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Music

Elzo Durt réunit les pénitents de l'éternelle damnation pour Deus Ex Machina

On a été poser quelques questions à l'illustrateur responsable de quelques unes des pochettes de disques les plus spectaculaires du moment, à quelques heures du lancement de sa nouvelle exposition.

Comme tout ce qui vient de Belgique, Elzo Durt se pointe souvent sans prévenir, avec une idée impossible sous le bras, toujours souriant, toujours serein, même s’il semble en permanence couver un truc qui ressemble à une panique immense, aux prémices d’une indicible sauvagerie. Illustrateur connu pour ses sérigraphies et sa collaboration avec Born Bad (les affiches des soirées On Ice et une multitude de pochettes de disques pour La Femme, Jack Of Heart ou encore Francis Bebey), Elzo est aussi un personnage-clé de la nuit Bruxelloise (qui a assisté à l’une de ses soirées sans devoir subir plusieurs mois de rééducation peut s’estimer heureux) et la moitié de Teenage Menopause, un des meilleurs labels européens de ces 5 dernières années. J’ai été lui poser quelques questions à l’occasion du lancement de sa nouvelle exposition, Deus Ex Machina, qui marque un premier tournant dans son travail et dont le vernissage a lieu ce soir à 18h, à la galerie 12Mail, à Paris.

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Noisey : Les pièces de Deus Ex Machina tournent autour de la religion, et plus précisément du catholicisme. C'est un thème qu'on t’a proposé ou bien tu l’as choisi toi-même ?
Elzo Durt : Disons qu’il s’est petit à petit imposé de lui-même. Tout est venu des conditions et des contraintes. La galerie me proposait un budget qui me permettait de faire quelque chose de nouveau, de sortir de la sérigraphie qui était jusqu’à présent mon support principal. Mais en même temps, c’est une petite galerie, avec peu d’espace. Donc, très vite l’idée a été de me limiter à une thématique précise et de la décliner au maximum. L’idée du catholicisme est venue à la fois d’une illustration que j’avais faite pour un 45 tours qui n’est jamais sorti et que j’aimais beaucoup [qui est devenue la pièce centrale de l’expo et la pochette du disque que Born Bad a sorti pour l’occasion et qu'on vous a présenté il y a quelques jours], et de documents que j’ai récupéré à ce moment là. Je travaille essentiellement sur des documents existants que je détourne, décompose, assemble, et là il s’avère que j’étais en plein dans les images pieuses, donc ça s’est imposé quasiment tout seul. Je t’avoue qu’au départ, je me suis demandé si cette exposition n’arrivait pas un peu trop tard. Tu as déjà pas mal exposé sur Paris, pour Sergeant Paper, Arts Factory, HEY !, souvent avec les mêmes pièces. Ton travail a beaucoup circulé ces derniers temps, grâce notamment à la pochette de l’album de La Femme, à celle du LP de Pypy . Mais là en voyant les pièces que tu exposes ce soir, j’ai presque l’impression de redécouvrir ce que tu fais.
Oui, parce que jusqu’à présent, je tournais sur la même expo, qui s’agrandissait au fur et à mesure et qui finalement regroupait la quasi-totalité de mon boulot. Là ça fait quasiment un an que je ne fais plus de sérigraphie, je sentais que je m’enfermais dans un truc. Mais je ne trouvais pas d’autre support non plus, parce que dès que je tentais autre chose, je tombais dans des budgets plus du tout accessibles pour moi. Et je ne voulais pas faire du print papier après avoir fait de la sérigraphie… Le diasec [support utilisé pour Deus Ex Machina, qui consiste en une image montée sur résine acrylique], ça fait un moment que j’y pensais même si c’était trop cher pour moi. Pourtant, c’était le support idéal. Ça me permettait de travailler sur des pièces uniques, et plus multiples comme avec la sérigraphie où les pièces sont limitées à 10, 20, 100 exemplaires. Et c’est un support compliqué à transporter, que tu ne peux pas exposer n’importe où. La pièce centrale de l'exposition, à peine sortie du carton. Photo - Guillaume Sorge. Tu te sens donc prêt à partir dans quelque chose de nouveau.
Ouais, même si ça demande une autre préparation, un autre budget, des soutiens… Mais j’avais vraiment besoin de sortir de la sérigraphie, même si j’y reviendrai fatalement. Ne serait-ce que pour que certaines illustrations soient accessibles à un public plus modeste. Parce qu’en sérigraphie, je tourne autour de 200 euros, mais en diasec, on est plutôt sur du 3000, c’est plus du tout le même délire. Après, c’est pas toujours évident pour moi de me placer. J’au pu bosser pour Le Monde, avec des contraintes assez particulières, 20h pour livrer deux illustrations, sur des thématiques précises. Ça s’est hyper cool, mais ça n’arrive pas tous les jours. Faut sire que j’ai un peu de mal à me vendre aussi, c’est pas vraiment mon truc [Rires]

Ça je l’ai vite compris, la première fois où on est entrés en contact par MySpace en 2006, j’ai un peu eu l’impression de me retrouver avec un de ces mecs qui tiennent des boutiques où rien n’est rangé et rien n’a de prix. [Rires]
Ouias, c’est un peu ça [Rires]. Tout ce que j’ai fait, c’est le fruit de rencontres. Par exemple, j’ai bossé pour Carhartt pendant un temps, ce sont eux qui sont venus me trouver après une expo. Je ne serais jamais allé voir ces gens là dans leurs immeubles avec ma veste en cuir et mes sérigraphies sous le bras. Mais je suis dans une grosse agence maintenant qui me place sur des trucs, des couvertures de bouquins, des choses assez intéressantes à faire. La pochette de In Yer Mouth de Jack Of Heart, également présente sur l'exposition Et du coup, comment ça se passe au niveau de Teenage Menopause, le label que tu gères avec Froos ? J’ai l’impression que tu es un peu en retrait depuis quelques sorties.
Le label a pris une ampleur que je n'imaginais absolument pas et j'ai pas mal laissé les rênes à Froos, même si je donne évidemment toujours mon avis. Il m’est arrivé de poser mon veto sur des trucs, donc je reste la moitié de Teenage Menopause, mais je suis effectivement plus en retrait, moins présent sur le terrain. Cela dit je reste assez intransigeant sur l’aspect visuel. Souvent les groupes bossent à fond sur leur musique et se décident assez rapidement sur une cover médiocre ou pas du tout en phase avec ce qu’ils font. Et quand tu leurs fais la remarque, ils ne veulent rien savoir. Mon boulot, dans c’est cas là, c’est de leur faire comprendre pourquoi leur choix est un mauvais choix. À la base, le but de Teenage Menopause, c’était de faire à la fois découvrir des groupes via le disque et des artistes via la pochette. C’est un truc auquel on tient, même si on s’adapte aussi en fonction des sorties. Là, on envisage de sortir un truc plus techno début 2015, l’enjeu ne sera peut être pas le même, visuellement. Tu étais en revanche nettement plus présent sur les soirées du label.
Oui, mais je vais un peu lever le pied. J'ai fait énormément de choses sur Bruxelles, des tas de concerts, mais c'est usant à la longue et ça me prend énormément de temps. Je vais désormais me focaliser uniquement sur 2-3 gros évènements assez chouettes, dans le style de ce qu’on avait fait avec le Rockerill à Charleroi. Là, on de chouettes idées pour Paris par exemple, avec ce même côté crossover, entre concert punk et after techno. ELZO DURT
DEUS EX MACHINA
Du 26 septembre au 14 novembre 2014
Vernissage ce soir, à 18h - entrée libre
12Mail / Red Bull Space
12 rue du Mail
75002 Paris
www.12mail.fr