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LE NUMÉRO FILM

On a retrouvé un frère Poiraud

Les frères Poiraud sont des réalisateurs singuliers qui ont signé une tonne de pubs plus ou moins intéressantes (les mouches qui baisent ou la statue de la liberté qui traverse New York, c’est eux).

Kitty Glutt est un monstre en latex sculpté par Didier Poiraud, sans scénario pour le moment

Les frères Poiraud sont des réalisateurs singuliers qui ont signé une tonne de pubs plus ou moins intéressantes (les mouches qui baisent ou la statue de la liberté qui traverse New York, c’est eux), mais surtout, ce sont nos réalisateurs de « films de genre » français préférés depuis qu’il ont sorti Atomik Circus, le retour de James Bataille en vendant à TF1 un film avec Vanessa Paradis et Benoît Poelvoorde et en réalisant la production française la plus chaotique apparue sur les écrans depuis… toujours. Un film garage parfait, aussi énergisant et bordélique qu’un Russ Meyer qui prendrait pour thème une invasion extraterrestre. Depuis, rien. TF1 les a blacklistés et les projets auxquels ils s’attaquent semblent ne jamais aboutir. On est allés trouver Didier Poiraud sur ses terres nantaises pour qu’il nous raconte ce qu’il fait en ce moment. Et apparemment, ce qui l’excite le plus, c’est le barbecue pour faire de la fumée dans les films. Vice : T’es à Nantes en ce moment ?
Didier Poiraud : Oui, mais je monte à Paris régulièrement, parce qu’on essaie de vendre nos projets avec Thierry. Apparemment vous vous embarquez dans des aventures solo depuis James Bataille…
Oui. En pub et en ciné. Moi, je travaille pas mal au Maroc, en Tunisie ou au Liban. Là où je peux bosser, quoi. C’est pas trop cher et y’a de la commande. On pourrait tourner des tas de films là-bas. Des films dans des décors désertiques, ça coûte rien, tu as un super décor. Comme Besson dans Le Dernier Combat. Un mec face à un lapin, et voilà. Tu peux même mettre cinq mecs, pour créer du drame. Finalement Mondes mutants de Corben, c’est pareil. En parlant de Corben, vous aviez pas un projet d’adaptation de Rip in Time ?
Si, on a fini l’écriture y’a pas longtemps avec ma copine, Astrid. On avait une prod, mais elle s’est dégonflée au dernier moment parce qu’elle se sentait pas de présenter un film post-apocalyptique à Cannes. Ils préféraient vendre des comédies romantiques. Alors t’en es où ?
J’essaie de vendre un autre truc qui s’appelle Skull 28. C’est pas ce slasher qui se passait dans un parking, dont Alexandre Aja a produit une copie aux États-Unis ?
Si, mais je l’ai récrit. Maintenant c’est un truc ambiance Ça tourne à Manhattan. C’est mon histoire. L’histoire d’un réal’ qui essaie de vendre un film d’horreur à Paris, mais ça se passe mal. Genre La Nuit américaine mais avec des monstres ?
Oui, exactement. Dès que tu cites Truffaut, c’est plus facile de se faire comprendre par le CNC. Les Little Rabbits tu les vois toujours ?
Ouais, mais maintenant ils s’appellent les French Cowboy. On organise des concerts dans la cour de la baraque où on habite. Ça s’appelle At Blackhouse. On fait venir des groupes, on monte une petite installation et je filme. On a de la bière et du barbecue, ça fait de la fumée dans le film. Les groupes qui viennent repartent avec un clip, ils sont contents. Ça a coûté 40 euros en bière et en barbecue, le barbecue pour la fumée, la bière pour l’ambiance. Y’a des groupes comme Borst Minorts, Tom Wellbank, Golden Boots ou Papier Tigre qui sont déjà venus. Entre autres… Ça ressemble au truc que vous aviez fait à une Nuit Blanche sur les rails de la Petite Ceinture ?
Non, moi aux Nuits Blanches, j’avais fait des projections sur les murs. C’est un mec de Nantes qui nous avait trouvé le plan, mais on était un peu hors-sujet. Ça ressemble plus au bar d’Atomik Circus. Mais les filles aiment pas trop. Elles viennent avec des fringues chic qui se lavent pas alors le barbecue ça leur plaît pas. Une fois, à cause d’elles, on a dû faire un truc avec que des bulles. 40 euros, c’est cool, mais si on te donnait les moyens et la liberté ­infinis pour faire un film, ça ressemblerait à quoi ?
Y’aurait de la SF dedans, c’est sûr… La base, c’est Les Envahisseurs, la série avec David Vincent. Le look, l’ambiance, tout est là… Ben… En fait je referais bien le retour du retour de James Bataille… Je veux dire… C’était déjà un retour, alors on peut en faire autant qu’on veut… Pour faire un film, t’as juste besoin d’un monstre et d’une machine à fumée. Donc vous faites partie de cette minorité de réalisateurs qui ont pu faire un film idéal ?
Ouais… J’imagine… Atomik Circus, ça a été le dernier projet de Jean Yanne. Comment c’était de bosser avec lui ?
La première fois qu’on l’a vu, c’était un peu sordide. Il faisait un téléfilm avec deux petits chiens. Il était déprimé. Il avait des problèmes avec les impôts et il avait investi dans une boîte en Thaïlande où y’a eu un attentat. Tous les mecs qu’il connaissait avaient explosé. Le projet l’a excité tout de suite. Quand on a voulu faire les premières lectures, Vanessa Paradis était à Los Angeles et ça la faisait chier de venir, alors le producteur a calculé que ça coûterait moins cher de nous envoyer à Los Angeles chez elle avec Poelvoorde et Jean Yanne. Évidemment, ça faisait bizarre de se retrouver sur Sunset Boulevard avec ce petit ­groupe, à lire ce projet. Quand on a commencé à tourner, l’ambiance était cool, il avait des problèmes de cœur mais il s’en foutait. Une semaine après, il est mort. On était mal, et en plus il faisait un bon duo avec Poelvoorde. Fallait qu’on retrouve une grande gueule comme lui. Marielle s’est proposé tout de suite mais on pensait aussi à Charlebois. Fallait trouver des mecs à l’image de ce qu’on voulait, un truc franchouille 70. C’est aussi pour ça qu’on avait pris Venentino Venentini. On le reconnaît pas forcément, mais il est là, et on le sait. On m’a dit que t’étais intarissable sur les vans et les camping-cars…
Non, ça c’est des conneries. C’est parce que j’ai rapporté un camion de surfeur des States, avec marchepieds et tout. Un Chevy Van G20. Mais ce truc est impossible à faire homologuer en France. En plus des marchepieds, il avait une porte coulissante qui s’ouvrait avec un décapsuleur, mais elle s’ouvrait dans le mauvais sens alors à chaque fois, c’était un enfer. Fallait ressouder la porte, une vraie galère. À chaque fois qu’on débarquait dans un camping, les mecs stressaient, c’était drôle, mais j’ai dû le revendre. La pire affaire que j’aie jamais faite. Et l’avenir ça ressemble à quoi ?
On va mettre en ligne les films At Blackhouse. Mais précise bien que c’est « At Blackhouse », parce que Blackhouse c’est un label qui existe déjà, et je suis en train de finir Invasion Zombie, un 26 minutes tiré d’une BD que j’ai faite y’a deux ans. C’est facile à Nantes de faire des trucs comme ça, mais à Paris oublie, faut payer tout le monde.