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Sels de bain, orgies, meurtre et logiciel antivirus

S'il y a un truc que la société peut apprendre du feuilleton qui entoure le mutli-millionnaire John McAfee, c'est que la meilleure façon de prendre de la MDPV, autrement dit des « sels de bain », c'est de s’en administrer par voie rectale.

John McAfee

S'il y a un truc que la société peut apprendre du feuilleton qui entoure le mutli-millionnaire John McAfee, c'est que la meilleure façon de prendre de la MDPV, autrement dit des « sels de bain », c'est de s’en administrer par voie rectale. « Mesurez votre dose », a écrit McAfee il y a deux ans sur un forum psychonaute, sous le pseudo « Suffmonger ». « Humectez votre majeur d'un peu de salive, pressez-le sur la poudre, insérez-le-vous dans les fesses. C’est pas si terrible, vous verrez. Nous sommes dans une arène opposant les drogues à la libido et je navigue entre les deux, comme tout le monde. Si vous suivez mon conseil, et même si ça vous paraît dégoûtant, vous en serez récompensé. »

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Voilà le genre de fanfaronnades auxquelles il était enclin. Ce qui est sûr, c’est que John McAfee passe plus de temps que 99.9 % des êtres humains– chaque heure de sa putain de vie – à carpédiémiser.

Cet homme faisait du sex yoga. Et il pratiquait un sport ridiculement dangereux qui s'appelle l'aérotrek. Il rassemblait près de lui les flagorneurs du monde entier, investissait dans des yachts immenses, des labos de drogues récréatives, des gardes du corps et des armes à feu, et, plus que tout, il faisait de sa vie le saint pèlerinage de sa queue ; oui, l’œuvre de toute sa vie, c’est d'enfoncer son pénis dans le plus grand nombre de jeunes femmes possible. Son Saint Graal, selon les informations d'amis proches publiées par Gizmodo, était les « drogues qui donnent des pulsions sexuelles aux femmes ». Il vivait pour le plaisir. Si vous plissiez un petit peu les yeux, vous pourriez certainement voir en lui une sorte de héros populaire un peu dérangé.

Mais il y a eu un mort, et maintenant c'est trois fois plus dur de se taper des barres en blaguant.

Gregory Faull

Le 11 novembre, la police a retrouvé le corps de Gregory Faull, le voisin de McAfee, à son domicile de Belize avec une blessure de balle à l'arrière du crâne. Depuis, l’inventeur du software anti-virus le plus connu du monde des utilisateurs de PC est en fuite, donnant des nouvelles toutes les demi-heures à Wired Magazine. Oui,Wired Magazine. Les habitudes de la Silicon Valley ont la peau dure.

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Il leur a avoué s'être teint les cheveux pour essayer de se déguiser. Il a dit qu'il s'était caché des flics qui fouillaient sa maison en s'enterrant dans le sable avec une boîte en carton pour se couvrir la tête. Il a juré – même si, rappelons-le, sa meilleure amie est une drogue paranoïaque – qu'il s'agissait d'une conspiration visant à le détruire personnellement. Et, comme si on avait besoin d'une preuve supplémentaire venant d'un mec à la limite de la folie, il s'est comparé à Julian Assange.

À l'époque où le gars qui possède Tumblr était en couches-culottes, McAfee était le roi de la protection antivirus. Ingénieur à Lockheed à la fin des années 1980, il a perdu pas mal de temps à essayer de virer les virus qui squattaient les ordinateurs avant d’avoir l'idée d'un programme qui les zapperait automatiquement. En 1992, il rendait publique la compagnie McAfee et se mettait de côté 100 millions de dollars. En 1994, il s’est vu contraint de quitter son travail après avoir dit à tout le monde que le virus Michel-Ange allait détruire les ordinateurs du monde entier le 6 mars 1992. Ce qui n'a pas été le cas. Il a eu l'air con. Mais il avait l'air riche. Incroyablement riche. Maintenant, vu que le business qu'il a mis au point a glissé hors de son contrôle, il est effectivement à la retraite, à l'âge de 47 ans. Comment un leader et visionnaire tel que lui allait employer le reste de sa vie ?

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Apparemment, la réponse est « devenir de plus en plus taré », et c'est d'ailleurs la même réponse pour bien des individus incroyablement riches et hyper-imaginatifs avant lui.

McAfee a un jour été un adolescent hippie. En effet, il a suivi les chercheurs qui ont fait la route de Delhi au Népal, comme Steve Jobs, quelques mois avant qu'il ne décide d'inventer Apple. Dans son monde, il n'y a jamais eu aucune morale bourgeoise pieuse. Il n'y aurait que des drogues, des rapports sexuels, un pouvoir personnel absolu et une grande collection de chiens et d'armes à feu.

Bien sûr, on dit tous que s'il nous arrivait de rejoindre le groupe des ultra-riches, nous utiliserions cet argent pour enrichir l'humanité. Construire un orphelinat. Passer par la case « tour du monde ». Mais, au cœur de nos cœurs, on sait tous comment on le dépenserait vraiment : asservir des putes ; créer un complexe fortifié dans un État à moitié véreux ; construire un ashram yoga obsédé par le sexe qu’on peuplerait de jeunes femmes frêles et d'hommes androgynes qui seraient financièrement dépendants de nous. On dépenserait avec joie 150 dollars pour un taxi qui viendrait de San Pedro afin de nous approvisionner en jeunes femmes fraîches. Elles nous rejoindraient dans nos soirées orgiaques pleines de sels de bain. On pourrait même, comme il semblerait que McAfee l'ait fait, offrir un yacht d'un million de dollars au garde-côte de Belize, en espérant qu'il ferme les yeux sur les curieux produits chimiques qu'on a brassés dans notre labo.

La tragédie de McAfee est semblable à celle du roi Midas. S'il avait travaillé pour Taco Bell plutôt que pour Lockhead, McAfee aurait un boulot à la con comme tout le monde. Au lieu de ça, la société a brusquement donné à ce type un peu dérangé des centaines de millions de dollars. Et a commencé, vingt ans plus tard, à légèrement flipper, voire à être légèrement écœurée en réalisant le peu de discernement dont elle avait fait preuve en prenant cette décision.

C'est une histoire triste. Mais il n'est pas tout seul, dans notre économie actuelle. Ça fait 20 ans qu'on nourrit un courant constant de magiciens fondateurs pirates qui ont griffonné un chiffre ridicule au dos d'une enveloppe. Quand ces gens se barrent des compagnies qu'ils ont créées et se retrouvent à la dérive avec un nombre illimité de carnets de chèque, des choses étranges se produisent, c'est forcé. Imaginez Zuckerconnard être obligé de s’enterrer dans le sable à l'âge de 35 ans : et alors ? Il aura toujours potentiellement cinquante années à vivre. Imaginez quel Caligula d'entreprise il sera avant d'avoir seulement atteint l'âge de McAfee.

La Silicon Valley a été construite dans une sorte d'esprit naïf et optimiste : on pensait que « des mecs gentils » viendraient y diriger les technologies des générations futures. Dans la déclaration d'intentions de Google une phrase, célèbre, contient les mots : « Don’t be evil. » On est en août 1969 et l'ère peace and love du software a ouvert certains esprits alors qu'elle en faisait imploser d'autres. Je vous parie 10 euros que dans dix ans, les mecs de Myspace retourneront l'arme contre eux tandis que deux putes mineures les supplieront d’épargner leur vie dans une chambre d'hôtel miteuse de Bangkok.