Le voyage jusqu'au pub prend fin sur un parking de graviers, derrière une petite dune herbeuse. Si vous vous aventurez quelques mètres plus loin, vous avez de fortes chances de tomber sur une jolie plage de galets.C'est là que j'ai rencontré Stephen Harris pour la première fois. On était en août et la journée s'annonçait étouffante. La silhouette de Stephen se détachait sur fond d'épais nuages fades survolant la mer du Nord. La plage est jonchée d'algues et, à intervalle régulier, on tombe sur des épis s'avançant vers le large.Harris est à la tête du Sportsman depuis 18 ans. Mais si on le cherche, c'est ici ou dans les champs alentour qu'on a le plus de chance de le trouver : la zone autour du pub est un peu son garde-manger.LIRE AUSSI : À l'intérieur du pub secret qui ne sert que des barmen
Les quelques touches haut de gamme visibles aujourd'hui, tels que les savons de luxe et les serviettes à main en coton dans la salle de bains, n'ont rien à voir avec le Sportsman qu'Harris a connu. Dans le livre de recettes qu'il a récemment publié, The Sportsman, il parle de son enfance à Whitstable et du Sportsman tel qu'il le connaissait.« C'était ce drôle de bâtiment en bordure de la ville. Le Sportsman était un peu bizarre. Je me souviens d'un endroit assez triste. Un endroit qui avait connu des jours meilleurs », raconte Harris en remontant de la plage vers le pub. « Mais j'y suis très attaché. »C'était un drôle de bâtiment en bordure de la ville. Je me souviens d'un endroit assez triste et qui avait connu des jours meilleurs.
Harris avait commencé à travailler en tant que cuisinier professionnel seulement 4 ans auparavant. Il venait du monde de la finance. Dans son livre, il écrit avoir été influencé par les meilleurs restaurants de Londres. Alors comment a-t-il fait pour passer d'amateur « de bonne bouffe locale », selon ses propres mots, à collectionneur de trophées ?« Après 4 ans ici, j'ai dû prendre une semaine de congé parce que je ne me sentais pas très bien. J'avais passé la semaine précédente à tourner en rond. J'ai commencé à m'intéresser à l'histoire du coin et j'ai contacté un de mes potes archéologue. J'ai appris que cette région avait une identité culinaire assez spéciale », poursuit Harris. « En approfondissant mes recherches, j'ai découvert que le terrain au milieu duquel se trouve le pub, appartenait aux cuisines de l'Archevêque de Canterbury, selon Le Livre du Jugement dernier de 1086. »En approfondissant mes recherches, j'ai découvert que le terrain au milieu duquel se trouve le pub, appartenait aux cuisines de l'Archevêque de Canterbury
Harris raconte : « Je suis dans cette idée de 'cuisine de terroir' [en français dans le texte], d'une nourriture qui peut être le reflet du paysage local. Si des agneaux broutent dans les marais salants, vous aurez toujours de l'agneau au menu. »Mais pense-t-il que des ingrédients comme le sel sont meilleurs quand ils viennent du coin ?« Non, pas spécialement. Et je ne l'ai jamais revendiqué. Du sel, c'est du sel. Je n'ai jamais dit qu'il serait meilleur ici ou qu'il aurait un autre goût. Mais ça en dit long sur le restaurant et les environs. Je pense aussi que ça aide à donner une direction et un objectif à la cuisine. »Je suis dans cette idée de 'cuisine de terroir'. Une nourriture qui est le reflet du paysage local. Si des agneaux broutent dans les marais salants, vous aurez de l'agneau au menu.
Vous ne pouvez pas imaginer à quel point j'étais ambitieux. Je voulais en faire le meilleur restaurant du pays. Et j'allais y consacrer toute ma matière grise
« Et l'endroit ressemblait déjà à ça. Sans chichis. On a ouvert les portes et on s'est lancé direct dans le grand bain. Je fonctionnais de la même manière quand j'étais gosse. Trouver une guitare, apprendre à jouer, écrire quelques chansons et monter sur scène. »Quand on vous disait que les chefs étaient les nouvelles rock stars.LIRE AUSSI : Au pays des rosbifs, le maître trancheur est roi