20 ans après « Football Factory » : derrière le mythe du hooligan anglais

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20 ans après « Football Factory » : derrière le mythe du hooligan anglais

Geoff Pearson, spécialisé en droit criminel à l'université de Manchester, revient sur la construction du mythe du hool anglais.

Mai 1997 : le premier roman de John King, Football Factory, débarque dans les librairies anglaises, et le succès est presque immédiat. Récit en pointillé de la vie d'un hooligan de Chelsea, faite de bastons, d'innombrables pintes, de poulets tikka masalas et de coups d'un soir, Football Factory arrive à un moment idéal dans la littérature britannique. Celle-ci sort alors à peine de deux phénomènes de librairie inattendus : Carton Jaune (1992), où Nick Hornby raconte son amour obsessionnel pour Arsenal, et Trainspotting (1993) d'Irvine Welsh, chronique toxique d'héroïnomanes des bas-fonds d'Edimbourg.

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Le roman de John King sert de trait d'union parfait entre les deux : à Trainspotting, il emprunte sa structure narrative non-linéaire et son atmosphère nihiliste de récit du déclassement, tandis que Carton Jaune lui a ouvert la voie en réconciliant football et littérature : Football Factory en est le pendant testosteroné et sordide. De quoi en faire instantanément un roman culte.

À l'époque, le livre dérange par la violence des propos de son héros, Tommy Johnson. Raconté à la première personne, le récit colle en effet au point de vue du jeune hooligan de Chelsea, et John King ne se prive pas sur les saillies misogynes, racistes et virilistes. Spécialiste des sous-cultures britanniques, il s'inspire de ce qu'il a pu observer dans les travées de Stamford Bridge dans les années 1970 et 1980. Entre les chroniques de bastons et de nuits en taule, certains chapitres adoptent d'autres points de vue, avec des personnages plus ou moins extérieurs à l'intrigue principale, que ce soit un vétéran de la Seconde guerre mondiale qui vient de perdre sa femme, ou un ancien hooligan qui s'est rangé de la baston pour voyager autour du monde. Le but : dépeindre la condition des laissés-pour-compte de l'Angleterre post-Thatcher. Irvine Welsh ira même jusqu'à le qualifier de « livre le plus authentique jamais écrit sur le foot et la classe ouvrière anglaise ».

Football Factory (et ses suites La Meute et Aux couleurs de l'Angleterre) n'est pas étranger au regain d'intérêt culturel pour le hooliganisme qui débute dans la deuxième partie des années 1990. Ainsi, les mémoires d'anciens hooligans commencent à affluer dans les vitrines de librairies anglaises au tournant du siècle, chaque club ayant droit à son témoignage de voyou repenti, racontant de l'intérieur les pires bastons de leurs samedis après-midi. Une littérature trop romancée selon le spécialiste de la culture des supporters Steve Redhead, qui y voit des recueils de souvenirs partiels et opportunistes, trop axés sur les rares instants de violence pour que la description du hooliganisme soit fidèle.

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