Mafia, dans les années 90. Et elle n’a pas tort. Pour faire simple, Three 6 Mafia est l’un des groupes qui a eu le plus d’influence sur le rap, et on retrouve leur patte chez tous les artistes actuels, de Migos à A$AP Rocky. Gangsta Boo a rejoint le groupe à ses débuts, avant la sortie de leur album phare Mystic Stylez en 1995. Boo assume son penchant pour les thèmes sombres et surnaturels, se surnommant elle-même la Fille du Diable. Après avoir quitté le groupe suite à la sortie de When the Smoke Clears : Sixty 6, Sixty 1 en 2000 pour des problèmes de ronds, elle a poursuivi sa carrière solo, sortant régulièrement des mixtapes et des albums. La dernière en date, Underground Cassette Tape Music, en 2014 est le fruit de sa collaboration avec le rappeur et producteur de Houston Beatking. Cette mixtape mélange à la perfection la lourdeur des basses de Houston et le côté trippy et méditatifde Memphis.

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Une nouvelle génération de fans a découvert Gangsta Boo l’année passée sur le featuring « Love Again (Akinyele Back) » de Run The Jewels, dans lequel elle leur vole carrément la vedette. Aujourd’hui, après avoir passé l’année à sillonner les plus gros festivals avec El-P et Killer Mike, elle revient avec un nouvel EP Candy, Diamonds, and Pills. Son morceau « Kill Bitches » défonce et est plus franch du collier que jamais : « It’s like an every day job not to kill bitches » balance Gangsta Boo dans le clip que vous pourrez découvrir jun peu plus bas. On en a profité pour lui poser quelques questions, avec un bouclier.

Noisey : De quelle manière penses-tu avoir été une inspiration dans le rap ?
Gangsta Boo : J’étais en avance sur mon temps. Aujourd’hui, les gens font du Three 6 Mafia. C’est un son spécial avec une cadence et un flow qui lui sont propres. Je l’entends beaucoup, pas uniquement chez les rappeuses mais en général. C’est un truc de Memphis. Je pense que la ville de Memphis a poussé beaucoup d’artistes de crunk à se rebeller et à foncer.

Comment as-tu construit le personnage de Gangsta Boo ?
C’est juste mon côté garçon manqué. J’ai grandi avec trois frères, et il y avait cinq mecs dans mon groupe, donc c’était assez simple pour moi, c’était le produit de mon environnement. La vie à Memphis est difficile, donc si tu survis à Memphis, tu peux survivre à tout.

Palre-moi de ta relation avec la rappeuse La Chat, avec qui tu as sorti la mixtape Witch l’année dernière.
Je veux juste parler de mon nouveau projet, Candy, Diamonds, And Pills. Ca ne m’intéresse pas du tout de parler des rappeuses. J’ai pas l’intention de te parler des autres filles dans le rap avec lesquelles je trace, ok ? Je veux te parler de moi, de mon album et de mon futur, c’est tout.

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OK. Dis-m'en plus sur la dernière mixtape que tu as sortie alors, Underground Cassette Tape Music.
Ouais, c’était un projet que j’avais avec Beatking, et c’est une de mes meilleures sorties jusqu'à maintenant. J’avais quitté un peu plus tôt que prévu la tournée avec Da Mafia 6IX [une reformation de Three 6 Mafia sans Juicy J], je voulais bosser sur des nouveaux sons et on m’avait pas mal parlé de Beatking. Il voulait travailler avec moi et il m’a envoyé un morceau. J’aimais bien le beat et on s’entendait bien, je lui ai proposé de se lancer dans une collaboration. Les artistes hommes et femmes collaborent rarement jusqu’au duo. Donc il m’envoyait les boucles et tout. Je me suis dit, « Putain, j’aime bien ce type. » Il est rapide, il a capté le truc et il m’envoyait des sons qui me ressemblent. C’était le combo parfait.

Ouais, je trouve que c’était un mélange intéressant entre le son de Houston et celui de Memphis.
Ouais, je composais et il se chargeait du beat. C’était un bon concept, c’est aussi pour ça qu’on a travaillé ensemble sur Candy, Diamonds, and Pills. Je travaille mieux avec des mecs.

Pourquoi ?
Je sais pas, c’est comme ça. La plupart des gens ne veulent pas écouter plusieurs rappeuses sur un morceau. Ca peut être cool, mais parfois les voix féminines me saoulent. Même ma propre voix me saoule aussi, parfois. C’est bien de trouver un équilibre avec une voix masculine.

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Parle-moi de ta nouvelle mixtape.
Elle s’appelle Candy, Diamonds, and Pills, et c’est un EP. Je voulais sortir un truc, j’ai pas mal bougé avec Run The Jewels (grâce à qui je me suis fait plein de nouveaux fans à Coachella d'ailleurs), donc je voulais sortir de nouveaux morceaux pour que mes anciens et mes nouveaux fans sachent où j’en étais. Il y a sept morceaux dessus, et le son est cool. Beatking m’a aidée à la prod, donc la qualité va être au rendez-vous.

Dans quel envrionnement tu te sens le mieux pour bosser ?
Je fais de la bonne musique quand je suis dans le quartier ou dans des endroits plus pauvres, des trap houses, tu vois le délire. Sinon, en freestyle, dans un studio tout simple, ou dans une piaule de cité. J’arrive pas à composer des trucs bons en banlieue pavillonnaire ou dans de super studios dernier cri. Il faut qu’il y ait quelque chose qui me rappelle le quartier.

Tes thématiques sont couvent sombres et paranormales, ça te vient d'où ?
Je suis un peu bizarre [rires]. J’aime bien mater des émissions d’enquêtes, des trucs sur les crimes. J’ai fait mes armes avec Three 6 Mafia, je ne voue peut-être pas de culte au diable, mais je m’intéresse au côté obscur des choses. Parfois, je me considère comme une rappeuse horrocore, cette appellation me va, j’ai appris à maîtriser ce côté de mon rap. Je fais beaucoup de recherches et je mate plein d’émissions consacrées à des meurtriers. Ca me plaît de connaître les ficelles du cerveau humain, et savoir pourquoi ces personnes pensent d’une manière différente de la nôtre.

Quel tueur en série t’intéresse le plus ?
Charles Manson. Il a manipulé tellement de gens pour faire en sorte qu’ils accomplissent des actes à sa place. Et plus récemment, ce mec complètement fou qui a buté les deux journalistes en direct. Elles ne l’ont pas vu venir, ça fout encore plus la trouille. Mais ce genre d’évènements ne m’inspirent pas dans l’écriture de mes morceaux, je n’écris plus de trucs flippants maintenant. Je le faisais avant avec Three 6. On était jeunes, on parlait beaucoup de trucs en rapport avec le Diable et avec la Bible également. Avant, je pouvais lire un passage de la Bible et en faire un rap. C’est par exemple ce que j’ai fait sur « Throw Yo Setts In Da Air » que j’ai composé à 16 ans. Je me faisais appeler The Devil Daughter. Aujourd’hui, je préfère rapper sur des trucs réels.

Comment décrirais-tu le son de ton nouveau projet ?
Je veux juste faire de la musique bonne pour fumer, et que les gens puissent kiffer dessus. C’est pas forcément une musique pour faire la fête, comme on pouvait faire avec Three 6 — avec des morceaux comme « Tear The Club Up », « Who Run It » ou « Hit A Motherfucker ». Je ne fais pas non plus de la musique pour se cogner. Je veux que les gens écoutent vraiment ma musique, qu’ils puissent fumer des joints dessus. Ils écoutent mieux quand ils sont défoncés.

Comment s’est passée ta tournée avec Run The Jewels ?
C’était génial. On a joué devant des foules énormes, on a fait des festivals devant un public très jeune et mélangé. Un vrai bonheur. C’est une chance inestimable de pouvoir capter l’attention de la jeune génération, parce qu'avec toute la musique qu’ils écoutent, ils pourraient croire que A$AP Rocky est à l’origine de ce son. Ils ne savent pas. Beaucoup ignorent que Juicy J était dans Three 6 Mafia. Ils le voient comme une nouvelle sensation. C’est mignon qu’ils pensent ça, mais ça le serait encore plus s’ils connaissaient la vérité. C’est pour ça que je continue à mettre ma musique en avant, pour leur faire comprendre que Gangsta Boo a existé et qu’elle est encore là. Après un passage sur Google, Ezra Marcus est de retour sur Twitter.