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Bobby Liebling, le leader de Pentagram, nous explique où il en est

« Plus de Baphomet, plus de croix inversée. C’est désormais écrit dans notre rider et nos contrats. »

Photo - Jeff Lee

Bobby Liebling n’est pas au mieux de sa forme. La nouvelle n'a rien de surprenant si vous connaissez son groupe, Pentagram, ou si vous avez vu Last Days Here, l’incroyable documentaire qui retrace son combat contre la drogue et dépeint sa vie, à 50 ans, installé dans le sous-sol de ses parents, jusqu'à ce que sa nouvelle compagne, de 30 ans sa cadette, et leur bébé le poussent enfin à déménager. Aujourd’hui, Bobby a 61 ans et on imagine qu’il a plus ou moins arrêté les conneries. En tout cas, il a trouvé la foi. Mais il s'est séparé de sa femme et ses parents vivent désormais tous les deux à l’hôpital, où il essaie tant bien que mal de leur rendre visite, lors de son unique sortie hebdomadaire.

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Côté positif, Pentagram a deux nouveaux projets en préparation : All Your Sins : Video Vault, un double DVD regroupant plein de lives, vieux et récents, et un nouvel album studio intitulé Curious Volume, que Liebling et ses potes – le guitariste Victor Griffin, le bassiste Greg Turley et le nouveau batteur Pete Campbell— sont actuellement en train de terminer.

Étant donné les circonstances évoquées plus haut, Liebling ne parle plus à la presse. Son manager, Sean « Pellet » Pelletier (celui qui en chie comme jamais dans Last Days Here) a fait une exception à la règle, pour Noisey, mais a failli annuler au dernier moment quand les parents de Bobby ont dû être hospitalisés d’urgence. Mais on a quand même fini par y arriver. Voilà où en est aujourd’hui le chanteur de Pentagram.

Noisey : Comment vont tes parents ?
Bobby Liebling : Pas très bien en ce moment. Une ambulance est venue les chercher il y a deux jours pour les conduire en centre de soins intensifs. Ils sont tous les deux dans le même hôpital. Je suis un peu nerveux en ce moment à cause de ça, mon père a fait un malaise et ma mère a oublié de prendre ses cachets. Donc, c’est le bordel. Je vis dans leur maison là, et les murs commencent à me toiser. La réalité me rattrape. Mon père a 95 ans, ma mère va sur ses 84 ans et ils sont tous les deux très malades, et tout ce que je peux faire c’est prier pour eux. S’ils n’y arrivent pas, ils rejoindront tous les deux un endroit plus paisible de toute façon.

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Je suis désolé d'apprendre ça, Bobby.
On va tous partir. Une fois que tu sors du trou, tu meurs. La plupart des gens ne voient pas les choses comme ça, mais c’est vraiment ce qui se passe. Quand t’es jeune, il y a tous ces trucs que tu veux voir et faire – tu as de l’appétit. Mais quand tu arrives à mon âge – j’ai 61 ans – tu as tout fait. Je suis allé ici et là, j’ai vu tous les putains de trucs que tu peux imaginer sur cette planète. Les années commencent à filer et c’est ce qui nous arrive à tous. Ça fait simplement partie du plan, celui que le mec d’en haut nous réserve. Voilà comment j’envisage tout ça.

Tu parles du « mec d’en haut ». Le guitariste de Pentagram, Victor Griffin, a eu une révélation il y a quelques années à ce sujet. Comment tu l’as vécu ?
Ça m’a prfondément affecté. Je suis dans le même cas maintenant, et on a évolué plus que n’importe qui parce qu’on s’est tournés vers Dieu et que ça nous a apporté la sérénité. Je ne crois pas à l’église, mais chaque jour je dialogue à voix haute avec Dieu pendant 2 ou 3 heures. Quand j’essaie d’analyser tout ça, je réalise que c’est vain. C’est ça le truc. Il faut juste y croire. Et j’y crois. C’est ce qui me fait tenir. Je suis une rock star, et jamais je n’aurais pensé atteindre cet état. Je ne suis pas parfait, mais je fais les choses bien, de plus en plus. Lorsque j’ai suivi la même voie que Victor, ma conscience spirituelle a fait surface. Elle a pris le pas sur notre existence païenne et ritualisée.

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Ça veut dire que Pentagram ne peut plus faire certaines choses.
Ouais. Plus de Baphomet, plus de croix inversée. C’est désormais écrit dans notre rider et nos contrats. Les gens ne vont peut-être pas comprendre quand ils vont entendre « Review Your Choices » ou « Be Forewarned ». Ces morceaux te disent qu’il y a deux chemins à suivre, mais je ne peux pas te dire lequel choisir. Tu dois le trouver par toi-même. Et c’est dur parfois. J’ai parlé à mon ex-femme hier soir, et il y a une chance qu’on recolle les morceaux. Je prie pour que ça arrive, parce que je l’aime vraiment. Elle a fait beaucoup de mauvaises choses, comme nous tous. Dieu te pardonnera si tu le loues et si tu arrêtes tes conneries. Quand ce sera mon tour, je saurais où aller. Et je n’ai pas peur. Je sais que je vais rejoindre un endroit agréable, où je serai en sécurité. Il existe quelque part un état de perfection, et c’est là que je finirai, parce que j’y crois.

Tu es passé par des tas de phases difficiles depuis la création du groupe en 1971 – des contrats avortés avec des maisons de disque, la dépendance à la drogue et trois douzaines de membres différents. Quand tu fais le bilan, est-ce que les bons moments supplantent les mauvais ?
Les bons moments terrassent littéralement les mauvais quand le groupe fonctionne. Mais ce n’est pas toujours le cas. Ces temps-ci, je suis totalement reclus. Je suis extrêmement asocial. Je ne sors pas de l’appartement. Je vois une ou deux personnes par semaine, sans ça, je reste à la maison et je regarde des films sur Netflix. Je ne sors jamais, nulle part. J’ai peur de sortir une fois la nuit tombée.

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Pourquoi ?
C’est dangereux ici, mec. Ce monde est pourri. Je n’ai pas grandi avec des flingues. Sérieux, nique les armes ! On s’est toujours battus à mains nues – peut-être que certains avaient des poings américains, ok, mais aujourd’hui, tu peux te choper une balle au cours d’un drive-by. C’est la réalité. Les gens se disent « Oh non, ça ne m’arrivera pas », mais c’est des conneries ! Tu dois faire attention, mec. Il faut faire gaffe, parce que c’est bien plus facile de déconner. Bien plus facile.

Qu’est ce que tu peux nous dire sur le prochain album de Pentagram ?
On prend des risques avec ce disque. Ca s’appelle Curious Volume, ce qui veut tout dire parce que ça n’aura rien à voir avec ton album typique de Pentagram. On a 13 chansons et je dirais que la moitié reste dans notre style traditionnel, celui que les fans pur et dur veulent entendre. Mais pour le reste, il y a des morceaux punk et des ballades. On a voulu tester des trucs pour voir si la sauce prenait. C’est vraiment quitte ou double, pourquoi ne pas découvrir une autre part de toi-même ?

Comment as-tu choisi le titre de l’album ?
Eh bien, au départ l’album devait contenir des trucs bien plus vieux. C’est le cas – il y a une chanson que j’ai écrite en 1965 dessus, et une autre de 1969, une ballade. Donc je voulais l’intituler Over Many A Quaint and Curious Volume of Forgotten Lore [une phrase tirée du Corbeau d’Edgar Allan Poe], parce que ça symbolise à la fois le passé et le présent. Mais on l’a raccourci en Curious Volume, parce que je me suis interrogé au sujet de notre obsession qui nous pousse à jouer des choses sombres et à contempler autant le vide. Ca t’aspire, comme une drogue. C’est devenu un moyen de décharger notre dépression.

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Jusqu’à cet album, mon disque préféré de Pentagram était Sub-Basement de 2001. C’est vraiment le plus démentiel, le plus malade, le plus dépravé et le truc le plus perturbant que j’ai jamais entendu de ma vie. C’est vraiment difficile d’écouter Sub-Basement et de ne pas ressentir ton cerveau se transformer en boue. C’est un disque qui t’agresse, qui t’inflige sa loi. Il va au-delà du désagréable. Mais je l’adore parce que des centaines – peut-être des milliers – de kids partout autour du monde m’on dit « J’allais me suicider puis j’ai entendu Sub-Basement et pour je ne sais quelle raison je me suis senti moins seul. » Et ça, ça me va droit au cœur. Ils ont réalisé qu’ils n’étaient pas les seuls à avoir des problèmes. On fait tous partie du club des mécontents au moins à un moment de notre vie, pas vrai ? Après Sub-Basement, je dirais que le nouvel album sera le plus sombre de Pentagram. Il est vraiment flippant.

Est-ce que tu as toi-même pensé au suicide dans tes phases les plus sombres ?
J’ai essayé plus d’une fois. Ce n’est pas la chose à faire. Il faut tenir le coup. Et c’est ce que je fais maintenant, mais pour être honnête, je suis sur le fil. Ca me bouffe parce que je suis plus vieux et plus sage et je ne peux plus m’en tirer aussi facilement. Jouer de la musique donne l’impression de m’accomplir. Je ne ressentais pas ça plus jeune. Tout consistait à altérer notre conscience. Mais aujourd’hui, je ne suis plus là-dedans, et je cherche le confort avant tout.

Il y a d’autres choses qui ont changées dans le groupe ?
Le groupe a l’air vraiment ok avec ce nouvel état d’esprit. On est devenus une vraie famille, plus que jamais, parce qu’on connaît nos limites. Je ne peux plus sauter sur scène ou jouer trois chansons d’un coup parce que sinon je ne peux plus respirer. Victor doit porter des lunettes parce qu’il ne voit plus les cordes. Tout ça c’est la vraie vie, mec. On n’est pas éternels, mais on peut donner le meilleur de nous-mêmes et faire en sorte que chaque jour compte. C’est dur mais on doit le faire. Parce que nous sommes avons encore la chance d’être là.

J’espère que ça va encore durer un moment.
Moi aussi. En 2013, un truc comme 126 mecs du heavy rock sont morts. Ça fait beaucoup, bordel. Et tous ces mecs, excepté deux, avaient entre 55 et 65 ans. Donc on vit moins longtemps quand on mène « cette vie ». On vit rapidement. Tu connais le vieux dicton, et il est toujours d’actualité. Moi, j’essaie juste de continuer à en profiter tant que je peux. Mais il ne faut pas trop insister. Brian Jones était mon idole, et il est mort avant tous les autres. Il prenait des quantités de drogues, avait tout le temps des meufs à poil chez lui, et c’est exactement ce que j’ai fait. Je prenais des tas de drogues et ma maison était toujours remplie de blondes nues. Mais aujourd’hui j’ai 61 ans. Donc quand tous ces types nous ont quitté en 2013, je me suis dit « Oh boy ». Parce que hey, soyons réalistes, je suis un cassos. Je suis un énorme cassos, un cassos professionnel. Mais le plus effrayant c’est qu’eux sont partis et que moi, je suis toujours là. Et je sais qu’il y a une raison à ça. J. Bennett joue de la guitare dans Ides Of Gemini. Il n’est pas sur Twitter.