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Music

Comment un DJ anglais a réuni des fonds pour le dernier membre vivant des Winstons, le groupe qui a créé l'Amen Break

Oui, le crowdfunding sert parfois à autre chose qu'à financer des traîne-savates.

Richard Spencer, chez lui - Photo gracieusement prêtées par Richard Spencer

Le DJ anglais Martyn Webster s'est fait la main sur les breaksbeats hip-hop et drum'n'bass des années 80 et 90. Au long de son parcours, il a, comme des centaines de DJs avant lui, appris l'histoire du Amen break, un des breakbeats les plus utilisés au monde, samplé sur le morceau « Amen Brother », enregistré en 1969 par les Winstons.

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Si vous accélérez le Amen break, vous obtiendrez la base de toute une décennie de UK hardcore et de drum'n'bass et penserez immédiatement à des trucs comme Sonz Of A Loop Da Loop Era, Shy FX & UK Apachi ou Squarepusher. Si vous le ralentissez, vous reconnaîtrez des tonnes de classiques hip-hop, du « King Of The Beats » de Mantronix (une des toutes premières utilisations du Amen break) au « Straight Outta Compton » de N.W.A. Nas l'a samplé à plusieurs reprisees. On l'entend même dans le générique de Futurama.

Il y a quelques années, Webster est tombé, en écoutant BBC Radio 1, sur une interview du dernier membre encore vivant des Winstons, le chanteur Richard Spencer. Spencer, qui a également accompagné Otis Redding et Curtis Mayfield au saxophone, a, au cours de cet entretien, évoqué le Amen break, indiquant que ni lui, ni aucun autre membre du groupe n'avaient touché le moindre centime de l'exploitation massive de leur disque.

« Ça m'a énormément touché d'entendre

Richard parler du fait qu'il n'avait jamais été payé pour ce break et qu'il n'avait ni le temps ni les moyens de courir après l'argent qu'on lui devait. J'ai eu envie de faire quelque chose pour lui, nous explique Webster. C'était dingue de se dire qu'il ne restait plus qu'une personne encore en vie parmi les responsables de ce break légendaire et qu'elle restait là, impuissante, tandis qu'on pillait son héritage. J'ai trouvé ça terriblement injuste, surtout quand Richard a précisé que Gregory Coleman, le batteur du groupe qu'on entend donc dans le break, a fini SDF. Du coup je me suis dit qu'en tant que DJs et producteurs, c'était notre devoir d'agir. De laisser tomber toutes ces histoires de copyright, de royalties et d'actions légales et d'aller droit au but—donner chacun un peu d'argent pour remercier ce type et rendre à César ce qui est à César, tout simplement. »

Webster a ainsi lancé une campagne de crowdfunding baptisée The Winstons Amen Breakbeat Gesture. Son but initial était de réunir 1000 £ (environ 1400 €). « Pour être tout à fait honnête, admet Webster, je n'avais aucune idée de l'objectif à fixer. Le projet pouvait s'avérer être un flop total, mais, techniquement, il avait un certain potentiel. Vu le nombre de gens qui connaissent et ont utilisé ce sample, ça pouvait aller très, très loin. Et je l'espérais secrètement, pour Richard. »

L'objectif de Webster a été atteint et largement dépassé, la campagne ayant réuni en seulement 24 heures, plus de 15 000 £ (environ 21 000 €).

« Je n'ai pas de mots pour dire à quel point j'ai été surpris et comblé par l'attitude et la générosité des gens, qui se sont immédiatement sentis touchés projet et y ont participé en masse, dans un incroyable élan de fraternité musicale, nous a déclaré Richard Spencer, contacté par e-mail la semaine dernière. J'ai traversé de sales périodes dans ma vie et je sais qu'il y a toujours des gens incroyables dans ce monde, prêts à vous aider et à vous conseiller. Toute cette histoire en est la preuve. Elle est aussi la preuve que la musique est à la fois une porte de sortie et un refuge. Je tiens à remercier tous mes frères, pour avoir cru en ce projet. Désormais, je peux mourir en paix, en sachant que ce qu'on a fait a touché des tas de gens—mais pas tout de suite ! »

Tamara Palmer est sur Twitter.