Drive Blind en 1996. Photo - J.M. JimenezÇa se passait très précisément le mardi 8 février 1994, au Terminal Export de Nancy, une salle aujourd'hui fermée et remplacée par un complexe immobilier. Les montpelliérains deDrive Blindouvraient pour les Tindersticks, dont c'était la première véritable tournée en France. Le groupe n'était pas exactement une découverte, leur nom, qui était plutôt facile à retenir (« Drive Blind » était le titre d'un des meilleurs morceaux de Ride), circulait depuis un moment dans les fanzines et la plupart d'entre nous connaissait déjà sur le bout des doigts leur premier EPStop Thinking Start Fighting, micro-tuerie à mi-chemin entre Dinosaur Jr, Sugar, les Lemonheads et à peu près tout ce qu'il se faisait de bien dans le genre à ce moment là dans le monde. Bref, le genre de groupe qu'on aimait, qu'on respectait, mais à qui il manquait encore quelque chose pourvraimentl'adorer.C'est arrivé ce soir là quand le bassiste, après le dernier morceau du set, et juste avant de quitter la scène, s'est adressé au public et a balancé dans le micro : « N'écoutez pas ce que disent lesInrocks, Gallon Drunk sont bien meilleurs que les Tindersticks. » En une petite phrase, Drive Blind venait de passer de « petit groupe coolos du sud de la France » à « monolithe de feu en qui tous nos espoirs étaient placés ». Un statut confirmé durant l'année par la sortie d'un nouveau EP,Tropical Motion Fever, sur lequel on trouvait le tubesque « Clinical Test Required », et du premier album du groupe,Super Easy, où le ton se durcissait assez nettement.Ce qu'on ignorait à ce moment, c'est qu'ils n'était en vérité qu'à un petit tiers de leurs capacités : deux ans plus tard, après un remaniement de line-up qui verrait l'arrivée de Karine Auzier du groupe Moonstruck à la basse et au chant, Drive Blind allait sortir le disque qui allait définitivement imposer son nom dans le paysagefrenchcore, dans la presse et même dans les tunnels de clips du soir sur M6 (avec l'imparable « Vegetable Vendetta »).Be A Vegetableétait une synthèse parfaite de tout ce qu'on aimait dans ce groupe, le muscle et l'expérimentation en plus, le tout à un degré de pureté jamais atteint par aucun de leurs disques précédents. La bande-son d'une baston sans pitié entre Jesus Lizard et les Pixies arbitrée par Kim Gordon et Page Hamilton. Et un classique absolu de la scène noise rock française des 90's, au même titre que lePlugde Sloy,Placebode Condense,Nude Portobello Bones ouRadiant Discharged Crossed-Offde Bästard.Il deviendra aussi, malheureusement, le dernier album du groupe, qui se séparera quelques mois plus tard, et, avec les années, un des disques les plus difficiles à trouver de leur discographie, en plus d'être un des rares, dans cette scène, à ne jamais être sorti en vinyle. Un manque désormais comblé grâce àHead Records, excellent label de Montpellier à qui l'on doit entre autres leDestination Qualitéde Pneu et l'hallucinant premier album de Verdun, qui a rééditéBe A Vegetableen double vinyle. Le disque a été pour l'occasion remasterisé par celui qui l'a enregistré et mixé à l'époque, David Weber, ingénieur du son au studio des Forces Motrices à Genève, connu pour son travail avec Treponem Pal, Knut ou Condense. La tracklist a été augmentée au passage d'un inédit (« Lose 2 »), retrouvé parmi les bandes d'origine, ainsi que des titres périphériques à l'album, comme le gigantesque « Wrecking », sans doute le plus gros tube jamais enregistré par Drive Blind, qu'ils avaient eu la coquetterie de ne pas mettre sur l'album mais en face B de « Vegetable Vendetta ». La marque des seigneurs.20 ans après,Be A Vegetablesonne toujours aussi frais, puissant et définitif, Gallon Drunk sont toujours meilleurs que les Tindersticks et on n'écoute toujours pas ce que disent lesInrocks. Continuons de continuer.La réédition double vinyle de Be A Vegetable est sortie sur Head Records. Vous pouvez la commander ici.
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