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Music

Stonebwoy fait briller les couleurs du Ghana

Le rappeur africain n'a pas attendu Meek Mill et Chris Brown pour prendre son futur en main.

L’influence du Ghana sur la musique moderne n’est, a priori, pas évidente pour tout le monde. L’histoire de ce pays d’Afrique de l’ouest a pourtant été marquée par quelques succès commerciaux, à commencer par celui de Jai Paul qui avait samplé Lara Croft sur l’intro de « Track 15 », extrait de son album distribué sous le manteau. Ok, ça n'aide pas vraiment, mais quand même. On se rappelle aussi de Meek Mill qui criait « West Side, Africa ! » sur « Fans Mi », collaboration avec le rappeur américano-nigérien Davido. Et puis il y a Stonebwoy, qui est bien décidé à offrir au Ghana une place de choix sur la carte du rap avec son mélange de dancehall, d’afrobeat, et de mélodies pop. Musicien depuis ses 15 ans, Stonebwoy a aujourd’hui 27 ans et a récemment était adoubé Meilleur Artiste International de 2015 aux BET Awards. Il cherche maintenant à percer dans le reste du monde, espérant s’imposer hors de sa ville natale. « J’ai commencé dans mon quartier, explique Stonebwoy. Maintenant ces gens savent qui je suis et ce que je fais. J'ai fait mes preuves ici. »

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L’industrie musicale du Ghana est particulièrement ouverte. Les artistes et les producteurs penvent travailler ensemble sans qu'il y ait le moindre obstacle entre eux. Il y a assez de producteurs et de studios pour tout le monde, tous les musiciens intéressés peuvent tenter leur chance, et il n’y jamais de barrière à l’entrée. « Les gens vendent leurs CD dans la rue pour pouvoir payer leurs séances de studio et enregistrer de nouveaux morceaux », raconte Stonebwoy. En général, les concerts se déroulent à l’Accra Sports Stadium, une salle qui peut accueillir jusque 50 000 personnes et qui reçoit autant des artistes locaux que des stars internationales comme Chris Brown, invité au Ghana il y a peu. Hormis ces gros concerts, qui ont lieu deux à trois fois par mois, le prix d’un billet reste abordable, avoisinant les 100 cédis, soit environ 23 euros. Et ceux qui ne veulent pas quitter le quartier, peuvent aussi écouter de la musique depuis leur jardin. « On a des camions qui diffusent de la musique dans la rue, comme en Jamaïque. Ils mettent le son à fond et tout ceux qui sont autour peuvent écouter et se la donner. »

Malgré la possibilité de profiter de leur musique au Ghana, de nombreux artistes cherchent aussi à percer aux Etats-Unis. Selon Stonebwoy, cette stratégie est dépassée aujourd’hui. « La plupart des gens au Ghana, et en Afrique en général, pensent que la réalité est aussi clinquante que celle qu’on leur montre à la télé ou sur Internet. Je peux t’assurer que si tu proposes à 10 personnes de s’installer immédiatement en Occident, ils acceptent même sans savoir ce qu’ils y feront et sans aucune sécurité. C’est totalement illusoire. Ils pensent que ce qu’ils voient à la télé est bien réel. Demande à un jeune s’il veut partir à l’étranger, il te répondra toujours oui. Puis ils partent, et ils se rendent compte que ce n’est pas du tout ce qu’ils avaient imaginé. »

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Des artistes comme Akon peuvent être associés à la musique africaine, mais il faut bien se rappeler qu’il est originaire de St Louis, dans le Missouri. Stonebwoy est ghanéen et il a bien l’intention de devenir une superstar mondiale. À l'occasion de sa venue au Canada dans le cadre de l'African Music Week, on est allés le rencontrer pour en savoir un peu plus sur lui est ses ambitions.

Noisey : Vous écoutez quoi au Ghana ? Il y a un genre de musique particulier qui domine ?
Stonebwoy : C’est vaste, il y a une multitude de genres de musiques différentes. En ce moment, le dancehall marche très fort, même si les gens en ont toujours pas mal écouté. Ça change de génération en génération.

Si je sors en club un vendredi soir, qu’est-ce que je suis susceptible d’entendre ?
Du dancehall, à 70-80 %. Pour le reste, du rap.

Du rap américain, genre Drake ?
Ouais. Un gros artiste local vient de faire une collaboration avec un rappeur de son calibre. Il se passe la même chose au Ghana qu’aux Etats-Unis.

Un rappeur qui vient de se lancer a des chances de gagner de l'argent avec sa musique au Ghana ?
Ouais bien sûr, s’il connaît les bonnes personnes. Les concerts sont primordiaux. On a pas mal de grosses salles, mais les plus gros artistes hip-hop jouent dans des stades. Il y a aussi des concerts dans des universités.

Au départ, personne ne se pointait à tes concerts, et aujourd’hui tu remplis des stades. Qu’est-ce qu'il s’est passé ?
C’est grâce à un morceau et au soutien que m’a apporté un artiste, Samini, qui est dans le coin depuis un bout de temps. On a bossé ensemble sur « Hills and Valley ». Quand le morceau est sorti, les gens au Ghana pensaient que ça venait de Jamaïque, puis ils se sont rendus compte que c’était un mec du coin. Et là-dessus, j’ai enchaîné les hits.

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Donc finalement, avoir gagné un BET award n'a pas changé grand chose à ton parcours.
Je fais ça par amour. D’autres récompenses suivront, et comme pour le BET, ce sera une consécration. Mais faire de la musique dans le seul but de recevoir les honneurs, ça ne sert à rien.

T’as prévu de bosser avec des gens au Canada ?
Je suis surtout là pour l'African Music Week. Tout ne se fera pas du jour au lendemain. Hier, on a été invité par une radio, on a reçu de bons feedbacks. À part ça, j’ai pu bosser avec quelques artistes jamaïcains. JD Era et Rich Kidd sont tous les deux Ghanéens, on les voit pas mal aujourd’hui. On a une compilation de musique africaine qui va sortir sur laquelle on a enregistré un morceau avec JD Era et Sarkodi, qui est l’équivalent de Jay-Z au Ghana. J’espère pouvoir ramener JD Era au pays cet hiver, il a prévu de prendre Rich Kidd avec lui, comme ça on pourra les présenter ensemble au pays. On leur dira que c’est avec JD Era qu’on traîne quand on est au Canada et vice-versa, en espérant qu’on puisse faire un échange de visibilité.

Tu te vois où dans 5 ans ?
On va essayer de bosser avec d’autres artistes, tenter de faire profiter de nos opportunités à d’autres gens. Il y a pas mal d’artistes de mon coin à qui on propose des concerts aujourd'hui. Ils venaient à mes concerts et maintenant je les soutiens. Je ne vais pas attendre 5 ans pour me mettre à quelque chose, parce que on' n'a jamais attendu qu'on nous aide pour se bouger. C'est notre culture.

Qu’est-ce qu’il faudrait pour que le Ghana devienne un pays plus touristique ?
Il faut faire briller le Ghana, et c’est ce qu’on essaye de faire. On fait de notre mieux pour le mettre en avant. On espère qu’un jour les grandes maisons de disques viendront nous voir et feront du Ghana un grand laboratoire d'où émergeront de grands artistes. On veut que Chris Brown soit heureux à l’idée de venir chaque mois jouer en Afrique. Slava est sur Twitter.