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Cadavres de motards, vétérans du Vietnam et putains de hippies : sur la route avec King Buzzo

À l'occasion de sa tournée en solo et en acoustique aux USA, le leader des Melvins a réalisé pour nous un petit journal de bord. En voici la troisième partie.

Il y a quelques semaines, Buzz Osborne, le leader des Melvins, a entamé une tournée acoustique en solo pour promouvoir son album This Machine Kill Artists_. Puisqu'il avait l'air hyper enjoué à l'idée de partir sur la route seul avec sa guitare, on lui a demandé s'il pouvait écrire un petit journal de bord, tout au long de la tournée. En voici la troisième partie (au cas où vous prendriez le train en marche, la première est ici _et la deuxième est là). GRAND RAPIDS, MICHIGAN On est arrivés à Grand Rapids la veille du concert, ce qui nous laissait toute une nuit à tuer. Je me suis couché tôt, j'ai regardé une grosse moitié de Lawrence d'Arabie et je me suis endormi devant. Tu n'as jamais trop de mal à t'endormir quand tu es en tournée, enfin t'as plutôt intérêt, sinon tu risques de perdre la boule. Brian et Dave ne tenaient plus en place et ils voulaient à tout prix « faire un truc ». Ils ont fini par aller dans ce bar, connu pour être le meilleur bar de Rhythm and Blues de la ville. Ils m'ont raconté qu'au moment où ils sont entrés dans le rade, tous les dealers leur ont sauté dessus pour leur vendre de l'herbe. Après le concert - un groupe que Brian a qualifié de meilleur groupe de blues qu'il ait jamais vu dans le Michigan- ils ont pris le chemin du retour et Dave a lancé à un vendeur de coke un peu trop insistant un « lâche moi et va faire ton rapport aux stups ». Apparemment le type n'a pas apprécié et a gueulé « Aux stups ? Je suis pas un putain de flic, mec. T'as de la chance, j'ai pas mon 9mm sur moi sinon t'aurais fini troué comme un filet de pêche ». Je me suis levé assez tôt, j'ai fait ma lessive et j'ai lu un peu d'un livre de John Fante. J'ai pensé au type mort qu'on a vu sur l'autoroute entre Seattle et Spokane. J'étais en train de conduire quand soudain le trafic a subitement ralenti. On roulait au pas depuis 500 mètres quand on a vu ce type allongé sur la route, le casque encore sur la tête et les jambes presque retournées. De toute évidence, il avait fait un vol plané depuis l'autre côté de l'autoroute avant d'atterrir là. Le type était mort, et la seule chose à laquelle j'ai pu penser, c'est que j'avais probablement été au courant de son décès des heures avant sa propre famille. J'ai eu ma dose de cadavres dans la vie, pourtant ça me retourne toujours autant. J'espère ne jamais m'y habituer. J'ai rencontré un type qui cotoyait la mort au quotidien, un photographe médico-légiste du Wayne. Il a vu des trucs insensés. Il habitait à Détroit, dans un magasin reconverti en un super appartement. À l'intérieur, on se serait cru dans l'appartement de Kevin Spacey dans Se7en. Ce mec était complètement parano, mais bon, quand tu vis à Détroit, ça se comprend, sans même compter tous les trucs abominables qu'il pouvait voir dans son boulot. Qui ne deviendrait pas parano après toutes ces années passées à devoir faire face aux apsects les plus sombres de l'être humain. Il m'impressionnait, c'était vraiment un type intéressant, le genre de personne que j'adore. Il avait installé des caméras de surveillance partout dehors et même des micros pour ÉCOUTER ce qui pouvait bien se passer devant chez lui. Je lui ai demandé ce qu'il trouvait le plus dur dans son travail, il m'a répondu que c'était quand le corps à photographier était celui d'une personne qu'il connaissait. Il devrait vraiment écrire un livre.

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Les loges du concert à Détroit À Grand Rapids, on a joué dans un club qui s'appelait The Pyramid Scheme. Jusque maintenant, sur cette tournée, j'ai joué dans un club baptisé The Shake Down, un autre qui s'appelait The Shank Hall et maintenant The Pyramid Scheme. Je devrais ouvrir un club à L.A., je l'appellerai le Stick Em Up, Bitch ou plus simplement le Rip Off Club . Je me demande bien combien de groupes j'arriverais à faire jouer. Je ne pense pas que ça prête tant à conséquence que ça, finalement. Toujours est-il que The Pyramid Scheme était vraiment un endroit sympa et que j'y ai donné l'un de mes meilleurs concerts de la tournée, en tout cas pour l'instant. C'est sans conteste le meilleur club de Grand Rapids, et certainement l'un des meilleurs de tout le pays. J'ai déjà hâte d'y retourner. C'était génial de découvrir un nouveau club et d'y donner un concert cool. Le jour suivant, on a tracé vers l'Ohio et on a atterri dans un hôtel dans ce qui semblait être le pire ghetto de Columbus. Bizarrement, c'était un hôtel plutôt haut de gamme. On a demandé au manager de l'hôtel si notre véhicule était en sécurité sur le parking, il nous a répondu « ne vous inquiétez pas, nos agents de sécurité sont armés. Même si les gens autour se comportent n'importe comment, ils savent qu'ils n'ont pas intérêt à venir rôder près du parking ». Rassurant. Il a fait très chaud durant le concert à Colombus. Dès le premier morceau, je suais déjà comme un porc. J'ai pas arrêté de penser à Frank Booth dans Blue Velvet pendant presque la totalité du concert, et je ne sais toujours pas pourquoi. Finalement, je suis peut-être devenu complètement fou. J'ai arrêté de boire et c'est une bonne chose. Quand je buvais, on me décrivait comme un Frank Booth méchant. Dale [Crover, le batteur des Melvins] dit que c'est mieux pour tout le monde que j'ai arrêté de boire, je suppose que c'est vrai mais je ne peux pas faire marche arrière. Les gens n'aiment pas que les choses changent. Tant pis pour eux. Maintenant, on ne peut plus retourner en arrière. Internet a changé les choses, pour toujours. Longue vie à Internet. DETROIT, MICHIGAN On est passé par Toledo sur le chemin de Détroit, ça m'a rappelé le film Apocalyspe Now. Le capitaine Willard dit qu'il vient de Toledo. Il y a un dialogue vraiment cool avec Kurtz là-dessus. Pendant nos dates en Europe avec Flipper, leur guitariste m'avait raconté qu'il avait été envoyé DEUX fois au Vietnam ! Il m'a dit que quand il s'était engagé dans l'armée, il ne savait même pas que les États-Unis était en guerre et encore moins où le Vietnam se situait. Il a été envoyé au Vietnam durant les deux années les plus meurtrières de la guerre, en 1967 et en1968, et il a ENSUITE fini dans Flipper. J'imagine qu'il a choisi la bonne voie, surtout quand on voit toute la haine que les gens ressentent quand ils parlent ou se souviennent de la guerre du Vietnam. Ça m'a fait voir Flipper sous un autre jour et je les aime encore plus depuis. L'escale à Détroit était très plaisante, même si ça peut paraître étrange de dire ça. Le public était bien élevé et les gens avaient l'air de s'intéresser à ce que je faisais. C'était cool ! On vit dans un monde sans foi ni loi, ni vérité, et ce n'est certainement pas sur scène que tu trouveras cette vérité : la seule chose que tu espères c'est un peu de respect mais la plupart du temps le public s'en balance. Alors, quand ça arrive, c'est vraiment très appréciable et je n'oublierai pas de si tôt l'accueil que j'ai reçu à Détroit. Pour moi, ça fait vraiment la différence. Je suis en tournée juste avec ma guitare acoustique, à essayer de faire quelque chose d'un peu particulier et ça a l'air de marcher. En tout cas, c'est tout ce que je peux espérer. Mon seul objectif, c'est de ne pas tout faire foirer. Ha !

Les loges à Cleveland CLEVELAND, OHIO Le lendemain, on a traversé l'Ohio pour notre concert à Cleveland et on a tous remarqué qu'il y avait des putains de flics de partout. On a en compté 25 entre Toledo et Cleveland, deux villes séparées par à peine 150 km. Mais pourquoi ? Génial, la caisse n'est pas immatriculée dans l'Ohio et des dizaines de flics demandent à toutes les voitures de se ranger. J'étais hyper nerveux pendant toute la durée du trajet. Avoir à négocier avec un putain de flic qui me demande de me ranger pour une raison quelconque était bien la dernière chose que j'avais envie de faire. Je déteste ça. Finalement on s'en est bien sorti, on ne nous a pas demandé de nous ranger. J'ai raconté cette histoire le soir, sur scène et tout le monde s'en foutait. Moi, ça me dérange. Bientôt, les flics viendront emmerder des citoyens tout à fait innocents et personne ne bronchera. Je déteste ça. Je ne veux pas qu'un flic vienne m'engueuler pour de la merde. Je n'ai aucun ordre à recevoir d'un flic – mais honnêtement de qui est-ce que je pourrais en recevoir ? Je ne sais pas. Les flics me donnent juste envie de poignarder un type à mort, surtout quand ils refont les lois et les sanctions à leur sauce. C'est cool qu'ils existent, mais pas qu'ils s'en prennent à moi. Ils se trompent d'ennemi. SYRACUSE, NEW YORK Pour la fête nationale, le 4 juillet, on a pris notre journée et on a roulé sur 500 km jusque Syracuse, New York. On est arrivés en fin d'après-midi. J'ai changé les cordes de ma guitare et maté Shining. Shining est devenu la bande-son de toute mon escapade dans le nord-est des États-Unis. Je me suis réveillé tôt mais je suis resté une demi-heure allongé à ne penser à rien. Je ne me sens pas à l'aise dans ces moments. C'est là que je me dis que je pourrai devenir dingue et complètement perdre le fil. Mais plutôt que de penser à tout ça, j'ai pris une douche.

Le concert à Syracuse était super. La salle est un vieux théâtre avec des sièges tout défoncés, j'adore cet endroit. Le son était bon, l'atmosphère aussi. J'ai joué avec les Melvins ici l'an dernier, et je me rappelle qu'un ado noir s'était fait arrêté pour avoir joué avec un flingue dans le parking. Il avait pointé un type de la sécurité qui avait immédiatement appelé la police, une centaine de flics avaient été dépêchés ainsi qu'un hélicoptère. Finalement, il s'est avéré que c'était juste un gamin de 14 ans qui jouait avec un flingue en plastique. Quel imbécile. C'est pour ce genre de connerie que des gamins se font abattre. Il a eu de la chance que les flics ne lui tirent pas une balle dans la tête. Laissez vos jouets chez vous, les enfants. BURLINGTON, VERMONT Burlington est un énième fief à hippies, mais le concert était super et je n'ai pas vu l'ombre d'un hippie, c'était donc plutôt cool. La dernière fois que je suis venu à Burlington, c'était pour notre tournée 51/51 – qui est passée par tous les États, plus DC – il y avait une jam hippie dans la salle voisine, une salle encore plus grosse que celle dans laquelle on jouait et qui était blindée de hippies. C'était infernal. Je ne comprends pas comment ces empaffés de hippies égarés dans le temps tolèrent cette musique de merde. J'ai jamais pu supporter ce bordel et écouter ça en étant défoncé, ça doit être encore pire. Je suppose que si j'écoutais toute la discographie des Grateful Dead, je trouverais bien une paire de morceaux OK, mais la simple idée d'avoir à écouter l'intégralité de ces albums horribles me file des boutons. Si j'étais obligé de faire ça, je pense que j'arrêterai pour toujours d'écouter de la musique et que je me tournerais vers les reportages de société et les débats politiques à la radio. Les jeunes hippies d'aujourd'hui et leurs nouveaux groupes devraient se forger une mouvement bien à eux. Plus de Buzz et de Melvins sur Noisey Rednecks, cadres moyens et fans de Kiss : sur la route avec King Buzzo
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